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Rafael del Moral
LANGAGE
ET COMMUNICATION
2
Sommaire
Introduction
1. Langage et communication
1.1. Les principes
1.2. Indice et langage
1.3. Signe et langage
2. Systèmes de communication linguistique et non linguistique
2.1. La sémiotique.
2.2. Caractères spécifiques du langage humain
2.2.1. Fonctions du langage
2.2.2. Spécificité du langage
2.2.3. La double articulation
2.3. Communication humaine
2.4. Communication non humaine
2.4.1. Les signaux visuels
2.4.2. Les signaux acoustiques
2.4.3. Les signaux chimiques
2.4.4. Les signaux tactiles
Introduction
Il s’agit dans ce thème de situer l’étude du langage dans une perspec-
tive ample. Nous commençons par montrer comment le langage est
relié avec d’autres moyens de communication sous le titre plus général
de sémiotique. Nous revoyons les principales structures du langage hu-
main et les comparons avec les propriétés que manifeste la communica-
tion animale. Il semble qu’il existe peu d’aspects communs: il n’est pas
possible de trouver la créativité et la complexité structurelle du langage
3
dans la conduite communicative naturelle d’autres espèces. Il existe
aussi un contraste clair avec les divers domaines d’expression non ver-
bale. Nous abordons des domaines comme l’expression faciale, les
gestes corporels et la communication tactile, ainsi que quelques codes
et substituts basés sur le langage utilisés dans le monde. Nous pouvons
identifier plus facilement les frontières de la matière en voyant les res-
semblances et les différences entre le langage et ces autres domaines.
La perspective du développement de la linguistique est historique. Elle
aborde l’apport d’idées systématiques sur la nature du langage propo-
sées par les spécialistes de l’antiquité en Grèce, à Rome et en Inde, et
insiste sur l’intérêt du langage au Moyen Age et à la Renaissance jus-
qu’aux temps modernes. La période la plus rapide du développement a
été le XXè siècle, où nous trouvons un progrès sans précédent du savoir
linguistique.
.
Langage et communication
1.1.
Les principes
C’est dans le premier quart du XXe siècle qu’on commence à élaborer la
théorie du langage et de la communication. Avant que l’accent soit dé-
finitivement mis sur le langage comme système de communication la
théorie expliquait en d’autres termes le pouvoir qu’ont les hommes
d’inventer des systèmes de communication, d’utiliser certains phéno-
mènes perceptibles (les signifiants ) pour évoquer, dénoter, signifier
d’autres phénomènes non observables ici et maintenant (les signifiés).
Cette théorie, même si elle n’en découle pas intégralement, devait
beaucoup à Saussure qui le premier avait insisté sur la nécessité de re-
placer la linguistique proprement dite –qui n’en est qu’une province –
dans le vaste domaine de l’ensemble de tous les systèmes de signes
(l’écriture, l’alphabet des sourds-muets, les rites symboliques, la poli-
tesse, les signaux militaires, la mode, les signaux maritimes, etc.). C’est
ce domaine qu’il nommait la sémiologie.
Mais en définissant le langage comme tout système de signes (ou de
4
communication), la tradition saussurienne rétablissait l’indistinction
entre langage proprement dit (systèmes de communication linguis-
tiques) et sémiologie (systèmes de communication non linguistiques).
1.2.
Indice et langage
Un indice est un fait observable, qui renseigne l’observateur sur un
autre fait non actuellement observable: la forme, la couleur, l’altitude
et la direction des nuages peuvent être un indice du temps qu’il va faire.
Les signes sont une classe d’indices produits artificiellement par un
émetteur pour communiquer à un récepteur des états non observables,
les significations des énoncés qu’il émet. Pour un sémiologue, les traces
du pied d’un gibier sur le sol détrempé ne sont pas des signes mais des
indices, exactement comme la fièvre, qui n’a pas été produite par
l’organisme pour communiquer avec le médecin, ni même avec le ma-
lade. Et, jusqu’à nouvel ordre, les rêves d’un patient sont des indices
que le psychiatre doit interpréter par le moyen d’une analyse scienti-
fique très différente de l’analyse linguistique: le patient ne les a pas
produits pour communiquer avec le psychiatre, ni sans doute avec lui-
même (jusqu’à preuve scientifique du contraire). Par ces exemples
mêmes, on s’aperçoit combien la limite entre indice et signe, au sens
opératoire des termes, s’est trouvée oblitérée par une très vieille syno-
nymie. C’est ainsi qu’un bon linguiste, Giulio Bertoni, a pu dire (Enciclo-
pedia Treccani, 1938) que le rire est un langage, que les larmes sont un
langage, sans être cependant tenté de leur appliquer des méthodes
d’analyse linguistique dans un traité de linguistique.
John Dewey, antérieurement, allait même plus loin: pour lui, toute
trace laissée par les hommes était un signe et tout fait anthropolo-
gique devenait langage, non seulement les gestes, les rites, les cérémo-
nies (qui sont peut-être des systèmes de communication autres que les
langues), mais aussi les monuments, les produits des arts industriels,
dont il est certain qu’une civilisation ne les a pas produits, d’abord et
fondamentalement, pour communiquer avec les ethnologues ou les
archéologues qui viendront peut-être un jour les exhumer et les inter-
préter du dehors. Toute une branche de la sémiologie naissante court le
risque de confondre, sous le nom de sémiologie de la signification,
l’interprétation des indices avec la lecture des signes, qui serait la sé-
miologie de la communication proprement dite, pour laquelle le pre-
5
mier problème est toujours d’établir scientifiquement qu’il y a intention
de communication au sens propre. Le risque épistémologique est ici de
postuler à priori que les modèles qui ont été mis au point et vérifiés
dans la communication – la plupart du temps linguistique – sont appli-
cables ipso facto à des domaines pour lesquels il n’y a pas communica-
tion, ou pour lesquels on n’a pas établi s’il y a communication ou non, ni
le cas échéant si la nature de la communication est de même type qu’en
linguistique.
1.3.
Signe et langage
Pour des linguistes de la première moitié du XXè siècle tous les signes
produits par les humains sont des langages ( « tous les organes peu-
vent servir à créer un langage » Vendryes, « les gestes sont un lan-
gage » Bertoni,).
Pourquoi la linguistique, qui est l’étude scientifique du langage,
n’étudie-t-elle pas tous ces langages?
Jespersen admet qu’il existe des « moyens de communication ani-
maux », mais, tout en posant qu’ils diffèrent des langages humains, il ne
fournit aucun critère scientifique pour l’analyse spécifique de ces divers
« systèmes de signes ». Il se borne à déclarer que, « dans sa forme dé-
veloppée, le langage est à coup sûr une caractéristique humaine, et
peut être considéré comme la principale marque de l’humanité ».
Lorsque Morris, en 1946, aborde le même problème, il ne le résout pas
mieux. « Il est évident, écrit-il, que les processus signifiants chez les
hommes présupposent des processus signifiants comme il en advient
chez les animaux, et qu’ils se développent à partir de tels processus;
mais il est évident aussi que la conduite humaine montre dans le lan-
gage une complication étonnante, un raffinement sans commune me-
sure avec ce qu’on observe chez les animaux. »
Colin Cherry, (1957), conclut sans autres critères que « l’homme a seul
le don du langage » et que les animaux n’ont pas de langage parce qu’ils
n’ont pas de « système de pensée organisée ». Le langage des abeilles
n’est ni développable, ni flexible, ni universel.
Si tout le monde postule, ou pressent, que le langage humain produit
des systèmes de signes si spécifiquement différents de tous les autres
qu’ils suffisent à distinguer l’espèce humaine de toutes les autres es-
pèces animales, il faut ici, de toute nécessité, fournir les critères scienti-
6
fiques de cette spécificité.
2.
Systèmes de communication linguistique et non linguistique.
2.1.
La sémiotique.
La sémiotique reprend le projet de sémiologie de Saussure et s’assigne
pour objet l’étude de la vie des signes au sein de la vie sociale. A la
différence cependant de la sémiologie issue de l’enseignement de Saus-
sure, elle refuse de privilégier le langage et la société. La sémiotique
veut être une théorie générale des modes de signifier.
SÉMIOTIQUE
   

Auditif - vocal Visuel Facile Olfactif
Gustatif
         
Langage Reflets Effets Qualité Langage Écriture Cinétique Langage Code Proxénétique
vocales musicaux de la voix des symboles des sourds secret
physiologiques  et aveugles
Codes
--------------------------------------------------------
« langage corporel »
(communication non verbale)
2.2.
Caractères spécifiques du langage humain
C’est dans ce très vaste domaine que devrait être situé le langage tel
qu’il est représenté en tant que système de communication au moyen
des langues naturelles humaines. La tradition aristotélicienne, aussi
7
bien que la plupart des définitions du deuxième quart du XXe siècle,
suggérait de définir le langage autant par son but (soit l’expression de la
pensée, soit la communication) que par son moyen (un système de
signes).
2.2.1.
Fonctions du langage
Cette suggestion a été exploitée par Roman Jakobson et ses fonctions
du langage. Jakobson a postulé qu’il existait six fonctions du langage,
dont chacune correspondrait à un des facteurs de l’acte de communica-
tion linguistique:
émetteur
ou personne qui parle,
récepteur
ou personne qui écoute,
canal
ou voie de transmission
code
ou règles connus par émetteur et récepteur
message
ou contenu de l’information
référent
ou réalité non linguistique à laquelle renvoie le message.
* La fonction expressive ou émotive y ajouterait tout ce que l’émetteur
met de lui-même dans son message, à travers son message, et en plus
de la signification référentielle de ce message.
* La fonction appellative ou conative viserait surtout à multiplier les
moyens d’action de l’émetteur et du message sur le récepteur.
* La fonction phatique aurait pour objet de s’assurer que le canal est
libre (« Allô ! Vous m’entendez ? »).
* La fonction métalinguistique consisterait à utiliser le langage pour
parler du code (« Napoléon est un nom propre »).
* Enfin, la fonction poétique serait essentiellement centrée sur
l’élaboration formelle du message en tant que tel.
* La fonction référentielle serait donc centrée sur la mise en relief du
référent.
Il n’est pas difficile d’apercevoir que cette admirable symétrie des fac-
8
teurs et des fonctions risque d’être un artifice de présentation com-
mode pour certains faits, car il est impossible de trouver des critères
proprement linguistiques pour différencier ces diverses fonctions. Par
exemple, « l’élément argon est un gaz rare » et « le mot suzée est un
substantif archaïque » sont deux énoncés de structure linguistique ri-
goureusement semblables, bien que le premier puisse être assigné à la
fonction référentielle et le second à la fonction métalinguistique. De
plus, ces fonctions pourraient être retrouvées dans beaucoup de sys-
tèmes de communication non linguistiques et ne sont donc pas spéci-
fiques des langues naturelles. On préférera, avec Denise et Frédéric
François, parler d’une fonction centrale et primaire de communication
toujours présente, dans tous les énoncés, opposée à des fonctions se-
condaires ou, mieux encore, à des usages et à des effets très divers de
ces mêmes énoncés (tout ce que Ludwig Wittgenstein appelait des
« jeux de langage »: appeler, commander, prier, crier, mentir, jouer une
pièce, lire un texte à voix haute, convaincre, séduire, émouvoir, ef-
frayer, décrire, raconter, supposer, interroger, nier, poser des devi-
nettes, faire un calembour: il avait raison, il y a là autant de « fonc-
tions » du langage).
2.2.2.
Spécificité du langage
C’est à Saussure qu’il faut remonter pour appréhender la bonne mé-
thode d’analyse de la spécificité du langage, bien qu’il ne l’ait pas pous-
sée à son terme. En opposant la linguistique à la sémiologie, c’est-à-dire
le langage à tous les autres systèmes de signes, il attirait l’attention sur
ce fait que l’établissement de la communication n’est pas le trait spéci-
fiquement distinctif du langage humain, puisqu’il partage ce trait avec
tous les autres moyens ou systèmes de communication. Par contre, il
insistait sur un autre caractère des unités linguistiques, qu’il appelait
l’arbitraire du signe (le fait qu’il n’y ait aucune obligation naturelle
d’appeler une pomme « pomme »; il est, en effet, possible de l’appeler
manzana, apple, Apfel, mela, jabloko, etc.). Mais il n’en faisait pas le
caractère propre du langage humain. De fait, beaucoup d’autres sys-
tèmes de communication: code de la route, cartes routières, codes fer-
roviaires ou maritimes, etc., utilisent des signes arbitraires. Le fait que
les messages linguistiques soient linéaires, c’est-à-dire se déroulent sur
la trame du temps, leur donne des propriétés importantes, qui les dis-
9
tinguent des systèmes où les unités s’organisent dans l’espace (repré-
sentations graphiques, dessin, cartographie, peinture, etc.). Mais ce fait
ne leur est pas propre: d’autres systèmes déroulent leurs messages de
la même façon dans le temps (musique, cinéma au moins partielle-
ment). Saussure avait aussi mis en évidence le caractère discret des
signes linguistiques, le fait qu’ils signifient par oui ou non, tout ou rien;
le signe mouton signifie « mouton » d’abord, par différence avec tous
les autres signes qui pourraient figurer à sa place; il ne peut jamais
(comme dans un système constitué par la représentation de grandeurs
continues) signifier « plus ou moins mouton », selon l’intonation par
exemple. Mais beaucoup d’autres systèmes fonctionnent au moyen
d’unités discrètes, ainsi le code de la route, les feux de position, etc. Le
fait que les unités linguistiques soient combinables selon des règles et
forment système n’est pas spécifique non plus: tous les systèmes de
communication présentent ce caractère.
2.2.3.
La double articulation
Grâce à une analyse de L. T. Hjelmslev, déjà suggérée par Ferdinand de
Saussure et définitivement mise au point par André Martinet, le trait
qui distingue spécifiquement le langage conçu comme l’ensemble des
langues naturelles des hommes s’est révélé dans ce qu’on nomme sa
double articulation .
On entend par là que les langues naturelles humaines paraissent être
les seuls codes construits sur une codification systématique à deux
étages.
Les messages y sont construits par des suites d’unités minimales dites
significatives (ou monèmes; ou morphèmes dans la terminologie anglo-
saxonne), unités à deux faces, une face signifiante et une face signifiée.
Le train file vite contient quatre de ces unités, quand on néglige
quelques subtilités dans l’analyse de file. Grâce à cette première articu-
lation, le nombre des messages possibles est infiniment plus grand que
si chaque message devait posséder un signifiant totalement distinct.
Ces unités, à leur tour, sont construites au moyen d’unités plus petites,
non signifiantes mais distinctives, les phonèmes. Le mot file en contient
trois: [f, i, l]. Ces unités de deuxième articulation, toujours en petit
nombre dans une langue – entre vingt et cinquante –, permettent de
construire des milliers de monèmes différents d’une façon plus écono-
10
mique que si chaque monème (comme dans une écriture idéogra-
phique) devait disposer d’un signifiant totalement distinct de tous les
autres.
La double articulation rend certainement compte en grande partie,
sinon en totalité, de cette propriété si mystérieuse des langues hu-
maines, toujours aperçue, jamais techniquement expliquée:
l’extraordinaire quantité de messages possibles, au moyen d’une
double économie dans la structuration par rapport à ce que peuvent
tous les autres systèmes de communication.
Qu’on prenne le code des abeilles, ou celui de la route, ou celui des
symboles des mathématiques, on trouve toujours des messages dé-
composables en unités significatives, qui ne sont pas décomposables à
leur tour en unités minimales distinctives successives, comparables,
dans leur fonctionnement, aux phonèmes.
Il serait antiscientifique de s’endormir sur cette sécurité que la double
articulation rend définitivement compte de la spécificité du langage
opposé à tous les autres systèmes de communication. Toutefois, il
n’est pas outrecuidant d’écarter la solution – qu’on n’oppose générale-
ment pas à la double articulation, mais qui s’y oppose en fait – qui con-
siste à parler plutôt de niveaux d’analyse du langage: niveaux des traits
pertinents (labialité, surdité, nasalité d’un phonème, etc.), niveau des
phonèmes, niveau des monèmes, niveau des syntagmes (ou combinai-
sons plus ou moins dissociables de monèmes), niveau des propositions,
niveau de la phrase. Cette description des structures du message abou-
tit à effacer la signification théorique fondamentale de la double éco-
nomie réalisée par les deux articulations en unités non signifiantes et en
unités signifiantes.
2.3.
Communication humaine
Une façon d’envisager le langage, utilisée par la plupart des linguistes
modernes, consiste à identifier les différentes propriétés considérées
comme étant les caractéristiques essentielles. Il s’agit de déterminer ce
qui « compte » comme langage humain, en opposition avec un autre
système de communication. On a eu recours à deux sortes
d’investigation. L’une est centrée sur l’identification des propriétés
structurelles universelles du langage. L’autre consiste à opposer le lan-
gage à des formes non humaines de communication et à d’autres
11
formes de communication humaine.
Le point de vue comparatif qui a obtenu le plus de succès est celui qui
a été proposé par le linguiste américain Charles Ohckett, qui employa
un modèle d’investigation zoologique pour identifier les principaux
points de liaison entre le langage et d’autres systèmes de communica-
tion, spécialement chez les animaux.
Son ensemble de treize structures de la communication qu’emploie le
langage parlé est le suivant:
- Canal auditif-vocal. On emploie le son pour combler la distance entre
la bouche et l’oreille, en opposition à un moyen visuel, du toucher ou
d’un autre genre.
- Transmission émise et réception directionnelle. N’importe quel sys-
tème auditif peut entendre un signal à sa portée et il est possible de
localiser la source au moyen de la capacité auditive pour localiser des
sons.
- Evanouissement rapide. Les signaux auditifs sont transitoires et
n’attendent pas que le récepteur soit disposé à les entendre (à la diffé-
rence des traces d’un animal ou de l’écriture).
- Interchangeables. Les utilisateurs d’une langue peuvent reproduire
n’importe quel message linguistique qu’il peuvent comprendre (à la
différence des divers comportements de la cour de mâles et de femelles
dans plusieurs espèces).
- Rétroalimentation totale. Les utilisateurs d’une langue entendent tout
ce qu’ils disent et peuvent y réfléchir (à la différence des exhibitions
visuelles que les animaux réalisent souvent pendant leur cour et qui ne
sont pas visibles pour eux).
- Spécialisation. Les ondes sonores du langage parlé n’ont d’autre fonc-
tion que de signaler le sens (à la différence du halètement audible des
chiens qui n’a qu’un propos biologique).
- Sémanticité. Les éléments du signal transmettent le sens par leur as-
sociation stable avec des situations du monde réel (à la différence du
halètement des chiens, qui ne « signifie » pas qu’un chien ait chaud
mais qu’il en « fait partie »).
- Procédé arbitraire. Les éléments du signal ne dépendent pas de la na-
ture de la réalité à laquelle ils se réfèrent (à la différence de la vitesse de
la « danse » de l’abeille, qui reflète directement la distance du nectar
depuis la ruche).
- Eléments discrets. Le langage parlé utilise un petit ensemble
d’éléments de son qui contrastent clairement entre eux (à la différence
12
des grognements et autres bruits émotionnels dont la force varie selon
des échelles continues).
- Déplacements. Il est possible de parler d’événements lointains dans
l’espace et dans le temps par rapport à la situation de celui qui parle (à
la différence des cris de la plupart des animaux, qui reflètent les stimu-
lations de l’entourage immédiat).
- Productivité. Il existe une capacité infinie pour exprimer et com-
prendre le sens en employant des éléments connus de phrases pour en
produire de nouvelles (à la différence de l’ensemble limité et fixe
d’appels employés par les animaux).
- Transmission par tradition. Le langage se transmet d’une génération à
la suivante fondamentalement au moyen d’un processus
d’enseignement et d’apprentissage (à la différence de la capacité des
abeilles pour communiquer le lieu où se trouve le nectar, qui se trans-
met de manière génétique).
- Double organisation. Les sons du langage n’ont pas de sens intrin-
sèque, ils se combinent de manière différente pour former des élé-
ments (comme des mots) qui transmettent un sens (à la différence des
appels animaux, qui ne peuvent s’analyser à deux nivaux de structures
similaires).
2.4.
Communication non humaine
Entre 1930 et 1960, les éthologistes objectivistes, sous l’influence pré-
dominante de K. Lorenz et de N. Tinbergen identifiaient, pour chaque
espèce, un répertoire de stimulations qui, agissant comme des si-
gnaux, déclenchaient des modifications spécifiques du comportement
des individus receveurs. Le « releaser » (en allemand: « Auslöser »)
était défini par K. Lorenz comme la stimulation qui déclenche chez les
individus de la même espèce un comportement de forme invariable ou
peu variable (« fixed action pattern »), au moins lorsque ces individus
sont dans un état physiologique approprié. Le comportement déclenché
peut lui-même constituer un « releaser » pour l’émetteur, et ainsi de
suite, à l’exemple de la parade sexuelle (ou pariade) qui, chez les oi-
seaux, apparaît comme une alternance d’orientations corporelles, de
postures, de déplacements, de vocalisations, parfois de touchers, entre
le mâle et la femelle.
Chaque stimulation de forme invariable ou peu variable fut considérée
13
comme un signal agissant électivement sur un mécanisme génétique-
ment programmé dans le système nerveux du receveur (l’I.R.M.: « In-
nate Releasing Mechanism »).
L’échange d’informations entre deux individus de la même espèce, au-
trement dit la communication, a reposé pendant longtemps sur de tels
concepts. Dans ce cadre déterministe, les chercheurs ont notamment
pour objectif d’isoler des éléments de comportement qui, ayant valeur
de signaux spécifiques, permettent une reconnaissance spécifique entre
mâle et femelle, et constituent ainsi des barrières de reproduction. Con-
sidérés comme génétiquement programmés, de tels signaux sont tenus
comme des caractères taxinomiques, au même titre que les caractères
de morphologie, d’anatomie et de physiologie. Cela permet de préciser
la position systématique de chaque espèce et le degré d’apparentement
des espèces. Les signaux spécifiques peuvent être analysés sous cet
angle, mais leur structure et leur organisation séquentielle doivent être
précisées, en même temps que leurs fonctions doivent être nuancées et
élargies à d’autres domaines que celui de la reproduction, à la lumière
des études éthologiques plus récentes, comme le montrent bien les
études sur les Primates.
2.4.1.
Les signaux visuels
Outre les études sur le rôle des couleurs (plumage, taches colorées,
livrée nuptiale, etc.), des caractères morphologiques (bois du cerf, crête
de la poule, etc.), des postures (tête et corps tendus, posture accroupie,
etc.) et des mouvements (gonflement des plumes, mimiques faciales,
etc.) dans la communication animale, les recherches sur les échanges
lumineux des lucioles permettront de cerner les caractéristiques et les
fonctions des signaux visuels dans les comportements de reproduction.
Chez les lucioles, la durée de chaque émission et/ou l’intervalle de
temps entre l’émission mâle et l’émission femelle sont caractéristiques
de chaque espèce. Ainsi, le mâle de Photinus pyralis émet-il toutes les
5,8 secondes un éclair auquel une femelle proche répond environ 2 se-
condes plus tard (de 1,6 à 2,4 secondes plus tard, selon la température
ambiante). C’est cet intervalle de temps entre l’émission femelle et
l’émission mâle qui est significatif: le mâle répond par une émission lu-
mineuse à tout éclair expérimental qui survient deux secondes environ
14
après sa dernière émission. La comparaison des émissions lumineuses
produites par des espèces de lucioles sympatriques (habitant les mêmes
lieux géographiques) a permis de montrer que la confusion entre es-
pèces différentes, au moment de la reproduction, est évitée par le fait
que chaque espèce possède son code temporel d’échanges lumineux.
Un mode de communication aussi strict constitue une barrière de re-
production entre les différentes espèces qui ont colonisé le même mi-
lieu.
Chez d’autres espèces, les mâles isolés augmentent la luminosités de
leurs éclairs à mesure qu’ils se rapprochent d’un rassemblement de
mâles et synchronisent leurs éclairs avec ceux des autres mâles. C’est la
synchronisation des éclairs qui attire électivement les femelles de la
même espèce. Cet exemple montre que l’étude des systèmes de com-
munication doit aussi souvent prendre en compte les émissions de
toute une population, et pas seulement d’un émetteur et d’un receveur
particuliers.
Les signaux visuels peuvent jouer un rôle dans d’autres comporte-
ments: défense du territoire, comportements agonistiques (ensemble
des comportements qui interviennent dans un conflit), comportements
parentaux, reconnaissance individuelle…
2.4.2.
Les signaux acoustiques
Tout comme pour les signaux visuels, on sait depuis longtemps que les
signaux acoustiques (cris, chants, grognements, aboiements, tambou-
rinements, frottements de zones corporelles sur le substrat, etc.)
jouent un rôle essentiel dans l’attraction spécifique du partenaire
sexuel, puis dans les comportements de cour et d’accouplement.
Cependant, si les signaux acoustiques ont des caractéristiques propres à
chaque espèce, ils peuvent aussi être influencés par les facteurs
d’environnement.
C’est le cas du chant d’appel sexuel de certaines espèces de grillons
dans sa fréquence des « pulses », qui sont des unités sonores qui com-
posent le chant, non reconnaissables par l’oreille humaine. Ceux-ci sont
synchronisés de telle façon que les femelles appartenant à l’une des
espèces sympatriques de grillons lorsqu’elles se trouvent à la même
température ambiante ne peuvent être trompées par des chants
d’appel sexuel de mâles d’une autre espèce.
15
Cependant, le paramètre qui rend le signal spécifique n’est pas toujours
la fréquence des pulses. En effet, l’étude comparative et systématique
des espèces de grillons, sauterelles et autres insectes qui stridulent ou
chantent, montre que l’élément significatif du chant du mâle pour la
femelle peut être, selon les espèces, le caractère discontinu du chant
(bouffées sonores séparées par des pauses de durée plus ou moins
longue), la durée des périodes chantées par rapport à la durée des pé-
riodes de silence, l’intervalle entre la fin de l’émission mâle et le début
de l’émission femelle, la fréquence des sons élémentaires (les
«pulses») qui composent les phrases sonores successives, etc. Chaque
espèce apparaît ainsi comme unique.
En dehors des insectes chanteurs et des mammifères de quelques es-
pèces de poissons et de batraciens, les études les plus précises et sys-
tématiques sur les communications acoustiques ont trait aux oiseaux.
Les éthologistes ont ouvert la voie à des analyses très élaborées de la
structure et des fonctions des signaux acoustiques. En plus du sono-
graphe qui permet de visualiser le spectre de fréquences et l’intensité
d’un cri ou d’un chant, et de quantifier la durée des éléments sonores,
des motifs, des intervalles de temps entre les motifs, etc., les cher-
cheurs disposent d’appareils qui leur permettent de découper, recom-
biner et/ou synthétiser les éléments sonores successifs. Ils peuvent ainsi
identifier de plus en plus finement les paramètres qui permettent à un
oiseau de reconnaître ceux de la même espèce (chant spécifique), et du
même groupe géographique (dialecte), l’identité et les motivations des
autres individus du même groupe spécifique.
L’un des chants les plus étudiés est le chant de proclamation territo-
riale . Les paramètres qui en assurent la reconnaissance spécifique va-
rient d’une espèce à l’autre.
Par exemple, J. C. Brémond montre que, chez le Pouillot siffleur (Phyl-
loscopus sibilatrix ), la forme des éléments du chant de proclamation
territoriale paraît être le paramètre essentiel dans la reconnaissance
spécifique de ce chant. C’est la gamme de fréquences qui assure la re-
connaissance spécifique du chant de proclamation territoriale. Il peut y
avoir aussi une modulation descendante, puis ascendante. L’expérience
a été prouvée en observant la réaction vive lorsqu’on leur fait entendre
le chant non modifié des oiseaux de la même espèce en l’absence de
16
tout signal visuel. Par contre, la durée du chant et la gamme de fré-
quences ne jouent pas un rôle important.
Mais aucune règle générale ne se dégage quant aux capacités
d’apprentissage des individus pour le chant d’une autre espèce ou le
chant d’autres individus de la même espèce.
Chez certaines espèces, comme le passereau « Swamp sparrow », le
chant est peu variable d’un individu à l’autre; les prédispositions à
l’apprentissage sont limitées à une gamme étroite de motifs: élevés
dans l’isolement acoustique, ces oiseaux n’apprennent ensuite que les
motifs de leur espèce, à l’exclusion de tout autre motif, même lorsque
celui-ci provient de l’une des espèces les plus proches, telles que le
« Song sparrow »
Il s’agit donc là apparemment d’un bon modèle génétique où le chant
peut constituer un caractère taxinomique utile. Une telle espèce peut
aussi être précieuse pour le neurophysiologiste qui recherche les struc-
tures nerveuses et les mécanismes physiologiques impliqués dans
l’émission d’un chant spécifique de structure invariable ou peu variable.
Cependant d’autres modèles existent.
Par exemple, W. H. Thorpe a montré que, chez le pinson Fringilla
coelebs, le chant d’appel du mâle, à partir du printemps qui suit
l’année de naissance, présente deux types de particularités:
d’une part, des notes spécifiques, émises même lorsque l’oiseau a
été élevé dans l’isolement acoustique par rapport à ses congé-
nères; d’autre part, des phrases et arrangements de phrases qui
reflètent à la fois un apprentissage du chant des congénères et
un auto-apprentissage (pour que le pinson émette complètement
le même type de chant que ses congénères élevés naturellement,
au cours du printemps qui suit l’année de naissance, il est impor-
tant qu’il se soit entendu chanter au cours de son premier au-
tomne, alors que son chant d’automne, « rambling song », ne pa-
raît pas avoir de structure). Cependant, comme chez de nom-
breuses espèces, le pinson n’apprend pas n’importe quels chants
mais seulement ceux de son espèce et ceux de quelques rares es-
pèces, phylogénétiquement proches de la sienne.
L’un des objectifs des éthologistes est la recherche de phénomènes de
reconnaissance acoustique, au sein d’une espèce donnée, des individus
17
appartenant à la même zone géographique (recherche des dialectes) et
des individus en tant que tels.
Prenons un exemple à partir des études de M. Kreutzer sur le
Bruant zizi Emberiza circlus . Analysant 3.200 chants émis par 89
oiseaux dans quatre localités différentes. M. Kreutzer distingue
au total 5 familles de motifs (chaque motif comporte le plus sou-
vent un élément acoustique, ou note, parfois deux éléments).
Lorsque, pour chaque localité, il étudie les différentes combinai-
sons possibles de familles de motifs, prises deux à deux dans les
chants enregistrés, M. Kreutzer conclut que les familles de motifs
se répartissent au hasard, quelle que soit l’origine géographique
des individus. Il n’observe pas davantage de différences, d’une
localité à l’autre, dans la gamme de fréquences et la durée des
motifs.
Au terme de son étude, M. Kreutzer conclut donc que la structure et la
durée des motifs, ainsi que la gamme de fréquences sont des para-
mètres hautement spécifiques, qui ne changent pas avec la région habi-
tée par les oiseaux. Une telle conclusion paraît exclure l’existence de
dialectes chez le Bruant zizi.
Mais une analyse quantitative plus précise permet de montrer que le
nombre total de motifs et les types de motifs les plus utilisés dans un
chant varient d’une localité à l’autre. Chaque localité se caractérise
ainsi par des chants qui lui sont propres, en raison des combinaisons
particulières qui résultent des motifs les plus utilisés et du nombre total
de motifs, et par des chants qu’elle a en commun avec les autres locali-
tés, en raison des paramètres spécifiques du chant. En même temps, si
les mêmes types de chant peuvent être entendus dans des localités dif-
férentes, c’est avec des fréquences différentes.
C’est par conséquent parce que certains chants sont émis fréquemment
par le plus grand nombre d’individus dans une localité donnée, alors
qu’ils sont présentés plus rarement et seulement par un petit nombre
d’individus dans les localités voisines, que les Bruants zizi de la localité
pourraient reconnaître leur appartenance à la même zone géogra-
phique. La notion de dialecte apparaît ainsi comme subtile et nuancée
chez les passereaux et, de façon plus générale, chez les oiseaux. Parallè-
lement, le problème de la reconnaissance individuelle reste posé, au
moins chez les espèces qui ne vivent pas en groupe ou en colonie.
18
Les données sont plus claires chez les oiseaux coloniaux comme les
mouettes ou les Sphéniscidés (ou Manchots).
Prenons l’exemple des manchots étudiés notamment par
P. Jouventin dans l’Antarctique. Chez le Manchot Adélie, la re-
connaissance mutuelle entre conjoints, fidèles l’un à l’autre tout
au long du cycle reproducteur, repose surtout sur le chant de pa-
rade émis par l’individu qui revient au nid. Si les chants successifs
d’un mâle présentent une bonne constance dans leur structure,
ils sont très différents d’un mâle à l’autre, ce qui permet évi-
demment une reconnaissance de chacun au sein de la colonie,
notamment par le conjoint. Chez cette espèce qui construit un
nid, le poussin ne s’émancipe que vers le 22e jour après
l’éclosion. Il émet alors des chants dont la structure ne se modifie
ensuite que très peu. Quittant le nid et les parents, il possède une
identité acoustique qui lui permet d’être reconnu au sein de la co-
lonie, alors que son chant était auparavant très variable, no-
tamment au cours des 10 premiers jours.
Chez le Manchot Empereur aussi, le chant de cour constitue le principal
support de la reconnaissance individuelle. Le découpage temporel des
motifs et des séries de motifs est remarquablement fixe chez le même
oiseau d’une année à l’autre. Par suite, la variabilité du chant de chaque
manchot empereur est faible, comparée à celle des différents individus
d’une même communauté.
En effet, ces oiseaux se groupent par milliers et forment des co-
lonies très denses sur la banquise antarctique. Il est essentiel
qu’en l’absence de « référent » spatial particulier (l’espèce ne
construit pas de nid), les conjoints puissent s’identifier sans am-
biguïté après qu’il se sont quittés, par exemple pour chercher de
la nourriture pour la famille. Dans ces populations, le poussin
conserve le même type de chant, de l’éclosion au départ en mer.
Non protégé par un nid et pouvant quitter « accidentellement »
les replis de la « fourrure » parentale, il peut ainsi être identifié à
tout moment par ses parents. Le découpage temporel du chant
en motifs, qui donne le rythme, est le paramètre essentiel qui
permet la reconnaissance du poussin.
19
Outre les chants de proclamation territoriale et de parade, de recon-
naissance du groupe géographique, de reconnaissance individuelle et de
relations entre le jeune et son ou ses parents, les signaux acoustiques
jouent un rôle important dans les comportements agonistiques.
Par exemple, chez le rouge-gorge Erithacus rubecula, le mâle modifie
son chant de proclamation territoriale dès qu’un intrus pénètre dans la
zone dont il est propriétaire: il chante de façon plus assourdie, augmente
l’énergie acoustique dans les plus hautes fréquences ainsi que le nombre
de notes par unité de temps et la durée totale du chant.
Le rouge-gorge peut graduer ces modifications et informer ainsi l’intrus
de son niveau d’agressivité.
Dans la même situation, la grive Turdus philomelos alterne des frag-
ments de chant assourdi et le chant normal. Le taux de chant modifié
indique « l’humeur » de l’oiseau: plus le taux est augmenté, plus la
tendance à passer à l’agression augmente.
Chez le Troglodytes troglodytes, le propriétaire d’un territoire diminue
l’intervalle de temps entre les chants lorsque sa tendance à passer à
l’agression augmente.
De façon plus générale, les oiseaux peuvent transmettre par des si-
gnaux acoustiques des informations précises sur leur état émotionnel.
Comme l’ont montré les éthologistes objectivistes les signaux visuels
(crête de poule plus ou moins érigée; plumes de dindon plus ou moins
gonflées; etc.) peuvent alors renforcer, compenser ou remplacer les
signaux acoustiques.
Parmi les autres signaux acoustiques des oiseaux, citons les cris de dé-
tresse, notamment ceux des jeunes poussins de la poule domestique,
les gazouillis de sécurité ou de confort de ces mêmes poussins, les cris
de contact des oiseaux de basse-cour, les cris d’alarme...
Cependant, on ne connaît pas précisément les paramètres qui, dans
chacun des cris ou chants, véhiculent l’information de détresse, de
sécurité ou de confort, de maintien du contact avec les jeunes lors-
qu’ils sont émis par les parents, etc. Des études plus profondes visant à
synthétiser les sons spécifiques et à les émettre à des individus de
l’espèce étudiée dans des conditions contrôlée doivent servir pour cer-
ner la part qui revient à l’intensité acoustique, à la gamme de fré-
quences, au rythme d’émission de tel ou tel motif dans la transmission
des informations au cours des diverses situations vécues par l’oiseau,
20
que celui-ci soit émetteur ou receveur.
2.4.3.
Les signaux chimiques
C’est probablement l’étude des communications chimiques qui a le plus
progressé au cours des dernières décennies. Quatre types de re-
cherches lui ont donné une impulsion décisive:
– Les recherches sur l’appel sexuel de la femelle du Bombyx du mûrier
et l’isolement de la molécule qui véhicule l’information: il s’agit d’un
alcool sécrété par les glandes abdominales, logiquement appelé le
bombykol. Ainsi se trouvait identifiée la première phéromone . On peut
la définir comme une stimulation chimique qui, véhiculant une informa-
tion sur l’état physiologique et/ou psychologique d’un individu, entraîne
des modifications significatives et prévisibles du comportement et par-
fois de la physiologie du receveur.
– Les recherches sur l’influence des sécrétions des glandes mandibu-
laires de la reine d’abeilles sur le comportement et la physiologie des
ouvrières. La phéromone royale entraîne la formation d’une cour
d’ouvrières autour de la reine, l’inhibition de la construction d’alvéoles
royaux par les ouvrières (c’est dans ces alvéoles que sont élevées les
larves qui se développent en reine après avoir reçu une nourriture par-
ticulière), l’attraction des mâles au cours du vol nuptial de la reine, pen-
dant lequel elle est fécondée, l’attraction des ouvrières au cours de
l’essaimage et l’inhibition du développement ovarien des ouvrières. Le
cadavre d’une reine suffit le plus souvent à provoquer la plupart de ces
effets.
– Les recherches sur les caractéristiques et les fonctions de la piste
déposée par les fourmis Solenopsis saevissima qui ont découvert une
source de nourriture. La piste est formée à partir des sécrétions d’une
glande abdominale. Utilisant la théorie de l’information on a pu calculer
la quantité d’informations contenues dans une telle piste.
– Les recherches qui ont montré que, chez les mammifères, la re-
cherche du partenaire sexuel et l’ensemble des phénomènes de la re-
production sont étroitement liés à des stimulations chimiques spéci-
fiques. Ainsi, l’effet Lee-Boot (Van der Lee et L. M. Boot) se produit
entre femelles de souris: mises ensemble, celles-ci présentent un arrêt
de leur cycle estrien en allongeant leur phase d’anoestrus (phase pen-
dant laquelle les ovulations ne se produisent pas et les femelles ne sont
21
pas sexuellement réceptives); ce sont des stimulations olfactives spéci-
fiques qui sont à l’origine de cet effet.
* L’effet Whitten (W. K. Whitten) rend compte de l’influence
des souris mâles sur le déclenchement de l’œstrus des femelles
et, par suite, de la synchronisation des cycles estriens de celles-
ci; la seule odeur de l’urine de mâle suffit à provoquer cet effet
chez les femelles vierges (H. M. Marsden et F. H. Bronson).
* L’effet Bruce (H. M. Bruce): l’odeur d’une souris mâle, pré-
sente par exemple dans la litière souillée par un mâle, provoque
un blocage de gestation chez une femelle fécondée par un autre
mâle; la femelle revient en œstrus 3 à 4 jours après avoir été ex-
posée à l’odeur du 2e mâle.
On trouve dans ces recherches de pionnier les deux fonctions essen-
tielles des phéromones: la transmission d’un signal et l’induction de
phénomènes neuro-endocriniens et endocriniens. Depuis les années
1960, les recherches ont donné de nombreux exemples de ces deux
fonctions, souvent indissociables, surtout chez les insectes et les mam-
mifères. Elles ont fait faire des progrès importants à de nombreux sec-
teurs de la biologie, sur le plan fondamental comme sur celui des appli-
cations.
2.4.4.
Les signaux tactiles
Les communications tactiles sont, le plus souvent, étudiées de façon
anecdotique, même lorsqu’on leur reconnaît un rôle important dans les
comportements sociaux, comme chez les primates. Pourtant, on sait
que, chez les guêpes sociales d’Europe et chez l’abeille domestique, les
échanges de nourriture « bouche à bouche » ou échanges trophallac-
tiques, sont réglés par des signaux tactiles précis.
L’ouvrière de guêpe ou d’abeille qui sollicite sa nourriture d’un
congénère, porte des stimulations tactiles précises au moyen de
l’une ou l’autre de ses antennes, parfois des deux, au contact des
pièces buccales situées entre les mandibules entrouvertes de
l’ouvrière sollicitée. Ces zones sont riches en mécanorécepteurs.
Leur stimulation entraîne une régurgitation de nourriture chez
22
l’ouvrière sollicitée, en même temps que des mouvements
d’antennes particuliers qui ont valeurs de signaux d’acceptation
du contact. Peu avant, ou au moment de rompre le contact,
l’ouvrière sollicitée émet d’autres mouvements d’antennes carac-
téristiques: détentes appuyées en direction de la tête de la sollici-
teuse chez l’abeille, rabattements appuyés entre les deux in-
sectes chez les guêpes sociales. L’apparition de ces mouvements
coïncide avec la fin des régurgitations de l’ouvrière sollicitée.
Tout montre donc que ces mouvements ont valeur de signaux de rup-
ture du contact et d’arrêt de la régurgitation.
Certaines fourmis, comme les Camponotus, ont aussi des mou-
vements d’antennes de même forme que chez les guêpes et les
abeilles pour solliciter leur nourriture. Cependant, contrairement
aux guêpes et aux abeilles, les fourmis ne paraissent pas avoir
des signaux antennaires qui règlent la dynamique des échanges
entre la solliciteuse et la donneuse de nourriture, notamment
l’arrêt des régurgitations et la rupture du contact. On peut pen-
ser que cela a pu, au cours de l’évolution, faciliter la pénétration
d’un nombre relativement élevé de commensaux et de parasites
dans les sociétés de fourmis. En revanche, la plus grande com-
plexité des communications antennaires chez les guêpes et les
abeilles a pu constituer un obstacle à la pénétration de leurs so-
ciétés par des espèces étrangères (hypothèse de A. Bonavita).
L’expérience avec les macaques est intéressante aussi.
Lorsque de jeunes macaques sont élevés de façon telle qu’ils ne
peuvent toucher un congénère, ou être touché par lui, pendant
six mois, tous leurs comportements sociaux apparaissent ensuite
profondément altérés, même lorsqu’ils ont pu voir et entendre
d’autres macaques pendant la période d’isolement:
– les individus restent souvent prostrés dans des attitudes évo-
quant l’autisme chez les êtres humains;
– leurs systèmes de communication sexuels (recherche et ap-
proche du partenaire sexuel) sont inexistants;
– leurs systèmes de communication agonistiques sont déplacés
vers le repli sur soi-même et les bouffées d’agression « non réfré-
nées » à l’approche d’un congénère;
23
– leur comportement maternel, quant il s’agit de femelles insé-
minées expérimentalement, est aberrant (rejet du jeune et
agressions).
Lorsque l’isolement tactile dure trois mois, les comportements
sont également modifiés, mais ils deviennent progressivement
comparables à ceux de macaques élevés naturellement par leur
mère, à la condition que les individus élevés isolément soient mis
en présence d’autres individus du même âge, que ceux-ci aient
été élevés dans l’isolement social ou non.
Les activités ludiques, en particulier les touchers corporels, pa-
raissent alors compenser le déficit des stimulations tactiles spéci-
fiques des trois premiers mois.
L’insuffisance des études sur les signaux tactiles peut s’expliquer par des
difficultés méthodologiques: il est en effet difficile de quantifier les tou-
chers.
Aide mémoire
1. Langage et communication
1.1. Les principes.
- Avant que l’accent soit définitivement mis sur le langage comme sys-
tème de communication la théorie expliquait en d’autres termes le
pouvoir qu’ont les hommes d’inventer des systèmes de communication,
(les signifiants, les signifiés).
- Saussure avait insisté sur la nécessité de replacer la linguistique pro-
prement dite dans le vaste domaine de l’ensemble de tous les systèmes
de signes.
La sémiologie.
1.2. Indice et langage
- Un indice est un fait observable, qui renseigne l’observateur sur un
autre fait non actuellement observable.
- John Dewey : toute trace laissée par les hommes était un signe et tout
fait anthropologique devenait langage.
1.3. Signe et langage
- Pour des linguistes de la première moitié du XXè siècle tous les signes
24
produits par les humains sont des langages.
- Jespersen : « dans sa forme développée, le langage est à coup sûr une
caractéristique humaine, et peut être considéré comme la principale
marque de l’humanité ».
- Colin Cherry, (1957) : « l’homme a seul le don du langage ». Les ani-
maux n’ont pas de langage parce qu’ils n’ont pas de « système de pen-
sée organisée ».
2. Systèmes de communication linguistique et non linguistique.
2.1. La sémiotique: théorie générale des modes de signifier.
2.2. Caractères spécifiques du langage humain: système de communi-
cation au moyen des langues naturelles humaines.
2.2.1. Fonctions du langage
Jakobson :
* La fonction expressive : tout ce que l’émetteur met de lui-même dans
son message.
* La fonction appellative ou conative : multiplier les moyens d’action de
l’émetteur et du message sur le récepteur.
* La fonction phatique : s’assurer que le canal est libre.
* La fonction métalinguistique : utiliser le langage pour parler du code.
* La fonction poétique : centrée sur l’élaboration formelle du message..
* La fonction référentielle : centrée sur la mise en relief du référent.
2.2.2. Spécificité du langage
L’établissement de la communication n’est pas le trait spécifiquement
distinctif du langage humain. L’arbitraire du signe : il n’en faisait pas le
caractère propre du langage humain. De fait, beaucoup d’autres sys-
tèmes de communication utilisent des signes arbitraires.
2.2.3. La double articulation
Extraordinaire quantité de messages possibles au moyen d’une double
économie dans la structuration par rapport à ce que peuvent tous les
autres systèmes de communication.
2.3. Communication humaine
propriétés considérées comme étant les caractéristiques essentielles.
Structures de la communication qu’emploie le langage parlé :
Canal auditif-vocal, transmission émise et réception directionnelle, eva-
nouissement rapide, interchangeables, rétroalimentation totale, spécia-
lisation, sémanticité, procédé arbitraire, éléments discrets, déplace-
ments, productivité, transmission par tradition, double organisation.
2.4. Communication non humaine
25
2.4.1. Les signaux visuels
- Mouvements et échanges lumineux dans les comportements de re-
production.
- Défense du territoire, comportements agonistiques, comportements
parentaux, reconnaissance individuelle…
2.4.2. Les signaux acoustiques :
- Cris, chants, grognements… jouent un rôle essentiel dans l’attraction
spécifique du partenaire sexuel.
- Chaque espèce apparaît ainsi comme unique.
- Aucune règle générale ne se dégage quant aux capacités
d’apprentissage des individus.
- Chaque localité se caractérise ainsi par des chants qui lui sont propres,
en raison des combinaisons particulières.
- cris de détresse, les gazouillis de sécurité ou de confort, cris de contact
des oiseaux de basse-cour, cris d’alarme...
- On ne connaît pas les paramètres qui véhiculent l’information.
2.4.3. Les signaux chimiques : Quatre types de recherches : l’appel
sexuel, glandes mandibulaires de la reine d’abeilles, piste déposée par
les fourmis, recherche du partenaire sexuel chez les mammifères.
2.4.4. Les signaux tactiles : anecdotique. Insuffisance des études.
26
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AUROUX, SYLVAIN et coll., Histoire des idées linguistiques, Bruxelles, éd.
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BACHMAN, CHRISTIAN, LINDENFELD, JACQUELINE ET SIMONIN JACKY,
Langage et communications sociales, Paris, Hatier, 1981.
BENVENISTE, ÉMILE, Problèmes de linguistique générale, Paris, Galli-
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BRONCKART, JEAN PAUL, Théories du langage, une introduction critique,
Bruxelles, Dessart et Mardaga, 1977.
CHOMSKY, NOAM, Réflexions sur le langage, par Judith Milner, Béatrice
Vautherin et Pierre Fiala, Paris, F. Maspero, 1977.
CORRAZE, JACQUES, les Communications non verbales, Paris, P.U.F.,
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GAENG, PAUL A., Introduction to the Principles of Lenguage, New York ;
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MARTINET, ANDRÉ, Éléments de linguistique générale, Paris, A. Colin,
1960, 3éme éd. 1991.
SAUSSURE, FERDINAND DE, Cours de linguistique générale, Lausanne,
Payot, 1916, nouv. éd., 1972.
SINCLAIR DE ZWAART, H., Acquisition du langage et développement de
la pensée : sous-systèmes linguistiques et opérations concrètes,
Paris, Dunod, 1967.
27
2
Le processus de
communication
Sommaire
1. Le processus de communication: situation de communication
1.1. Les éléments de la communication
1.2. Les fonctions du langage
2. Les actes de langage
2.1. Définition
2.2. Les principaux types d’actes de langage
2.2.1. Les modalités d’énonciation
2.2.2. Les performatifs
2.2.3. Les comportements
2.2.4. Actes indirects et sous– entendus.
28
2.2.5. L’ironie
2.3. Les registres de langue
2.3.1. Le registre soutenu
2.3.2. Le registre familier
2.3.3. Le registre courant, commun.
2.3.4. Emplois dans les textes
3. La négociation du sens
3.1. La signification structurelle ou grammaticale
3.2. La signification lexicale
3.3. La flexibilité sémantique
Introduction
La langue n’est qu’une variété de code, soit un ensemble préarrangé de
signaux. Les linguistes ont souvent exploité la ressemblance qu’il y avait
entre tout processus de communication (y compris lorsque émetteur
et/ou récepteur sont des machines) et le langage.
C’est du code que partent les instructions transmises physiologique-
ment à l’appareil moteur qui les réalisera (la phonation, les mimiques et
le comportement gestuel). C’est de façon inverse, mais non symétrique,
que se passe le décodage chez le récepteur, processus également appe-
lé reconnaissance: les ondes transmises et transformées en signaux sont
probablement confrontées avec ce qui existe de plus proche dans la
mémoire et au besoin y prennent place. Il est bien évident que ce
schéma n’est jamais réalisé de façon optimale, mais qu’il faut accorder
une certaine importance au bruit, qui vient perturber la communication.
C’est pourquoi le code est souvent invoqué à l’intérieur même du mes-
sage, notamment dans les énoncés tautologiques, ce qui définit la fonc-
tion métalinguistique du langage.
Comme le message est avant tout destiné à véhiculer une information, il
est inimaginable qu’un discours soit purement axé sur le code: il faut se
rappeler du reste que chacun de ces deux concepts n’a d’existence que
par rapport à l’autre, et que le code ne peut se concevoir que comme
l’ensemble des conventions auxquelles se réfèrent les partenaires lors
de la communication effectuée par le message.
Saussure et Jakobson ont eu recours à cette opposition structurale, le
premier en la dénommant langue/parole et pour souligner le caractère
29
social, transindividuel de l’institution langagière (personne ne peut par
sa volonté modifier les lois de fonctionnement de la communication,
qui, pourtant, évoluent dans le temps), le second, d’une façon bien plus
axée sur la théorie de la communication, pour mettre au jour les prin-
cipes d’une « poétique » au sens large et même d’une grammaire.
30
1.
Le processus de communication: situation de communication
La communication est l’échange verbal entre un sujet parlant, qui pro-
duit un énoncé destiné à un autre sujet parlant, et un interlocuteur dont
il sollicite l’écoute et une réponse explicite ou implicite (selon le type
d’énoncé).
Observé du point de vue psychologique la signification qu’un locuteur
associe aux sons est la même que celle que l’auditeur associe à ces
mêmes sons, bien que cela ne soit pas toujours vrai.
Les participants à la communication, ou acteurs de la communication,
sont les « personnes » entre lesquelles cette communication s’établit:
le sujet parlant qui produit l’énoncé, l’interlocuteur ou allocutaire, et
enfin ce dont on parle, les êtres ou objets du monde. Des éléments spa-
tio-temporels doivent être ajoutés: objets présents ou absents, proches
ou éloignés, relations sociales entre les participants à la communica-
tion… Ce statut de la communication est défini par la distance sociale,
ou intersubjective, instituée par le locuteur avec ses interlocuteurs (tu-
toyer, vouvoyer, sélectionner des mots respectueux… ) Tout cela se tra-
duit par des modes et aspects du verbe, et par des adverbes comme
peut-être, sans doute…
Du point de vue technique la communication est le fait qu’une infor-
mation soit transmise d’un point à un autre (lieu ou personne).
Le transfert de cette information se fait au moyen d’un message qui a
reçu une certaine forme, que a été codé. La première condition, en ef-
fet, pour que la communication puisse s’établir, est le codage de
l’information, c’est-à-dire la transformation du message sensible et
concret en un système de signes ou code, dont la caractéristique essen-
tielle est d’être une convention préétablie, systématique et catégorique.
Quand la communication s’établit, nous disons que les parties compo-
santes de cette transmission forment un système de communication.
1.1.
Les éléments de la communication
31
Le schéma de la communication suppose la transmission d’un message
entre un émetteur et un récepteur possédant en commun, au moins
partiellement, le code nécessaire à la transcription du message.
Un système comporte, d’après Jakobson, les élément suivants:
CONTEXTE ou RÉFÉRENT
DESTINATEUR ------------- MESSAGE----------------DESTINATAIRE
CONTACT
CODE
Le code comprend des signaux spécifiques et un ensemble de règles de
combinaisons propres à ce système de signaux; dans les langues natu-
relles, le code est constitué par les phonèmes, les morphèmes et les
règles de combinaison de ces éléments entre eux (par opposition à la
parole, constituée par les énoncés réalisés, ou des messages).
Le canal, support physique de la transmission du message, moyen par
lequel le code ou les signaux sont transmis: c’est l‘air pour le cas de la
communication verbale, mais le canal peut avoir des formes très di-
verses: bandes de fréquence radio, lumières, systèmes mécaniques ou
électroniques divers…
Le destinateur est à la fois la source du message, l’émetteur propre-
ment dit, comportant les mécanismes du codage et l’appareil émetteur
lui-même. On dit de l’émetteur qu’il est un encodeur, c’est à dire qu’il
sélectionne à l’intérieur du code un certain nombre de signaux permet-
tant de transmettre le message.
Le destinataire est à la fois l’appareil qui reçoit le message (oreille ou
récepteur-radio) et le destinataire proprement dit du message (cer-
veau humain pour le langage parlé, auditeur pour la radio, etc.) Le pro-
cessus du décodage se fait au niveau du récepteur-destinataire par la
« recherche en mémoire » des éléments sélectionnés par l’émetteur et
constituant le message. Dans une communication courante, destinateur
et destinataire échangent leur rôles au fur et à mesure.
32
Le message est fait de traces et de signes.
Dans le schéma de la traduction on peut voir la notion de recodage du
message:
source

message
dans le
code A

encodeur message

décodeur
réencodeur
message
dans le
code B

destinataire
 
règles du
code A
règles du
code B
Le recodage, ou réencodage, opération par laquelle le message codé,
puis décodé, reçoit une nouvelle forme. Par exemple, on dicte un télé-
gramme (forme acoustique), qui est transcrit sur une feuille de papier
(forme graphique) puis tapé en morse (forme mécanique) et finalement
transmis sous forme d’impulsions électriques.
La notion du contexte ou référent peut être verbale, ou bien physique
ou même psychologique.
Le processus de communication est un circuit où le sujet parlant gé-
nère un concept. Celui-ci est ensuite uni à une image acoustique (selon
les compétences linguistiques de l’individu et dans sa langue propre) qui
suit un canal (l’air, les ondes sonores) et qui arrive à l’oreille du récep-
teur. Celui-ci reçoit une image acoustique qui doit s’unir avec le con-
cept. Les deux concepts doivent coïncider. C’est donc au niveau du cer-
veau que se déroulent les opérations d’encodage et de décodage, Le
cerveau joue le rôle à la fois d’émetteur et de récepteur du message.
C’est dans le cerveau également que sont déposés les éléments du code
et que s’enchaînent les opérations de « recherche de mémoire ».
Dans un dialogue, une conversation ou un débat, les interlocuteurs sont
présents et ils peuvent s’interrompre mutuellement, demander des pré-
cisions, revenir sur des points antérieurs, dresser des bilans tempo-
raires, etc. Ils construisent bien le sens des messages ensemble.
33
La lecture est aussi un dialogue, un dialogue avec un texte. Certes, que
le texte écrit n’est qu’un simple texte informatif, on se trouve dans le
modèle de communication du simple transfert d’une information. Mais
un roman, un poème ou un essai n’est pas une information transmise.
C’est un texte offert, un texte dont il faut s’emparer, qu’il faut ap-
prendre à connaître.
Chaque lecteur est différent. Chaque lecteur apporte avec lui sa propre
connaissance de la langue, son histoire personnelle… Il y a souvent un
grand écart entre le texte et le lecteur : le texte date d’une époque
lointaine, différente, une époque que le lecteur connaît mal, ou qu’il ne
connaît pas du tout. La lecture n’est donc pas une simple réception pas-
sive. C’est un dialogue avec le texte, une suite d’interrogations pour
parvenir à la compréhension progressive de ses significations, à ce que
« dit » le texte, à ce qu’il « nous » dit.
1.2.
Les fonctions du langage
A chaque facteur de la communication, Jakobson fait correspondre une
fonction du langage :
FONCTION RÉFÉRENTIELLE
(contexte, référents)
FONCTION EXPRESSIVE- FONCTION POÉTIQUE- FONCTION CONATIVE
(destinateur) ----------------- (message) -------------------- (destinataire)
FONCTION PHATIQUE
(canal)
FONCTION MÉTALINGUISTIQUE
(code)
La fonction expressive est centrée sur le destinateur. Elle correspond à
son intervention directe dans le message. Elle peut être soutenue par
des gestes dans lesquels le destinateur se désigne, occupe l’espace que
est autour de lui.
34
La fonction conative est centrée sur le destinataire. Elle correspond à
son interpellation par le destinateur. Là aussi, les gestes divers peuvent
participer à cette fonction,
La fonction référentielle est centrée sur le référent. Les signes linguis-
tiques acquièrent une signification complète grâce aux liens que les
unissent à leur contexte et à leur référent. Ces liens permettent égale-
ment de découvrir dans les textes deux sortes de relations : les associa-
tives et les référentielles.
- Les relations associatives résultent des liens que s’établissent
entre les signes et les contacts présents ou absents. C’est donc
un type de relation que est centré sur le texte lui-même, sur son
organisation, sur son écriture.
- Les relations référentielles résultent des liens que s’établissent
entre les signes et leur référent. C’est donc un type de relation
que « tourne » le texte vers l’extérieur, vers le monde, vers :
« ce » dont parle le texte.
La fonction phatique est centrée sur le canal. Elle correspond à toutes
les expressions ou attitudes que ont pour but d’ouvrir ce canal (Allô ?),
de le maintenir ouvert (Patientez…) ou de le fermer (Je raccroche…).
Relèvent de cette même fonction tous les Euh…, Voyons voir…, bon.,..,
Je disais… qui ont pour but de conserver l’attention de l’autre.
La fonction métalinguistique retourne le langage vers le code. Elle cor-
respond aux précisions qu’on apporte sur le ou les sens de ce qu’on dit.
La fonction poétique est centrée sur le message, elle ne concerne pas
que les poésies, mais toutes les relations associatives des signifiants ou
des signifiés qui peuvent intervenir dans le message.
2.
Les actes de langage
2.1.
Définition
35
Quand on énonce un discours, on « dit » quelque chose et on « fait »
quelque chose:
Il va pleuvoir
 
L’énonciateur « dit »:
« la pluie arrive »
L’énonciateur « fait » quelque
chose:
- il constate simplement qu’il pleut;
- il avertit qu’un parapluie serait
utile;
- il marque son dépit de ne pas
pouvoir sortir.
On appelle acte de langage l’acte qu’on accomplit en disant quelque
chose, oralement ou par écrit. L’acte de langage appartient donc au
discours et à la situation de communication. C’est une manière particu-
lière de se comporter.
- Il y a des manières de se comporter, d’agir, qui passent par des gestes,
des attitudes, des actions au sens banal du terme.
- Les actes de langage sont des manières de se comporter qui passent
par l’utilisation du langage:
promettre, jurer, prier, ordonner, demander, avertir, insulter, se moquer
de…
On distingue généralement trois principaux registres de la langue: le
registre familier, le registre courant ou commun, le registre soutenu,
qu’on verra plus tard.. Ce sont trois manières d’utiliser la langue, mais
elles correspondent aussi à des manières de se comporter. Elles dépen-
dent donc en partie des situations de communication.
2.2.
Les principaux types d’actes de langage
2.2.1.
Les modalités d’énonciation
36
Un premier type d’actes de langage apparaît dans les modalités
d’énonciation de la phrase : « déclarer », « demander », « ordonner »
sont des actes du langage.
En prononçant les phrases qui suivent, on accomplit chacun de ces
actes:
J’affirme que c’est impossible.
Pourriez vous m’aider ?
Viens vite !
Ces actes renvoient à des situations précises.
- Pour déclarer quelque chose, il faut que j’aie la parole, qu’on
m’écoute, qu’on me lise.
- Les actes de « demander » et d’ « ordonner » sont encore plus stricte-
ment délimités.
Par exemple : c’est l’examinateur qui pose les questions, pas celui qui
passe l’examen, et on ne peut pas donner un ordre à n’importe qui.
2.2.2.
Les performatifs
Nous avons vu que ce terme désigne les verbes qu’on emploie pour
« faire » quelque chose. Les actes de langages accomplis sont alors très
exactement ceux où « dire » c’est « faire ».
Exemples: jurer, donner sa parole, promettre, parier, excuser, remercier,
bénir, maudire, décréter, déclarer, léguer, baptiser, etc.
Les verbes performatifs ne sont pas performatifs à tous les temps et à
toutes les personnes. Ils ont cette valeur au présent de l’indicatif et à la
première personne. Jurer, c’est dire « je le jure », pas « je jurerai », ou
« il a juré ». Cette valeur n’est acquise que dans une situation donnée
qui est parfois très codifiée. On ne jure pas dans n’importe quelle cir-
constance.
37
2.2.3.
Les comportements
Ce sont des actes de langage où le langage intervient, mais de manière
moins codifiée que dans le cas des performatifs. Cela ne signifie pas
qu’il n’y a pas de situation de communication précise. Il y a toujours une
situation.
- Estimer, c’est estimer la valeur de quelque chose- une opinion, par
exemple- ou de quelqu’un. C’est avoir la compétence ou simplement le
droit moral d’estimer. On peut contester ce droit.
- Renseigner, c’est renseigner quelqu’un qui nous a demandé explicite-
ment ou implicitement quelque chose.
- Autres exemples: défier, critiquer, flatter, prévenir, avertir, concéder,
recommander, approuver, encourager, etc.
Le refus de dialogue. C’est une sorte d’ « acte de non-langage ». Le des-
tinataire indique qu’il refuse la communication: on fait semblant de lire
le journal ou de dormir, on ne répond pas, on raccroche le téléphone,
on retourne la lettre sans l’avoir ouverte, etc.
Si le destinateur a vraiment cherché à entrer en communication avec le
destinataire, lui opposer le contact est toujours impoli. Dans certains
cas, c’est même un comportement de mépris insupportable: le destina-
teur a l’impression de ne pas exister.
2.2.4.
Actes indirects et sous– entendus.
Ce sont des actes de langage avec complicité du locuteur.
Pour ordonner, prier, défier, etc., il faut une situation de communica-
tion, donc un destinataire. Mais, dans la plupart des cas, on ne de-
mande pas l’avis du destinataire. Il obéit ou non à l’ordre, à la prière, au
défi.
D’autres actes de langage demandent la complicité du destinataire.
- Les actes de langage indirects consistent à employer les modalités
d’énonciation avec une autre valeur : déclarations qui sont des de-
mandes, interrogations qui sont des menaces ou des ordres, interroga-
tion rhétoriques.
Pour montrer que la complicité des interlocuteurs est nécessaire dans
ces actes de langage, on peut évoquer le cas où l’interlocuteur refuse la
complicité, fait semblant de ne pas jouer le jeu:
- Tu peux me passer l’eau, s’il te plaît ?
38
- Oui.
Et celui qui vient de répondre en reste là !
- Les sous-entendus sont des actes de langage où l’on dit quelque
chose sans le dire vraiment. Ils sont très pratiques parce qu’ils permet-
tent de donner une opinion sans risque. On laisse la responsabilité de
comprendre au destinataire:
- Paul a l’air fatigué ce matin.
- Tu veux dire qu’il passe ses nuits à danser ?
- Non ! je n’ai pas voulu dire ça.
Le sous–entendu n’est possible que si les interlocuteurs se compren-
nent à demi–mots, s’ils sont au courant des mêmes événements, s’ils
partagent une communauté de compréhension. Dans l’exemple donné
ci-dessus, il faut que les deux interlocuteurs connaissent le Paul dont il
est question.
2.2.5.
L’ironie
L’ironie est un acte de langage avec complicité du locuteur.
Du point de vue de l’expression, les principaux procédés de l’ironie sont:
- l’antiphrase et la litote;
- la prétérition:
Je ne dis pas que tu es stupide  On le dit !
- l’ajout d’un commentaire inattendu, absurde:
Panglosse fut pendu, quoique ce ne soit pas la coutume. (Voltaire)
- le ton « ironique ».
Mais l’ironie n’est pas un simple problème d’expression. On ne peut
pas définir l’ironie par le ton « ironique ». Ou alors on définit le ton
« ironique » par.... l’ironie, et on tourne en rond !
L’ironie est un acte qui justifie et éclaire l’emploi de ces procédés.
Cet acte de langage implique trois facteurs:
- un énonciateur qui « fait » de l’ironie;
- une cible qui est visée par l’ironie;
- des témoins complices qui comprennent ce que dit l’énonciateur.
39
Comprendre que dans un discours il y a de l’ironie, c’est saisir un écart
entre ce qui est dit et la situation:
«Beau temps, n’est-ce pas ? »
 
Un jour de soleil, Un jour de pluie,
c’est une constatation. c’est un antiphrase ironique.
Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux
armée.
(Voltaire)
 
Si Voltaire est un écrivain connu Si Voltaire est....Voltaire
pour « admirer »la guerre, le texte est une antiphrase
le texte n’est pas ironique. ironique.
Comme tous les sous-entendus, l’ironie court toujours le risque de ne
pas être comprise. Si on fait lire cette phrase ci-dessus à un lecteur qui
ignore tout sur Voltaire, il ne peut pas apprécier l’ironie. S’il a lu « Can-
dide » depuis le début, quand il arrive á cette phrase, il ne peut pas se
tromper d’interprétation:
- Voltaire « fait » de l’ironie;
- la cible visée est la guerre et son exaltation;
- le lecteur est complice de l’ironie puisqu’il la comprend.
L’humour repose sur les mêmes données que l’ironie mais la
cible n’est pas visée avec autant de force.
On rencontre pourtant une force identique dans l’humour
noir qui est parfois une forme d’ironie.
2.3.
Les registres de langue
Ce sont des manières d’utiliser le langage, mais ils correspondent aussi à
des situations de communication, à des manières de se comporter.
2.3.1.
Le registre soutenu
Le seul registre que l’on puisse définir de manière assez claire est le re-
gistre soutenu. Il y a dans la langue des tours, des pratiques que per-
40
sonne n’utilise spontanément. Pour employer le registre soutenu, il
faut « faire attention » à ce qu’on dit ou à ce qu’on écrit. Le registre
soutenu n’est jamais spontané.
- Il est donc associé à des situations de communications où l’on prête
attention à son comportement.
- Il demande une bonne connaissance des ressources de la langue.
- Le registre soutenu se rencontre à l’oral et à l’écrit, mais son modèle
est un modèle écrit: concordance classique des temps, emploi du sub-
jonctif, tours des anciens usages, emploi fréquent des phrases com-
plexes, vocabulaires recherché…
Le registre soutenu s’explique aussi par opposition au registre familier
et au registre courant.
2.3.2.
Le registre familier
Le registre familier est celui d’une parole spontanée, employée avec ses
proches, ses amis, dans des situations de communication sans con-
traintes.
- Le modèle du registre familier est un modèle oral et il comporte sou-
vent des « fautes » au regard de l’usage correct. C’est un registre ou les
effets de style de l’oral sont souvent présents: ton, accents, emphase
syntaxique, hyperbole, redondances…
On emploie facilement des termes d’argot ou de patois, des mots
« grossiers ».
Cela dit, il y a sans doute autant de registres familiers que de locu-
teurs. Tout dépend pour chacun de sa connaissance de la langue, de son
milieu, de l’importance qu’il attache au langage, de son souci de respec-
ter des normes de « bon usage », de la qualité de sa prononciation, etc.
2.3.3.
Le registre courant, commun.
Ce registre est moins spontané que le registre familier, mais il est plus
spontané que le registre soutenu.
- Il s’emploie dans les situations de la vie quotidienne, quand nous
sommes au contact de gens que nous ne connaissons pas ou peu.
41
- Il fonctionne à l’oral et à l’écrit. On y trouve les cadres les plus géné-
raux de la langue, ceux d’un usage correct sans recherche d’effets parti-
culiers.
- Au fond, c’est le registre qui passe inaperçu.
2.3.4.
Emplois dans les textes
Les registres de la langue peuvent être considérés de deux manières.
- Le point de vue normatif les classe en registres corrects et incorrects.
De ce point de vue, il y a donc des registres qu’on doit éviter d’employer
dans la mesure du possible.
- Le point de vue descriptif les analyse comme des ressources de la
langue. Maîtriser sa langue, c’est pouvoir employer les différents re-
gistres selon les situations de communication.
Dans les textes, on peut rencontrer l’influence de deux points de vue.
- L’auteur s’en tient à la norme et s’interdit d’employer des registres
incorrects ou registres « bas ».
- L’auteur joue sur toute la gamme des registres, en fonction de ses per-
sonnages et des situations où ils se trouvent. Cela le conduit donc sou-
vent à jouer sur les registres marqués, ceux qu’on peut distinguer: les
registres familiers et les registres soutenus.
Le lecteur doit repérer les passages où ces registres sont employés, ap-
précier comment ils conviennent aux situations de communication.
3.
La négociation du sens
L'objet et but du langage est de se revêtir de sens. Les langues ont dé-
veloppé des formes pour satisfaire les besoins de communication dans
tout leurs aspects. C'est parce que les besoins de communication hu-
maine sont si nombreux et si variés que l'étude du sens est probable-
ment la plus difficile partie de l'étude sérieuse de la langue.
Traditionnellement la langue a été définie comme l'expression de la
pensée, mais, comme on a pu le voir, cela implique une interprétation
trop étroite de la langue. L'expression de la pensée est juste un aspect
42
parmi les multiples fonctions exécutées par la langue dans certains con-
textes.
Nous allons voir dans ce troisième point du thème la négociation du
sens dans l’expression à trois niveaux : structurel, lexical et sémantique.
3.1.
La signification structurelle ou grammaticale
La signification de toute phrase comprend deux parties : la signification
des mots qu’elle contient, et la signification structurelle ou grammati-
cale portée par la phrase elle-même.
Le chien a chassé le chat
et
le garçon a chassé le chat
sont deux phrases différentes dans leur signification parce que chien et
garçon sont des mots différents avec des significations du mot diffé-
rentes. La même équivalence peut être appliquée aux phrases dans les
autres langues.
Les deux phrases :
le chien a chassé le chat
et
le chat a chassé le chien
contiennent les mêmes mots exactement, mais le sens est différent
parce que l’ordre des mots distingue ce qui est appelé sujet et objet
conventionnellement.
En latin les deux phrases correspondantes ne seraient pas distinguées
par l’ordre des mots qui est grammaticalement indifférent et pour une
grande part une manière de style, mais par des formes différentes dans
les équivalents lexicaux de chien et chat.
En japonais, la distinction grammaticale de sujet et objet, normalement
marquée par l’ordre des mots (sujet-objet-verbe), peut être renforcée
par une particule placée après le premier mot et une particule d’objet
après le second mot.
Les ressources formelles de toute langue pour faire des distinctions
dans les significations structurelles des phrases sont limitées par :
- le linéaire (temps), dimension de parler,
43
- la durée de la mémoire limitée du cerveau humain.
Les écrivains s’inspirent des lectures nombreuses et diverses faites tout
au long de leur vie. L’écriture est libre des restrictions de la durée de la
mémoire par la permanence de marques visuelles. Étant donné que les
textes écrits sont presque tout à fait divorcés de la prononciation orale,
la longueur et la complexité de la phrase peuvent être portées aux ex-
trêmes, comme on peut l’observer dans quelques documents légaux et
législatifs qui sont pratiquement inintelligibles à la lecture à haute voix.
Toutes les langues peuvent employer des structures de la phrase diffé-
rentes pour affirmer des faits (explicatifs), poser des questions (interro-
gatives), et enjoindre ou défendre quelques cours d'action (impératifs).
Des moyens plus délicats existent pour adoucir ou modifier ces distinc-
tions de base:
Il fait froid aujourd'hui, n’est pas?
Il ne pleut pas encore?
Fermez la porte, s’il vous plait.
Voudriez-vous ne pas trop prolonger...?
Les langues utilisent leurs propres ressources pour ces buts différem-
ment, mais, en général, chacune paraît être également flexible structu-
rellement. Les ressources principales sont l’ordre des mots, la forme du
mot, la structure syntaxique et, dans la parole, le ton et la place de
l’intonation.
Un mot ou une expression peuvent être mis en valeur en étant placés
dans la phrase en premier lieu alors qu’ils ne se placeraient pas là nor-
malement. On peut, par exemple, mettre la phrase à la forme passive.
On peut affirmer des faits, poser des questions, et donner des directives
avec une variété d'intonations; et aussi indiquer, avec des gestes vi-
sibles, des attitudes différentes, des sensations et des relations sociales
et personnelles entre orateur et auditeur. L’emphase est associée sur-
tout avec l’intonation, et celle-ci possède une signification structurelle
dans la parole.
Les possibilités d'exprimer des significations structurelles sont une des
plus importantes possibilités de toutes les langues. Ces dons sont ac-
quis dès l’enfance et sont appris plus lentement et avec plus de difficul-
té quand il s’agit de maîtriser une seconde langue apprise plus tardive-
44
ment. Les spécialistes en sont encore aux premiers pas d'une analyse
rigoureuse et pleine de ressources. La plupart des langues sont concer-
nées par cette étude, loin encore d’une compréhension adéquate de
toutes les fonctions sémantiques.
3.2.
La signification lexicale
L'autre composant du sens de la phrase est la signification du mot, les
significations individuelles des mots dans une phrase, comme éléments
du lexique. D’une façon ou d’une autre les dictionnaires sont une
grande liste des mots d’une lange et de leurs significations. Dans toutes
les langues on demande « Qu’est-ce que cela veut dire ? » Cette ques-
tion est plus facile à poser qu’à répondre.
C'est à travers les ressources lexicales que les langues maintiennent la
flexibilité. Chaque langue a un vocabulaire de quelques milliers de
mots ; pourtant ces mots ne sont pas tous en usage, et quelques-uns
sont au seuil de fréquences minimales ou utilisés par un nombre res-
treint d’orateurs.
Les mots doivent assumer les différents besoins présentés par la réali-
té. Les noms, les verbes et les adjectifs doivent répertorier les choses,
les actions et les qualités existant dans le monde, et chaque langue
s’organise à sa façon. Si tous les mots représentaient les mêmes réali-
tés, la traduction serait facile, ou tout au moins plus facile qu’elle ne
l’est maintenant.
Les langues créent en partie le monde que les hommes habitent. Bien
sûr, beaucoup de mots nomment des parties existantes et des parties
du monde et du ciel: pierre, arbre, chien, femme, étoile, nuage… et ainsi
de suite. Cependant, beaucoup d’autres mots ne correspondent pas à
ces réalités si évidentes. Pensons aux noms d’animaux, aux plantes et
légumes et aux mauvaises herbes et aux façons de les percevoir par les
différentes cultures. Pensons aussi à la manière de distribuer le temps:
année, mois, jour, heure, minute, hier, demain… ces mots ne font pas
référence à des sections directes de la réalité mais permettent
d’imposer une sorte d'ordre, en accord avec les autres, sur les processus
de changement observés dans le monde.
45
Les pronoms personnels choisissent les personnes (celle qui parle, celle
qui écoute et toutes les autres) mais quelques langues font des distinc-
tions différentes dans leurs pronoms, soit en s’incluant soi-même dans
le nous de la personne qui parle, soit en ajoutant d’autres pronoms dans
des situations diverses, ou bien, comme fait le japonais et plusieurs
autres langues, en ajoutant une variété de formes qui dénotent les rap-
ports sociaux observés.
D’autres significations des mots sont plus bornés à la culture même du
peuple, et donc plus difficiles à traduire. Ce sont des mots qui règlent la
conduite et les relations d’une culture particulière.
La traduction devient progressivement plus difficile quand on se déplace
vers des langues de cultures plus éloignées, et il a été dit qu’une traduc-
tion exige une unification de contexte culturel. C’est ainsi qu’une per-
sonne comprend l'univers et les relations entre elle-même et les autres.
A ce phénomène s’ajoute la façon dont l’enfant commence à com-
prendre progressivement le monde avec la langue dont il a hérité. La
grande majorité des formes du mot ne gardent aucune relation directe
avec leurs significations lexicales. Ce qui est appelé des mots onomato-
péiques est plutôt semblable dans la forme à travers les langues diffé-
rentes:
coucou Français, coucou Anglais et Kuckuck Allemand est directement
imitateur de l'appel de l'oiseau.
le ding-dong anglais et bim-bam allemand partagent plusieurs sons des
traits en commun qui partiellement ressemblent au retentir des cloches.
En tout, c'est une très petite partie du vocabulaire. Le plus grand
nombre de mots dans une langue n’a aucune association directe entre
le son et la signification :
.
caballo - espagnol
horse - anglais
pferd - allemand
cheval - français
equus - latin
hippopotames - grec
sont des formes de mots sans rapport avec l'animal qui est nommé.
C'est la condition arbitraire du signe linguistique. Le vocabulaire doit
46
être en grande partie arbitraire, parce que la plus grande partie du
monde et de l'expérience de l'homme n'est pas associée directement
avec un bruit.
Les relations entre structure de la phrase et significations structurelles
sont aussi en grande partie arbitraires et tacitement conventionnelles.
3.3.
La flexibilité sémantique
Non seulement les mots ont des sens différents dans les différentes
langues, mais nous pouvons dire qu’il n’y a de signification fixe dans
aucune langue. Les changements sémantiques ont lieu continuellement
et à n’importe quel moment, et parfois seulement dans une partie de
leur espace sémantique. C'est un aspect supplémentaire et une condi-
tion de la flexibilité inhérente et nécessaire à la langue.
En général, les mots sont assez imprécis; cependant, dans des condi-
tions particulières, leurs significations peuvent être précises ou adap-
tées, habituellement en ajoutant plus de mots ou expressions pour divi-
ser un champ donné en plus de détails.
Bon contraste généralement avec mauvais; mais on peut, par exemple,
établir des niveaux comme : phénoménal, excellent, très bon, bon, mau-
vais…
Les noms de couleurs obtiennent leurs significations de leurs con-
trastes mutuels. Le champ qui distingue les visions des teintes des cou-
leurs est très grand et va au-delà des ressources de tout vocabulaire. Les
enfants apprennent les couleurs de base dans leur langue assez tôt et
en même temps; une telle est appelée rouge et elle est normalement
apprise avant les subdivisions telles que cramoisi, pourpre, écarlate ou
vermeil. Les langues font leurs divisions fondamentales de la panoplie
des couleurs dans des espaces sémantiques différents.
Alors que le vocabulaire des couleurs employé dans les langues est dif-
férent, des recherches faites par Brent Berlin et Paul Kay ont essayé de
montrer qu’il y a pour les êtres humains onze catégories de couleur per-
ceptives de base qui servent comme points de référence pour les mots
de couleur d'une langue universellement, indépendamment du nom qui
47
peut être employé régulièrement.
Le vocabulaire des termes de la parenté varie d’une langue à l’autre et
dépend des différences culturelles. L’anglais distingue la famille proche
par sexe: mère, père ; sœur, frère; tante, oncle et autres. D’autres
langues, telles que le malais, font une distinction lexicale d'âge fonda-
mentalement, avec des mots séparés pour frère aîné ou soeur aîné, et
plus jeune frère ou plus jeune sœur. D’autres encore, comme celle des
indiens américains, utilisent des mots différents pour la sœur d'un
homme et pour la sœur d'une femme. Mais tout cela mis à part, toute
langue peut être aussi précise que le demande la situation dans la dési-
gnation de la parenté. Quand cela est nécessaire, les anglophones peu-
vent spécifier soeur aînée et cousin de la femme, et dans la catégorie
totale il est possible de distinguer entre les cousins proches et les loin-
tains.
Le meilleur exemple de précision d'une réserve lexicale se trouve dans
le champ de l'arithmétique. Dans ce domaine nous pouvons aller jus-
qu’à l’infini. Entre deux nombres entiers un nombre fractionnaire ou
décimal supplémentaire peut toujours être inséré, et cela peut aller
indéfiniment: entre 10 et 11, 10 1/2 (10.5), 10 1/4 (10.25), 10 1/8
(10.125), et ainsi de suite. Donc, le mathématicien ou le scientifique est
capable d'accomplir à volonté les degrés de précision quantitative ap-
propriés à ses objectifs; d'où l'importance de déclarations quantitatives
dans les sciences. Toute échelle thermométrique contient beaucoup
plus de distinctions de températures disponibles que dans le vocabu-
laire d'une langue, qui est de toutes les façons limité : brûlant, chaud,
tiède, froid…
Pour beaucoup d’objectifs de la vie ordinaire l'imprécision même des
langues est la source de leur force. Dans le domaine des mathématiques
apparaît l’usage idéal des différents besoins. Mais la capacité
d’adaptation qu’ont les langues à tout besoin réel est énorme.
48
Aide Mémoire
1. Le processus de communication: situation de communication
- La communication est un échange verbal.
- Les participants à la communication sont les « personnes » entre les-
quelles cette communication s’établit: le sujet parlant, l’interlocuteur
,les êtres ou objets du monde.
- Le transfert de cette information se fait au moyen d’un message qui a
reçu une certaine forme, qui a été codé. La première condition est donc
le codage de l’information.
1.1. Les éléments de la communication
Le schéma de la communication suppose la transmission d’un message
entre un émetteur et un récepteur possédant en commun le code né-
cessaire à la transcription du message.
Le code comprend des signaux spécifiques et un ensemble de règles
Le canal est le support physique de la transmission du message.
Le destinateur est à la fois la source du message et l’émetteur propre-
ment dit.
Le destinataire est à la fois l’appareil qui reçoit le message (oreille ou
récepteur-radio) et le destinataire proprement dit du message (cerveau
humain pour le langage parlé, auditeur pour la radio, etc.)
Le processus du décodage se fait au niveau du récepteur-destinataire
par la « recherche en mémoire » des éléments sélectionnés par
l’émetteur et constituant le message.
Le message est fait de traces et de signes.
Le processus de communication est un circuit où le sujet parlant génère
un concept. C’est donc au niveau du cerveau que se déroulent les opé-
rations d’encodage et de décodage, Le cerveau joue le rôle à la fois
d’émetteur et de récepteur du message.
La lecture est aussi un dialogue, un dialogue avec un texte.
Il y a souvent un grand écart entre le texte et le lecteur
1.2. Les fonctions du langage
A chaque facteur de la communication, Jakobson fait correspondre une
fonction du langage :
La fonction expressive est centrée sur le destinateur.
La fonction conative est centrée sur le destinataire.
49
La fonction référentielle est centré sur le référent
On peut découvrir dans les textes deux sortes de relations : les associa-
tives et les référentielles.
La fonction poétique est centrée sur le canal
La fonction métalinguistique retourne le langage vers le code.
La fonction poétique est centrée sur le message.
2. Les actes de langage
2.1. Définition : On appelle acte de langage l’acte qu’on accom-
plit en disant quelque chose, oralement ou par écrit.
On distingue généralement trois principaux registres de la langue: le
registre familier, le registre courant ou commun, le registre soutenu.
2.2. Les principaux types d’actes de langage
2.2.1. Les modalités d’énonciation : Un premier type
d’actes de langage apparaît dans les modalités d’énonciation de
la phrase : « déclarer », « demander », « ordonner » sont des
actes du langage. Ces actes renvoient à des situations précises.
2.2.2. Les performatifs : Ce terme désigne les verbes
qu’on emploie pour « faire » quelque chose.
2.2.3. Les comportements : Ce sont des actes de langage,
où le langage intervient, mais de manière moins codifiée.
2.2.4. Actes indirects et sous– entendus : Ce sont des
actes de langage avec complicité du locuteur.
2.2.5. L’ironie : L’ironie est un acte de langage avec com-
plicité du locuteur. Les principaux procédés de l’ironie sont: -
l’antiphrase et la litote; - la prétérition:
- l’ajout d’un commentaire inattendu, absurde. - le ton « ironique ».
2.3. Les registres de langue. Ce sont des manières d’utiliser le
langage.
2.3.1. Le registre soutenu : n’est jamais spontané.
2.3.2. Le registre familier : parole spontanée, employée
dans des situations de communication sans contraintes.
2.3.3. Le registre courant, commun : moins spontané que
le registre familier, mais il est plus spontané que le registre sou-
tenu.
50
2.3.4. Emplois dans les textes
- Le point de vue normatif les classe en registres corrects
et incorrects.
- Le point de vue descriptif les analyse comme des res-
sources de la langue.
3. La négociation du sens. L'objet et but du langage est de se revêtir de
sens.
L'étude du sens est probablement la plus difficile partie de l'étude sé-
rieuse de la langue.
3.1. La signification structurelle ou grammaticale : La significa-
tion de toute phrase comprend deux parties. L’écriture est libre des
restrictions de la durée de la mémoire. Toutes les langues peuvent em-
ployer des structures de la phrase différentes. Les langues utilisent leurs
propres ressources. Un mot ou une expression peuvent être mis en va-
leur. Les possibilités d'exprimer des significations structurelles sont une
des plus importantes possibilités de toutes les langues.
3.2. La signification lexicale : L'autre composant du sens de la
phrase est la signification du mot. C'est à travers les ressources lexi-
cales que les langues maintiennent la flexibilité. Les mots doivent assu-
mer les différents besoins présentés par la réalité. Les langues créent en
partie le monde que les hommes habitent. Les pronoms personnels
choisissent les personnes. D’autres significations des mots sont plus
bornés à la culture même du peuple.
3.3. La flexibilité sémantique :Non seulement les mots ont des
sens différents dans les différentes langues, mais nous pouvons dire
qu’il n’y a de signification fixe dans aucune langue.
- Les noms de couleurs obtiennent leurs significations de leurs con-
trastes mutuels.
- Le vocabulaire des termes de la parenté varie d’une langue à l’autre et
dépend des différences culturelles.
- Le meilleur exemple de précision d'une réserve lexicale se trouve dans
le champ de l'arithmétique.
- La capacité d’adaptation qu’ont les langues à tout besoin réel est
énorme.
51
Bibliographie
ACHARD, PIERRE, La Sociologie du langage, Paris, P.U.F., « Que sais-
je ? »,1993.
ARRIVÉ, MICHEL ET CHEVALIER, JEAN CLAUDE, la Grammaire, Paris,
Klincksieck, 1970.
BACHMAN, CHRISTIAN, LINDENFELD, JACQUELINE ET SIMONIN JACKY,
Langage et communications sociales, Paris, Hatier, 1981.
BALLY, CHARLES, Linguistique générale et linguistique française, Paris, E.
Leroux, 1932 ; 4ème éd. Berne, A. Francke, 1965.
BRONCKART, JEAN PAUL, Théories du langage, une introduction critique,
Bruxelles, Dessart et Mardaga, 1977.
CHOMSKY, NOAM, Réflexions sur le langage, par Judith Milner, Béatrice
Vautherin et Pierre Fiala, Paris, F. Maspero, 1977.
KLEIN, WOLFGANG, l’Acquisition de langue étrangère, Paris, A. Colin,
1989.
KURODA, S.-Y., Aux quatre coins de la linguistique, Paris, Éd. du Seuil,
1979.
MOULOUD, NOËL, Langage et Structures, Paris, Payot, 1969.
ROUDINESCO, ELISABETH, Initiation à la linguistique générale, Paris,
l’Expansion scientifique française, 1967.
SAUSSURE, FERDINAND DE, Cours de linguistique générale, Lausanne,
Payot, 1916, nouv. éd., 1972.
52
3
La compétence communicative
Sommaire
1. La compétence communicative
1.1. Le discours dans la situation de communication
1.2. La communication comme transmission d’une information
1.3. La communication comme compréhension et expérimentations
d’une situation
1.4. Les connaissances communes préalables
1.5. Le dialogue et la lecture
2. Analyse de ses composants.
2.1. Les principes de la communication linguistique: la théorie de
l’information.
2.2. Les compétences articulatoires: la phonétique.
2.2.1. Genèse des sons
2.2.2. Unités fonctionnelles de l’expression
2.2.3. Principales applications
2.3. Les compétences du vocabulaire: le lexicologie et la sémantique.
2.3.1. Le champ lexicologique
2.3.2. La sémantique
2.3.2.1. La sémantique structurale
2.3.2.2. L’analyse « componentielle »
2.3.3. Le vocabulaire du français
2.3.3.1. Le latin dans le lexique du français.
2.3.3.2. Les emprunts
53
2.4. Les compétences morphologiques et syntaxiques
2.4.1. La morphologie
2.4.2. La syntaxe
Introduction
Le comportement linguistique d’un locuteur est défini par un couple de
concepts: compétence, ou savoir linguistique du locuteur, et perfor-
mance, ou réalisation concrète de ce savoir linguistique dans des actes
de communication, qu’il s’agisse d’émission (le sujet fait des phrases) ou
de réception (le sujet comprend des phrases).
Si la compétence permet de produire des phrases selon un modèle de
grammaticalité et de déceler dans les phrases émises par les autres les
phrases agrammaticales, la performance consiste précisément à
émettre ces phrases et à les recevoir. C’est dire que, comme la parole
dans la terminologie saussurienne (par opposition à la langue), la per-
formance constitue les données observables du comportement linguis-
tique.
La tâche du linguiste est alors d’élaborer un modèle de la performance
linguistique, ce qui suppose qu’on cerne avec suffisamment de précision
la notion d’acceptabilité, qui est du domaine de la performance: qu’est-
ce qui fait qu’une phrase syntaxiquement bien formée est jugée accep-
table ou non acceptable par un locuteur? sa longueur?, le nombre trop
élevé d’enchâssements? Les réponses sont ici encore floues, car on ne
peut se contenter de critères internes à la phrase elle-même: ils peu-
vent également jouer des considérations extrinsèques, comme la nature
du message (oral, écrit), son support (journal, affiche publicitaire), etc.,
qui modifient la performance linguistique où sont en jeu à la fois locu-
teur et auditeur.
La prise en compte de la performance définit peut-être deux domaines
spécifiques de l’analyse linguistique: la psycholinguistique et la sociolin-
guistique. En ce sens, le parallèle entre performance et parole ne peut
être mené très loin car, si la parole permet de décrire la langue dans la
linguistique saussurienne, la grammaire générative essaie d’élaborer
pour compétence et performance deux modèles distincts. S’il est vrai
que l’une est déterminée par l’autre, elle l’est également par le con-
texte et par le locuteur, toutes choses qui, sans être niées, ne sont pas
aussi nettement spécifiées chez Saussure.
Langage et communication
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Langage et communication

  • 2. 2 Sommaire Introduction 1. Langage et communication 1.1. Les principes 1.2. Indice et langage 1.3. Signe et langage 2. Systèmes de communication linguistique et non linguistique 2.1. La sémiotique. 2.2. Caractères spécifiques du langage humain 2.2.1. Fonctions du langage 2.2.2. Spécificité du langage 2.2.3. La double articulation 2.3. Communication humaine 2.4. Communication non humaine 2.4.1. Les signaux visuels 2.4.2. Les signaux acoustiques 2.4.3. Les signaux chimiques 2.4.4. Les signaux tactiles Introduction Il s’agit dans ce thème de situer l’étude du langage dans une perspec- tive ample. Nous commençons par montrer comment le langage est relié avec d’autres moyens de communication sous le titre plus général de sémiotique. Nous revoyons les principales structures du langage hu- main et les comparons avec les propriétés que manifeste la communica- tion animale. Il semble qu’il existe peu d’aspects communs: il n’est pas possible de trouver la créativité et la complexité structurelle du langage
  • 3. 3 dans la conduite communicative naturelle d’autres espèces. Il existe aussi un contraste clair avec les divers domaines d’expression non ver- bale. Nous abordons des domaines comme l’expression faciale, les gestes corporels et la communication tactile, ainsi que quelques codes et substituts basés sur le langage utilisés dans le monde. Nous pouvons identifier plus facilement les frontières de la matière en voyant les res- semblances et les différences entre le langage et ces autres domaines. La perspective du développement de la linguistique est historique. Elle aborde l’apport d’idées systématiques sur la nature du langage propo- sées par les spécialistes de l’antiquité en Grèce, à Rome et en Inde, et insiste sur l’intérêt du langage au Moyen Age et à la Renaissance jus- qu’aux temps modernes. La période la plus rapide du développement a été le XXè siècle, où nous trouvons un progrès sans précédent du savoir linguistique. . Langage et communication 1.1. Les principes C’est dans le premier quart du XXe siècle qu’on commence à élaborer la théorie du langage et de la communication. Avant que l’accent soit dé- finitivement mis sur le langage comme système de communication la théorie expliquait en d’autres termes le pouvoir qu’ont les hommes d’inventer des systèmes de communication, d’utiliser certains phéno- mènes perceptibles (les signifiants ) pour évoquer, dénoter, signifier d’autres phénomènes non observables ici et maintenant (les signifiés). Cette théorie, même si elle n’en découle pas intégralement, devait beaucoup à Saussure qui le premier avait insisté sur la nécessité de re- placer la linguistique proprement dite –qui n’en est qu’une province – dans le vaste domaine de l’ensemble de tous les systèmes de signes (l’écriture, l’alphabet des sourds-muets, les rites symboliques, la poli- tesse, les signaux militaires, la mode, les signaux maritimes, etc.). C’est ce domaine qu’il nommait la sémiologie. Mais en définissant le langage comme tout système de signes (ou de
  • 4. 4 communication), la tradition saussurienne rétablissait l’indistinction entre langage proprement dit (systèmes de communication linguis- tiques) et sémiologie (systèmes de communication non linguistiques). 1.2. Indice et langage Un indice est un fait observable, qui renseigne l’observateur sur un autre fait non actuellement observable: la forme, la couleur, l’altitude et la direction des nuages peuvent être un indice du temps qu’il va faire. Les signes sont une classe d’indices produits artificiellement par un émetteur pour communiquer à un récepteur des états non observables, les significations des énoncés qu’il émet. Pour un sémiologue, les traces du pied d’un gibier sur le sol détrempé ne sont pas des signes mais des indices, exactement comme la fièvre, qui n’a pas été produite par l’organisme pour communiquer avec le médecin, ni même avec le ma- lade. Et, jusqu’à nouvel ordre, les rêves d’un patient sont des indices que le psychiatre doit interpréter par le moyen d’une analyse scienti- fique très différente de l’analyse linguistique: le patient ne les a pas produits pour communiquer avec le psychiatre, ni sans doute avec lui- même (jusqu’à preuve scientifique du contraire). Par ces exemples mêmes, on s’aperçoit combien la limite entre indice et signe, au sens opératoire des termes, s’est trouvée oblitérée par une très vieille syno- nymie. C’est ainsi qu’un bon linguiste, Giulio Bertoni, a pu dire (Enciclo- pedia Treccani, 1938) que le rire est un langage, que les larmes sont un langage, sans être cependant tenté de leur appliquer des méthodes d’analyse linguistique dans un traité de linguistique. John Dewey, antérieurement, allait même plus loin: pour lui, toute trace laissée par les hommes était un signe et tout fait anthropolo- gique devenait langage, non seulement les gestes, les rites, les cérémo- nies (qui sont peut-être des systèmes de communication autres que les langues), mais aussi les monuments, les produits des arts industriels, dont il est certain qu’une civilisation ne les a pas produits, d’abord et fondamentalement, pour communiquer avec les ethnologues ou les archéologues qui viendront peut-être un jour les exhumer et les inter- préter du dehors. Toute une branche de la sémiologie naissante court le risque de confondre, sous le nom de sémiologie de la signification, l’interprétation des indices avec la lecture des signes, qui serait la sé- miologie de la communication proprement dite, pour laquelle le pre-
  • 5. 5 mier problème est toujours d’établir scientifiquement qu’il y a intention de communication au sens propre. Le risque épistémologique est ici de postuler à priori que les modèles qui ont été mis au point et vérifiés dans la communication – la plupart du temps linguistique – sont appli- cables ipso facto à des domaines pour lesquels il n’y a pas communica- tion, ou pour lesquels on n’a pas établi s’il y a communication ou non, ni le cas échéant si la nature de la communication est de même type qu’en linguistique. 1.3. Signe et langage Pour des linguistes de la première moitié du XXè siècle tous les signes produits par les humains sont des langages ( « tous les organes peu- vent servir à créer un langage » Vendryes, « les gestes sont un lan- gage » Bertoni,). Pourquoi la linguistique, qui est l’étude scientifique du langage, n’étudie-t-elle pas tous ces langages? Jespersen admet qu’il existe des « moyens de communication ani- maux », mais, tout en posant qu’ils diffèrent des langages humains, il ne fournit aucun critère scientifique pour l’analyse spécifique de ces divers « systèmes de signes ». Il se borne à déclarer que, « dans sa forme dé- veloppée, le langage est à coup sûr une caractéristique humaine, et peut être considéré comme la principale marque de l’humanité ». Lorsque Morris, en 1946, aborde le même problème, il ne le résout pas mieux. « Il est évident, écrit-il, que les processus signifiants chez les hommes présupposent des processus signifiants comme il en advient chez les animaux, et qu’ils se développent à partir de tels processus; mais il est évident aussi que la conduite humaine montre dans le lan- gage une complication étonnante, un raffinement sans commune me- sure avec ce qu’on observe chez les animaux. » Colin Cherry, (1957), conclut sans autres critères que « l’homme a seul le don du langage » et que les animaux n’ont pas de langage parce qu’ils n’ont pas de « système de pensée organisée ». Le langage des abeilles n’est ni développable, ni flexible, ni universel. Si tout le monde postule, ou pressent, que le langage humain produit des systèmes de signes si spécifiquement différents de tous les autres qu’ils suffisent à distinguer l’espèce humaine de toutes les autres es- pèces animales, il faut ici, de toute nécessité, fournir les critères scienti-
  • 6. 6 fiques de cette spécificité. 2. Systèmes de communication linguistique et non linguistique. 2.1. La sémiotique. La sémiotique reprend le projet de sémiologie de Saussure et s’assigne pour objet l’étude de la vie des signes au sein de la vie sociale. A la différence cependant de la sémiologie issue de l’enseignement de Saus- sure, elle refuse de privilégier le langage et la société. La sémiotique veut être une théorie générale des modes de signifier. SÉMIOTIQUE      Auditif - vocal Visuel Facile Olfactif Gustatif           Langage Reflets Effets Qualité Langage Écriture Cinétique Langage Code Proxénétique vocales musicaux de la voix des symboles des sourds secret physiologiques  et aveugles Codes -------------------------------------------------------- « langage corporel » (communication non verbale) 2.2. Caractères spécifiques du langage humain C’est dans ce très vaste domaine que devrait être situé le langage tel qu’il est représenté en tant que système de communication au moyen des langues naturelles humaines. La tradition aristotélicienne, aussi
  • 7. 7 bien que la plupart des définitions du deuxième quart du XXe siècle, suggérait de définir le langage autant par son but (soit l’expression de la pensée, soit la communication) que par son moyen (un système de signes). 2.2.1. Fonctions du langage Cette suggestion a été exploitée par Roman Jakobson et ses fonctions du langage. Jakobson a postulé qu’il existait six fonctions du langage, dont chacune correspondrait à un des facteurs de l’acte de communica- tion linguistique: émetteur ou personne qui parle, récepteur ou personne qui écoute, canal ou voie de transmission code ou règles connus par émetteur et récepteur message ou contenu de l’information référent ou réalité non linguistique à laquelle renvoie le message. * La fonction expressive ou émotive y ajouterait tout ce que l’émetteur met de lui-même dans son message, à travers son message, et en plus de la signification référentielle de ce message. * La fonction appellative ou conative viserait surtout à multiplier les moyens d’action de l’émetteur et du message sur le récepteur. * La fonction phatique aurait pour objet de s’assurer que le canal est libre (« Allô ! Vous m’entendez ? »). * La fonction métalinguistique consisterait à utiliser le langage pour parler du code (« Napoléon est un nom propre »). * Enfin, la fonction poétique serait essentiellement centrée sur l’élaboration formelle du message en tant que tel. * La fonction référentielle serait donc centrée sur la mise en relief du référent. Il n’est pas difficile d’apercevoir que cette admirable symétrie des fac-
  • 8. 8 teurs et des fonctions risque d’être un artifice de présentation com- mode pour certains faits, car il est impossible de trouver des critères proprement linguistiques pour différencier ces diverses fonctions. Par exemple, « l’élément argon est un gaz rare » et « le mot suzée est un substantif archaïque » sont deux énoncés de structure linguistique ri- goureusement semblables, bien que le premier puisse être assigné à la fonction référentielle et le second à la fonction métalinguistique. De plus, ces fonctions pourraient être retrouvées dans beaucoup de sys- tèmes de communication non linguistiques et ne sont donc pas spéci- fiques des langues naturelles. On préférera, avec Denise et Frédéric François, parler d’une fonction centrale et primaire de communication toujours présente, dans tous les énoncés, opposée à des fonctions se- condaires ou, mieux encore, à des usages et à des effets très divers de ces mêmes énoncés (tout ce que Ludwig Wittgenstein appelait des « jeux de langage »: appeler, commander, prier, crier, mentir, jouer une pièce, lire un texte à voix haute, convaincre, séduire, émouvoir, ef- frayer, décrire, raconter, supposer, interroger, nier, poser des devi- nettes, faire un calembour: il avait raison, il y a là autant de « fonc- tions » du langage). 2.2.2. Spécificité du langage C’est à Saussure qu’il faut remonter pour appréhender la bonne mé- thode d’analyse de la spécificité du langage, bien qu’il ne l’ait pas pous- sée à son terme. En opposant la linguistique à la sémiologie, c’est-à-dire le langage à tous les autres systèmes de signes, il attirait l’attention sur ce fait que l’établissement de la communication n’est pas le trait spéci- fiquement distinctif du langage humain, puisqu’il partage ce trait avec tous les autres moyens ou systèmes de communication. Par contre, il insistait sur un autre caractère des unités linguistiques, qu’il appelait l’arbitraire du signe (le fait qu’il n’y ait aucune obligation naturelle d’appeler une pomme « pomme »; il est, en effet, possible de l’appeler manzana, apple, Apfel, mela, jabloko, etc.). Mais il n’en faisait pas le caractère propre du langage humain. De fait, beaucoup d’autres sys- tèmes de communication: code de la route, cartes routières, codes fer- roviaires ou maritimes, etc., utilisent des signes arbitraires. Le fait que les messages linguistiques soient linéaires, c’est-à-dire se déroulent sur la trame du temps, leur donne des propriétés importantes, qui les dis-
  • 9. 9 tinguent des systèmes où les unités s’organisent dans l’espace (repré- sentations graphiques, dessin, cartographie, peinture, etc.). Mais ce fait ne leur est pas propre: d’autres systèmes déroulent leurs messages de la même façon dans le temps (musique, cinéma au moins partielle- ment). Saussure avait aussi mis en évidence le caractère discret des signes linguistiques, le fait qu’ils signifient par oui ou non, tout ou rien; le signe mouton signifie « mouton » d’abord, par différence avec tous les autres signes qui pourraient figurer à sa place; il ne peut jamais (comme dans un système constitué par la représentation de grandeurs continues) signifier « plus ou moins mouton », selon l’intonation par exemple. Mais beaucoup d’autres systèmes fonctionnent au moyen d’unités discrètes, ainsi le code de la route, les feux de position, etc. Le fait que les unités linguistiques soient combinables selon des règles et forment système n’est pas spécifique non plus: tous les systèmes de communication présentent ce caractère. 2.2.3. La double articulation Grâce à une analyse de L. T. Hjelmslev, déjà suggérée par Ferdinand de Saussure et définitivement mise au point par André Martinet, le trait qui distingue spécifiquement le langage conçu comme l’ensemble des langues naturelles des hommes s’est révélé dans ce qu’on nomme sa double articulation . On entend par là que les langues naturelles humaines paraissent être les seuls codes construits sur une codification systématique à deux étages. Les messages y sont construits par des suites d’unités minimales dites significatives (ou monèmes; ou morphèmes dans la terminologie anglo- saxonne), unités à deux faces, une face signifiante et une face signifiée. Le train file vite contient quatre de ces unités, quand on néglige quelques subtilités dans l’analyse de file. Grâce à cette première articu- lation, le nombre des messages possibles est infiniment plus grand que si chaque message devait posséder un signifiant totalement distinct. Ces unités, à leur tour, sont construites au moyen d’unités plus petites, non signifiantes mais distinctives, les phonèmes. Le mot file en contient trois: [f, i, l]. Ces unités de deuxième articulation, toujours en petit nombre dans une langue – entre vingt et cinquante –, permettent de construire des milliers de monèmes différents d’une façon plus écono-
  • 10. 10 mique que si chaque monème (comme dans une écriture idéogra- phique) devait disposer d’un signifiant totalement distinct de tous les autres. La double articulation rend certainement compte en grande partie, sinon en totalité, de cette propriété si mystérieuse des langues hu- maines, toujours aperçue, jamais techniquement expliquée: l’extraordinaire quantité de messages possibles, au moyen d’une double économie dans la structuration par rapport à ce que peuvent tous les autres systèmes de communication. Qu’on prenne le code des abeilles, ou celui de la route, ou celui des symboles des mathématiques, on trouve toujours des messages dé- composables en unités significatives, qui ne sont pas décomposables à leur tour en unités minimales distinctives successives, comparables, dans leur fonctionnement, aux phonèmes. Il serait antiscientifique de s’endormir sur cette sécurité que la double articulation rend définitivement compte de la spécificité du langage opposé à tous les autres systèmes de communication. Toutefois, il n’est pas outrecuidant d’écarter la solution – qu’on n’oppose générale- ment pas à la double articulation, mais qui s’y oppose en fait – qui con- siste à parler plutôt de niveaux d’analyse du langage: niveaux des traits pertinents (labialité, surdité, nasalité d’un phonème, etc.), niveau des phonèmes, niveau des monèmes, niveau des syntagmes (ou combinai- sons plus ou moins dissociables de monèmes), niveau des propositions, niveau de la phrase. Cette description des structures du message abou- tit à effacer la signification théorique fondamentale de la double éco- nomie réalisée par les deux articulations en unités non signifiantes et en unités signifiantes. 2.3. Communication humaine Une façon d’envisager le langage, utilisée par la plupart des linguistes modernes, consiste à identifier les différentes propriétés considérées comme étant les caractéristiques essentielles. Il s’agit de déterminer ce qui « compte » comme langage humain, en opposition avec un autre système de communication. On a eu recours à deux sortes d’investigation. L’une est centrée sur l’identification des propriétés structurelles universelles du langage. L’autre consiste à opposer le lan- gage à des formes non humaines de communication et à d’autres
  • 11. 11 formes de communication humaine. Le point de vue comparatif qui a obtenu le plus de succès est celui qui a été proposé par le linguiste américain Charles Ohckett, qui employa un modèle d’investigation zoologique pour identifier les principaux points de liaison entre le langage et d’autres systèmes de communica- tion, spécialement chez les animaux. Son ensemble de treize structures de la communication qu’emploie le langage parlé est le suivant: - Canal auditif-vocal. On emploie le son pour combler la distance entre la bouche et l’oreille, en opposition à un moyen visuel, du toucher ou d’un autre genre. - Transmission émise et réception directionnelle. N’importe quel sys- tème auditif peut entendre un signal à sa portée et il est possible de localiser la source au moyen de la capacité auditive pour localiser des sons. - Evanouissement rapide. Les signaux auditifs sont transitoires et n’attendent pas que le récepteur soit disposé à les entendre (à la diffé- rence des traces d’un animal ou de l’écriture). - Interchangeables. Les utilisateurs d’une langue peuvent reproduire n’importe quel message linguistique qu’il peuvent comprendre (à la différence des divers comportements de la cour de mâles et de femelles dans plusieurs espèces). - Rétroalimentation totale. Les utilisateurs d’une langue entendent tout ce qu’ils disent et peuvent y réfléchir (à la différence des exhibitions visuelles que les animaux réalisent souvent pendant leur cour et qui ne sont pas visibles pour eux). - Spécialisation. Les ondes sonores du langage parlé n’ont d’autre fonc- tion que de signaler le sens (à la différence du halètement audible des chiens qui n’a qu’un propos biologique). - Sémanticité. Les éléments du signal transmettent le sens par leur as- sociation stable avec des situations du monde réel (à la différence du halètement des chiens, qui ne « signifie » pas qu’un chien ait chaud mais qu’il en « fait partie »). - Procédé arbitraire. Les éléments du signal ne dépendent pas de la na- ture de la réalité à laquelle ils se réfèrent (à la différence de la vitesse de la « danse » de l’abeille, qui reflète directement la distance du nectar depuis la ruche). - Eléments discrets. Le langage parlé utilise un petit ensemble d’éléments de son qui contrastent clairement entre eux (à la différence
  • 12. 12 des grognements et autres bruits émotionnels dont la force varie selon des échelles continues). - Déplacements. Il est possible de parler d’événements lointains dans l’espace et dans le temps par rapport à la situation de celui qui parle (à la différence des cris de la plupart des animaux, qui reflètent les stimu- lations de l’entourage immédiat). - Productivité. Il existe une capacité infinie pour exprimer et com- prendre le sens en employant des éléments connus de phrases pour en produire de nouvelles (à la différence de l’ensemble limité et fixe d’appels employés par les animaux). - Transmission par tradition. Le langage se transmet d’une génération à la suivante fondamentalement au moyen d’un processus d’enseignement et d’apprentissage (à la différence de la capacité des abeilles pour communiquer le lieu où se trouve le nectar, qui se trans- met de manière génétique). - Double organisation. Les sons du langage n’ont pas de sens intrin- sèque, ils se combinent de manière différente pour former des élé- ments (comme des mots) qui transmettent un sens (à la différence des appels animaux, qui ne peuvent s’analyser à deux nivaux de structures similaires). 2.4. Communication non humaine Entre 1930 et 1960, les éthologistes objectivistes, sous l’influence pré- dominante de K. Lorenz et de N. Tinbergen identifiaient, pour chaque espèce, un répertoire de stimulations qui, agissant comme des si- gnaux, déclenchaient des modifications spécifiques du comportement des individus receveurs. Le « releaser » (en allemand: « Auslöser ») était défini par K. Lorenz comme la stimulation qui déclenche chez les individus de la même espèce un comportement de forme invariable ou peu variable (« fixed action pattern »), au moins lorsque ces individus sont dans un état physiologique approprié. Le comportement déclenché peut lui-même constituer un « releaser » pour l’émetteur, et ainsi de suite, à l’exemple de la parade sexuelle (ou pariade) qui, chez les oi- seaux, apparaît comme une alternance d’orientations corporelles, de postures, de déplacements, de vocalisations, parfois de touchers, entre le mâle et la femelle. Chaque stimulation de forme invariable ou peu variable fut considérée
  • 13. 13 comme un signal agissant électivement sur un mécanisme génétique- ment programmé dans le système nerveux du receveur (l’I.R.M.: « In- nate Releasing Mechanism »). L’échange d’informations entre deux individus de la même espèce, au- trement dit la communication, a reposé pendant longtemps sur de tels concepts. Dans ce cadre déterministe, les chercheurs ont notamment pour objectif d’isoler des éléments de comportement qui, ayant valeur de signaux spécifiques, permettent une reconnaissance spécifique entre mâle et femelle, et constituent ainsi des barrières de reproduction. Con- sidérés comme génétiquement programmés, de tels signaux sont tenus comme des caractères taxinomiques, au même titre que les caractères de morphologie, d’anatomie et de physiologie. Cela permet de préciser la position systématique de chaque espèce et le degré d’apparentement des espèces. Les signaux spécifiques peuvent être analysés sous cet angle, mais leur structure et leur organisation séquentielle doivent être précisées, en même temps que leurs fonctions doivent être nuancées et élargies à d’autres domaines que celui de la reproduction, à la lumière des études éthologiques plus récentes, comme le montrent bien les études sur les Primates. 2.4.1. Les signaux visuels Outre les études sur le rôle des couleurs (plumage, taches colorées, livrée nuptiale, etc.), des caractères morphologiques (bois du cerf, crête de la poule, etc.), des postures (tête et corps tendus, posture accroupie, etc.) et des mouvements (gonflement des plumes, mimiques faciales, etc.) dans la communication animale, les recherches sur les échanges lumineux des lucioles permettront de cerner les caractéristiques et les fonctions des signaux visuels dans les comportements de reproduction. Chez les lucioles, la durée de chaque émission et/ou l’intervalle de temps entre l’émission mâle et l’émission femelle sont caractéristiques de chaque espèce. Ainsi, le mâle de Photinus pyralis émet-il toutes les 5,8 secondes un éclair auquel une femelle proche répond environ 2 se- condes plus tard (de 1,6 à 2,4 secondes plus tard, selon la température ambiante). C’est cet intervalle de temps entre l’émission femelle et l’émission mâle qui est significatif: le mâle répond par une émission lu- mineuse à tout éclair expérimental qui survient deux secondes environ
  • 14. 14 après sa dernière émission. La comparaison des émissions lumineuses produites par des espèces de lucioles sympatriques (habitant les mêmes lieux géographiques) a permis de montrer que la confusion entre es- pèces différentes, au moment de la reproduction, est évitée par le fait que chaque espèce possède son code temporel d’échanges lumineux. Un mode de communication aussi strict constitue une barrière de re- production entre les différentes espèces qui ont colonisé le même mi- lieu. Chez d’autres espèces, les mâles isolés augmentent la luminosités de leurs éclairs à mesure qu’ils se rapprochent d’un rassemblement de mâles et synchronisent leurs éclairs avec ceux des autres mâles. C’est la synchronisation des éclairs qui attire électivement les femelles de la même espèce. Cet exemple montre que l’étude des systèmes de com- munication doit aussi souvent prendre en compte les émissions de toute une population, et pas seulement d’un émetteur et d’un receveur particuliers. Les signaux visuels peuvent jouer un rôle dans d’autres comporte- ments: défense du territoire, comportements agonistiques (ensemble des comportements qui interviennent dans un conflit), comportements parentaux, reconnaissance individuelle… 2.4.2. Les signaux acoustiques Tout comme pour les signaux visuels, on sait depuis longtemps que les signaux acoustiques (cris, chants, grognements, aboiements, tambou- rinements, frottements de zones corporelles sur le substrat, etc.) jouent un rôle essentiel dans l’attraction spécifique du partenaire sexuel, puis dans les comportements de cour et d’accouplement. Cependant, si les signaux acoustiques ont des caractéristiques propres à chaque espèce, ils peuvent aussi être influencés par les facteurs d’environnement. C’est le cas du chant d’appel sexuel de certaines espèces de grillons dans sa fréquence des « pulses », qui sont des unités sonores qui com- posent le chant, non reconnaissables par l’oreille humaine. Ceux-ci sont synchronisés de telle façon que les femelles appartenant à l’une des espèces sympatriques de grillons lorsqu’elles se trouvent à la même température ambiante ne peuvent être trompées par des chants d’appel sexuel de mâles d’une autre espèce.
  • 15. 15 Cependant, le paramètre qui rend le signal spécifique n’est pas toujours la fréquence des pulses. En effet, l’étude comparative et systématique des espèces de grillons, sauterelles et autres insectes qui stridulent ou chantent, montre que l’élément significatif du chant du mâle pour la femelle peut être, selon les espèces, le caractère discontinu du chant (bouffées sonores séparées par des pauses de durée plus ou moins longue), la durée des périodes chantées par rapport à la durée des pé- riodes de silence, l’intervalle entre la fin de l’émission mâle et le début de l’émission femelle, la fréquence des sons élémentaires (les «pulses») qui composent les phrases sonores successives, etc. Chaque espèce apparaît ainsi comme unique. En dehors des insectes chanteurs et des mammifères de quelques es- pèces de poissons et de batraciens, les études les plus précises et sys- tématiques sur les communications acoustiques ont trait aux oiseaux. Les éthologistes ont ouvert la voie à des analyses très élaborées de la structure et des fonctions des signaux acoustiques. En plus du sono- graphe qui permet de visualiser le spectre de fréquences et l’intensité d’un cri ou d’un chant, et de quantifier la durée des éléments sonores, des motifs, des intervalles de temps entre les motifs, etc., les cher- cheurs disposent d’appareils qui leur permettent de découper, recom- biner et/ou synthétiser les éléments sonores successifs. Ils peuvent ainsi identifier de plus en plus finement les paramètres qui permettent à un oiseau de reconnaître ceux de la même espèce (chant spécifique), et du même groupe géographique (dialecte), l’identité et les motivations des autres individus du même groupe spécifique. L’un des chants les plus étudiés est le chant de proclamation territo- riale . Les paramètres qui en assurent la reconnaissance spécifique va- rient d’une espèce à l’autre. Par exemple, J. C. Brémond montre que, chez le Pouillot siffleur (Phyl- loscopus sibilatrix ), la forme des éléments du chant de proclamation territoriale paraît être le paramètre essentiel dans la reconnaissance spécifique de ce chant. C’est la gamme de fréquences qui assure la re- connaissance spécifique du chant de proclamation territoriale. Il peut y avoir aussi une modulation descendante, puis ascendante. L’expérience a été prouvée en observant la réaction vive lorsqu’on leur fait entendre le chant non modifié des oiseaux de la même espèce en l’absence de
  • 16. 16 tout signal visuel. Par contre, la durée du chant et la gamme de fré- quences ne jouent pas un rôle important. Mais aucune règle générale ne se dégage quant aux capacités d’apprentissage des individus pour le chant d’une autre espèce ou le chant d’autres individus de la même espèce. Chez certaines espèces, comme le passereau « Swamp sparrow », le chant est peu variable d’un individu à l’autre; les prédispositions à l’apprentissage sont limitées à une gamme étroite de motifs: élevés dans l’isolement acoustique, ces oiseaux n’apprennent ensuite que les motifs de leur espèce, à l’exclusion de tout autre motif, même lorsque celui-ci provient de l’une des espèces les plus proches, telles que le « Song sparrow » Il s’agit donc là apparemment d’un bon modèle génétique où le chant peut constituer un caractère taxinomique utile. Une telle espèce peut aussi être précieuse pour le neurophysiologiste qui recherche les struc- tures nerveuses et les mécanismes physiologiques impliqués dans l’émission d’un chant spécifique de structure invariable ou peu variable. Cependant d’autres modèles existent. Par exemple, W. H. Thorpe a montré que, chez le pinson Fringilla coelebs, le chant d’appel du mâle, à partir du printemps qui suit l’année de naissance, présente deux types de particularités: d’une part, des notes spécifiques, émises même lorsque l’oiseau a été élevé dans l’isolement acoustique par rapport à ses congé- nères; d’autre part, des phrases et arrangements de phrases qui reflètent à la fois un apprentissage du chant des congénères et un auto-apprentissage (pour que le pinson émette complètement le même type de chant que ses congénères élevés naturellement, au cours du printemps qui suit l’année de naissance, il est impor- tant qu’il se soit entendu chanter au cours de son premier au- tomne, alors que son chant d’automne, « rambling song », ne pa- raît pas avoir de structure). Cependant, comme chez de nom- breuses espèces, le pinson n’apprend pas n’importe quels chants mais seulement ceux de son espèce et ceux de quelques rares es- pèces, phylogénétiquement proches de la sienne. L’un des objectifs des éthologistes est la recherche de phénomènes de reconnaissance acoustique, au sein d’une espèce donnée, des individus
  • 17. 17 appartenant à la même zone géographique (recherche des dialectes) et des individus en tant que tels. Prenons un exemple à partir des études de M. Kreutzer sur le Bruant zizi Emberiza circlus . Analysant 3.200 chants émis par 89 oiseaux dans quatre localités différentes. M. Kreutzer distingue au total 5 familles de motifs (chaque motif comporte le plus sou- vent un élément acoustique, ou note, parfois deux éléments). Lorsque, pour chaque localité, il étudie les différentes combinai- sons possibles de familles de motifs, prises deux à deux dans les chants enregistrés, M. Kreutzer conclut que les familles de motifs se répartissent au hasard, quelle que soit l’origine géographique des individus. Il n’observe pas davantage de différences, d’une localité à l’autre, dans la gamme de fréquences et la durée des motifs. Au terme de son étude, M. Kreutzer conclut donc que la structure et la durée des motifs, ainsi que la gamme de fréquences sont des para- mètres hautement spécifiques, qui ne changent pas avec la région habi- tée par les oiseaux. Une telle conclusion paraît exclure l’existence de dialectes chez le Bruant zizi. Mais une analyse quantitative plus précise permet de montrer que le nombre total de motifs et les types de motifs les plus utilisés dans un chant varient d’une localité à l’autre. Chaque localité se caractérise ainsi par des chants qui lui sont propres, en raison des combinaisons particulières qui résultent des motifs les plus utilisés et du nombre total de motifs, et par des chants qu’elle a en commun avec les autres locali- tés, en raison des paramètres spécifiques du chant. En même temps, si les mêmes types de chant peuvent être entendus dans des localités dif- férentes, c’est avec des fréquences différentes. C’est par conséquent parce que certains chants sont émis fréquemment par le plus grand nombre d’individus dans une localité donnée, alors qu’ils sont présentés plus rarement et seulement par un petit nombre d’individus dans les localités voisines, que les Bruants zizi de la localité pourraient reconnaître leur appartenance à la même zone géogra- phique. La notion de dialecte apparaît ainsi comme subtile et nuancée chez les passereaux et, de façon plus générale, chez les oiseaux. Parallè- lement, le problème de la reconnaissance individuelle reste posé, au moins chez les espèces qui ne vivent pas en groupe ou en colonie.
  • 18. 18 Les données sont plus claires chez les oiseaux coloniaux comme les mouettes ou les Sphéniscidés (ou Manchots). Prenons l’exemple des manchots étudiés notamment par P. Jouventin dans l’Antarctique. Chez le Manchot Adélie, la re- connaissance mutuelle entre conjoints, fidèles l’un à l’autre tout au long du cycle reproducteur, repose surtout sur le chant de pa- rade émis par l’individu qui revient au nid. Si les chants successifs d’un mâle présentent une bonne constance dans leur structure, ils sont très différents d’un mâle à l’autre, ce qui permet évi- demment une reconnaissance de chacun au sein de la colonie, notamment par le conjoint. Chez cette espèce qui construit un nid, le poussin ne s’émancipe que vers le 22e jour après l’éclosion. Il émet alors des chants dont la structure ne se modifie ensuite que très peu. Quittant le nid et les parents, il possède une identité acoustique qui lui permet d’être reconnu au sein de la co- lonie, alors que son chant était auparavant très variable, no- tamment au cours des 10 premiers jours. Chez le Manchot Empereur aussi, le chant de cour constitue le principal support de la reconnaissance individuelle. Le découpage temporel des motifs et des séries de motifs est remarquablement fixe chez le même oiseau d’une année à l’autre. Par suite, la variabilité du chant de chaque manchot empereur est faible, comparée à celle des différents individus d’une même communauté. En effet, ces oiseaux se groupent par milliers et forment des co- lonies très denses sur la banquise antarctique. Il est essentiel qu’en l’absence de « référent » spatial particulier (l’espèce ne construit pas de nid), les conjoints puissent s’identifier sans am- biguïté après qu’il se sont quittés, par exemple pour chercher de la nourriture pour la famille. Dans ces populations, le poussin conserve le même type de chant, de l’éclosion au départ en mer. Non protégé par un nid et pouvant quitter « accidentellement » les replis de la « fourrure » parentale, il peut ainsi être identifié à tout moment par ses parents. Le découpage temporel du chant en motifs, qui donne le rythme, est le paramètre essentiel qui permet la reconnaissance du poussin.
  • 19. 19 Outre les chants de proclamation territoriale et de parade, de recon- naissance du groupe géographique, de reconnaissance individuelle et de relations entre le jeune et son ou ses parents, les signaux acoustiques jouent un rôle important dans les comportements agonistiques. Par exemple, chez le rouge-gorge Erithacus rubecula, le mâle modifie son chant de proclamation territoriale dès qu’un intrus pénètre dans la zone dont il est propriétaire: il chante de façon plus assourdie, augmente l’énergie acoustique dans les plus hautes fréquences ainsi que le nombre de notes par unité de temps et la durée totale du chant. Le rouge-gorge peut graduer ces modifications et informer ainsi l’intrus de son niveau d’agressivité. Dans la même situation, la grive Turdus philomelos alterne des frag- ments de chant assourdi et le chant normal. Le taux de chant modifié indique « l’humeur » de l’oiseau: plus le taux est augmenté, plus la tendance à passer à l’agression augmente. Chez le Troglodytes troglodytes, le propriétaire d’un territoire diminue l’intervalle de temps entre les chants lorsque sa tendance à passer à l’agression augmente. De façon plus générale, les oiseaux peuvent transmettre par des si- gnaux acoustiques des informations précises sur leur état émotionnel. Comme l’ont montré les éthologistes objectivistes les signaux visuels (crête de poule plus ou moins érigée; plumes de dindon plus ou moins gonflées; etc.) peuvent alors renforcer, compenser ou remplacer les signaux acoustiques. Parmi les autres signaux acoustiques des oiseaux, citons les cris de dé- tresse, notamment ceux des jeunes poussins de la poule domestique, les gazouillis de sécurité ou de confort de ces mêmes poussins, les cris de contact des oiseaux de basse-cour, les cris d’alarme... Cependant, on ne connaît pas précisément les paramètres qui, dans chacun des cris ou chants, véhiculent l’information de détresse, de sécurité ou de confort, de maintien du contact avec les jeunes lors- qu’ils sont émis par les parents, etc. Des études plus profondes visant à synthétiser les sons spécifiques et à les émettre à des individus de l’espèce étudiée dans des conditions contrôlée doivent servir pour cer- ner la part qui revient à l’intensité acoustique, à la gamme de fré- quences, au rythme d’émission de tel ou tel motif dans la transmission des informations au cours des diverses situations vécues par l’oiseau,
  • 20. 20 que celui-ci soit émetteur ou receveur. 2.4.3. Les signaux chimiques C’est probablement l’étude des communications chimiques qui a le plus progressé au cours des dernières décennies. Quatre types de re- cherches lui ont donné une impulsion décisive: – Les recherches sur l’appel sexuel de la femelle du Bombyx du mûrier et l’isolement de la molécule qui véhicule l’information: il s’agit d’un alcool sécrété par les glandes abdominales, logiquement appelé le bombykol. Ainsi se trouvait identifiée la première phéromone . On peut la définir comme une stimulation chimique qui, véhiculant une informa- tion sur l’état physiologique et/ou psychologique d’un individu, entraîne des modifications significatives et prévisibles du comportement et par- fois de la physiologie du receveur. – Les recherches sur l’influence des sécrétions des glandes mandibu- laires de la reine d’abeilles sur le comportement et la physiologie des ouvrières. La phéromone royale entraîne la formation d’une cour d’ouvrières autour de la reine, l’inhibition de la construction d’alvéoles royaux par les ouvrières (c’est dans ces alvéoles que sont élevées les larves qui se développent en reine après avoir reçu une nourriture par- ticulière), l’attraction des mâles au cours du vol nuptial de la reine, pen- dant lequel elle est fécondée, l’attraction des ouvrières au cours de l’essaimage et l’inhibition du développement ovarien des ouvrières. Le cadavre d’une reine suffit le plus souvent à provoquer la plupart de ces effets. – Les recherches sur les caractéristiques et les fonctions de la piste déposée par les fourmis Solenopsis saevissima qui ont découvert une source de nourriture. La piste est formée à partir des sécrétions d’une glande abdominale. Utilisant la théorie de l’information on a pu calculer la quantité d’informations contenues dans une telle piste. – Les recherches qui ont montré que, chez les mammifères, la re- cherche du partenaire sexuel et l’ensemble des phénomènes de la re- production sont étroitement liés à des stimulations chimiques spéci- fiques. Ainsi, l’effet Lee-Boot (Van der Lee et L. M. Boot) se produit entre femelles de souris: mises ensemble, celles-ci présentent un arrêt de leur cycle estrien en allongeant leur phase d’anoestrus (phase pen- dant laquelle les ovulations ne se produisent pas et les femelles ne sont
  • 21. 21 pas sexuellement réceptives); ce sont des stimulations olfactives spéci- fiques qui sont à l’origine de cet effet. * L’effet Whitten (W. K. Whitten) rend compte de l’influence des souris mâles sur le déclenchement de l’œstrus des femelles et, par suite, de la synchronisation des cycles estriens de celles- ci; la seule odeur de l’urine de mâle suffit à provoquer cet effet chez les femelles vierges (H. M. Marsden et F. H. Bronson). * L’effet Bruce (H. M. Bruce): l’odeur d’une souris mâle, pré- sente par exemple dans la litière souillée par un mâle, provoque un blocage de gestation chez une femelle fécondée par un autre mâle; la femelle revient en œstrus 3 à 4 jours après avoir été ex- posée à l’odeur du 2e mâle. On trouve dans ces recherches de pionnier les deux fonctions essen- tielles des phéromones: la transmission d’un signal et l’induction de phénomènes neuro-endocriniens et endocriniens. Depuis les années 1960, les recherches ont donné de nombreux exemples de ces deux fonctions, souvent indissociables, surtout chez les insectes et les mam- mifères. Elles ont fait faire des progrès importants à de nombreux sec- teurs de la biologie, sur le plan fondamental comme sur celui des appli- cations. 2.4.4. Les signaux tactiles Les communications tactiles sont, le plus souvent, étudiées de façon anecdotique, même lorsqu’on leur reconnaît un rôle important dans les comportements sociaux, comme chez les primates. Pourtant, on sait que, chez les guêpes sociales d’Europe et chez l’abeille domestique, les échanges de nourriture « bouche à bouche » ou échanges trophallac- tiques, sont réglés par des signaux tactiles précis. L’ouvrière de guêpe ou d’abeille qui sollicite sa nourriture d’un congénère, porte des stimulations tactiles précises au moyen de l’une ou l’autre de ses antennes, parfois des deux, au contact des pièces buccales situées entre les mandibules entrouvertes de l’ouvrière sollicitée. Ces zones sont riches en mécanorécepteurs. Leur stimulation entraîne une régurgitation de nourriture chez
  • 22. 22 l’ouvrière sollicitée, en même temps que des mouvements d’antennes particuliers qui ont valeurs de signaux d’acceptation du contact. Peu avant, ou au moment de rompre le contact, l’ouvrière sollicitée émet d’autres mouvements d’antennes carac- téristiques: détentes appuyées en direction de la tête de la sollici- teuse chez l’abeille, rabattements appuyés entre les deux in- sectes chez les guêpes sociales. L’apparition de ces mouvements coïncide avec la fin des régurgitations de l’ouvrière sollicitée. Tout montre donc que ces mouvements ont valeur de signaux de rup- ture du contact et d’arrêt de la régurgitation. Certaines fourmis, comme les Camponotus, ont aussi des mou- vements d’antennes de même forme que chez les guêpes et les abeilles pour solliciter leur nourriture. Cependant, contrairement aux guêpes et aux abeilles, les fourmis ne paraissent pas avoir des signaux antennaires qui règlent la dynamique des échanges entre la solliciteuse et la donneuse de nourriture, notamment l’arrêt des régurgitations et la rupture du contact. On peut pen- ser que cela a pu, au cours de l’évolution, faciliter la pénétration d’un nombre relativement élevé de commensaux et de parasites dans les sociétés de fourmis. En revanche, la plus grande com- plexité des communications antennaires chez les guêpes et les abeilles a pu constituer un obstacle à la pénétration de leurs so- ciétés par des espèces étrangères (hypothèse de A. Bonavita). L’expérience avec les macaques est intéressante aussi. Lorsque de jeunes macaques sont élevés de façon telle qu’ils ne peuvent toucher un congénère, ou être touché par lui, pendant six mois, tous leurs comportements sociaux apparaissent ensuite profondément altérés, même lorsqu’ils ont pu voir et entendre d’autres macaques pendant la période d’isolement: – les individus restent souvent prostrés dans des attitudes évo- quant l’autisme chez les êtres humains; – leurs systèmes de communication sexuels (recherche et ap- proche du partenaire sexuel) sont inexistants; – leurs systèmes de communication agonistiques sont déplacés vers le repli sur soi-même et les bouffées d’agression « non réfré- nées » à l’approche d’un congénère;
  • 23. 23 – leur comportement maternel, quant il s’agit de femelles insé- minées expérimentalement, est aberrant (rejet du jeune et agressions). Lorsque l’isolement tactile dure trois mois, les comportements sont également modifiés, mais ils deviennent progressivement comparables à ceux de macaques élevés naturellement par leur mère, à la condition que les individus élevés isolément soient mis en présence d’autres individus du même âge, que ceux-ci aient été élevés dans l’isolement social ou non. Les activités ludiques, en particulier les touchers corporels, pa- raissent alors compenser le déficit des stimulations tactiles spéci- fiques des trois premiers mois. L’insuffisance des études sur les signaux tactiles peut s’expliquer par des difficultés méthodologiques: il est en effet difficile de quantifier les tou- chers. Aide mémoire 1. Langage et communication 1.1. Les principes. - Avant que l’accent soit définitivement mis sur le langage comme sys- tème de communication la théorie expliquait en d’autres termes le pouvoir qu’ont les hommes d’inventer des systèmes de communication, (les signifiants, les signifiés). - Saussure avait insisté sur la nécessité de replacer la linguistique pro- prement dite dans le vaste domaine de l’ensemble de tous les systèmes de signes. La sémiologie. 1.2. Indice et langage - Un indice est un fait observable, qui renseigne l’observateur sur un autre fait non actuellement observable. - John Dewey : toute trace laissée par les hommes était un signe et tout fait anthropologique devenait langage. 1.3. Signe et langage - Pour des linguistes de la première moitié du XXè siècle tous les signes
  • 24. 24 produits par les humains sont des langages. - Jespersen : « dans sa forme développée, le langage est à coup sûr une caractéristique humaine, et peut être considéré comme la principale marque de l’humanité ». - Colin Cherry, (1957) : « l’homme a seul le don du langage ». Les ani- maux n’ont pas de langage parce qu’ils n’ont pas de « système de pen- sée organisée ». 2. Systèmes de communication linguistique et non linguistique. 2.1. La sémiotique: théorie générale des modes de signifier. 2.2. Caractères spécifiques du langage humain: système de communi- cation au moyen des langues naturelles humaines. 2.2.1. Fonctions du langage Jakobson : * La fonction expressive : tout ce que l’émetteur met de lui-même dans son message. * La fonction appellative ou conative : multiplier les moyens d’action de l’émetteur et du message sur le récepteur. * La fonction phatique : s’assurer que le canal est libre. * La fonction métalinguistique : utiliser le langage pour parler du code. * La fonction poétique : centrée sur l’élaboration formelle du message.. * La fonction référentielle : centrée sur la mise en relief du référent. 2.2.2. Spécificité du langage L’établissement de la communication n’est pas le trait spécifiquement distinctif du langage humain. L’arbitraire du signe : il n’en faisait pas le caractère propre du langage humain. De fait, beaucoup d’autres sys- tèmes de communication utilisent des signes arbitraires. 2.2.3. La double articulation Extraordinaire quantité de messages possibles au moyen d’une double économie dans la structuration par rapport à ce que peuvent tous les autres systèmes de communication. 2.3. Communication humaine propriétés considérées comme étant les caractéristiques essentielles. Structures de la communication qu’emploie le langage parlé : Canal auditif-vocal, transmission émise et réception directionnelle, eva- nouissement rapide, interchangeables, rétroalimentation totale, spécia- lisation, sémanticité, procédé arbitraire, éléments discrets, déplace- ments, productivité, transmission par tradition, double organisation. 2.4. Communication non humaine
  • 25. 25 2.4.1. Les signaux visuels - Mouvements et échanges lumineux dans les comportements de re- production. - Défense du territoire, comportements agonistiques, comportements parentaux, reconnaissance individuelle… 2.4.2. Les signaux acoustiques : - Cris, chants, grognements… jouent un rôle essentiel dans l’attraction spécifique du partenaire sexuel. - Chaque espèce apparaît ainsi comme unique. - Aucune règle générale ne se dégage quant aux capacités d’apprentissage des individus. - Chaque localité se caractérise ainsi par des chants qui lui sont propres, en raison des combinaisons particulières. - cris de détresse, les gazouillis de sécurité ou de confort, cris de contact des oiseaux de basse-cour, cris d’alarme... - On ne connaît pas les paramètres qui véhiculent l’information. 2.4.3. Les signaux chimiques : Quatre types de recherches : l’appel sexuel, glandes mandibulaires de la reine d’abeilles, piste déposée par les fourmis, recherche du partenaire sexuel chez les mammifères. 2.4.4. Les signaux tactiles : anecdotique. Insuffisance des études.
  • 26. 26 Bibliographie ACHARD, PIERRE, La Sociologie du langage, Paris, P.U.F., « Que sais- je ? »,1993. AJURIAGUERRA, JULIAN DE, BRESSON F., FRAISSE P. INHELDER B., OLÉ- RON P. ET PIAGET J. (éds), Problèmes de psycholinguistique, Paris, P.U.F., 1963. AMACKER, RENÉ, Linguistique saussurienne, Genève, Droz, 1975. AUROUX, SYLVAIN et coll., Histoire des idées linguistiques, Bruxelles, éd. Mardaga, 1990-1992, 2 vol. AUROUX, SYLVAIN et coll., Matériaux pour une histoire des théories lin- guistiques, Université de Lille, 1984. BACHMAN, CHRISTIAN, LINDENFELD, JACQUELINE ET SIMONIN JACKY, Langage et communications sociales, Paris, Hatier, 1981. BENVENISTE, ÉMILE, Problèmes de linguistique générale, Paris, Galli- mard, 1966-1974, 2 vol. BOUTON, CHARLES P., le Développement du langage chez l’enfant, as- pects normaux et pathologiques, Paris, Masson, 1976. BRONCKART, JEAN PAUL, Théories du langage, une introduction critique, Bruxelles, Dessart et Mardaga, 1977. CHOMSKY, NOAM, Réflexions sur le langage, par Judith Milner, Béatrice Vautherin et Pierre Fiala, Paris, F. Maspero, 1977. CORRAZE, JACQUES, les Communications non verbales, Paris, P.U.F., 1980. GAENG, PAUL A., Introduction to the Principles of Lenguage, New York ; Harper and Row, 1971. MARTINET, ANDRÉ, Éléments de linguistique générale, Paris, A. Colin, 1960, 3éme éd. 1991. SAUSSURE, FERDINAND DE, Cours de linguistique générale, Lausanne, Payot, 1916, nouv. éd., 1972. SINCLAIR DE ZWAART, H., Acquisition du langage et développement de la pensée : sous-systèmes linguistiques et opérations concrètes, Paris, Dunod, 1967.
  • 27. 27 2 Le processus de communication Sommaire 1. Le processus de communication: situation de communication 1.1. Les éléments de la communication 1.2. Les fonctions du langage 2. Les actes de langage 2.1. Définition 2.2. Les principaux types d’actes de langage 2.2.1. Les modalités d’énonciation 2.2.2. Les performatifs 2.2.3. Les comportements 2.2.4. Actes indirects et sous– entendus.
  • 28. 28 2.2.5. L’ironie 2.3. Les registres de langue 2.3.1. Le registre soutenu 2.3.2. Le registre familier 2.3.3. Le registre courant, commun. 2.3.4. Emplois dans les textes 3. La négociation du sens 3.1. La signification structurelle ou grammaticale 3.2. La signification lexicale 3.3. La flexibilité sémantique Introduction La langue n’est qu’une variété de code, soit un ensemble préarrangé de signaux. Les linguistes ont souvent exploité la ressemblance qu’il y avait entre tout processus de communication (y compris lorsque émetteur et/ou récepteur sont des machines) et le langage. C’est du code que partent les instructions transmises physiologique- ment à l’appareil moteur qui les réalisera (la phonation, les mimiques et le comportement gestuel). C’est de façon inverse, mais non symétrique, que se passe le décodage chez le récepteur, processus également appe- lé reconnaissance: les ondes transmises et transformées en signaux sont probablement confrontées avec ce qui existe de plus proche dans la mémoire et au besoin y prennent place. Il est bien évident que ce schéma n’est jamais réalisé de façon optimale, mais qu’il faut accorder une certaine importance au bruit, qui vient perturber la communication. C’est pourquoi le code est souvent invoqué à l’intérieur même du mes- sage, notamment dans les énoncés tautologiques, ce qui définit la fonc- tion métalinguistique du langage. Comme le message est avant tout destiné à véhiculer une information, il est inimaginable qu’un discours soit purement axé sur le code: il faut se rappeler du reste que chacun de ces deux concepts n’a d’existence que par rapport à l’autre, et que le code ne peut se concevoir que comme l’ensemble des conventions auxquelles se réfèrent les partenaires lors de la communication effectuée par le message. Saussure et Jakobson ont eu recours à cette opposition structurale, le premier en la dénommant langue/parole et pour souligner le caractère
  • 29. 29 social, transindividuel de l’institution langagière (personne ne peut par sa volonté modifier les lois de fonctionnement de la communication, qui, pourtant, évoluent dans le temps), le second, d’une façon bien plus axée sur la théorie de la communication, pour mettre au jour les prin- cipes d’une « poétique » au sens large et même d’une grammaire.
  • 30. 30 1. Le processus de communication: situation de communication La communication est l’échange verbal entre un sujet parlant, qui pro- duit un énoncé destiné à un autre sujet parlant, et un interlocuteur dont il sollicite l’écoute et une réponse explicite ou implicite (selon le type d’énoncé). Observé du point de vue psychologique la signification qu’un locuteur associe aux sons est la même que celle que l’auditeur associe à ces mêmes sons, bien que cela ne soit pas toujours vrai. Les participants à la communication, ou acteurs de la communication, sont les « personnes » entre lesquelles cette communication s’établit: le sujet parlant qui produit l’énoncé, l’interlocuteur ou allocutaire, et enfin ce dont on parle, les êtres ou objets du monde. Des éléments spa- tio-temporels doivent être ajoutés: objets présents ou absents, proches ou éloignés, relations sociales entre les participants à la communica- tion… Ce statut de la communication est défini par la distance sociale, ou intersubjective, instituée par le locuteur avec ses interlocuteurs (tu- toyer, vouvoyer, sélectionner des mots respectueux… ) Tout cela se tra- duit par des modes et aspects du verbe, et par des adverbes comme peut-être, sans doute… Du point de vue technique la communication est le fait qu’une infor- mation soit transmise d’un point à un autre (lieu ou personne). Le transfert de cette information se fait au moyen d’un message qui a reçu une certaine forme, que a été codé. La première condition, en ef- fet, pour que la communication puisse s’établir, est le codage de l’information, c’est-à-dire la transformation du message sensible et concret en un système de signes ou code, dont la caractéristique essen- tielle est d’être une convention préétablie, systématique et catégorique. Quand la communication s’établit, nous disons que les parties compo- santes de cette transmission forment un système de communication. 1.1. Les éléments de la communication
  • 31. 31 Le schéma de la communication suppose la transmission d’un message entre un émetteur et un récepteur possédant en commun, au moins partiellement, le code nécessaire à la transcription du message. Un système comporte, d’après Jakobson, les élément suivants: CONTEXTE ou RÉFÉRENT DESTINATEUR ------------- MESSAGE----------------DESTINATAIRE CONTACT CODE Le code comprend des signaux spécifiques et un ensemble de règles de combinaisons propres à ce système de signaux; dans les langues natu- relles, le code est constitué par les phonèmes, les morphèmes et les règles de combinaison de ces éléments entre eux (par opposition à la parole, constituée par les énoncés réalisés, ou des messages). Le canal, support physique de la transmission du message, moyen par lequel le code ou les signaux sont transmis: c’est l‘air pour le cas de la communication verbale, mais le canal peut avoir des formes très di- verses: bandes de fréquence radio, lumières, systèmes mécaniques ou électroniques divers… Le destinateur est à la fois la source du message, l’émetteur propre- ment dit, comportant les mécanismes du codage et l’appareil émetteur lui-même. On dit de l’émetteur qu’il est un encodeur, c’est à dire qu’il sélectionne à l’intérieur du code un certain nombre de signaux permet- tant de transmettre le message. Le destinataire est à la fois l’appareil qui reçoit le message (oreille ou récepteur-radio) et le destinataire proprement dit du message (cer- veau humain pour le langage parlé, auditeur pour la radio, etc.) Le pro- cessus du décodage se fait au niveau du récepteur-destinataire par la « recherche en mémoire » des éléments sélectionnés par l’émetteur et constituant le message. Dans une communication courante, destinateur et destinataire échangent leur rôles au fur et à mesure.
  • 32. 32 Le message est fait de traces et de signes. Dans le schéma de la traduction on peut voir la notion de recodage du message: source  message dans le code A  encodeur message  décodeur réencodeur message dans le code B  destinataire   règles du code A règles du code B Le recodage, ou réencodage, opération par laquelle le message codé, puis décodé, reçoit une nouvelle forme. Par exemple, on dicte un télé- gramme (forme acoustique), qui est transcrit sur une feuille de papier (forme graphique) puis tapé en morse (forme mécanique) et finalement transmis sous forme d’impulsions électriques. La notion du contexte ou référent peut être verbale, ou bien physique ou même psychologique. Le processus de communication est un circuit où le sujet parlant gé- nère un concept. Celui-ci est ensuite uni à une image acoustique (selon les compétences linguistiques de l’individu et dans sa langue propre) qui suit un canal (l’air, les ondes sonores) et qui arrive à l’oreille du récep- teur. Celui-ci reçoit une image acoustique qui doit s’unir avec le con- cept. Les deux concepts doivent coïncider. C’est donc au niveau du cer- veau que se déroulent les opérations d’encodage et de décodage, Le cerveau joue le rôle à la fois d’émetteur et de récepteur du message. C’est dans le cerveau également que sont déposés les éléments du code et que s’enchaînent les opérations de « recherche de mémoire ». Dans un dialogue, une conversation ou un débat, les interlocuteurs sont présents et ils peuvent s’interrompre mutuellement, demander des pré- cisions, revenir sur des points antérieurs, dresser des bilans tempo- raires, etc. Ils construisent bien le sens des messages ensemble.
  • 33. 33 La lecture est aussi un dialogue, un dialogue avec un texte. Certes, que le texte écrit n’est qu’un simple texte informatif, on se trouve dans le modèle de communication du simple transfert d’une information. Mais un roman, un poème ou un essai n’est pas une information transmise. C’est un texte offert, un texte dont il faut s’emparer, qu’il faut ap- prendre à connaître. Chaque lecteur est différent. Chaque lecteur apporte avec lui sa propre connaissance de la langue, son histoire personnelle… Il y a souvent un grand écart entre le texte et le lecteur : le texte date d’une époque lointaine, différente, une époque que le lecteur connaît mal, ou qu’il ne connaît pas du tout. La lecture n’est donc pas une simple réception pas- sive. C’est un dialogue avec le texte, une suite d’interrogations pour parvenir à la compréhension progressive de ses significations, à ce que « dit » le texte, à ce qu’il « nous » dit. 1.2. Les fonctions du langage A chaque facteur de la communication, Jakobson fait correspondre une fonction du langage : FONCTION RÉFÉRENTIELLE (contexte, référents) FONCTION EXPRESSIVE- FONCTION POÉTIQUE- FONCTION CONATIVE (destinateur) ----------------- (message) -------------------- (destinataire) FONCTION PHATIQUE (canal) FONCTION MÉTALINGUISTIQUE (code) La fonction expressive est centrée sur le destinateur. Elle correspond à son intervention directe dans le message. Elle peut être soutenue par des gestes dans lesquels le destinateur se désigne, occupe l’espace que est autour de lui.
  • 34. 34 La fonction conative est centrée sur le destinataire. Elle correspond à son interpellation par le destinateur. Là aussi, les gestes divers peuvent participer à cette fonction, La fonction référentielle est centrée sur le référent. Les signes linguis- tiques acquièrent une signification complète grâce aux liens que les unissent à leur contexte et à leur référent. Ces liens permettent égale- ment de découvrir dans les textes deux sortes de relations : les associa- tives et les référentielles. - Les relations associatives résultent des liens que s’établissent entre les signes et les contacts présents ou absents. C’est donc un type de relation que est centré sur le texte lui-même, sur son organisation, sur son écriture. - Les relations référentielles résultent des liens que s’établissent entre les signes et leur référent. C’est donc un type de relation que « tourne » le texte vers l’extérieur, vers le monde, vers : « ce » dont parle le texte. La fonction phatique est centrée sur le canal. Elle correspond à toutes les expressions ou attitudes que ont pour but d’ouvrir ce canal (Allô ?), de le maintenir ouvert (Patientez…) ou de le fermer (Je raccroche…). Relèvent de cette même fonction tous les Euh…, Voyons voir…, bon.,.., Je disais… qui ont pour but de conserver l’attention de l’autre. La fonction métalinguistique retourne le langage vers le code. Elle cor- respond aux précisions qu’on apporte sur le ou les sens de ce qu’on dit. La fonction poétique est centrée sur le message, elle ne concerne pas que les poésies, mais toutes les relations associatives des signifiants ou des signifiés qui peuvent intervenir dans le message. 2. Les actes de langage 2.1. Définition
  • 35. 35 Quand on énonce un discours, on « dit » quelque chose et on « fait » quelque chose: Il va pleuvoir   L’énonciateur « dit »: « la pluie arrive » L’énonciateur « fait » quelque chose: - il constate simplement qu’il pleut; - il avertit qu’un parapluie serait utile; - il marque son dépit de ne pas pouvoir sortir. On appelle acte de langage l’acte qu’on accomplit en disant quelque chose, oralement ou par écrit. L’acte de langage appartient donc au discours et à la situation de communication. C’est une manière particu- lière de se comporter. - Il y a des manières de se comporter, d’agir, qui passent par des gestes, des attitudes, des actions au sens banal du terme. - Les actes de langage sont des manières de se comporter qui passent par l’utilisation du langage: promettre, jurer, prier, ordonner, demander, avertir, insulter, se moquer de… On distingue généralement trois principaux registres de la langue: le registre familier, le registre courant ou commun, le registre soutenu, qu’on verra plus tard.. Ce sont trois manières d’utiliser la langue, mais elles correspondent aussi à des manières de se comporter. Elles dépen- dent donc en partie des situations de communication. 2.2. Les principaux types d’actes de langage 2.2.1. Les modalités d’énonciation
  • 36. 36 Un premier type d’actes de langage apparaît dans les modalités d’énonciation de la phrase : « déclarer », « demander », « ordonner » sont des actes du langage. En prononçant les phrases qui suivent, on accomplit chacun de ces actes: J’affirme que c’est impossible. Pourriez vous m’aider ? Viens vite ! Ces actes renvoient à des situations précises. - Pour déclarer quelque chose, il faut que j’aie la parole, qu’on m’écoute, qu’on me lise. - Les actes de « demander » et d’ « ordonner » sont encore plus stricte- ment délimités. Par exemple : c’est l’examinateur qui pose les questions, pas celui qui passe l’examen, et on ne peut pas donner un ordre à n’importe qui. 2.2.2. Les performatifs Nous avons vu que ce terme désigne les verbes qu’on emploie pour « faire » quelque chose. Les actes de langages accomplis sont alors très exactement ceux où « dire » c’est « faire ». Exemples: jurer, donner sa parole, promettre, parier, excuser, remercier, bénir, maudire, décréter, déclarer, léguer, baptiser, etc. Les verbes performatifs ne sont pas performatifs à tous les temps et à toutes les personnes. Ils ont cette valeur au présent de l’indicatif et à la première personne. Jurer, c’est dire « je le jure », pas « je jurerai », ou « il a juré ». Cette valeur n’est acquise que dans une situation donnée qui est parfois très codifiée. On ne jure pas dans n’importe quelle cir- constance.
  • 37. 37 2.2.3. Les comportements Ce sont des actes de langage où le langage intervient, mais de manière moins codifiée que dans le cas des performatifs. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de situation de communication précise. Il y a toujours une situation. - Estimer, c’est estimer la valeur de quelque chose- une opinion, par exemple- ou de quelqu’un. C’est avoir la compétence ou simplement le droit moral d’estimer. On peut contester ce droit. - Renseigner, c’est renseigner quelqu’un qui nous a demandé explicite- ment ou implicitement quelque chose. - Autres exemples: défier, critiquer, flatter, prévenir, avertir, concéder, recommander, approuver, encourager, etc. Le refus de dialogue. C’est une sorte d’ « acte de non-langage ». Le des- tinataire indique qu’il refuse la communication: on fait semblant de lire le journal ou de dormir, on ne répond pas, on raccroche le téléphone, on retourne la lettre sans l’avoir ouverte, etc. Si le destinateur a vraiment cherché à entrer en communication avec le destinataire, lui opposer le contact est toujours impoli. Dans certains cas, c’est même un comportement de mépris insupportable: le destina- teur a l’impression de ne pas exister. 2.2.4. Actes indirects et sous– entendus. Ce sont des actes de langage avec complicité du locuteur. Pour ordonner, prier, défier, etc., il faut une situation de communica- tion, donc un destinataire. Mais, dans la plupart des cas, on ne de- mande pas l’avis du destinataire. Il obéit ou non à l’ordre, à la prière, au défi. D’autres actes de langage demandent la complicité du destinataire. - Les actes de langage indirects consistent à employer les modalités d’énonciation avec une autre valeur : déclarations qui sont des de- mandes, interrogations qui sont des menaces ou des ordres, interroga- tion rhétoriques. Pour montrer que la complicité des interlocuteurs est nécessaire dans ces actes de langage, on peut évoquer le cas où l’interlocuteur refuse la complicité, fait semblant de ne pas jouer le jeu: - Tu peux me passer l’eau, s’il te plaît ?
  • 38. 38 - Oui. Et celui qui vient de répondre en reste là ! - Les sous-entendus sont des actes de langage où l’on dit quelque chose sans le dire vraiment. Ils sont très pratiques parce qu’ils permet- tent de donner une opinion sans risque. On laisse la responsabilité de comprendre au destinataire: - Paul a l’air fatigué ce matin. - Tu veux dire qu’il passe ses nuits à danser ? - Non ! je n’ai pas voulu dire ça. Le sous–entendu n’est possible que si les interlocuteurs se compren- nent à demi–mots, s’ils sont au courant des mêmes événements, s’ils partagent une communauté de compréhension. Dans l’exemple donné ci-dessus, il faut que les deux interlocuteurs connaissent le Paul dont il est question. 2.2.5. L’ironie L’ironie est un acte de langage avec complicité du locuteur. Du point de vue de l’expression, les principaux procédés de l’ironie sont: - l’antiphrase et la litote; - la prétérition: Je ne dis pas que tu es stupide  On le dit ! - l’ajout d’un commentaire inattendu, absurde: Panglosse fut pendu, quoique ce ne soit pas la coutume. (Voltaire) - le ton « ironique ». Mais l’ironie n’est pas un simple problème d’expression. On ne peut pas définir l’ironie par le ton « ironique ». Ou alors on définit le ton « ironique » par.... l’ironie, et on tourne en rond ! L’ironie est un acte qui justifie et éclaire l’emploi de ces procédés. Cet acte de langage implique trois facteurs: - un énonciateur qui « fait » de l’ironie; - une cible qui est visée par l’ironie; - des témoins complices qui comprennent ce que dit l’énonciateur.
  • 39. 39 Comprendre que dans un discours il y a de l’ironie, c’est saisir un écart entre ce qui est dit et la situation: «Beau temps, n’est-ce pas ? »   Un jour de soleil, Un jour de pluie, c’est une constatation. c’est un antiphrase ironique. Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armée. (Voltaire)   Si Voltaire est un écrivain connu Si Voltaire est....Voltaire pour « admirer »la guerre, le texte est une antiphrase le texte n’est pas ironique. ironique. Comme tous les sous-entendus, l’ironie court toujours le risque de ne pas être comprise. Si on fait lire cette phrase ci-dessus à un lecteur qui ignore tout sur Voltaire, il ne peut pas apprécier l’ironie. S’il a lu « Can- dide » depuis le début, quand il arrive á cette phrase, il ne peut pas se tromper d’interprétation: - Voltaire « fait » de l’ironie; - la cible visée est la guerre et son exaltation; - le lecteur est complice de l’ironie puisqu’il la comprend. L’humour repose sur les mêmes données que l’ironie mais la cible n’est pas visée avec autant de force. On rencontre pourtant une force identique dans l’humour noir qui est parfois une forme d’ironie. 2.3. Les registres de langue Ce sont des manières d’utiliser le langage, mais ils correspondent aussi à des situations de communication, à des manières de se comporter. 2.3.1. Le registre soutenu Le seul registre que l’on puisse définir de manière assez claire est le re- gistre soutenu. Il y a dans la langue des tours, des pratiques que per-
  • 40. 40 sonne n’utilise spontanément. Pour employer le registre soutenu, il faut « faire attention » à ce qu’on dit ou à ce qu’on écrit. Le registre soutenu n’est jamais spontané. - Il est donc associé à des situations de communications où l’on prête attention à son comportement. - Il demande une bonne connaissance des ressources de la langue. - Le registre soutenu se rencontre à l’oral et à l’écrit, mais son modèle est un modèle écrit: concordance classique des temps, emploi du sub- jonctif, tours des anciens usages, emploi fréquent des phrases com- plexes, vocabulaires recherché… Le registre soutenu s’explique aussi par opposition au registre familier et au registre courant. 2.3.2. Le registre familier Le registre familier est celui d’une parole spontanée, employée avec ses proches, ses amis, dans des situations de communication sans con- traintes. - Le modèle du registre familier est un modèle oral et il comporte sou- vent des « fautes » au regard de l’usage correct. C’est un registre ou les effets de style de l’oral sont souvent présents: ton, accents, emphase syntaxique, hyperbole, redondances… On emploie facilement des termes d’argot ou de patois, des mots « grossiers ». Cela dit, il y a sans doute autant de registres familiers que de locu- teurs. Tout dépend pour chacun de sa connaissance de la langue, de son milieu, de l’importance qu’il attache au langage, de son souci de respec- ter des normes de « bon usage », de la qualité de sa prononciation, etc. 2.3.3. Le registre courant, commun. Ce registre est moins spontané que le registre familier, mais il est plus spontané que le registre soutenu. - Il s’emploie dans les situations de la vie quotidienne, quand nous sommes au contact de gens que nous ne connaissons pas ou peu.
  • 41. 41 - Il fonctionne à l’oral et à l’écrit. On y trouve les cadres les plus géné- raux de la langue, ceux d’un usage correct sans recherche d’effets parti- culiers. - Au fond, c’est le registre qui passe inaperçu. 2.3.4. Emplois dans les textes Les registres de la langue peuvent être considérés de deux manières. - Le point de vue normatif les classe en registres corrects et incorrects. De ce point de vue, il y a donc des registres qu’on doit éviter d’employer dans la mesure du possible. - Le point de vue descriptif les analyse comme des ressources de la langue. Maîtriser sa langue, c’est pouvoir employer les différents re- gistres selon les situations de communication. Dans les textes, on peut rencontrer l’influence de deux points de vue. - L’auteur s’en tient à la norme et s’interdit d’employer des registres incorrects ou registres « bas ». - L’auteur joue sur toute la gamme des registres, en fonction de ses per- sonnages et des situations où ils se trouvent. Cela le conduit donc sou- vent à jouer sur les registres marqués, ceux qu’on peut distinguer: les registres familiers et les registres soutenus. Le lecteur doit repérer les passages où ces registres sont employés, ap- précier comment ils conviennent aux situations de communication. 3. La négociation du sens L'objet et but du langage est de se revêtir de sens. Les langues ont dé- veloppé des formes pour satisfaire les besoins de communication dans tout leurs aspects. C'est parce que les besoins de communication hu- maine sont si nombreux et si variés que l'étude du sens est probable- ment la plus difficile partie de l'étude sérieuse de la langue. Traditionnellement la langue a été définie comme l'expression de la pensée, mais, comme on a pu le voir, cela implique une interprétation trop étroite de la langue. L'expression de la pensée est juste un aspect
  • 42. 42 parmi les multiples fonctions exécutées par la langue dans certains con- textes. Nous allons voir dans ce troisième point du thème la négociation du sens dans l’expression à trois niveaux : structurel, lexical et sémantique. 3.1. La signification structurelle ou grammaticale La signification de toute phrase comprend deux parties : la signification des mots qu’elle contient, et la signification structurelle ou grammati- cale portée par la phrase elle-même. Le chien a chassé le chat et le garçon a chassé le chat sont deux phrases différentes dans leur signification parce que chien et garçon sont des mots différents avec des significations du mot diffé- rentes. La même équivalence peut être appliquée aux phrases dans les autres langues. Les deux phrases : le chien a chassé le chat et le chat a chassé le chien contiennent les mêmes mots exactement, mais le sens est différent parce que l’ordre des mots distingue ce qui est appelé sujet et objet conventionnellement. En latin les deux phrases correspondantes ne seraient pas distinguées par l’ordre des mots qui est grammaticalement indifférent et pour une grande part une manière de style, mais par des formes différentes dans les équivalents lexicaux de chien et chat. En japonais, la distinction grammaticale de sujet et objet, normalement marquée par l’ordre des mots (sujet-objet-verbe), peut être renforcée par une particule placée après le premier mot et une particule d’objet après le second mot. Les ressources formelles de toute langue pour faire des distinctions dans les significations structurelles des phrases sont limitées par : - le linéaire (temps), dimension de parler,
  • 43. 43 - la durée de la mémoire limitée du cerveau humain. Les écrivains s’inspirent des lectures nombreuses et diverses faites tout au long de leur vie. L’écriture est libre des restrictions de la durée de la mémoire par la permanence de marques visuelles. Étant donné que les textes écrits sont presque tout à fait divorcés de la prononciation orale, la longueur et la complexité de la phrase peuvent être portées aux ex- trêmes, comme on peut l’observer dans quelques documents légaux et législatifs qui sont pratiquement inintelligibles à la lecture à haute voix. Toutes les langues peuvent employer des structures de la phrase diffé- rentes pour affirmer des faits (explicatifs), poser des questions (interro- gatives), et enjoindre ou défendre quelques cours d'action (impératifs). Des moyens plus délicats existent pour adoucir ou modifier ces distinc- tions de base: Il fait froid aujourd'hui, n’est pas? Il ne pleut pas encore? Fermez la porte, s’il vous plait. Voudriez-vous ne pas trop prolonger...? Les langues utilisent leurs propres ressources pour ces buts différem- ment, mais, en général, chacune paraît être également flexible structu- rellement. Les ressources principales sont l’ordre des mots, la forme du mot, la structure syntaxique et, dans la parole, le ton et la place de l’intonation. Un mot ou une expression peuvent être mis en valeur en étant placés dans la phrase en premier lieu alors qu’ils ne se placeraient pas là nor- malement. On peut, par exemple, mettre la phrase à la forme passive. On peut affirmer des faits, poser des questions, et donner des directives avec une variété d'intonations; et aussi indiquer, avec des gestes vi- sibles, des attitudes différentes, des sensations et des relations sociales et personnelles entre orateur et auditeur. L’emphase est associée sur- tout avec l’intonation, et celle-ci possède une signification structurelle dans la parole. Les possibilités d'exprimer des significations structurelles sont une des plus importantes possibilités de toutes les langues. Ces dons sont ac- quis dès l’enfance et sont appris plus lentement et avec plus de difficul- té quand il s’agit de maîtriser une seconde langue apprise plus tardive-
  • 44. 44 ment. Les spécialistes en sont encore aux premiers pas d'une analyse rigoureuse et pleine de ressources. La plupart des langues sont concer- nées par cette étude, loin encore d’une compréhension adéquate de toutes les fonctions sémantiques. 3.2. La signification lexicale L'autre composant du sens de la phrase est la signification du mot, les significations individuelles des mots dans une phrase, comme éléments du lexique. D’une façon ou d’une autre les dictionnaires sont une grande liste des mots d’une lange et de leurs significations. Dans toutes les langues on demande « Qu’est-ce que cela veut dire ? » Cette ques- tion est plus facile à poser qu’à répondre. C'est à travers les ressources lexicales que les langues maintiennent la flexibilité. Chaque langue a un vocabulaire de quelques milliers de mots ; pourtant ces mots ne sont pas tous en usage, et quelques-uns sont au seuil de fréquences minimales ou utilisés par un nombre res- treint d’orateurs. Les mots doivent assumer les différents besoins présentés par la réali- té. Les noms, les verbes et les adjectifs doivent répertorier les choses, les actions et les qualités existant dans le monde, et chaque langue s’organise à sa façon. Si tous les mots représentaient les mêmes réali- tés, la traduction serait facile, ou tout au moins plus facile qu’elle ne l’est maintenant. Les langues créent en partie le monde que les hommes habitent. Bien sûr, beaucoup de mots nomment des parties existantes et des parties du monde et du ciel: pierre, arbre, chien, femme, étoile, nuage… et ainsi de suite. Cependant, beaucoup d’autres mots ne correspondent pas à ces réalités si évidentes. Pensons aux noms d’animaux, aux plantes et légumes et aux mauvaises herbes et aux façons de les percevoir par les différentes cultures. Pensons aussi à la manière de distribuer le temps: année, mois, jour, heure, minute, hier, demain… ces mots ne font pas référence à des sections directes de la réalité mais permettent d’imposer une sorte d'ordre, en accord avec les autres, sur les processus de changement observés dans le monde.
  • 45. 45 Les pronoms personnels choisissent les personnes (celle qui parle, celle qui écoute et toutes les autres) mais quelques langues font des distinc- tions différentes dans leurs pronoms, soit en s’incluant soi-même dans le nous de la personne qui parle, soit en ajoutant d’autres pronoms dans des situations diverses, ou bien, comme fait le japonais et plusieurs autres langues, en ajoutant une variété de formes qui dénotent les rap- ports sociaux observés. D’autres significations des mots sont plus bornés à la culture même du peuple, et donc plus difficiles à traduire. Ce sont des mots qui règlent la conduite et les relations d’une culture particulière. La traduction devient progressivement plus difficile quand on se déplace vers des langues de cultures plus éloignées, et il a été dit qu’une traduc- tion exige une unification de contexte culturel. C’est ainsi qu’une per- sonne comprend l'univers et les relations entre elle-même et les autres. A ce phénomène s’ajoute la façon dont l’enfant commence à com- prendre progressivement le monde avec la langue dont il a hérité. La grande majorité des formes du mot ne gardent aucune relation directe avec leurs significations lexicales. Ce qui est appelé des mots onomato- péiques est plutôt semblable dans la forme à travers les langues diffé- rentes: coucou Français, coucou Anglais et Kuckuck Allemand est directement imitateur de l'appel de l'oiseau. le ding-dong anglais et bim-bam allemand partagent plusieurs sons des traits en commun qui partiellement ressemblent au retentir des cloches. En tout, c'est une très petite partie du vocabulaire. Le plus grand nombre de mots dans une langue n’a aucune association directe entre le son et la signification : . caballo - espagnol horse - anglais pferd - allemand cheval - français equus - latin hippopotames - grec sont des formes de mots sans rapport avec l'animal qui est nommé. C'est la condition arbitraire du signe linguistique. Le vocabulaire doit
  • 46. 46 être en grande partie arbitraire, parce que la plus grande partie du monde et de l'expérience de l'homme n'est pas associée directement avec un bruit. Les relations entre structure de la phrase et significations structurelles sont aussi en grande partie arbitraires et tacitement conventionnelles. 3.3. La flexibilité sémantique Non seulement les mots ont des sens différents dans les différentes langues, mais nous pouvons dire qu’il n’y a de signification fixe dans aucune langue. Les changements sémantiques ont lieu continuellement et à n’importe quel moment, et parfois seulement dans une partie de leur espace sémantique. C'est un aspect supplémentaire et une condi- tion de la flexibilité inhérente et nécessaire à la langue. En général, les mots sont assez imprécis; cependant, dans des condi- tions particulières, leurs significations peuvent être précises ou adap- tées, habituellement en ajoutant plus de mots ou expressions pour divi- ser un champ donné en plus de détails. Bon contraste généralement avec mauvais; mais on peut, par exemple, établir des niveaux comme : phénoménal, excellent, très bon, bon, mau- vais… Les noms de couleurs obtiennent leurs significations de leurs con- trastes mutuels. Le champ qui distingue les visions des teintes des cou- leurs est très grand et va au-delà des ressources de tout vocabulaire. Les enfants apprennent les couleurs de base dans leur langue assez tôt et en même temps; une telle est appelée rouge et elle est normalement apprise avant les subdivisions telles que cramoisi, pourpre, écarlate ou vermeil. Les langues font leurs divisions fondamentales de la panoplie des couleurs dans des espaces sémantiques différents. Alors que le vocabulaire des couleurs employé dans les langues est dif- férent, des recherches faites par Brent Berlin et Paul Kay ont essayé de montrer qu’il y a pour les êtres humains onze catégories de couleur per- ceptives de base qui servent comme points de référence pour les mots de couleur d'une langue universellement, indépendamment du nom qui
  • 47. 47 peut être employé régulièrement. Le vocabulaire des termes de la parenté varie d’une langue à l’autre et dépend des différences culturelles. L’anglais distingue la famille proche par sexe: mère, père ; sœur, frère; tante, oncle et autres. D’autres langues, telles que le malais, font une distinction lexicale d'âge fonda- mentalement, avec des mots séparés pour frère aîné ou soeur aîné, et plus jeune frère ou plus jeune sœur. D’autres encore, comme celle des indiens américains, utilisent des mots différents pour la sœur d'un homme et pour la sœur d'une femme. Mais tout cela mis à part, toute langue peut être aussi précise que le demande la situation dans la dési- gnation de la parenté. Quand cela est nécessaire, les anglophones peu- vent spécifier soeur aînée et cousin de la femme, et dans la catégorie totale il est possible de distinguer entre les cousins proches et les loin- tains. Le meilleur exemple de précision d'une réserve lexicale se trouve dans le champ de l'arithmétique. Dans ce domaine nous pouvons aller jus- qu’à l’infini. Entre deux nombres entiers un nombre fractionnaire ou décimal supplémentaire peut toujours être inséré, et cela peut aller indéfiniment: entre 10 et 11, 10 1/2 (10.5), 10 1/4 (10.25), 10 1/8 (10.125), et ainsi de suite. Donc, le mathématicien ou le scientifique est capable d'accomplir à volonté les degrés de précision quantitative ap- propriés à ses objectifs; d'où l'importance de déclarations quantitatives dans les sciences. Toute échelle thermométrique contient beaucoup plus de distinctions de températures disponibles que dans le vocabu- laire d'une langue, qui est de toutes les façons limité : brûlant, chaud, tiède, froid… Pour beaucoup d’objectifs de la vie ordinaire l'imprécision même des langues est la source de leur force. Dans le domaine des mathématiques apparaît l’usage idéal des différents besoins. Mais la capacité d’adaptation qu’ont les langues à tout besoin réel est énorme.
  • 48. 48 Aide Mémoire 1. Le processus de communication: situation de communication - La communication est un échange verbal. - Les participants à la communication sont les « personnes » entre les- quelles cette communication s’établit: le sujet parlant, l’interlocuteur ,les êtres ou objets du monde. - Le transfert de cette information se fait au moyen d’un message qui a reçu une certaine forme, qui a été codé. La première condition est donc le codage de l’information. 1.1. Les éléments de la communication Le schéma de la communication suppose la transmission d’un message entre un émetteur et un récepteur possédant en commun le code né- cessaire à la transcription du message. Le code comprend des signaux spécifiques et un ensemble de règles Le canal est le support physique de la transmission du message. Le destinateur est à la fois la source du message et l’émetteur propre- ment dit. Le destinataire est à la fois l’appareil qui reçoit le message (oreille ou récepteur-radio) et le destinataire proprement dit du message (cerveau humain pour le langage parlé, auditeur pour la radio, etc.) Le processus du décodage se fait au niveau du récepteur-destinataire par la « recherche en mémoire » des éléments sélectionnés par l’émetteur et constituant le message. Le message est fait de traces et de signes. Le processus de communication est un circuit où le sujet parlant génère un concept. C’est donc au niveau du cerveau que se déroulent les opé- rations d’encodage et de décodage, Le cerveau joue le rôle à la fois d’émetteur et de récepteur du message. La lecture est aussi un dialogue, un dialogue avec un texte. Il y a souvent un grand écart entre le texte et le lecteur 1.2. Les fonctions du langage A chaque facteur de la communication, Jakobson fait correspondre une fonction du langage : La fonction expressive est centrée sur le destinateur. La fonction conative est centrée sur le destinataire.
  • 49. 49 La fonction référentielle est centré sur le référent On peut découvrir dans les textes deux sortes de relations : les associa- tives et les référentielles. La fonction poétique est centrée sur le canal La fonction métalinguistique retourne le langage vers le code. La fonction poétique est centrée sur le message. 2. Les actes de langage 2.1. Définition : On appelle acte de langage l’acte qu’on accom- plit en disant quelque chose, oralement ou par écrit. On distingue généralement trois principaux registres de la langue: le registre familier, le registre courant ou commun, le registre soutenu. 2.2. Les principaux types d’actes de langage 2.2.1. Les modalités d’énonciation : Un premier type d’actes de langage apparaît dans les modalités d’énonciation de la phrase : « déclarer », « demander », « ordonner » sont des actes du langage. Ces actes renvoient à des situations précises. 2.2.2. Les performatifs : Ce terme désigne les verbes qu’on emploie pour « faire » quelque chose. 2.2.3. Les comportements : Ce sont des actes de langage, où le langage intervient, mais de manière moins codifiée. 2.2.4. Actes indirects et sous– entendus : Ce sont des actes de langage avec complicité du locuteur. 2.2.5. L’ironie : L’ironie est un acte de langage avec com- plicité du locuteur. Les principaux procédés de l’ironie sont: - l’antiphrase et la litote; - la prétérition: - l’ajout d’un commentaire inattendu, absurde. - le ton « ironique ». 2.3. Les registres de langue. Ce sont des manières d’utiliser le langage. 2.3.1. Le registre soutenu : n’est jamais spontané. 2.3.2. Le registre familier : parole spontanée, employée dans des situations de communication sans contraintes. 2.3.3. Le registre courant, commun : moins spontané que le registre familier, mais il est plus spontané que le registre sou- tenu.
  • 50. 50 2.3.4. Emplois dans les textes - Le point de vue normatif les classe en registres corrects et incorrects. - Le point de vue descriptif les analyse comme des res- sources de la langue. 3. La négociation du sens. L'objet et but du langage est de se revêtir de sens. L'étude du sens est probablement la plus difficile partie de l'étude sé- rieuse de la langue. 3.1. La signification structurelle ou grammaticale : La significa- tion de toute phrase comprend deux parties. L’écriture est libre des restrictions de la durée de la mémoire. Toutes les langues peuvent em- ployer des structures de la phrase différentes. Les langues utilisent leurs propres ressources. Un mot ou une expression peuvent être mis en va- leur. Les possibilités d'exprimer des significations structurelles sont une des plus importantes possibilités de toutes les langues. 3.2. La signification lexicale : L'autre composant du sens de la phrase est la signification du mot. C'est à travers les ressources lexi- cales que les langues maintiennent la flexibilité. Les mots doivent assu- mer les différents besoins présentés par la réalité. Les langues créent en partie le monde que les hommes habitent. Les pronoms personnels choisissent les personnes. D’autres significations des mots sont plus bornés à la culture même du peuple. 3.3. La flexibilité sémantique :Non seulement les mots ont des sens différents dans les différentes langues, mais nous pouvons dire qu’il n’y a de signification fixe dans aucune langue. - Les noms de couleurs obtiennent leurs significations de leurs con- trastes mutuels. - Le vocabulaire des termes de la parenté varie d’une langue à l’autre et dépend des différences culturelles. - Le meilleur exemple de précision d'une réserve lexicale se trouve dans le champ de l'arithmétique. - La capacité d’adaptation qu’ont les langues à tout besoin réel est énorme.
  • 51. 51 Bibliographie ACHARD, PIERRE, La Sociologie du langage, Paris, P.U.F., « Que sais- je ? »,1993. ARRIVÉ, MICHEL ET CHEVALIER, JEAN CLAUDE, la Grammaire, Paris, Klincksieck, 1970. BACHMAN, CHRISTIAN, LINDENFELD, JACQUELINE ET SIMONIN JACKY, Langage et communications sociales, Paris, Hatier, 1981. BALLY, CHARLES, Linguistique générale et linguistique française, Paris, E. Leroux, 1932 ; 4ème éd. Berne, A. Francke, 1965. BRONCKART, JEAN PAUL, Théories du langage, une introduction critique, Bruxelles, Dessart et Mardaga, 1977. CHOMSKY, NOAM, Réflexions sur le langage, par Judith Milner, Béatrice Vautherin et Pierre Fiala, Paris, F. Maspero, 1977. KLEIN, WOLFGANG, l’Acquisition de langue étrangère, Paris, A. Colin, 1989. KURODA, S.-Y., Aux quatre coins de la linguistique, Paris, Éd. du Seuil, 1979. MOULOUD, NOËL, Langage et Structures, Paris, Payot, 1969. ROUDINESCO, ELISABETH, Initiation à la linguistique générale, Paris, l’Expansion scientifique française, 1967. SAUSSURE, FERDINAND DE, Cours de linguistique générale, Lausanne, Payot, 1916, nouv. éd., 1972.
  • 52. 52 3 La compétence communicative Sommaire 1. La compétence communicative 1.1. Le discours dans la situation de communication 1.2. La communication comme transmission d’une information 1.3. La communication comme compréhension et expérimentations d’une situation 1.4. Les connaissances communes préalables 1.5. Le dialogue et la lecture 2. Analyse de ses composants. 2.1. Les principes de la communication linguistique: la théorie de l’information. 2.2. Les compétences articulatoires: la phonétique. 2.2.1. Genèse des sons 2.2.2. Unités fonctionnelles de l’expression 2.2.3. Principales applications 2.3. Les compétences du vocabulaire: le lexicologie et la sémantique. 2.3.1. Le champ lexicologique 2.3.2. La sémantique 2.3.2.1. La sémantique structurale 2.3.2.2. L’analyse « componentielle » 2.3.3. Le vocabulaire du français 2.3.3.1. Le latin dans le lexique du français. 2.3.3.2. Les emprunts
  • 53. 53 2.4. Les compétences morphologiques et syntaxiques 2.4.1. La morphologie 2.4.2. La syntaxe Introduction Le comportement linguistique d’un locuteur est défini par un couple de concepts: compétence, ou savoir linguistique du locuteur, et perfor- mance, ou réalisation concrète de ce savoir linguistique dans des actes de communication, qu’il s’agisse d’émission (le sujet fait des phrases) ou de réception (le sujet comprend des phrases). Si la compétence permet de produire des phrases selon un modèle de grammaticalité et de déceler dans les phrases émises par les autres les phrases agrammaticales, la performance consiste précisément à émettre ces phrases et à les recevoir. C’est dire que, comme la parole dans la terminologie saussurienne (par opposition à la langue), la per- formance constitue les données observables du comportement linguis- tique. La tâche du linguiste est alors d’élaborer un modèle de la performance linguistique, ce qui suppose qu’on cerne avec suffisamment de précision la notion d’acceptabilité, qui est du domaine de la performance: qu’est- ce qui fait qu’une phrase syntaxiquement bien formée est jugée accep- table ou non acceptable par un locuteur? sa longueur?, le nombre trop élevé d’enchâssements? Les réponses sont ici encore floues, car on ne peut se contenter de critères internes à la phrase elle-même: ils peu- vent également jouer des considérations extrinsèques, comme la nature du message (oral, écrit), son support (journal, affiche publicitaire), etc., qui modifient la performance linguistique où sont en jeu à la fois locu- teur et auditeur. La prise en compte de la performance définit peut-être deux domaines spécifiques de l’analyse linguistique: la psycholinguistique et la sociolin- guistique. En ce sens, le parallèle entre performance et parole ne peut être mené très loin car, si la parole permet de décrire la langue dans la linguistique saussurienne, la grammaire générative essaie d’élaborer pour compétence et performance deux modèles distincts. S’il est vrai que l’une est déterminée par l’autre, elle l’est également par le con- texte et par le locuteur, toutes choses qui, sans être niées, ne sont pas aussi nettement spécifiées chez Saussure.