Glissement conceptuel version 4 de l'exposé de Phil Clauzard
1. du concept de glissement
conceptuel en divers topos
Philippe Clauzard
MCF Université de la Réunion - ESPE
Laboratoire ICARE EA 7389
MOTS CLEFS :
Analyse de l’activité enseignante, didactique professionnelle, secondarisation, glissement conceptuel, médiation, étude de la langue.
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2. Définition didactique standard
du « glissement conceptuel »
Le Glissement Conceptuel = l’instanciation du concept de
secondarisation dans l’apprendre => un observable de secondarisation
dans les transactions d’apprentissage
Secondariser = dépasser la matérialité de la tâche scolaire pour
accéder aux concepts des objets de savoir en question que cette tâche
supporte => abstraire, former des concepts => conceptualiser (concept
de Baktine repris par Beautier et Goigoux)
Le G.C. = Secondarisation pragmatisé : cad. quand il sert à orienter et
à guider l’action ==> concept pragmatique de glissement =>
organisateur de l’activité enseignante dès lors que l’intentionnalité de
l’acte d’enseignement est de faire former des concepts, de conduire à
la formation de concepts, à la conceptualisation.
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Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
3. Le Glissement Conceptuel = un pas de côté,
un passage, une transformation
Sans glissement, que nous qualifions de conceptuel, la classe reste au niveau de
la tâche, non de sa signification référée à l’objet de savoir (Quelles sont les
propriétés générales? À quoi ça sert? En quoi puis-je l’utiliser dans un autre
contexte? )
Les enseignements demeurent au niveau de la matérialité de l’exercice
scolaire…
Avec le glissement conceptuel, il est permis un pas de côté en direction d'une
objectivation, d'une formalisation, d'une compréhension d'un objet de savoir,
d'un objet du monde => glissement vers le haut : avancée; progression
Avec le glissement conceptuel, il est permis un passage du concept outil au
concept objet (cf. Douady), une transformation des connaissances du sujet, des
compétences du praticien, une prise de conscience d’un nouveau savoir
patrimonial (exogène, cf. les apprentissages premiers scolaires) ou d’un nouveau
savoir personnel (endogène, cf. les apprentissages expérientiels professionnels)
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4. Circulation, prise de conscience afin de
marquer le but du jeu d’apprentissage
En grammaire, le glissement conceptuel = un dépassement de l'outil -
langue pour construire une langue - objet => un passage d'un état à
l'autre dans l'appréhension de la langue => passage de l'utilisation à la
compréhension du fonctionnement => passage de l’épilinguistique au
métalinguistique,
En mathématique, c’est passer du symbole à sa signification, de
l’utilisation à l’utilité
En géographie, passer du croquis de paysage à l’objet conceptuel du
paysage façonné par les humains…
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5. Circulation, prise de conscience afin de
marquer le but du jeu d’apprentissage
Toujours, un glissement => circulation entre une connaissance non
consciente et une connaissance consciente, un jeu de prise de
conscience sur le terrain de jeu de l’apprentissage lors de la topogènèse
(cf. Sensevy): on marque le but du jeu d’apprentissage, le but du jeu
qui est la conceptualisation !
G.C. = une circulation dans la conceptualisation avec des paliers de
progression, une montée en abstraction, des ruptures
épistémologiques, une aire intermédiaire avec des vérités provisoires
à instituées, à la mesure du possible de conceptualisation des élèves, des
étudiants ou des professionnels, selon leurs zones de proche
développement (Vygotski, 1997).
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6. Glissement conceptuel et gestuelle de classe
G.C. = un geste de conduite au glissement pour l'enseignant => un geste
d’enseignement pour le professeur => opportunité de piloter les interactions
selon l'état des réponses des élèves et selon les états du savoir
approchés/construits motus proprio par les élèves. Glissement dépendant du
rapport entre les situations/régulations/questionnements didactiques de
l’enseignant et les réponses, les rétroactions des élèves (interactions/transactions
convergentes, divergentes, …) ainsi que l'état des contenus. En fonction de la
méso/chrono et topo genèse…
G.C. = un geste d’étude pour l’élève : c’est bien l’élève qui effectue un
glissement conceptuel afin de conceptualiser un objet de savoir qui sera partagé
par la classe, institutionnalisé par l’enseignant, fixé en mémoire et comme
ressource nouvelle pour le collectif classe et le sujet apprenant…
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7. Processus de trans-formation
Le glissement conceptuel est clairement envisagé comme un processus de
changement de niveau: c'est un glissement vers le « haut » =>
glissement de réussir ou comprendre, de la simple réalisation de la tâche à sa
secondarisation => processus de transformation…
Il est conceptuel dans le sens où l'élève est censé former des concepts en classe
ou bien le professionnel conceptualiser des éléments de sa pratique
professionnelle
Le glissement conceptuel fixe dans la médiation enseignante un acte de
secondarisation, impliquant une décontextualisation de la matérialité du «
faire » vers l’exercice du « penser », un cheminement vers un niveau
supérieur afin de conceptualiser progressivement.
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8. Processus de glissement pour former des
concepts et apprendre
passer à une
dimension
supérieure de
réflexivité sur
l’objet
sortir du faire
pour le penser
sortir de
l’activité pour
la penser
8
glisser par le
haut…
… de la réussite
de l’action à sa
compréhension…
… dans une
dialectique
piagétienne pour
laquelle le « faire »
nourrit le
« penser » puis le
« penser »
rétroagit sur le
« faire »…
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9. - un acte de secondarisation, impliquant décontextualisation de la matérialité du « faire »,
- une prise de conscience d’une compétence incorporée, implicite, inconsciente
- un cheminement de la réussite de l’action à sa compréhension,
- un « geste » pour concrétiser l’acte de faire apprendre (cf. Piaget)
comprendre
9
faire
réussir
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10. divers topos du glissement
APPRENTISSAGES PROFESSIONNELLES
GC vers la révélation de compétences
incorporées, de stratégies professionnelles
GC pour la résolution d’ajustements face à des
incidents didactiques ou pédagogiques
GC vers la mise à jour d’invariants de situation
et de sujet, révélateur de genre et du style
professionnels
les
apprentissages
professionnels
2 lieux d’appréhension
du Glissement Conceptuel
APPRENTISSAGES SCOLAIRES
GC en grammaire, étude de la langue
GC en mathématiques
GC en éducation à la citoyenneté
GC en géographie
GC en formation à la conduite automobile
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savoir professionnel, savoir opératoire
savoir d’action
savoir tacite, compétence critique
action efficace, analyse d’activité
savoir académique, savant
savoir transposé, enseigné
savoir appris compétence & connaissance
action efficace analyse d’apprentissage
et discours d’explicitation
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11. divers topos du glissement
les
apprentissages
professionnels
2 lieux d’appréhension
du Glissement Conceptuel
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endogènes
expérentiels
en contexte
non-didactique
en établissement
exogènes
patrimoniaux
en situation
didactique /a-didactique
en classe
savoir académique, savant
savoir transposé, enseigné
savoir appris compétence & connaissance
action efficace analyse d’apprentissage
et discours d’explicitation
savoir professionnel, savoir opératoire
savoir d’action
savoir tacite, compétence critique
action efficace, analyse d’activité
Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
12. Caractérisation de l‘épisode de glissement
conceptuel scolaire
Episodes de glissement conceptuel => des observables dans les corpus =>
unités fonctionnelles constituant des objets d’analyse.
Repérage par des changements d’état => des décrochements, des
changements de dimension et de registre dans les discours de classe.
L’ « épisode de glissement conceptuel » => un temps dans le flux dialogique
de la classe / G.C. séquence le film des activités de la classe.
Épisode de glissement => un élément constitutif du scénario didactique
(mais pas toujours conscient chez l’enseignant) => un échange verbal, entre
enseignant et élèves.
L’enseignant => l’instigateur, mais pas exclusivement. Il est induit et piloté
par l’enseignant pour être effectué par les élèves.
La fin de l'épisode => observer les effets cognitifs atteints: concept en
formation…
12Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
13. Caractérisation de l ‘épisode de glissement
conceptuel professionnel
Épisodes de glissement conceptuel => des observables dans les corpus
=> unités fonctionnelles constituant des objets d’analyse.
Repérage par des changements d’état => des décrochements, des
changements de dimension et de registre dans les discours du praticien en
autoconfrontation, lors de son débriefing, en situation d’explicitation…
L’ « épisode de glissement conceptuel » => un temps dans le flux dialogique
/ G.C. séquence le film des activités de la classe.
Épisode de glissement => un élément constitutif du scénario dialogique
(mais pas toujours conscient) => un échange verbal, entre formateur et
praticien => sémantiquement : ça correspond à une prise de conscience…
Le formateur => l’instigateur, mais pas exclusivement. Il est induit et piloté
par le formateur pour être effectué par le praticien.
La fin de l'épisode => observer la mise en exergue d’une compétence
inattendue, inavouée à soi-même comme une évidence.
13Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
14. Concept de « secondarisation » = une visée didactique.
Changer de dimension…
Extraire de la conjoncture, des aspects contextuels afin de constituer un objet second…
Selon la dialectique genre premier et genre second de Baktine…
Ce terme trouve son origine dans la distinction faite par Bakhtine (1984) entre genre de
discours premiers et genre de discours seconds. Les genres premiers relèvent d'une
production spontanée, immédiate, située dans un contexte duquel ils émergent,
suscitée et n’existant que par leur environnement. Schneuwly (1994) explicite qu’«ils
naissent de l’échange verbal spontané, ils sont fortement liés à l’expérience personnelle
du sujet ». (Schneuwly B., Genres et types de discours : considérations ontogénétiques
et et psychogénétiques, In Reuter, Y. (dir) : Les interactions lecture- écriture, Actes du
colloque Theodile-Crel, Bern, Peter Lang, 1994, p. 155-175. )
Les genres seconds sont fondés sur les premiers qu'ils travaillent de manière à évacuer
tout référencement à la conjoncturalité de leur production. À la spontanéité première,
succède un ressaisissement des mots et des idées qui donne une envergure
supérieure, une finalité autre, « une production discursive qui signifie bien au-delà de
l’interaction (initiale) dans laquelle elle peut conjoncturellement se situer » (Bautier,
Goigoux, 2004).
Concept repris par Goigoux, Bautier pour parler des difficultés d’apprentissage…
Retour sur la théorie didactique de la secondarisation
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15. Transposé du champ littéraire au champ scolaire, la notion de secondarisation
implique simultanément décontextualisation et adoption d'une autre finalité d'un ordre
supérieur.
Aux côtés d’activités scolaires « secondes » que nous définissons comme des
activités de conceptualisation, les activités scolaires « premières » ou pragmatiques
représentent pour les élèves des actions du type coller des vignettes, relier par un
trait, remettre en ordre des images, remplir un énoncé à trous, compléter, déplacer,
remplacer...
Un certain nombre d'élèves demeurent aux traits de surface de la situation didactique,
ils s'enferment d'une certaine manière dans l'action, l'agir scolaire immédiat et
n’accèdent pas de manière évidente ou automatique au registre supérieur.
Certains enfants décodent l'implicite scolaire de « secondarisation ». Ils peuvent
activement échanger avec le maître d'école de telle manière qu'un discours
« second » se développe dans les interactions de classe, tandis que d'autres ne
peuvent ou ne veulent pas suivre.
Certains chercheurs avancent des hypothèses de nature sociocognitive et
sociolangagière (Bautier E., Goigoux, R. Difficultés d’apprentissage, processus de
secondarisation et pratiques enseignantes : une approche relationnelle, In Evaluer et
comprendre les effets des pratiques pédagogiques, Revue Française de Pédagogie,
INRP, n°184, 2004, p. 91.)
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Retour sur la théorie didactique de la secondarisation
Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
16. Pour penser sur le « faire », sur l'action d’ explicitation, la tâche scolaire
prétexte à apprentissage…
Plus simplement, pour décoller de la matérialité du « faire » ou du
« dire » et exercer des activités de pensées sur le « dire » et le « faire » :
dire sur le « dire » et sur le « faire »…
Favoriser l'abstraction, l'universalité, le transfert…
Réfléchir sur les objets, exercer des activités de pensée sur les objets…
Glisser => être sur la voie de la formation du concept, car on a changé
de dimension : on est passé dans l'exercice de la pensée sur les objets,
constitutif éventuellement de plusieurs paliers de micro
conceptualisations successives (cf. la conceptualisation grammaticale)
Secondariser, c'est-à-dire effectuer un glissement conceptuel
c'est une condition essentielle pour apprendre et faire
apprendre.
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glisser pour secondariser
Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
17. glisser pour secondariser
Conduire en glissement conceptuel est un geste d'enseignement pour
le professeur.
Effectuer un glissement conceptuel est un geste d'études pour l’élève.
Sur le terrain d'un jeu didactique, après être rentré dans le jeu, se
prendre au jeu et jouer le jeu, il s'agit bien de marquer le but du jeu :
effectué un glissement conceptuel de manière à former le concept qui
est une visée du jeu d’apprentissage.
Lors de régulation et d'étayage, le professeur va conduire et aider le
jeu de sorte que les élèves pensent le jeu, pensent à ce qu'ils
viennent d'effectuer (exercice de métacognition) et qu'ils pensent le
jeu, qu’ils pensent le jeu même ( exercice de secondarisation).
Ainsi s’atteint le dernier échelon du jeu : fixer et partager le savoir,
c'est-à-dire finir en la matière le jeu.
17Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389
18. glissement, conceptualisation,
marque du but du jeu d’apprentissage
18
rentrer dans le jeu
marquer le but du jeu
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19. genèse du concept
À partir d’une recherche doctorale sur la médiation grammaticale pour comprendre comment
les enseignants enseignent-ils la grammaire?
À partir d’observations d’illusions d’apprentissage en tant que praticien et chercheur?
À partir d'analyse de corpus sur les interactions de co - activité professeurs et élèves…
Mettant à jour des changements de dimension dans les verbatims, dans le flux dialogique de la classe,
Mise en relief d’épisodes spécifiques où il se passe une activité intellectuelle forte chez les élèves dans
la classe, que le professeur provoque ou bien sur laquelle il rebondit…
Un jeu de conceptualisation en train de se dérouler, Un jeu de circulation par la conceptualisation
apparaît, en liaison avec une configuration propre au savoir grammatical et ce que les élèves peuvent
en conceptualiser de façon provisoire à institué…
Observation de plusieurs paliers d'appréhension et compréhension du fait grammatical, en
correspondance a des paliers de conceptualisation : dimension sémantique (le sens des phrases: qu
est-ce qui ?,) dimension textuelle (le sens du texte : de quoi on parle?), dimension morpho-syntaxique
(l’orthographe: quelle la marque du pluriel/singulier?), dimension syntaxique (la linguistique, quels sont
les constituants essentiels ou non essentiels, supprimables,, modifiables… ?)
Entrée dans l'analyse grammaticale par la grammaire structurale de Chomsky et entrée dans l'activité
didactique de l’enseignant par la théorie de l'action conjointe (Gérard Sensevy, rapporteur de la thèse
au jury de soutenance),
Principes et méthodologie de l'analyse du travail issus de la didactique professionnelle (Pierre Pastré,
directeur de recherche du conservatoire national des arts et métiers…)
19Philippe Clauzard MCF Université de la Réunion – ESPE Laboratoire ICARE EA 7389