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Table des matières
Introduction.........................................................................................................................................2
I-D'Haussmann à Hénard (1855-1914): le Pari(s) souterrain..............................................................4
    A-Le préalable, la complexité du sous-sol parisien........................................................................4
      1-Des traces du passé omniprésentes.........................................................................................4
      2-Les carrières, 1/10e de la surface de la capitale......................................................................4
      3-Un cadre juridique contraignant : un même propriétaire de la surface au centre de la Terre. 5
    B-Les travaux des ingénieurs Belgrand et Mille.............................................................................5
      1-Les égouts : hygiène et galerie porteuse.................................................................................5
      2-L'apport d'eau de source : canalisations et réservoirs.............................................................6
    C-Le métro de Bienvenüe...............................................................................................................6
      1-Une première ligne inaugurée en 1900...................................................................................6
      2-Suivre les itinéraires de surface..............................................................................................7
      3-Pas de croisement à niveau.....................................................................................................7
    D-Les projets non-conformistes d'Eugène Hénard.........................................................................7
      1-La conférence de Londres en 1910 sur la planification des villes..........................................7
      2-Le cas de la rue Paul Cézanne................................................................................................8
 II-Le Paris souterrain d'Utudjian (1933-1975) : des infrastructures automobiles aux équipements.. 9
    A-Historique du GECUS et du CPIUS...........................................................................................9
    B-Du rêve des autoroutes souterraines.........................................................................................10
      1-Les projets du GECUS..........................................................................................................10
      2-Les réalisations de passages souterrains...............................................................................10
   C- à la réalité des parkings souterrains........................................................................................11
      1-1957 : premier parking souterrain.........................................................................................11
      2-Le recours à la concession....................................................................................................11
    D-Le RER, une intervention complexe et coûteuse......................................................................11
    E-La notion de « ville épaisse » à travers les immeubles souterrains..........................................12
      1-Les deux fonctions initiales de l'immeuble souterrain..........................................................12
      2-Une nouvelle fonction, les équipements...............................................................................12
    F-L'urbanisme souterrain et Édouard Utudjian : premier bilan....................................................13
      1-Édouard Utudjian, son itinéraire et sa personnalité..............................................................13
      2-Les travaux d’Édouard Utudjian dans la presse grand public..............................................14
III-Bilan, autres pistes et après le GECUS........................................................................................15
    A-Dresser un bilan : recourir de façon réaliste à l'urbanisme souterrain......................................15
      1-Introduire une discipline.......................................................................................................15
      2-Considérer les contraintes avec réalisme..............................................................................15
      3-Intégrer le sous-sol dans une politique globale.....................................................................15
      4-La « Ville intérieure » de Montréal et Subtropolis à Kansas City........................................16
    B-Les épigones du GECUS : une évolution de l'architecture vers l’ingénierie............................16
      1-De « Espace souterrain » au « Comité Espace souterrain » de l'AFTES..............................16
      2-ITACUS, le successeur du CPIUS........................................................................................16
      3-Mastère Tunnels et ouvrages souterrains..............................................................................17
    C-Prospective : de Maymont à Fromboluti...................................................................................17
      1-Paul Maymont et Max Abramovitz.......................................................................................17
      2-Fromboluti : projet « Above Below »...................................................................................17
Conclusion.........................................................................................................................................19
Bibliographie et sources :..................................................................................................................20




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Introduction
La Cité de l'Architecture propose, jusqu'au 24 juillet 2011, une exposition intitulée « La Ville fertile,
vers une nature urbaine ». A travers la présentation de différents projets en cours, à venir ou purement
prospectifs, cette exposition tente de montrer que la (ré)conciliation entre la ville et la nature est
possible, sous réserve de modifier nos habitudes. Il convient, notamment, de « densifier » le tissu
urbain pour dégager de l'espace libre colonisable par la nature.
Par ailleurs, le début des travaux de réaménagement des Halles, sur le projet de Patrick Berger, a remis
au premier plan la vaste réflexion qui avait précédé le gigantesque chantier du quartier des Halles, il y a
plus de quarante ans.
C'est dans ce contexte que les travaux d’Édouard Utudjian (re)prennent un relief particulier.
Rappelons sa biographie en quelques traits. Édouard Utudjian est un architecte franco-arménien. Il est
né à Istanbul en 1905 et meurt à Paris en 19751. Après son baccalauréat obtenu en Turquie, il arrive à
Paris et se lance dans des études d'architecture à l’École nationale supérieure des beaux-arts. Il est
diplômé en 1929, après avoir suivi l'enseignement de Pontrémoli, grand prix de Rome 1890. Il
fréquente l'atelier d'Auguste Perret et suit avec assiduité les conférences de Le Corbusier.
On peut classer, de façon schématique, ses interventions « classiques » en deux domaines : tout d'abord
la construction et la restauration d'églises arméniennes dans plusieurs pays : en Arménie, bien sûr, mais
aussi aux États-Unis, en Suisse et à Jérusalem : il y restaure les espaces arméniens du Saint-Sépulcre.
Ensuite des réalisations en France et notamment des équipements : des stations d'épuration (Achères,
Rouen, Bordeaux, Cholet, Athis-Val, Calais), des hôpitaux (Magny-en-Vexin, Fondation Winburn à
Bièvres), des écoles (Magny-en-Vexin, Port-Marly), des usines, des garages et des dépôts. Il construit
également des bâtiments de logement (Paris, Poitiers, Châtellerault) et des immeubles de bureaux.
Il enseigne dans différentes écoles dont les Beaux-arts, l’École spéciale d'architecture ou encore le
Conservatoire national des arts et métiers.
Mais sa grande passion est l'urbanisme souterrain et c'est bien cet aspect de son travail qui entre en
résonance avec l'actualité citée supra. Comme l'écrit Michel Ragon, dans la préface de L'Architecture
et l'urbanisme souterrains2, « Édouard Utudjian est l'homme d'une idée neuve : l'urbanisme
souterrain. A cette idée, il a voué toute sa vie ». En 1933, il fonde le Groupe d'études et de coordination
de l'urbanisme souterrain (GECUS), qu'il anime toute sa vie. Il crée la revue Le Monde souterrain,
publiée de 1933 à sa mort, dont la collection, reliée, constitue L’Encyclopédie du monde souterrain. En
1952, son ouvrage L'Urbanisme souterrain est publié dans la célèbre collection « Que sais-je ? »3. Il est
également nommé secrétaire général du Comité permanent international de l'urbanisme souterrain
(CPIUS), qui internationalise le GECUS.
A l'heure où les déclarations en faveur de la densification et de la lutte contre l'étalement urbain font
florès, il est opportun de (re)découvrir la « ville épaisse », comme aime à en parler Édouard Utudjian.
Si Édouard Utudjian est sans doute un des premiers à utiliser le terme d'« urbanisme souterrain » et à
en théoriser l'idée, d'autres avant lui ont, à la manière de Monsieur Jourdain, fait de l'urbanisme
souterrain sans le savoir. Il convient donc d'aborder la question en brossant un tableau synthétique mais
éclairant des prédécesseurs à partir du milieu du XIXe siècle.
Édouard Utudjian a sans doute influencé nombre de réalisations souterraines à travers le monde.
Cependant c'est sur le cas de Paris que le GECUS a le plus travaillé et c'est encore sur Paris que les
préconisations du chantre de l'urbanisme souterrain ont rencontré le plus d'échos et déclenché le plus
de réactions. Le cœur de cette étude concerne donc Paris.
Enfin l'urbanisme souterrain connaît d'autres développements, notamment sur le continent américain, et
l’œuvre d’Édouard Utudjian a des continuateurs qui militent toujours pour la reconnaissance de l'intérêt
du sous-sol. On ne peut donc faire l'économie d'un tour d'horizon de l'urbanisme souterrain à côté et

1 La biographie qui suit doit beaucoup à la notice d'introduction au fonds Utudjian, disponible sur le site de la Cité de
  l'architecture et du patrimoine (www.archiwebture.citechaillot.fr).
2 Édouard Utudjian, Architecture et urbanisme souterrains, Paris, Robert Laffont, 1966
3 L'illustration de couverture est extraite de ce Que sais-je ?, p.104

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après Édouard Utudjian.




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I-D'Haussmann à Hénard (1855-1914): le Pari(s) souterrain.

Qui s'intéresse au sous-sol parisien, quelle que soit l'époque, relève en premier lieu sa complexité. En
outre on ne peut faire l'économie d'un rappel de l’œuvre du baron Haussmann et de ses ingénieurs et de
celle de Fulgence Bienvenüe. Enfin, au nombre des prédécesseurs d'Utudjian, figure aussi Eugène
Hénard.


A-Le préalable, la complexité du sous-sol parisien

La complexité est de trois ordres : traces du passé, présence des carrières de pierres et cadre juridique
délicat.


1-Des traces du passé omniprésentes

L'histoire de Paris, depuis l'île des Parisii sur la Seine jusqu'à la destruction des fortifications, se lit à
livre ouvert dans son sous-sol, bien souvent à une très faible profondeur (moins de six mètres, soit
environ deux étages de sous-sol). De nombreux ouvrages ont été écrits sur le sujet et d'autres viendront.
Ainsi, comme de toutes les villes qui ont une histoire multiséculaire, le sous-sol est riche des traces de
ce passé. Et surgit inévitablement le conflit entre tenants d'une conservation et d'une protection des
sites archéologiques à tous crins et défenseurs des constructions et de l'urbanisme. Comme souvent, la
vérité est à mi-chemin, tout est question de place du curseur.
Une polémique, née à la fin des années 1960, résume parfaitement cet état de fait. Il s'agit de l'affaire
de la construction d'un parking souterrain sous le parvis de Notre-Dame. Les travaux d’excavation
donnent lieu à une campagne de fouilles. Elle est menée par Michel Fleury, le Secrétaire général de la
Commission du Vieux Paris. A l'issue, il affirme que les travaux peuvent être lancés, que tout ce qui
représente une quelconque valeur archéologique a été mis au jour. A contrario, d'autres, tels Henry
Bernard, considèrent qu'il reste encore de très nombreux sanctuaires et bâtiments religieux sur ce site.
Il propose une autre implantation pour le parking souterrain, à l'est de la cathédrale 4 5. En conséquence
cette omniprésence du passé apparaît comme un facteur de grande complexité pour les travaux
souterrains : toute intervention peut donner lieu à une campagne de fouilles qui, au mieux, ralentit le
chantier et au pire l'annihile.


2-Les carrières, 1/10e de la surface de la capitale

Pendant des centaines d'années, le sous-sol de Paris est mis à contribution pour en extraire la pierre.
C'est le Second Empire qui y met un terme avec l'arrivée du chemin de fer : celui-ci permet de recourir
à des carrières à ciel ouvert distantes pour un coût moindre.
Ce véritable « gruyère » est la cause de nombreux désagréments. La fin du XVIII e siècle connaît
plusieurs effondrements sérieux. Ces accidents soulignent en creux un élément essentiel relativement
au sous-sol : la mémoire des lieux est indispensable, non seulement pour les interventions souterraines
futures mais aussi pour agir efficacement et en sécurité en surface. C'est à la suite de ces événements
qu'est créé le Service des carrières qui fait un état des lieux, dresse une cartographie du sous-sol et fait
maintenir des galeries de visite sous de nombreuses rues de Paris pour surveiller l'état des
4 Voir à ce sujet : Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°3 « Le sous-sol de Paris et l’urbanisme – Les Champs
  Élysées », Paris, 1970, p. 11 et s.
5 Voir le recueil d'illustrations en annexes.

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consolidations. Cette cartographie précise a toujours pêché par la faiblesse de ses mises à jour et
aujourd'hui, avec la multiplication des réseaux6, il est encore légitime de s'interroger sur l'existence
d'un document de synthèse du paris souterrain exhaustif et correctement mis à jour 7 et sur le rôle
respectif des services municipaux et des entreprises concessionnaires.


3-Un cadre juridique contraignant : un même propriétaire de la surface au centre de la Terre.

L'article 552 du Code civil stipule que le tréfonds ne bénéficie pas d'un régime particulier en matière de
droit de propriété. Cette disposition a des conséquences essentielles pour l'urbanisme souterrain. En
effet, pour éviter des procédures longues et aux chances d'aboutissement réduites et tout contentieux
avec les propriétaires, les infrastructures souterraines doivent être construites au droit des espaces
publics de surface. Ainsi, les voies de circulation souterraines, comme les métros, doivent suivre
scrupuleusement le tracé des voies de surface. Cette contrainte juridique est souvent plus lourde que les
contraintes techniques d'intervention sous nappe ou dans des couches géologiques défavorables et
limite de fait en France les projets d'urbanisme souterrain.

Si Édouard Utudjian est le premier à théoriser l'urbanisme souterrain, il connaît d'illustres
prédécesseurs, au premier rang desquels figure le préfet de Paris, baron Haussmann dont on cite
toujours les percées dans le Paris médiéval mais qui est aussi à l'initiative de gigantesques travaux
souterrains.


B-Les travaux des ingénieurs Belgrand et Mille

Ces deux ingénieurs ont travaillé sous les ordres du baron Haussmann respectivement à la question de
l'eau et des égouts.


1-Les égouts : hygiène et galerie porteuse

A Paris, la conception et la construction des égouts se développent surtout à compter de la deuxième
moitié du XIXe siècle. A partir de 1855, c'est le baron Haussmann, secondé par l'ingénieur Mille, qui
développe une grande partie du réseau tel que nous le connaissons aujourd’hui 8. La loi sur le tout-à-
l'égout est postérieure, elle date de 1894 et en 1910 est conçue la première tranche de la station
d'épuration d'Achères, sur laquelle Édouard Utudjian fera d'importants travaux de modernisation et
d'agrandissement au tournant du XXe siècle. Ainsi la question de l'évacuation des effluents prend un
tournant décisif en cinquante ans, ce qui est extrêmement rapide compte tenu de l'ampleur de
l'entreprise.
Le développement des égouts est un apport essentiel en matière d'hygiène et un tour de force
technique : en effet, l’ensemble des galeries a été creusé à la main. Mais au-delà de la stricte question
de santé publique, le développement des égouts a aussi apporté une novation technique supplémentaire.
Le creusement de galeries, de section ovoïde, permettant à un homme de se tenir debout est une
nouveauté essentielle : elle inaugure les galeries dites « visitables », permettant les interventions de
6 Notamment les réseaux enterrés, sans galerie de visite ; on peut penser en particulier à la question d'actualité de la fibre
  optique.
7 L'APUR avait mis au point, au début des années 1970, un « Atlas du Paris souterrain » qui recensait dix réseaux :
  égouts, eau potable, eau non potable, galeries de câbles électriques, électricité moyenne tension, électricité basse tension,
  gaz, téléphone, chauffage urbain et air comprimé ; à cela s'ajoutaient les parkings souterrains, les carrières et galeries et
  les sous-sols profonds d'immeubles, le tout au 1/5000e. Quid également de l'échelle à retenir : le 1/5000e permet d'avoir
  une vision globale mais le détail des réseaux nécessite d'aller jusqu'au 1/200e.
8 Le réseau représente aujourd'hui plus de 2000 kilomètres, contre 140 kilomètres au tournant du XIX e siècle.

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maintenance. Par ailleurs, et c'est sans doute là que réside la nouveauté et le génie de ses concepteurs,
la voûte de la galerie accueille un berceau qui porte des conduites d'eau potable puis le télégraphe, le
pneumatique et le téléphone9. Ces réseaux sont donc accessibles facilement et peuvent être réparés sans
éventration de la chaussée. Il faut noter à ce propos que le contrat de fourniture d'air comprimé n'a été
résilié par la ville de Paris qu'en 199410. Ensuite les réseaux de gaz, d'électricité et de chauffage urbain,
sont, pour des raisons de sécurité, installés dans des ensembles autonomes enterrés sous les trottoirs
mais la plupart du temps non visitables, entraînant un retour en arrière en terme d'urbanisme souterrain.


2-L'apport d'eau de source : canalisations et réservoirs

Si Mille est le spécialiste des égouts, c'est Eugène Belgrand qui apporte sa pierre à l'édifice souterrain
en matière de distribution d'eau potable et non potable. Il propose au préfet de Paris de séparer les
réseaux d'eau potable et d'eau non potable et d'alimenter Paris non plus en eau de rivière mais en eau de
source, ce qui représente une révolution, l'eau de source ayant mauvaise presse au XIX e siècle. Du coup
cette proposition rencontre une très grande hostilité de la population. Il crée notamment le grand
aqueduc de la Vanne et le réservoir de Montsouris qui peut recevoir plus de 200 000 m 3 d'eau. Les
canalisations d'eau, potable et non potable, en fonte, représentent chacune environ 1600 km ; elles sont,
pour la plupart, fixées aux voûtes des égouts ; seules les plus grosses canalisations sont indépendantes
et installées dans des galeries indépendantes de façon à être facilement visitées.

Les travaux souterrains des ingénieurs d'Haussmann sont donc exceptionnels à plus d'un titre. Ils
propulsent Paris dans la modernité et ouvrent la voie à ce qui sera le cœur de l'urbanisme souterrain à
Paris, le métropolitain.


C-Le métro de Bienvenüe

Paris poursuit la course en tête en matière d'urbanisme souterrain avec la construction de son métro par
l'ingénieur Fulgence Bienvenüe. Trois éléments peuvent être retenus : la lenteur de l'accouchement, la
contrainte de propriété du tréfonds et la question des croisements de voies.


1-Une première ligne inaugurée en 1900

Compte tenu de la forte croissance démographique de Paris 11, des problèmes de circulation et de
transport urbain apparaissent dans le courant du XIXe siècle. Très vite la solution d'un chemin de fer
urbain en « site propre » se dégage comme la seule viable. Les premiers projets voient le jour au milieu
du XIXe siècle mais se heurtent à différentes difficultés : absence de concession ou oppositions entre la
ville et l’État sur le type de desserte. Finalement, c'est l'échéance de l'Exposition Universelle de 1900
qui débloque la situation : le chemin de fer métropolitain est souterrain et électrique, comme celui de
Londres ; ce mode de traction résout le problème principal de l'évacuation des fumées qu'aurait posé
une machine à vapeur.




9 Voir illustration en annexe.
10 Contrat liant la Ville de Paris et la Compagnie des Horloges Pneumatiques (qui deviendra ensuite la Compagnie
   Parisienne de l’Air Comprimé puis la Société urbaine d'air comprimé (SUDAC)) depuis le début des années 1880.
11 Paris passe de 500 000 habitants à la fin du XVIIIe siècle à deux millions à la fin du XIXe siècle.

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2-Suivre les itinéraires de surface

Comme cela a été évoqué supra, se pose la question de la propriété du sous-sol. Il est décidé de suivre
les itinéraires de surface, afin d'éviter les trois écueils suivants : risque de dommages aux propriétés
riveraines, difficulté d'exécution des travaux en sous-œuvre et coût des indemnités pour l'acquisition de
la propriété du tréfonds. Ce schéma se heurte à un autre obstacle, celui des collecteurs d'égouts axiaux
qu'il faut contourner. Apparaît ainsi un autre élément souligné supra, celui de l'encombrement du sous-
sol ; il ne va qu'en s'accroissant, en raison de l'absence d'un schéma directeur global qui prendrait en
compte l'évolution de la ville dans toute son épaisseur, c'est-à-dire à la fois la surface et le sous-sol.


3-Pas de croisement à niveau

Les différentes voies du chemin de fer métropolitain ne peuvent se croiser à niveau ; elles doivent
obligatoirement passer les unes au dessus des autres. Cela accroît la difficulté des travaux puisqu'il faut
créer des échangeurs souterrains qui permettent aux voyageurs de passer d'une ligne à l'autre. Cet autre
élément est essentiel en matière d'urbanisme et d'aménagement au sens global, puisqu'il préfigure
l'empilement des échangeurs autoroutiers imaginés par Utudjian pour ses autoroutes souterraines et
réalisés pour les autoroutes aériennes partout à travers le monde.

Un autre pionnier du « pré-urbanisme souterrain » se révèle de façon contemporaine au développement
du métro parisien, il s'agit d’Eugène Hénard.


D-Les projets non-conformistes d'Eugène Hénard

Eugène Hénard projette la réalisation de multiples rues souterraines ; une seule a été réalisée à Paris.


1-La conférence de Londres en 1910 sur la planification des villes

Eugène Hénard commence par y dénoncer la façon dont les conduites de gaz et d'électricité parisiennes
sont enterrées sous les trottoirs « sans ordre ni méthode » et les conséquences que cela entraîne en
matière de maintenance. Il regrette également l'absence de plan qui permettrait la coopération des
différents acteurs, Administration et concessionnaires.
Il considère que le recours au sous-sol va s'accentuer avec l'installation de conduits d'évacuation de la
poussière, la multiplication de l'usage des pneumatiques pour le courrier, l'installation d'un réseau de
tuyaux d'air liquide pour les systèmes de réfrigération, des conduits de pétrole et même des conduits
pour le transport de l'eau de mer ou de l' « air pur », pour des usages à définir.
Mais sa grande idée est celle de la surélévation de la rue pour permettre l'installation au niveau du sol
naturel d'une « rue de service sous chaussée », équipée de quatre voies de trains de marchandises. Il
prévoit également un niveau supplémentaire pour les maisons riveraines afin de permettre les
communications avec cette rue souterraine. Cette rue de service est notamment prévue pour
l'enlèvement des ordures et le transport des marchandises pondéreuses. Entre la rue suspendue et la rue
de service un faux-plafond accueille tous les conduits cités supra12.
En conclusion de sa communication, il estime que le temps est proche du développement d'une « rue à
étage », les étages se multipliant en fonction de la croissance du trafic.

12 cf. les illustrations en annexe.

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Par de nombreux aspects, Eugène Hénard fait preuve d'une grande naïveté. Ses projets éludent
notamment toutes les questions juridiques et géologiques. Mais dans le même temps, ses projets
préfigurent l'urbanisme de dalle13 et son analyse de l'existant est cohérente : il souligne avec justesse le
grand désordre de l'enterrement des canalisations, l'absence de coopération entre les acteurs et, de
façon subséquente, le manque de cartographie du sous-sol.


2-Le cas de la rue Paul Cézanne14

Dans les années 1930, les architectes Louis Plousey et Urbain Cassan créent une voie privée entre la
rue du Faubourg Saint-Honoré et la rue de Courcelles pour lotir une parcelle. En effet cette rue est à
deux niveaux, de même largeur ; on accède au niveau inférieur par deux rampes d'accès et de sortie qui
ont été construites à l'intérieur des bâtiments. Il est encadré de poteaux en béton pour éviter les
restrictions de passage des véhicules sur le niveau supérieur. L'éclairage est fourni par des pavés de
verre qui habillent les trottoirs du niveau haut.
Ce projet doit irréfutablement aux idées d'Eugène Hénard : bien que cette rue souterraine ne conduise à
aucun réseau, les deux architectes ont retenu l'idée de l’organisation des fluides; ils ont ménagé des
galeries sous le niveau inférieur pour les y loger.
Cette unique réalisation parisienne montre que les bonnes propositions développées par Eugène Hénard
ont malheureusement été desservies par l'aspect illusoire de nombre d'autres.

Cette première période, qui court grosso modo du milieu du XIX e siècle au lendemain de la Première
Guerre mondiale, peut être qualifiée de « pré-urbanisme souterrain ». En effet, c'est Édouard Utudjian
qui définit le terme à compter de 1933 avec la création du Groupe d'études et de coordination sur
l'urbanisme souterrain (GECUS). En revanche, elle se révèle d'une grande modernité : le baron
Haussmann et ses ingénieurs entament une conquête du sous-sol relativement organisée. Les
interventions postérieures n'ont pas ce souci, ce que souligne avec justesse Eugène Hénard.




13 Voir à ce sujet : Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, Sols artificiels, sursols, dalles : étude historique
comparative, Paris, Atelier parisien d'urbanisme, 2005.
14 Voir à ce sujet l'article de Gabriel Morice « Immeubles avec rue souterraine, 168 à 172 rue du Faubourg St-Honoré, 25 à
   29 rue de Courcelles, à Paris », L'Architecture, 15 février 1932, p. 44-52, cité par Castex, Blain et Lefebvre, op. cit.

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II-Le Paris souterrain d'Utudjian (1933-1975) : des infrastructures automobiles aux
     équipements.

Cette période est fortement influencée par Édouard Utudjian qui rêve d'autoroutes souterraines et pense
sérieusement la question du stationnement souterrain. Les transports souterrains entrent dans une
nouvelle phase avec le Réseau express régionale (R.E.R.) pendant que les premiers équipements
souterrains hors transport voient le jour.


A-Historique du GECUS et du CPIUS
Édouard Utudjian s'intéresse à l'urbanisme souterrain assez jeune, après être tombé dans la collection
de L'Illustration de son grand-père dans laquelle figuraient plusieurs articles sur le sous-sol. Cette
passion ne le quitte pas, une fois son diplôme d'architecte en poche. En 1933, alors qu'il est diplômé
depuis quatre ans, il fonde avec quelques amis le Groupe d'études du centre urbain souterrain, qui
devient ensuite le Groupe d'études et de coordination de l'urbanisme souterrain. Il est créé suite à une
visite collective organisée en janvier dans les magasins OCEL 15. Le projet initial est « l'étude de
plusieurs centres souterrains dans une agglomération dense »16 et assez tôt Édouard Utudjian a
conscience de la nécessité d'internationaliser le mouvement. C'est pourquoi le GECUS organise à Paris
en 1937, parallèlement à l’Exposition internationale des Arts et Techniques, le premier Congrès
international d'urbanisme souterrain à l'issue duquel est créé le Comité permanent international de
l'urbanisme souterrain, dit C.P.I.U.S. Édouard Utudjian en devient naturellement le secrétaire général.
Quatre autres congrès ont lieu ensuite à Rotterdam en 1948, en Scandinavie en 1959, à Varsovie en
1965 et à Madrid en 1968.
Le GECUS et le CPIUS éditent conjointement une revue en français, « Le Monde souterrain » dont les
numéros entre 1947 et 1975 ont été reliés pour former L'Encyclopédie du monde souterrain. Cette
revue, malgré le fort sentiment de redite souligné supra, est une mine de documents sur la vie du
mouvement qui semble assez actif : on y trouve des comptes-rendus de congrès, les dates et lieux des
conférences données par Utudjian ainsi que nombre de notes nécrologiques publiées à la mort de ses
membres.
Le rôle du GECUS ne se limite pas à Paris, même si c'est son terrain de jeu favori. Outre les projets de
métros dans différentes capitales européennes, on trouve dans les archives 17 la trace d'un projet fort
documenté de tunnel sous la Manche, appelé « Tunnel sous le Pas-de-Calais, » développé dans le cadre
d'un comité interne au GECUS créé dès 1937 et auquel participe notamment Jean Tschumi18.
Les deux organisations ne survivent pas à leur créateur mais Utudjian se targue d'avoir réussi à
intéresser de « nombreuses personnalités » parmi lesquelles il cite Henri Prost, Auguste Perret ou
Pierre Lavedran.




15 « L'OCEL s'élève à l'angle du boulevard Haussmann et de la rue Taitbout, dans un vieil immeuble que viennent de
   transformer Albert Laprade et Bazin. Building d'affaires, construit dans ce Louis XVI neutre qui foisonne autour de
   l'Opéra ; cependant., il comprenait deux étages de sous-sols dont, jusqu'alors, personne n'avait tiré parti ; dès le premier
   moment, Laprade et Bazin, au contraire, crevaient ces caves pour étendre en profondeur la superficie de l'office - et de
   fait, avec l'entresol et le premier étage dont disposaient déjà les Secteurs, leurs magasins se superposent maintenant sur
   quatre étages…. », cité dans la revue « La construction moderne » du 21 Août 1932
16 Le Monde souterrain, n°100, avril 1957, p. 415
17 Le Monde souterrain, n°101, juin 1957, p. 477
18 Jean Tschumi est un architecte suisse qu’Édouard Utudjian connaît depuis les Beaux-arts puisqu'ils ont eu le même chef
   d'atelier en la personne d’Emmanuel Pontremoli. C'est le père de Bernard Tschumi.

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B-Du rêve des autoroutes souterraines...

Édouard Utudjian et le GECUS formulent de nombreux projets pour la circulation automobile sous la
capitale.


1-Les projets du GECUS

Cette création est le résultat du constat de la faible utilisation du sous-sol et plus prosaïquement de
l'état de la circulation automobile dans Paris. L'extrapolation du nombre de véhicules roulants dans les
années 1930 fait craindre un blocage généralisé pour la décennie suivante. C'est à partir de cette étude
que le GECUS propose plusieurs projets successifs d'autoroutes souterraines visant à désengorger la
capitale19. Ces différentes versions, détaillées par Édouard Utudjian dans son Que sais-je ?20, ont
plusieurs points communs. Elles prennent comme point de départ l'ensemble des voies existantes ou
projetées qui débouchent sur Paris et prévoient de les relier entre elles. Elles visent ensuite à
rationaliser la circulation en prévoyant sous la surface différents nœuds routiers observés comme
essentiels à la desserte des différents quartiers. Ces nœuds forment l'armature d'une trame et sont reliés
par des voies. C'est à ces points névralgiques qu'est prévue la liaison avec la surface et les liaisons entre
voies. En effet, le but recherché est l'absence de croisement à niveau car ce sont ces croisements qui en
surface obèrent la fluidité du trafic. Il est donc envisagé des rampes pour assurer ces connexions. Un
dessin de Jean Tschumi, présenté lors de l'Exposition internationale des Arts et Techniques de 1937 21,
sensé illustrer ces rampes hélicoïdales, est symbolique de leur démesure et du caractère extravagant de
ces projets. Pourtant le GECUS, en les modifiant, ne cesse de revenir à la charge avec cette idée. Lors
d'un débat, organisé par l'Atelier parisien d’urbanisme (APUR) en 1970 et dont les minutes sont
transcrites dans le Paris Projet n°322 , Édouard Utudjian revient sur ce projet qu'il n'a jamais abandonné.


2-Les réalisations de passages souterrains

Si le GECUS voit ses multiples projets d'autoroutes souterraines retoqués, une partie de ses idées est
tout de même exploitée et mise en œuvre. En effet, il n'échappe pas aux services d'urbanisme de Paris
que la circulation automobile croit de façon exponentielle et que faute d'une solution rapide,
l'engorgement guette la capitale. C'est ainsi que voient le jour plusieurs passages souterrains pour
automobiles. On peut citer notamment, parmi les plus importants, ceux de la porte Champerret, de la
Porte Maillot ou encore de la Porte de la Villette. Leur but est simple. Il s'agit de fluidifier le trafic des
boulevards extérieurs. Or la meilleure solution vise à supprimer les croisements à niveau avec les voies
radiales. Comme le sous-sol à cet endroit est moins encombré qu'au centre de Paris, la solution
souterraine s'impose naturellement.
Ces réalisations sont le résultat de la conjonction de deux facteurs : l'influence du GECUS, c'est
indéniable, mais mâtinée du réalisme des urbanistes et ingénieurs qui travaillent au profit de la ville de
Paris : ils recourent aux techniques souterraines à un endroit où cela peut se faire facilement tant
juridiquement que techniquement et où cette solution semble être la plus logique.

Un autre volet important voit le jour suite aux projets du GECUS, les garages souterrains.




19 Voir illustration en annexe
20 Édouard Utudjian, L'Urbanisme souterrain, Paris, Presses universitaires de France, collection « Que sais-je , »1952.
21 Voir illustration en annexe
22 op. cit., p. 59 et suivantes

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C- à la réalité des parkings souterrains

Au centre de Paris, l'urbanisme souterrain peine davantage à s'imposer, en raison de l'encombrement du
sous-sol. Malgré tout, la problématique du stationnement, concomitante de celle de la circulation, est
prégnante : il convient d'y trouver une parade. Cette fois, les idées développées par le GECUS sont
reprises largement. Par l'intermédiaire de son bureau d'études, il participe à plusieurs concours en
groupement avec des entreprises spécialisées. Les nombreux projets de parkings souterrains, sensés
servir d'interface entre les autoroutes souterraines et la surface, sont presque tous repris.


1-1957 : premier parking souterrain.

Les parkings souterrains projetés répondent à deux objectifs. Le premier est dit de « dissuasion ». Ce
premier type est planifié aux portes de la ville mais il ne voit pas tout de suite le jour. En effet, c'est le
second type, dit d' « intérêt local », qui ouvre le bal. Ce sont des ouvrages installées à proximité
immédiate des zones de concentration commerciale et des nœuds routiers. Le premier parking
souterrain voit le jour en 1957 sous le marché Saint-Honoré. D'autres suivent aux Invalides et avenue
Georges V. Plusieurs milliers de places sont ainsi offertes aux automobilistes.
Cette solution permet de pallier les difficultés de stationnement en surface mais ce sont des opérations
complexes et donc coûteuses.


2-Le recours à la concession

La solution retenue pour dépasser l'obstacle est celle de la concession : les garages souterrains sont
financés par des promoteurs privés, à charge pour eux de rembourser leurs investissements par
l'exploitation de ces parkings sur une durée de trente ans en général. A ce terme, la propriété de
l'ouvrage revient à la ville. Les coûts élevés résultent des travaux de creusement et d'installation mais
aussi des interventions « annexes », comme le dévoiement des réseaux et le réaménagement des abords
qui peuvent représenter jusqu'à un quart du coût total.

Ainsi, pendant toute la période de l'après-guerre, le GECUS voit la partie la plus réalisable de ses idées
triompher concernant les infrastructures automobiles et s'impose comme un conseiller crédible auprès
de l'autorité préfectorale en charge de la gestion de Paris puis de Paul Delouvier, chargé du
développement de la région parisienne. Son action apparaît moins visible qu'avec les parkings
souterrains mais son influence s'intensifie avec le projet plus gros depuis le métro de Bienvenüe, le
Réseau Express Régional (R.E.R.)


D-Le RER, une intervention complexe et coûteuse

Après les travaux du métro, dont les plus importants se sont déroulés pendant les quarante premières
années du XXe siècle, l'urbanisme souterrain « ferré » a marqué le pas, notamment en raison de la
guerre. Cependant, dans les années 1960, les projets de développement de l'agglomération parisienne 23
font très vite apparaître la cruelle nécessité d'y revenir. Les voyageurs pendulaires habitent de plus en
plus loin du centre de Paris et il est à la fois in-envisageable de prévoir une extension du trafic routier à
hauteur du développement des villes nouvelles et de prolonger les lignes de métro existantes. Si les
tronçons extérieurs à Paris posent relativement peu de problèmes en raison de l'espace disponible, qui
permet de concevoir un transport de surface ou à faible profondeur, la portion intra-muros est

23 Dans le contexte de la mise en place du Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de la région de Paris (SDAURP).

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autrement délicate.
D'immenses problèmes techniques ressurgissent pour créer les deux lignes nord-sud et est-ouest et les
connecter. Ce sont les mêmes que ceux rencontrés au début du siècle par les promoteurs du
Métropolitain mais ils sont, de fait, amplifiés : le sous-sol de Paris est devenu un entrelacs de réseaux
et canalisations diverses. Les méfaits soulignés par Hénard en son temps puis rappelés par Utudjian
sont mis à jour. Il faut donc envisager de passer sous l'existant, de travailler à grande profondeur, soit
entre moins dix mètres et moins vingt-cinq mètres et d'intervenir dans des couches moins favorables.
Parallèlement se reposent les problèmes juridiques de la propriété du sous-sol. Il faut encore faire avec
les contraintes de la surface, c'est-à-dire l'évitement des blocs d'immeubles et le suivi de voies
existantes à l'air libre étroites.
La conjonction de ces deux facteurs entraîne un coût très élevé mais cette réalisation est
incontournable.

Les idées d’Édouard Utudjian et les projets défendus par le GECUS ont été rendus publics d'abord à
travers les infrastructures souterraines routières. Le GECUS a également joué un grand rôle de conseil
dans la conception du RER. Mais dès l'origine, le concept d'urbanisme souterrain concerne plus
largement tous les aspects de la vie. D'ailleurs, à sa naissance, le GECUS prend comme référence
l'organisation du grand paquebot transatlantique, considéré comme l'archétype de la ville souterraine
(sous-marine en l'espèce).


E-La notion de « ville épaisse » à travers les immeubles souterrains


1-Les deux fonctions initiales de l'immeuble souterrain

Édouard Utudjian définit les deux fonctions originelles de la construction souterraine : le stockage
(l'archivage) et l'abri. En effet, l'homme, avant de construire en superstructure, se réfugie dans les
grottes et l'habitat troglodytique pour se protéger du froid et des prédateurs. Par ailleurs, ces grottes lui
servent à entreposer de quoi subsister. Ces fonctions se retrouvent à travers les exemples des coffres de
la Banque de France et des réserves de la Bibliothèque nationale ou les abris antiaériens.
Mais l'initiateur du GECUS veut sortir de ces deux fonctions d'origine et développer les équipements
souterrains


2-Une nouvelle fonction, les équipements

Édouard Utudjian veut enterrer les fonctions utilitaires de la cité. Il considère que nombre
d'équipements, qui par leur objet ne nécessitent pas d'apport de lumière naturelle ou même exigent
l'obscurité, peuvent idéalement être enterrés,libérant ainsi de l'espace en surface pour d'autres usages ;
il cite les cinémas, les piscines, les auditoriums, les salles de spectacles, etc. C'est de ces réflexions que
naît le concept de « ville épaisse ». Il estime qu'un plan d'urbanisme ne doit pas se contenter de projeter
ce qui va se passer en surface mais qu'il faut travailler dans l'épaisseur et prévoir en même temps
l'avenir du sous-sol ; en effet, une ville moderne ne peut se concevoir que dans l'interaction des
différents niveaux, les uns agissant sur les autres et réciproquement. Il dénonce à cet égard le chaos du
sous-sol, surtout entre la surface et moins dix mètres, qui résulte justement de l'absence de sa prise en
compte dans le développement de la ville. Il relève que seule la période du Second Empire, grâce à
Haussmann, connaît une conquête du sous-sol non « empirique ».
Plusieurs projets et réalisations illustrent ses idées. En premier lieu les projets pour les Champs-Élysées
qui à l'origine ne traitent que des voies et stationnements souterrains mais sont développés ensuite pour


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accueillir des équipements24. Les différentes esquisses visent justement à redynamiser la célèbre avenue
en faisant dialoguer surface et activités souterraines, regroupant un parking et des galeries
commerciales qui permettraient de recréer la liaison avec les rues adjacentes, laissées pour compte. De
ces projets seul le parking souterrain a vu le jour.
En revanche d'autres projets se concrétisent plus complètement. C'est le cas des patios enterrés de
Bernard Zehrfuss pour le bâtiment de l'UNESCO. Il n'y a pas de hasard. En effet, Bernard Zehrfuss
entre aux Beaux-arts en 1929, dans l'atelier de Pontremoli. Or celui-ci a été « embauché » par Utudjian
dans le GECUS. Il faut revenir en quelques mots sur la problématique du bâtiment de l'UNESCO : la
proximité de l’École Militaire interdit tout bâtiment de trop grande hauteur qui romprait la perspective.
En conséquence, la solution d'enterrer des bureaux et des salles de réunion autour de plusieurs patios
s'impose assez naturellement.
Mais le symbole par excellence de l'influence d’Édouard Utudjian et du GECUS est le projet des
Halles. Dans un article de mars 196725, il écrit : « l'emplacement des Halles doit constituer un espace
vert, un nouveau poumon de Paris qui souffre du manque de ces espaces. L'urbanisme souterrain est
seul susceptible d'atteindre ce but. » Édouard Utudjian y joue un rôle primordial mais reste dans
l'ombre. La création de cet ensemble souterrain inédit en France doit donc beaucoup au GECUS et à
son fondateur. Mais son nom apparaît peu, si ce n'est au moment du choix de l'emplacement de la
station de RER des Halles. Au printemps 1971, la presse nationale relaie l'opposition entre le projet
soutenu par les autorités, qui prévoit d'installer la station souterraine à l'emplacement qu'elle occupe
actuellement et celui défendu par le GECUS, qui opte au contraire pour une implantation sous le
plateau Beaubourg26 27.

Le projet des Halles est le dernier grand projet que suivent de près Édouard Utudjian et le GECUS,
celui-ci disparaissant avec son créateur. Il convient donc de tirer les premières leçons de ces quarante
ans d'activité.


F-L'urbanisme souterrain et Édouard Utudjian : premier bilan


1-Édouard Utudjian, son itinéraire et sa personnalité

Une première consultation d'une partie des archives d’Édouard Utudjian, détenues par l'Institut français
d'urbanisme28, fait apparaître le fort besoin de reconnaissance du personnage ou de son entourage : des
revues et de nombreuses coupures de journaux de différentes époques et de tous types sont
précieusement conservées et/ou découpées et archivées : on y trouve des articles rédigés par Édouard
Utudjian29, des projets du GECUS30 ou encore des interviews du « père de l'uranisme souterrain »31
mais aussi des articles de vulgarisation.
Un autre aspect ressort très clairement de l'étude des archives : l'idée fixe. Le sentiment diffus, né dans
un premier temps de la consultation du Paris Projet n°3, du Que sais-je ? et du numéro de Paris-Match
consacrée à Paris vingt ans après32 à propos des autoroutes souterraines se confirme : les thématiques
reviennent régulièrement. Il faut certes prendre en compte la période de plus de quarante ans pendant
24 Voir le Que-sais-je ? d'E. Utudjian, op. cit., p. 107 et s. et Paris Projet n°3, op. cit, p. 87 et s.
25 Association pour les espaces naturels, Aménagement et nature n°5 « Espaces naturels », Paris, 1967.
26 Voir à ce sujet notamment Le Monde du 2 avril 1971 et Le Figaro du 17 mai 1971.
27 Voir l'illustration en annexe.
28 Ont été exploités les cartons côtés 413 IFA 8, 413 IFA 9, 413 IFA 11 et 413 IFA 13
29 Par exemple le n°10 du 6 mars 1942 du Moniteur des travaux publics et du bâtiment. A noter que l'article est signé « E.
   Lestudiant » ; est-ce une erreur de typographie ou un pseudonyme ?
30 Par exemple le n°5 de mai 1969 de la revue allemande Baumeister consacre un chapitre intitulé « Die Hallen von Paris »
   dans lequel figure le projet du GECUS ; voir illustration en annexe.
31 Par exemple un interview par Paul Dreyfus dans Le Dauphiné libéré du 16 janvier 1969, voir illustration en annexe
32 Paris Match n°951, 1er juillet 1967, « Paris dans 20 ans ».

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laquelle Utudjian milite pour l'urbanisme souterrain mais la compilation de documents donne
singulièrement l'impression qu’Édouard Utudjian et le GECUS ont répété à l'envie la nécessité de
recourir à l'urbanisme souterrain en usant des mêmes arguments et en proposant les mêmes projets. On
peut aussi considérer qu'ils ont, comme de bons pédagogues, répété leur message de peur de ne pas être
entendu.
Dans le même temps, on observe une augmentation exponentielle du nombre de conférences données
par Édouard Utudjian au fil des années. Une nouvelle preuve de son influence et de la réception des
travaux du GECUS. Il faut donc y revenir.


2-Les travaux d’Édouard Utudjian dans la presse grand public

En effet, si les travaux d'Utudjian et du GECUS font l'objet d'articles dans la presse spécialisée (cf. les
notes de bas de page n°24 et 25 page précédente) ou dans les grands quotidiens, nationaux et
régionaux, il semble plus surprenant de trouver trace de l’urbanisme souterrain dans des
hebdomadaires ou mensuels dits « grand public ». La matière est aride mais semble passionner le
public. Ainsi la première approche en archives a permis de trouver trois articles de vulgarisation mais
assez fouillés, respectivement dans Télé 7 jours, Femme pratique et Cinq colonnes à la une33. Les trois
articles trouvés datent tous de l'année 1971. En revanche, les recherches, certes partielles, n'ont pas
permis de relever d'autres éléments similaires à des dates plus anciennes. Une explication peut être
avancée : le début des années 1970 est le théâtre d'une forte actualité souterraine en France, avec
l'ouverture des premiers tronçons du R.E.R. et surtout les débats qui entourent les études et premiers
travaux des Halles. Par ailleurs, Édouard Utudjian enchaîne les cycles de conférences. Enfin, cela
participe de la volonté de pédagogie du GECUS indiquée supra. En revanche, il faut souligner que les
articles sont illustrés de photos grand format en quadrichromie, présentant soit un projet des Halles
hors d'échelle (dans Femme pratique), soit le projet de ville sous la Seine de Paul Maymont 34. Ces
images font sans doute rêver les lecteurs mais sont loin des projets du GECUS, même les plus
singuliers, tels ceux des autoroutes souterraines.

On peut tirer deux leçons de ce qui précède. La première concerne Édouard Utudjian. Toute sa vie, il se
passionne pour l'urbanisme souterrain et ne cesse de défendre et de promouvoir ses idées, contre vents
et marées. Il en résulte de belles réalisations qui, paradoxalement ne portent pas son nom mais
indéniablement sa « patte ». la seconde, qui est un corolaire, porte plus largement sur le rayonnement
des idées du GECUS. La portée et la réception des réflexions et études sont sans doute amoindries par
les projets d'autoroutes souterraines qui résistent mal au principe de réalité. Pourtant, ces projets,
défendus par Utudjian, sont au cœur de sa réflexion et constituent une sorte de fil rouge tout au long de
sa vie et de celle du GECUS.




33Télé 7 Jours, semaine du 10 au 16 juillet 1971
         5 Colonnes à la une, n°3, semaine du 20 au 26 octobre 1971
         Femme pratique, n°102 de décembre 1971
34 cf. photographies en annexe.

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III-Bilan, autres pistes et après le GECUS

Après la mort du GECUS et de son créateur, il convient de dresser un bilan de l'urbanisme souterrain,
de cerner les évolutions de la doctrine et de dresser un portrait prospectif à grands traits


A-Dresser un bilan : recourir de façon réaliste à l'urbanisme souterrain

Ce bilan se décompose en trois leçons et est illustré par deux exemples significatifs.


1-Introduire une discipline

L'étude et les réalisations qui s'étendent du milieu du XIX e siècle à la fin du XXe siècle permettent de
tirer un premier enseignement, la nécessité absolue de procéder en matière d'urbanisme souterrain avec
discipline. En effet, contrairement à ce qui se passe en surface, les interventions en sous-sol ont des
conséquences définitives à la fois sur lui-même et sur ce qui se passe en surface ; toute nouvelle
intervention doit partir de l'existant toute modification est délicate, longue et coûteuse. Il convient
notamment d'agir de façon prospective, le plus possible, et en tout état de cause de dresser des relevés
exhaustifs et précis des interventions, en pensant aux suivantes qui arriveront de toute façon.


2-Considérer les contraintes avec réalisme

Qui parle d'urbanisme souterrain, doit aborder d'office ses contraintes, qui varient selon le lieu mais qui
ressortent généralement à trois domaines.
Technique. Même si les avancées techniques et technologiques ont été énormes depuis Haussmann, le
facteur technique reste prépondérant ; tout n'est pas possible sous terre, compte tenu de la géologie ou
de la présence des nappes phréatiques.
Juridique. Si la technique a progressé, le droit du sous-sol reste en France aujourd'hui globalement le
même qu'en 1855 ; l'article 552 du Code civil s'applique toujours : le tréfonds appartient à celui qui
possède le sol en surface et les dérogations sont rares et/ou coûteuses.
Financier. La technique permet de faire beaucoup mais c'est quelquefois pour un coût exorbitant. Il
convient donc toujours de se référer au « coefficient de terrage » défini par Édouard Utudjian, c'est-à-
dire à la différence de coût entre une même installation en surface et en sous-sol, le coût devant être
entendu au sens le plus large tant financier que social ou environnemental.


3-Intégrer le sous-sol dans une politique globale

C'est un des chevaux de bataille d’Édouard Utudjian. Toute sa vie il ne cesse de militer pour un
urbanisme qui prenne en compte tant la surface que le sous-sol, c'est le sens de sa notion de « ville
épaisse ». car surface et sous-sol interagissent et on peut projeter un plan de ville uniquement dans une
dimension. Cette problématique qui recoupe la première est pleinement d'actualité et explique
notamment les saignées nombreuses et répétées dans les chaussées et trottoirs des villes.




                                                      15
4-La « Ville intérieure » de Montréal et Subtropolis à Kansas City.

Montréal est sans doute l'exemple le plus cité de réussite souterraine. Mais on oublie souvent d'ajouter
que la « Ville intérieure » a nécessité près de cinquante ans de maturation entre les premières idées et
sa réalisation. On omet également la grande différence de cadre juridique du sous-sol avec la France,
par exemple35. Il n'en demeure pas moins que l'installation d'activités diverses autour de pôles de
transports collectifs est une des bonnes solutions à suivre pour travailler sur le développement de
l'urbanisme souterrain. C'est d'ailleurs sur ce principe que sont conçues les Halles.
Le deuxième exemple est à la fois très différent mais en même temps plus proche des catégories
originelles d’utilisation du sous-sol définies par Utudjian. Il s'agit de Subtropolis, un gigantesque
complexe souterrain de stockage de 5 millions de m 3 qui est ouvert depuis 2007 et peut accueillir à peu
près tout ce qui roule ou flotte. Il est parcouru de 11 kilomètres de routes et de nombreuses voies de
chemin de fer. C'est le stockage souterrain porté à son extrême mais cela semble fonctionner 36, ce qui
prouve que l'utilisation traditionnelle du sous-sol a encore des marges de progression.


B-Les épigones du GECUS : une évolution de l'architecture vers l’ingénierie


1-De « Espace souterrain » au « Comité Espace souterrain » de l'AFTES

Après la mort d’Édouard Utudjian et la disparition du GECUS, certains souhaitent continuer son
œuvre. Or il semble que les épigones se scindent dans un premier temps en deux entités différentes.
L'une, appelée « Espace souterrain », regroupe plutôt les tenants des « sciences molles », ce sont des
architectes , des urbanistes et des sociologues. L'autre, qui prend le nom d'Association française des
travaux en souterrain, est créée en 1970, pour répondre aux préconisations internationales. Elle
regroupe des ingénieurs, spécialistes des tunnels.
Ce n'est qu'en 2005 que l'association « Espace souterrain » est absorbée par l'AFTS qui devient
l’Association française des tunnels et de l'espace souterrain (AFTES) et crée le Comité Espace
souterrain. Cette courte histoire est symptomatique d'un mouvement de fond qui concerne l'ensemble
des domaines relatifs à l'acte de construire mais plus particulièrement l'urbanisme souterrain : la
domination des ingénieurs. D'ailleurs, on n'évoque plus la notion d'urbanisme souterrain qui, soit
disant, est trop restrictive. Mais cette évolution n'est malheureusement pas postérieure à la disparition
d’Édouard Utudjian. La lecture des numéros du « Monde souterrain », qui prend le sous-titre de
« Techniques de l'urbanisme souterrain et des travaux souterrains » à compter du numéro 150 en 1967,
permet de sentir cette évolution lente mais continue des domaines de l'architecte et de l'urbanisme vers
ceux de l'ingénieur.
Or au sein du Comité Espace souterrain, co-dirigé par Monique Labbé et Pierre Duffaut, seule la
première est architecte et il semble que ce soit la seule de son espèce parmi les gens « qui comptent »
au sein de l'AFTES.


2-ITACUS, le successeur du CPIUS

L'AFTES se décline au niveau international avec l'Association internationale des travaux et de l'espace
souterrain (AITES, ITA en anglais) au sein duquel un comité Espace souterrain trouve sa place,
l'ITACUS. Là aussi la part belle est faite aux spécialistes des tunnels. L'onglet « architecture » du site
Internet de l'association ne regroupe qu'une série de photos montrant l'histoire des relations entre

35 Voir à ce sujet : Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, op. cit.
36 Voir en annexe un prospectus de publicité.

                                                                 16
l'homme et le sous-sol.


3-Mastère Tunnels et ouvrages souterrains

Le dernier avatar de cette évolution est la création par l'AFTES d'un mastère spécialisé, en
collaboration avec l'INSA de Lyon, qui s'adresse aux ingénieurs BTP généralistes, soucieux de
perfectionner leurs connaissances en matière de travaux souterrains. La prise en compte de la nécessité
de former des spécialistes aux travaux souterrains est une bonne chose mais là encore l'architecture a
été balayée au profit de la technique des tunnels37.

Le rapide tour d'horizon des épigones du GECUS montre clairement la direction qui a été choisie. Les
travaux souterrains, et en l'espèce le tunnel, semble au centre des débats, pendant que l'architecture et
l'urbanisme occupent la portion congrue. Pour paraphraser Clémenceau, il semble que le sous-sol soit
considéré comme une chose trop sérieuse pour être confiée à des urbanistes et des architectes.
Heureusement, les projets fous des architectes sont encore là pour nous faire rêver.


C-Prospective : de Maymont à Fromboluti


1-Paul Maymont et Max Abramovitz

Dans les années 1960, Paul Maymont, prenant en compte la contrainte juridique des travaux
souterrains à Paris, remarque que la Seine constitue un large domaine public inoccupé, qui traverse
Paris de part en part. Il propose donc l'équipement complet du sous-sol de la Seine en voies routières,
parkings et autres activités38. Avec une largeur de la Seine allant de 150 à 200 mètres sur 12 kilomètres
de longueur, la surface approche 2 km² ; avec une dizaine d'étages, le volume utile équivaut à celui du
bâti d'un arrondissement entier.
Ce projet ne prend bien sûr en compte ni les contraintes géologiques, techniques ou financières du
creusement d'un immeuble de dix étages sous la Seine, long d'une dizaine de kilomètres mais il a le
mérite d'une réflexion qui sort des sentiers battus.
Dans le même ordre d'idée, Max Abramovitz propose en 1964 une projet de ville souterraine pour
Pittsburgh. Elle regroupe à la fois des parkings, des zones de stockage et des activités. Là aussi le
projet ne dépasse pas l'étape de l'ébauche et il est difficile de trouver de plus amples informations sur le
projet.


2-Fromboluti : projet « Above Below »

Plus près de nous, un jeune architecte de l'université Washington de Saint-Louis dans le Missouri,
propose un « gratte-ciel souterrain » destiné à réparer le paysage meurtri par l'exploitation minière dans
le désert de l’Arizona, à proximité de la ville de Bisbee39.
Son projet, baptisé "Above Below" est en effet pensé pour combler une ancienne mine à ciel ouvert de
275 mètres de profondeur sur plus de 1,2 km². Il imagine un programme qui comporte à la fois des
espaces réservés à l’habitation et au travail, des surfaces dédiées à l’agriculture et enfin des zones pour
le temps libre et les loisirs. L'ouvrage est auto-suffisant en énergie et en eau grâce à ses propres sources
d’énergie, à un système de recyclage d’eau et à des cheminées solaires pour réguler un climat local
37 Voir en annexe la page de garde de la plaquette d'information
38 Voir illustration en annexe
39 idem

                                                               17
artificiel. Dissimulé sous un dôme, le projet est entièrement construit sous terre, avec uniquement
quelques zones profitant de la lumière du soleil, disposées de façon idoine pour contrôler le climat et
accéder à la surface. Cependant, loin d’être coupés du monde, les habitants de la structure ont la
possibilité de se rendre à la ville voisine grâce à un train fonctionnant à l'énergie solaire. Ce concept
renouvelle l'urbanisme souterrain et ne modifie le paysage désertique que de façon mineure ; en effet
Matthew Fromboluti prévoit qu'un sol artificiel au-dessus du dôme permette à la végétation de se
développer à nouveau.




                                                     18
Conclusion

Ainsi, cette étude, non exhaustive de l'urbanisme souterrain parisien, tend à montrer que son apparition
est concomitante avec celle de la ville à l'âge industriel. Comme souvent, le fait précède le mot puisque
le concept n'apparaît qu'à partir de 1933, lorsque Édouard Utudjian crée le GECUS et développe ses
premiers projets souterrains.
Les travaux relatifs aux égouts et à l'adduction d'eau, engagés à partir de 1855 par le baron Haussmann,
apparaissent a posteriori d'une grande modernité, tant dans la conception que dans la mise en œuvre
avec la notion d'organisation du sous-sol et notamment cette idée géniale d'une galerie visitable, qui
sont en partie oubliées par ses successeurs.
La construction du métro clôt cette période révolutionnaire, très courte compte tenu de la réalisation de
travaux titanesques avec des moyens techniques rudimentaires.
Le témoin de l'urbanisme souterrain se passe ensuite entre Eugène Hénard et Édouard Utudjian, le
second développant et mettant en forme les intuitions du premier. En effet, le père de l'urbanisme
souterrain est incontestablement cet architecte franco-arménien qui voue sa vie à promouvoir
inlassablement les perspectives de ce développement sous la surface. Même si son cheval de bataille,
les autoroutes souterraines, ne voient pas le jour, n'étant pas suffisamment ancrées dans la réalité,
nombre de ses projets, comme le stationnement automobile souterrain, sont développés et la réalisation
des Halles et du RER lui doivent beaucoup. Plus largement, il ne cesse de mettre le doigt sur la
nécessité de penser le développement de la ville dans son épaisseur, le sous-sol et la surface étant par
essence liés et interdépendants.
Malheureusement, le concept, dans sa forme originelle, ne survit pas à son concepteur. En effet, pris
dans le mouvement plus vaste de l'acte de construire, le travail de l'architecte et de l'urbaniste a été
réduit au profit de l'ingénierie.
À l'heure où il n'est question que de densification et de libération d'espace pour une installation accrue
du végétal dans la ville, l'urbanisme souterrain retrouve toute sa place. Le sous-sol doit donc pour cela
être réinvesti méthodiquement et avec réalisme par les architectes et les urbanistes et ne pas être
uniquement l'apanage des constructeurs de tunnels.




                                                      19
Bibliographie et sources :

livres :
Édouard Utudjian, Architecture et urbanisme souterrains, Paris, Robert Laffont, 1966.
Édouard Utudjian, L'Urbanisme souterrain, Paris, Presses universitaires de France, collection « Que
sais-je , »1952.

revues et brochures :
Sabine Barles, Sarah Jardel, L'Urbanisme souterrain, étude comparée exploratoire, Paris, Atelier
parisien d'urbanisme, 2005.
Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, Sols artificiels, sursols, dalles : étude historique
comparative, Paris, Atelier parisien d'urbanisme, 2005.
Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°3 « Le sous-sol de Paris et l’urbanisme – Les Champs
Élysées », Paris, 1970.
Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°1 « Les Halles», Paris, 1969.
Association pour les espaces naturels, Aménagement et nature n°5 « Espaces naturels », Paris, 1967.
Bernard Lafay, « Plan – Solutions aux problèmes de Paris », Comité du nouveau Paris, 1954.

presse généraliste :
Paris Match n°951, 1er juillet 1967, « Paris dans 20 ans ».

Fonds Édouard Utudjian, archives de l'Institut français d'architecture :
cartons 413 IFA 8, 413 IFA 9, 413 IFA 11 et 413 IFA 13.




                                                      20
Annexes

Liste des documents iconographiques

   1. Schéma des propositions de M. Henry Bernard pour l'aménagement du parvis Notre-Dame
       (Paris Projet n°3, p.12).
   2. Coupe type d'une galerie d’égout (Paris Projet n°3, p.12)
   3. projet de rue à étages, présenté par Eugène Hénard, lors de la conférence de Londres en 1910
       (www.cornell)
   4. Projet de réseau d'autoroutes souterraines d’Édouard Utudjian (QSJ ? E. Utudjan, p. 116)
   5. Dessin d'une rampe hélicoïdale de liaison entre le réseau d'autoroutes souterraines et la surface
       par Jean Tschumi, présenté lors de l'Exposition internationale des arts et techniques de Paris en
       1937 (http://urbanites.rsr.ch/galerie-photos/paris-souterrain/)
   6. Plans des projets respectivement de la RATP et du GECUS pour l'implantation de la station de
       RER des Halles (Combat, 19 mai 1971)
   7. Projet du GECUS pour l'aménagement des Halles (Baumeister n°5 de mai 1969, p.539)
   8. Interview d'Edouard Utudjain par Paul Dreyfus (Le Dauphiné libéré, 16 janvier 1969)
   9. Dessin d'artiste illustrant le projet des Halles (Femme pratique, n°102, décembre 1971)
   10. Coupe du projet de Paul Maymont d'installation d'un complexe sous la Seine (5 Colonnes à la
       une, n°3, semaine du 20 au 26 octobre 1971)
   11. Prospectus de publicité pour la location d'emplacements dans Subtropolis
       (http://www.subtropolis.biz/pdfs/sub_store_rates_flyer.pdf)
   12. page de garde de la brochure présentant le mastère spécialisé tunnels et ouvrages souterrains
       (http://mstunnels.insa-lyon.fr/)
   13. coupe du projet « Above Below » de Matthew Fromboluti (http://frombo.com/folio-
       Evolo10.html)




                                                     21
Edouard Utudjian & l'urbanisme souterrain
Edouard Utudjian & l'urbanisme souterrain
Edouard Utudjian & l'urbanisme souterrain
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Edouard Utudjian & l'urbanisme souterrain

  • 1.
  • 2. Table des matières Introduction.........................................................................................................................................2 I-D'Haussmann à Hénard (1855-1914): le Pari(s) souterrain..............................................................4 A-Le préalable, la complexité du sous-sol parisien........................................................................4 1-Des traces du passé omniprésentes.........................................................................................4 2-Les carrières, 1/10e de la surface de la capitale......................................................................4 3-Un cadre juridique contraignant : un même propriétaire de la surface au centre de la Terre. 5 B-Les travaux des ingénieurs Belgrand et Mille.............................................................................5 1-Les égouts : hygiène et galerie porteuse.................................................................................5 2-L'apport d'eau de source : canalisations et réservoirs.............................................................6 C-Le métro de Bienvenüe...............................................................................................................6 1-Une première ligne inaugurée en 1900...................................................................................6 2-Suivre les itinéraires de surface..............................................................................................7 3-Pas de croisement à niveau.....................................................................................................7 D-Les projets non-conformistes d'Eugène Hénard.........................................................................7 1-La conférence de Londres en 1910 sur la planification des villes..........................................7 2-Le cas de la rue Paul Cézanne................................................................................................8 II-Le Paris souterrain d'Utudjian (1933-1975) : des infrastructures automobiles aux équipements.. 9 A-Historique du GECUS et du CPIUS...........................................................................................9 B-Du rêve des autoroutes souterraines.........................................................................................10 1-Les projets du GECUS..........................................................................................................10 2-Les réalisations de passages souterrains...............................................................................10 C- à la réalité des parkings souterrains........................................................................................11 1-1957 : premier parking souterrain.........................................................................................11 2-Le recours à la concession....................................................................................................11 D-Le RER, une intervention complexe et coûteuse......................................................................11 E-La notion de « ville épaisse » à travers les immeubles souterrains..........................................12 1-Les deux fonctions initiales de l'immeuble souterrain..........................................................12 2-Une nouvelle fonction, les équipements...............................................................................12 F-L'urbanisme souterrain et Édouard Utudjian : premier bilan....................................................13 1-Édouard Utudjian, son itinéraire et sa personnalité..............................................................13 2-Les travaux d’Édouard Utudjian dans la presse grand public..............................................14 III-Bilan, autres pistes et après le GECUS........................................................................................15 A-Dresser un bilan : recourir de façon réaliste à l'urbanisme souterrain......................................15 1-Introduire une discipline.......................................................................................................15 2-Considérer les contraintes avec réalisme..............................................................................15 3-Intégrer le sous-sol dans une politique globale.....................................................................15 4-La « Ville intérieure » de Montréal et Subtropolis à Kansas City........................................16 B-Les épigones du GECUS : une évolution de l'architecture vers l’ingénierie............................16 1-De « Espace souterrain » au « Comité Espace souterrain » de l'AFTES..............................16 2-ITACUS, le successeur du CPIUS........................................................................................16 3-Mastère Tunnels et ouvrages souterrains..............................................................................17 C-Prospective : de Maymont à Fromboluti...................................................................................17 1-Paul Maymont et Max Abramovitz.......................................................................................17 2-Fromboluti : projet « Above Below »...................................................................................17 Conclusion.........................................................................................................................................19 Bibliographie et sources :..................................................................................................................20 1
  • 3. Introduction La Cité de l'Architecture propose, jusqu'au 24 juillet 2011, une exposition intitulée « La Ville fertile, vers une nature urbaine ». A travers la présentation de différents projets en cours, à venir ou purement prospectifs, cette exposition tente de montrer que la (ré)conciliation entre la ville et la nature est possible, sous réserve de modifier nos habitudes. Il convient, notamment, de « densifier » le tissu urbain pour dégager de l'espace libre colonisable par la nature. Par ailleurs, le début des travaux de réaménagement des Halles, sur le projet de Patrick Berger, a remis au premier plan la vaste réflexion qui avait précédé le gigantesque chantier du quartier des Halles, il y a plus de quarante ans. C'est dans ce contexte que les travaux d’Édouard Utudjian (re)prennent un relief particulier. Rappelons sa biographie en quelques traits. Édouard Utudjian est un architecte franco-arménien. Il est né à Istanbul en 1905 et meurt à Paris en 19751. Après son baccalauréat obtenu en Turquie, il arrive à Paris et se lance dans des études d'architecture à l’École nationale supérieure des beaux-arts. Il est diplômé en 1929, après avoir suivi l'enseignement de Pontrémoli, grand prix de Rome 1890. Il fréquente l'atelier d'Auguste Perret et suit avec assiduité les conférences de Le Corbusier. On peut classer, de façon schématique, ses interventions « classiques » en deux domaines : tout d'abord la construction et la restauration d'églises arméniennes dans plusieurs pays : en Arménie, bien sûr, mais aussi aux États-Unis, en Suisse et à Jérusalem : il y restaure les espaces arméniens du Saint-Sépulcre. Ensuite des réalisations en France et notamment des équipements : des stations d'épuration (Achères, Rouen, Bordeaux, Cholet, Athis-Val, Calais), des hôpitaux (Magny-en-Vexin, Fondation Winburn à Bièvres), des écoles (Magny-en-Vexin, Port-Marly), des usines, des garages et des dépôts. Il construit également des bâtiments de logement (Paris, Poitiers, Châtellerault) et des immeubles de bureaux. Il enseigne dans différentes écoles dont les Beaux-arts, l’École spéciale d'architecture ou encore le Conservatoire national des arts et métiers. Mais sa grande passion est l'urbanisme souterrain et c'est bien cet aspect de son travail qui entre en résonance avec l'actualité citée supra. Comme l'écrit Michel Ragon, dans la préface de L'Architecture et l'urbanisme souterrains2, « Édouard Utudjian est l'homme d'une idée neuve : l'urbanisme souterrain. A cette idée, il a voué toute sa vie ». En 1933, il fonde le Groupe d'études et de coordination de l'urbanisme souterrain (GECUS), qu'il anime toute sa vie. Il crée la revue Le Monde souterrain, publiée de 1933 à sa mort, dont la collection, reliée, constitue L’Encyclopédie du monde souterrain. En 1952, son ouvrage L'Urbanisme souterrain est publié dans la célèbre collection « Que sais-je ? »3. Il est également nommé secrétaire général du Comité permanent international de l'urbanisme souterrain (CPIUS), qui internationalise le GECUS. A l'heure où les déclarations en faveur de la densification et de la lutte contre l'étalement urbain font florès, il est opportun de (re)découvrir la « ville épaisse », comme aime à en parler Édouard Utudjian. Si Édouard Utudjian est sans doute un des premiers à utiliser le terme d'« urbanisme souterrain » et à en théoriser l'idée, d'autres avant lui ont, à la manière de Monsieur Jourdain, fait de l'urbanisme souterrain sans le savoir. Il convient donc d'aborder la question en brossant un tableau synthétique mais éclairant des prédécesseurs à partir du milieu du XIXe siècle. Édouard Utudjian a sans doute influencé nombre de réalisations souterraines à travers le monde. Cependant c'est sur le cas de Paris que le GECUS a le plus travaillé et c'est encore sur Paris que les préconisations du chantre de l'urbanisme souterrain ont rencontré le plus d'échos et déclenché le plus de réactions. Le cœur de cette étude concerne donc Paris. Enfin l'urbanisme souterrain connaît d'autres développements, notamment sur le continent américain, et l’œuvre d’Édouard Utudjian a des continuateurs qui militent toujours pour la reconnaissance de l'intérêt du sous-sol. On ne peut donc faire l'économie d'un tour d'horizon de l'urbanisme souterrain à côté et 1 La biographie qui suit doit beaucoup à la notice d'introduction au fonds Utudjian, disponible sur le site de la Cité de l'architecture et du patrimoine (www.archiwebture.citechaillot.fr). 2 Édouard Utudjian, Architecture et urbanisme souterrains, Paris, Robert Laffont, 1966 3 L'illustration de couverture est extraite de ce Que sais-je ?, p.104 2
  • 5. I-D'Haussmann à Hénard (1855-1914): le Pari(s) souterrain. Qui s'intéresse au sous-sol parisien, quelle que soit l'époque, relève en premier lieu sa complexité. En outre on ne peut faire l'économie d'un rappel de l’œuvre du baron Haussmann et de ses ingénieurs et de celle de Fulgence Bienvenüe. Enfin, au nombre des prédécesseurs d'Utudjian, figure aussi Eugène Hénard. A-Le préalable, la complexité du sous-sol parisien La complexité est de trois ordres : traces du passé, présence des carrières de pierres et cadre juridique délicat. 1-Des traces du passé omniprésentes L'histoire de Paris, depuis l'île des Parisii sur la Seine jusqu'à la destruction des fortifications, se lit à livre ouvert dans son sous-sol, bien souvent à une très faible profondeur (moins de six mètres, soit environ deux étages de sous-sol). De nombreux ouvrages ont été écrits sur le sujet et d'autres viendront. Ainsi, comme de toutes les villes qui ont une histoire multiséculaire, le sous-sol est riche des traces de ce passé. Et surgit inévitablement le conflit entre tenants d'une conservation et d'une protection des sites archéologiques à tous crins et défenseurs des constructions et de l'urbanisme. Comme souvent, la vérité est à mi-chemin, tout est question de place du curseur. Une polémique, née à la fin des années 1960, résume parfaitement cet état de fait. Il s'agit de l'affaire de la construction d'un parking souterrain sous le parvis de Notre-Dame. Les travaux d’excavation donnent lieu à une campagne de fouilles. Elle est menée par Michel Fleury, le Secrétaire général de la Commission du Vieux Paris. A l'issue, il affirme que les travaux peuvent être lancés, que tout ce qui représente une quelconque valeur archéologique a été mis au jour. A contrario, d'autres, tels Henry Bernard, considèrent qu'il reste encore de très nombreux sanctuaires et bâtiments religieux sur ce site. Il propose une autre implantation pour le parking souterrain, à l'est de la cathédrale 4 5. En conséquence cette omniprésence du passé apparaît comme un facteur de grande complexité pour les travaux souterrains : toute intervention peut donner lieu à une campagne de fouilles qui, au mieux, ralentit le chantier et au pire l'annihile. 2-Les carrières, 1/10e de la surface de la capitale Pendant des centaines d'années, le sous-sol de Paris est mis à contribution pour en extraire la pierre. C'est le Second Empire qui y met un terme avec l'arrivée du chemin de fer : celui-ci permet de recourir à des carrières à ciel ouvert distantes pour un coût moindre. Ce véritable « gruyère » est la cause de nombreux désagréments. La fin du XVIII e siècle connaît plusieurs effondrements sérieux. Ces accidents soulignent en creux un élément essentiel relativement au sous-sol : la mémoire des lieux est indispensable, non seulement pour les interventions souterraines futures mais aussi pour agir efficacement et en sécurité en surface. C'est à la suite de ces événements qu'est créé le Service des carrières qui fait un état des lieux, dresse une cartographie du sous-sol et fait maintenir des galeries de visite sous de nombreuses rues de Paris pour surveiller l'état des 4 Voir à ce sujet : Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°3 « Le sous-sol de Paris et l’urbanisme – Les Champs Élysées », Paris, 1970, p. 11 et s. 5 Voir le recueil d'illustrations en annexes. 4
  • 6. consolidations. Cette cartographie précise a toujours pêché par la faiblesse de ses mises à jour et aujourd'hui, avec la multiplication des réseaux6, il est encore légitime de s'interroger sur l'existence d'un document de synthèse du paris souterrain exhaustif et correctement mis à jour 7 et sur le rôle respectif des services municipaux et des entreprises concessionnaires. 3-Un cadre juridique contraignant : un même propriétaire de la surface au centre de la Terre. L'article 552 du Code civil stipule que le tréfonds ne bénéficie pas d'un régime particulier en matière de droit de propriété. Cette disposition a des conséquences essentielles pour l'urbanisme souterrain. En effet, pour éviter des procédures longues et aux chances d'aboutissement réduites et tout contentieux avec les propriétaires, les infrastructures souterraines doivent être construites au droit des espaces publics de surface. Ainsi, les voies de circulation souterraines, comme les métros, doivent suivre scrupuleusement le tracé des voies de surface. Cette contrainte juridique est souvent plus lourde que les contraintes techniques d'intervention sous nappe ou dans des couches géologiques défavorables et limite de fait en France les projets d'urbanisme souterrain. Si Édouard Utudjian est le premier à théoriser l'urbanisme souterrain, il connaît d'illustres prédécesseurs, au premier rang desquels figure le préfet de Paris, baron Haussmann dont on cite toujours les percées dans le Paris médiéval mais qui est aussi à l'initiative de gigantesques travaux souterrains. B-Les travaux des ingénieurs Belgrand et Mille Ces deux ingénieurs ont travaillé sous les ordres du baron Haussmann respectivement à la question de l'eau et des égouts. 1-Les égouts : hygiène et galerie porteuse A Paris, la conception et la construction des égouts se développent surtout à compter de la deuxième moitié du XIXe siècle. A partir de 1855, c'est le baron Haussmann, secondé par l'ingénieur Mille, qui développe une grande partie du réseau tel que nous le connaissons aujourd’hui 8. La loi sur le tout-à- l'égout est postérieure, elle date de 1894 et en 1910 est conçue la première tranche de la station d'épuration d'Achères, sur laquelle Édouard Utudjian fera d'importants travaux de modernisation et d'agrandissement au tournant du XXe siècle. Ainsi la question de l'évacuation des effluents prend un tournant décisif en cinquante ans, ce qui est extrêmement rapide compte tenu de l'ampleur de l'entreprise. Le développement des égouts est un apport essentiel en matière d'hygiène et un tour de force technique : en effet, l’ensemble des galeries a été creusé à la main. Mais au-delà de la stricte question de santé publique, le développement des égouts a aussi apporté une novation technique supplémentaire. Le creusement de galeries, de section ovoïde, permettant à un homme de se tenir debout est une nouveauté essentielle : elle inaugure les galeries dites « visitables », permettant les interventions de 6 Notamment les réseaux enterrés, sans galerie de visite ; on peut penser en particulier à la question d'actualité de la fibre optique. 7 L'APUR avait mis au point, au début des années 1970, un « Atlas du Paris souterrain » qui recensait dix réseaux : égouts, eau potable, eau non potable, galeries de câbles électriques, électricité moyenne tension, électricité basse tension, gaz, téléphone, chauffage urbain et air comprimé ; à cela s'ajoutaient les parkings souterrains, les carrières et galeries et les sous-sols profonds d'immeubles, le tout au 1/5000e. Quid également de l'échelle à retenir : le 1/5000e permet d'avoir une vision globale mais le détail des réseaux nécessite d'aller jusqu'au 1/200e. 8 Le réseau représente aujourd'hui plus de 2000 kilomètres, contre 140 kilomètres au tournant du XIX e siècle. 5
  • 7. maintenance. Par ailleurs, et c'est sans doute là que réside la nouveauté et le génie de ses concepteurs, la voûte de la galerie accueille un berceau qui porte des conduites d'eau potable puis le télégraphe, le pneumatique et le téléphone9. Ces réseaux sont donc accessibles facilement et peuvent être réparés sans éventration de la chaussée. Il faut noter à ce propos que le contrat de fourniture d'air comprimé n'a été résilié par la ville de Paris qu'en 199410. Ensuite les réseaux de gaz, d'électricité et de chauffage urbain, sont, pour des raisons de sécurité, installés dans des ensembles autonomes enterrés sous les trottoirs mais la plupart du temps non visitables, entraînant un retour en arrière en terme d'urbanisme souterrain. 2-L'apport d'eau de source : canalisations et réservoirs Si Mille est le spécialiste des égouts, c'est Eugène Belgrand qui apporte sa pierre à l'édifice souterrain en matière de distribution d'eau potable et non potable. Il propose au préfet de Paris de séparer les réseaux d'eau potable et d'eau non potable et d'alimenter Paris non plus en eau de rivière mais en eau de source, ce qui représente une révolution, l'eau de source ayant mauvaise presse au XIX e siècle. Du coup cette proposition rencontre une très grande hostilité de la population. Il crée notamment le grand aqueduc de la Vanne et le réservoir de Montsouris qui peut recevoir plus de 200 000 m 3 d'eau. Les canalisations d'eau, potable et non potable, en fonte, représentent chacune environ 1600 km ; elles sont, pour la plupart, fixées aux voûtes des égouts ; seules les plus grosses canalisations sont indépendantes et installées dans des galeries indépendantes de façon à être facilement visitées. Les travaux souterrains des ingénieurs d'Haussmann sont donc exceptionnels à plus d'un titre. Ils propulsent Paris dans la modernité et ouvrent la voie à ce qui sera le cœur de l'urbanisme souterrain à Paris, le métropolitain. C-Le métro de Bienvenüe Paris poursuit la course en tête en matière d'urbanisme souterrain avec la construction de son métro par l'ingénieur Fulgence Bienvenüe. Trois éléments peuvent être retenus : la lenteur de l'accouchement, la contrainte de propriété du tréfonds et la question des croisements de voies. 1-Une première ligne inaugurée en 1900 Compte tenu de la forte croissance démographique de Paris 11, des problèmes de circulation et de transport urbain apparaissent dans le courant du XIXe siècle. Très vite la solution d'un chemin de fer urbain en « site propre » se dégage comme la seule viable. Les premiers projets voient le jour au milieu du XIXe siècle mais se heurtent à différentes difficultés : absence de concession ou oppositions entre la ville et l’État sur le type de desserte. Finalement, c'est l'échéance de l'Exposition Universelle de 1900 qui débloque la situation : le chemin de fer métropolitain est souterrain et électrique, comme celui de Londres ; ce mode de traction résout le problème principal de l'évacuation des fumées qu'aurait posé une machine à vapeur. 9 Voir illustration en annexe. 10 Contrat liant la Ville de Paris et la Compagnie des Horloges Pneumatiques (qui deviendra ensuite la Compagnie Parisienne de l’Air Comprimé puis la Société urbaine d'air comprimé (SUDAC)) depuis le début des années 1880. 11 Paris passe de 500 000 habitants à la fin du XVIIIe siècle à deux millions à la fin du XIXe siècle. 6
  • 8. 2-Suivre les itinéraires de surface Comme cela a été évoqué supra, se pose la question de la propriété du sous-sol. Il est décidé de suivre les itinéraires de surface, afin d'éviter les trois écueils suivants : risque de dommages aux propriétés riveraines, difficulté d'exécution des travaux en sous-œuvre et coût des indemnités pour l'acquisition de la propriété du tréfonds. Ce schéma se heurte à un autre obstacle, celui des collecteurs d'égouts axiaux qu'il faut contourner. Apparaît ainsi un autre élément souligné supra, celui de l'encombrement du sous- sol ; il ne va qu'en s'accroissant, en raison de l'absence d'un schéma directeur global qui prendrait en compte l'évolution de la ville dans toute son épaisseur, c'est-à-dire à la fois la surface et le sous-sol. 3-Pas de croisement à niveau Les différentes voies du chemin de fer métropolitain ne peuvent se croiser à niveau ; elles doivent obligatoirement passer les unes au dessus des autres. Cela accroît la difficulté des travaux puisqu'il faut créer des échangeurs souterrains qui permettent aux voyageurs de passer d'une ligne à l'autre. Cet autre élément est essentiel en matière d'urbanisme et d'aménagement au sens global, puisqu'il préfigure l'empilement des échangeurs autoroutiers imaginés par Utudjian pour ses autoroutes souterraines et réalisés pour les autoroutes aériennes partout à travers le monde. Un autre pionnier du « pré-urbanisme souterrain » se révèle de façon contemporaine au développement du métro parisien, il s'agit d’Eugène Hénard. D-Les projets non-conformistes d'Eugène Hénard Eugène Hénard projette la réalisation de multiples rues souterraines ; une seule a été réalisée à Paris. 1-La conférence de Londres en 1910 sur la planification des villes Eugène Hénard commence par y dénoncer la façon dont les conduites de gaz et d'électricité parisiennes sont enterrées sous les trottoirs « sans ordre ni méthode » et les conséquences que cela entraîne en matière de maintenance. Il regrette également l'absence de plan qui permettrait la coopération des différents acteurs, Administration et concessionnaires. Il considère que le recours au sous-sol va s'accentuer avec l'installation de conduits d'évacuation de la poussière, la multiplication de l'usage des pneumatiques pour le courrier, l'installation d'un réseau de tuyaux d'air liquide pour les systèmes de réfrigération, des conduits de pétrole et même des conduits pour le transport de l'eau de mer ou de l' « air pur », pour des usages à définir. Mais sa grande idée est celle de la surélévation de la rue pour permettre l'installation au niveau du sol naturel d'une « rue de service sous chaussée », équipée de quatre voies de trains de marchandises. Il prévoit également un niveau supplémentaire pour les maisons riveraines afin de permettre les communications avec cette rue souterraine. Cette rue de service est notamment prévue pour l'enlèvement des ordures et le transport des marchandises pondéreuses. Entre la rue suspendue et la rue de service un faux-plafond accueille tous les conduits cités supra12. En conclusion de sa communication, il estime que le temps est proche du développement d'une « rue à étage », les étages se multipliant en fonction de la croissance du trafic. 12 cf. les illustrations en annexe. 7
  • 9. Par de nombreux aspects, Eugène Hénard fait preuve d'une grande naïveté. Ses projets éludent notamment toutes les questions juridiques et géologiques. Mais dans le même temps, ses projets préfigurent l'urbanisme de dalle13 et son analyse de l'existant est cohérente : il souligne avec justesse le grand désordre de l'enterrement des canalisations, l'absence de coopération entre les acteurs et, de façon subséquente, le manque de cartographie du sous-sol. 2-Le cas de la rue Paul Cézanne14 Dans les années 1930, les architectes Louis Plousey et Urbain Cassan créent une voie privée entre la rue du Faubourg Saint-Honoré et la rue de Courcelles pour lotir une parcelle. En effet cette rue est à deux niveaux, de même largeur ; on accède au niveau inférieur par deux rampes d'accès et de sortie qui ont été construites à l'intérieur des bâtiments. Il est encadré de poteaux en béton pour éviter les restrictions de passage des véhicules sur le niveau supérieur. L'éclairage est fourni par des pavés de verre qui habillent les trottoirs du niveau haut. Ce projet doit irréfutablement aux idées d'Eugène Hénard : bien que cette rue souterraine ne conduise à aucun réseau, les deux architectes ont retenu l'idée de l’organisation des fluides; ils ont ménagé des galeries sous le niveau inférieur pour les y loger. Cette unique réalisation parisienne montre que les bonnes propositions développées par Eugène Hénard ont malheureusement été desservies par l'aspect illusoire de nombre d'autres. Cette première période, qui court grosso modo du milieu du XIX e siècle au lendemain de la Première Guerre mondiale, peut être qualifiée de « pré-urbanisme souterrain ». En effet, c'est Édouard Utudjian qui définit le terme à compter de 1933 avec la création du Groupe d'études et de coordination sur l'urbanisme souterrain (GECUS). En revanche, elle se révèle d'une grande modernité : le baron Haussmann et ses ingénieurs entament une conquête du sous-sol relativement organisée. Les interventions postérieures n'ont pas ce souci, ce que souligne avec justesse Eugène Hénard. 13 Voir à ce sujet : Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, Sols artificiels, sursols, dalles : étude historique comparative, Paris, Atelier parisien d'urbanisme, 2005. 14 Voir à ce sujet l'article de Gabriel Morice « Immeubles avec rue souterraine, 168 à 172 rue du Faubourg St-Honoré, 25 à 29 rue de Courcelles, à Paris », L'Architecture, 15 février 1932, p. 44-52, cité par Castex, Blain et Lefebvre, op. cit. 8
  • 10. II-Le Paris souterrain d'Utudjian (1933-1975) : des infrastructures automobiles aux équipements. Cette période est fortement influencée par Édouard Utudjian qui rêve d'autoroutes souterraines et pense sérieusement la question du stationnement souterrain. Les transports souterrains entrent dans une nouvelle phase avec le Réseau express régionale (R.E.R.) pendant que les premiers équipements souterrains hors transport voient le jour. A-Historique du GECUS et du CPIUS Édouard Utudjian s'intéresse à l'urbanisme souterrain assez jeune, après être tombé dans la collection de L'Illustration de son grand-père dans laquelle figuraient plusieurs articles sur le sous-sol. Cette passion ne le quitte pas, une fois son diplôme d'architecte en poche. En 1933, alors qu'il est diplômé depuis quatre ans, il fonde avec quelques amis le Groupe d'études du centre urbain souterrain, qui devient ensuite le Groupe d'études et de coordination de l'urbanisme souterrain. Il est créé suite à une visite collective organisée en janvier dans les magasins OCEL 15. Le projet initial est « l'étude de plusieurs centres souterrains dans une agglomération dense »16 et assez tôt Édouard Utudjian a conscience de la nécessité d'internationaliser le mouvement. C'est pourquoi le GECUS organise à Paris en 1937, parallèlement à l’Exposition internationale des Arts et Techniques, le premier Congrès international d'urbanisme souterrain à l'issue duquel est créé le Comité permanent international de l'urbanisme souterrain, dit C.P.I.U.S. Édouard Utudjian en devient naturellement le secrétaire général. Quatre autres congrès ont lieu ensuite à Rotterdam en 1948, en Scandinavie en 1959, à Varsovie en 1965 et à Madrid en 1968. Le GECUS et le CPIUS éditent conjointement une revue en français, « Le Monde souterrain » dont les numéros entre 1947 et 1975 ont été reliés pour former L'Encyclopédie du monde souterrain. Cette revue, malgré le fort sentiment de redite souligné supra, est une mine de documents sur la vie du mouvement qui semble assez actif : on y trouve des comptes-rendus de congrès, les dates et lieux des conférences données par Utudjian ainsi que nombre de notes nécrologiques publiées à la mort de ses membres. Le rôle du GECUS ne se limite pas à Paris, même si c'est son terrain de jeu favori. Outre les projets de métros dans différentes capitales européennes, on trouve dans les archives 17 la trace d'un projet fort documenté de tunnel sous la Manche, appelé « Tunnel sous le Pas-de-Calais, » développé dans le cadre d'un comité interne au GECUS créé dès 1937 et auquel participe notamment Jean Tschumi18. Les deux organisations ne survivent pas à leur créateur mais Utudjian se targue d'avoir réussi à intéresser de « nombreuses personnalités » parmi lesquelles il cite Henri Prost, Auguste Perret ou Pierre Lavedran. 15 « L'OCEL s'élève à l'angle du boulevard Haussmann et de la rue Taitbout, dans un vieil immeuble que viennent de transformer Albert Laprade et Bazin. Building d'affaires, construit dans ce Louis XVI neutre qui foisonne autour de l'Opéra ; cependant., il comprenait deux étages de sous-sols dont, jusqu'alors, personne n'avait tiré parti ; dès le premier moment, Laprade et Bazin, au contraire, crevaient ces caves pour étendre en profondeur la superficie de l'office - et de fait, avec l'entresol et le premier étage dont disposaient déjà les Secteurs, leurs magasins se superposent maintenant sur quatre étages…. », cité dans la revue « La construction moderne » du 21 Août 1932 16 Le Monde souterrain, n°100, avril 1957, p. 415 17 Le Monde souterrain, n°101, juin 1957, p. 477 18 Jean Tschumi est un architecte suisse qu’Édouard Utudjian connaît depuis les Beaux-arts puisqu'ils ont eu le même chef d'atelier en la personne d’Emmanuel Pontremoli. C'est le père de Bernard Tschumi. 9
  • 11. B-Du rêve des autoroutes souterraines... Édouard Utudjian et le GECUS formulent de nombreux projets pour la circulation automobile sous la capitale. 1-Les projets du GECUS Cette création est le résultat du constat de la faible utilisation du sous-sol et plus prosaïquement de l'état de la circulation automobile dans Paris. L'extrapolation du nombre de véhicules roulants dans les années 1930 fait craindre un blocage généralisé pour la décennie suivante. C'est à partir de cette étude que le GECUS propose plusieurs projets successifs d'autoroutes souterraines visant à désengorger la capitale19. Ces différentes versions, détaillées par Édouard Utudjian dans son Que sais-je ?20, ont plusieurs points communs. Elles prennent comme point de départ l'ensemble des voies existantes ou projetées qui débouchent sur Paris et prévoient de les relier entre elles. Elles visent ensuite à rationaliser la circulation en prévoyant sous la surface différents nœuds routiers observés comme essentiels à la desserte des différents quartiers. Ces nœuds forment l'armature d'une trame et sont reliés par des voies. C'est à ces points névralgiques qu'est prévue la liaison avec la surface et les liaisons entre voies. En effet, le but recherché est l'absence de croisement à niveau car ce sont ces croisements qui en surface obèrent la fluidité du trafic. Il est donc envisagé des rampes pour assurer ces connexions. Un dessin de Jean Tschumi, présenté lors de l'Exposition internationale des Arts et Techniques de 1937 21, sensé illustrer ces rampes hélicoïdales, est symbolique de leur démesure et du caractère extravagant de ces projets. Pourtant le GECUS, en les modifiant, ne cesse de revenir à la charge avec cette idée. Lors d'un débat, organisé par l'Atelier parisien d’urbanisme (APUR) en 1970 et dont les minutes sont transcrites dans le Paris Projet n°322 , Édouard Utudjian revient sur ce projet qu'il n'a jamais abandonné. 2-Les réalisations de passages souterrains Si le GECUS voit ses multiples projets d'autoroutes souterraines retoqués, une partie de ses idées est tout de même exploitée et mise en œuvre. En effet, il n'échappe pas aux services d'urbanisme de Paris que la circulation automobile croit de façon exponentielle et que faute d'une solution rapide, l'engorgement guette la capitale. C'est ainsi que voient le jour plusieurs passages souterrains pour automobiles. On peut citer notamment, parmi les plus importants, ceux de la porte Champerret, de la Porte Maillot ou encore de la Porte de la Villette. Leur but est simple. Il s'agit de fluidifier le trafic des boulevards extérieurs. Or la meilleure solution vise à supprimer les croisements à niveau avec les voies radiales. Comme le sous-sol à cet endroit est moins encombré qu'au centre de Paris, la solution souterraine s'impose naturellement. Ces réalisations sont le résultat de la conjonction de deux facteurs : l'influence du GECUS, c'est indéniable, mais mâtinée du réalisme des urbanistes et ingénieurs qui travaillent au profit de la ville de Paris : ils recourent aux techniques souterraines à un endroit où cela peut se faire facilement tant juridiquement que techniquement et où cette solution semble être la plus logique. Un autre volet important voit le jour suite aux projets du GECUS, les garages souterrains. 19 Voir illustration en annexe 20 Édouard Utudjian, L'Urbanisme souterrain, Paris, Presses universitaires de France, collection « Que sais-je , »1952. 21 Voir illustration en annexe 22 op. cit., p. 59 et suivantes 10
  • 12. C- à la réalité des parkings souterrains Au centre de Paris, l'urbanisme souterrain peine davantage à s'imposer, en raison de l'encombrement du sous-sol. Malgré tout, la problématique du stationnement, concomitante de celle de la circulation, est prégnante : il convient d'y trouver une parade. Cette fois, les idées développées par le GECUS sont reprises largement. Par l'intermédiaire de son bureau d'études, il participe à plusieurs concours en groupement avec des entreprises spécialisées. Les nombreux projets de parkings souterrains, sensés servir d'interface entre les autoroutes souterraines et la surface, sont presque tous repris. 1-1957 : premier parking souterrain. Les parkings souterrains projetés répondent à deux objectifs. Le premier est dit de « dissuasion ». Ce premier type est planifié aux portes de la ville mais il ne voit pas tout de suite le jour. En effet, c'est le second type, dit d' « intérêt local », qui ouvre le bal. Ce sont des ouvrages installées à proximité immédiate des zones de concentration commerciale et des nœuds routiers. Le premier parking souterrain voit le jour en 1957 sous le marché Saint-Honoré. D'autres suivent aux Invalides et avenue Georges V. Plusieurs milliers de places sont ainsi offertes aux automobilistes. Cette solution permet de pallier les difficultés de stationnement en surface mais ce sont des opérations complexes et donc coûteuses. 2-Le recours à la concession La solution retenue pour dépasser l'obstacle est celle de la concession : les garages souterrains sont financés par des promoteurs privés, à charge pour eux de rembourser leurs investissements par l'exploitation de ces parkings sur une durée de trente ans en général. A ce terme, la propriété de l'ouvrage revient à la ville. Les coûts élevés résultent des travaux de creusement et d'installation mais aussi des interventions « annexes », comme le dévoiement des réseaux et le réaménagement des abords qui peuvent représenter jusqu'à un quart du coût total. Ainsi, pendant toute la période de l'après-guerre, le GECUS voit la partie la plus réalisable de ses idées triompher concernant les infrastructures automobiles et s'impose comme un conseiller crédible auprès de l'autorité préfectorale en charge de la gestion de Paris puis de Paul Delouvier, chargé du développement de la région parisienne. Son action apparaît moins visible qu'avec les parkings souterrains mais son influence s'intensifie avec le projet plus gros depuis le métro de Bienvenüe, le Réseau Express Régional (R.E.R.) D-Le RER, une intervention complexe et coûteuse Après les travaux du métro, dont les plus importants se sont déroulés pendant les quarante premières années du XXe siècle, l'urbanisme souterrain « ferré » a marqué le pas, notamment en raison de la guerre. Cependant, dans les années 1960, les projets de développement de l'agglomération parisienne 23 font très vite apparaître la cruelle nécessité d'y revenir. Les voyageurs pendulaires habitent de plus en plus loin du centre de Paris et il est à la fois in-envisageable de prévoir une extension du trafic routier à hauteur du développement des villes nouvelles et de prolonger les lignes de métro existantes. Si les tronçons extérieurs à Paris posent relativement peu de problèmes en raison de l'espace disponible, qui permet de concevoir un transport de surface ou à faible profondeur, la portion intra-muros est 23 Dans le contexte de la mise en place du Schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de la région de Paris (SDAURP). 11
  • 13. autrement délicate. D'immenses problèmes techniques ressurgissent pour créer les deux lignes nord-sud et est-ouest et les connecter. Ce sont les mêmes que ceux rencontrés au début du siècle par les promoteurs du Métropolitain mais ils sont, de fait, amplifiés : le sous-sol de Paris est devenu un entrelacs de réseaux et canalisations diverses. Les méfaits soulignés par Hénard en son temps puis rappelés par Utudjian sont mis à jour. Il faut donc envisager de passer sous l'existant, de travailler à grande profondeur, soit entre moins dix mètres et moins vingt-cinq mètres et d'intervenir dans des couches moins favorables. Parallèlement se reposent les problèmes juridiques de la propriété du sous-sol. Il faut encore faire avec les contraintes de la surface, c'est-à-dire l'évitement des blocs d'immeubles et le suivi de voies existantes à l'air libre étroites. La conjonction de ces deux facteurs entraîne un coût très élevé mais cette réalisation est incontournable. Les idées d’Édouard Utudjian et les projets défendus par le GECUS ont été rendus publics d'abord à travers les infrastructures souterraines routières. Le GECUS a également joué un grand rôle de conseil dans la conception du RER. Mais dès l'origine, le concept d'urbanisme souterrain concerne plus largement tous les aspects de la vie. D'ailleurs, à sa naissance, le GECUS prend comme référence l'organisation du grand paquebot transatlantique, considéré comme l'archétype de la ville souterraine (sous-marine en l'espèce). E-La notion de « ville épaisse » à travers les immeubles souterrains 1-Les deux fonctions initiales de l'immeuble souterrain Édouard Utudjian définit les deux fonctions originelles de la construction souterraine : le stockage (l'archivage) et l'abri. En effet, l'homme, avant de construire en superstructure, se réfugie dans les grottes et l'habitat troglodytique pour se protéger du froid et des prédateurs. Par ailleurs, ces grottes lui servent à entreposer de quoi subsister. Ces fonctions se retrouvent à travers les exemples des coffres de la Banque de France et des réserves de la Bibliothèque nationale ou les abris antiaériens. Mais l'initiateur du GECUS veut sortir de ces deux fonctions d'origine et développer les équipements souterrains 2-Une nouvelle fonction, les équipements Édouard Utudjian veut enterrer les fonctions utilitaires de la cité. Il considère que nombre d'équipements, qui par leur objet ne nécessitent pas d'apport de lumière naturelle ou même exigent l'obscurité, peuvent idéalement être enterrés,libérant ainsi de l'espace en surface pour d'autres usages ; il cite les cinémas, les piscines, les auditoriums, les salles de spectacles, etc. C'est de ces réflexions que naît le concept de « ville épaisse ». Il estime qu'un plan d'urbanisme ne doit pas se contenter de projeter ce qui va se passer en surface mais qu'il faut travailler dans l'épaisseur et prévoir en même temps l'avenir du sous-sol ; en effet, une ville moderne ne peut se concevoir que dans l'interaction des différents niveaux, les uns agissant sur les autres et réciproquement. Il dénonce à cet égard le chaos du sous-sol, surtout entre la surface et moins dix mètres, qui résulte justement de l'absence de sa prise en compte dans le développement de la ville. Il relève que seule la période du Second Empire, grâce à Haussmann, connaît une conquête du sous-sol non « empirique ». Plusieurs projets et réalisations illustrent ses idées. En premier lieu les projets pour les Champs-Élysées qui à l'origine ne traitent que des voies et stationnements souterrains mais sont développés ensuite pour 12
  • 14. accueillir des équipements24. Les différentes esquisses visent justement à redynamiser la célèbre avenue en faisant dialoguer surface et activités souterraines, regroupant un parking et des galeries commerciales qui permettraient de recréer la liaison avec les rues adjacentes, laissées pour compte. De ces projets seul le parking souterrain a vu le jour. En revanche d'autres projets se concrétisent plus complètement. C'est le cas des patios enterrés de Bernard Zehrfuss pour le bâtiment de l'UNESCO. Il n'y a pas de hasard. En effet, Bernard Zehrfuss entre aux Beaux-arts en 1929, dans l'atelier de Pontremoli. Or celui-ci a été « embauché » par Utudjian dans le GECUS. Il faut revenir en quelques mots sur la problématique du bâtiment de l'UNESCO : la proximité de l’École Militaire interdit tout bâtiment de trop grande hauteur qui romprait la perspective. En conséquence, la solution d'enterrer des bureaux et des salles de réunion autour de plusieurs patios s'impose assez naturellement. Mais le symbole par excellence de l'influence d’Édouard Utudjian et du GECUS est le projet des Halles. Dans un article de mars 196725, il écrit : « l'emplacement des Halles doit constituer un espace vert, un nouveau poumon de Paris qui souffre du manque de ces espaces. L'urbanisme souterrain est seul susceptible d'atteindre ce but. » Édouard Utudjian y joue un rôle primordial mais reste dans l'ombre. La création de cet ensemble souterrain inédit en France doit donc beaucoup au GECUS et à son fondateur. Mais son nom apparaît peu, si ce n'est au moment du choix de l'emplacement de la station de RER des Halles. Au printemps 1971, la presse nationale relaie l'opposition entre le projet soutenu par les autorités, qui prévoit d'installer la station souterraine à l'emplacement qu'elle occupe actuellement et celui défendu par le GECUS, qui opte au contraire pour une implantation sous le plateau Beaubourg26 27. Le projet des Halles est le dernier grand projet que suivent de près Édouard Utudjian et le GECUS, celui-ci disparaissant avec son créateur. Il convient donc de tirer les premières leçons de ces quarante ans d'activité. F-L'urbanisme souterrain et Édouard Utudjian : premier bilan 1-Édouard Utudjian, son itinéraire et sa personnalité Une première consultation d'une partie des archives d’Édouard Utudjian, détenues par l'Institut français d'urbanisme28, fait apparaître le fort besoin de reconnaissance du personnage ou de son entourage : des revues et de nombreuses coupures de journaux de différentes époques et de tous types sont précieusement conservées et/ou découpées et archivées : on y trouve des articles rédigés par Édouard Utudjian29, des projets du GECUS30 ou encore des interviews du « père de l'uranisme souterrain »31 mais aussi des articles de vulgarisation. Un autre aspect ressort très clairement de l'étude des archives : l'idée fixe. Le sentiment diffus, né dans un premier temps de la consultation du Paris Projet n°3, du Que sais-je ? et du numéro de Paris-Match consacrée à Paris vingt ans après32 à propos des autoroutes souterraines se confirme : les thématiques reviennent régulièrement. Il faut certes prendre en compte la période de plus de quarante ans pendant 24 Voir le Que-sais-je ? d'E. Utudjian, op. cit., p. 107 et s. et Paris Projet n°3, op. cit, p. 87 et s. 25 Association pour les espaces naturels, Aménagement et nature n°5 « Espaces naturels », Paris, 1967. 26 Voir à ce sujet notamment Le Monde du 2 avril 1971 et Le Figaro du 17 mai 1971. 27 Voir l'illustration en annexe. 28 Ont été exploités les cartons côtés 413 IFA 8, 413 IFA 9, 413 IFA 11 et 413 IFA 13 29 Par exemple le n°10 du 6 mars 1942 du Moniteur des travaux publics et du bâtiment. A noter que l'article est signé « E. Lestudiant » ; est-ce une erreur de typographie ou un pseudonyme ? 30 Par exemple le n°5 de mai 1969 de la revue allemande Baumeister consacre un chapitre intitulé « Die Hallen von Paris » dans lequel figure le projet du GECUS ; voir illustration en annexe. 31 Par exemple un interview par Paul Dreyfus dans Le Dauphiné libéré du 16 janvier 1969, voir illustration en annexe 32 Paris Match n°951, 1er juillet 1967, « Paris dans 20 ans ». 13
  • 15. laquelle Utudjian milite pour l'urbanisme souterrain mais la compilation de documents donne singulièrement l'impression qu’Édouard Utudjian et le GECUS ont répété à l'envie la nécessité de recourir à l'urbanisme souterrain en usant des mêmes arguments et en proposant les mêmes projets. On peut aussi considérer qu'ils ont, comme de bons pédagogues, répété leur message de peur de ne pas être entendu. Dans le même temps, on observe une augmentation exponentielle du nombre de conférences données par Édouard Utudjian au fil des années. Une nouvelle preuve de son influence et de la réception des travaux du GECUS. Il faut donc y revenir. 2-Les travaux d’Édouard Utudjian dans la presse grand public En effet, si les travaux d'Utudjian et du GECUS font l'objet d'articles dans la presse spécialisée (cf. les notes de bas de page n°24 et 25 page précédente) ou dans les grands quotidiens, nationaux et régionaux, il semble plus surprenant de trouver trace de l’urbanisme souterrain dans des hebdomadaires ou mensuels dits « grand public ». La matière est aride mais semble passionner le public. Ainsi la première approche en archives a permis de trouver trois articles de vulgarisation mais assez fouillés, respectivement dans Télé 7 jours, Femme pratique et Cinq colonnes à la une33. Les trois articles trouvés datent tous de l'année 1971. En revanche, les recherches, certes partielles, n'ont pas permis de relever d'autres éléments similaires à des dates plus anciennes. Une explication peut être avancée : le début des années 1970 est le théâtre d'une forte actualité souterraine en France, avec l'ouverture des premiers tronçons du R.E.R. et surtout les débats qui entourent les études et premiers travaux des Halles. Par ailleurs, Édouard Utudjian enchaîne les cycles de conférences. Enfin, cela participe de la volonté de pédagogie du GECUS indiquée supra. En revanche, il faut souligner que les articles sont illustrés de photos grand format en quadrichromie, présentant soit un projet des Halles hors d'échelle (dans Femme pratique), soit le projet de ville sous la Seine de Paul Maymont 34. Ces images font sans doute rêver les lecteurs mais sont loin des projets du GECUS, même les plus singuliers, tels ceux des autoroutes souterraines. On peut tirer deux leçons de ce qui précède. La première concerne Édouard Utudjian. Toute sa vie, il se passionne pour l'urbanisme souterrain et ne cesse de défendre et de promouvoir ses idées, contre vents et marées. Il en résulte de belles réalisations qui, paradoxalement ne portent pas son nom mais indéniablement sa « patte ». la seconde, qui est un corolaire, porte plus largement sur le rayonnement des idées du GECUS. La portée et la réception des réflexions et études sont sans doute amoindries par les projets d'autoroutes souterraines qui résistent mal au principe de réalité. Pourtant, ces projets, défendus par Utudjian, sont au cœur de sa réflexion et constituent une sorte de fil rouge tout au long de sa vie et de celle du GECUS. 33Télé 7 Jours, semaine du 10 au 16 juillet 1971 5 Colonnes à la une, n°3, semaine du 20 au 26 octobre 1971 Femme pratique, n°102 de décembre 1971 34 cf. photographies en annexe. 14
  • 16. III-Bilan, autres pistes et après le GECUS Après la mort du GECUS et de son créateur, il convient de dresser un bilan de l'urbanisme souterrain, de cerner les évolutions de la doctrine et de dresser un portrait prospectif à grands traits A-Dresser un bilan : recourir de façon réaliste à l'urbanisme souterrain Ce bilan se décompose en trois leçons et est illustré par deux exemples significatifs. 1-Introduire une discipline L'étude et les réalisations qui s'étendent du milieu du XIX e siècle à la fin du XXe siècle permettent de tirer un premier enseignement, la nécessité absolue de procéder en matière d'urbanisme souterrain avec discipline. En effet, contrairement à ce qui se passe en surface, les interventions en sous-sol ont des conséquences définitives à la fois sur lui-même et sur ce qui se passe en surface ; toute nouvelle intervention doit partir de l'existant toute modification est délicate, longue et coûteuse. Il convient notamment d'agir de façon prospective, le plus possible, et en tout état de cause de dresser des relevés exhaustifs et précis des interventions, en pensant aux suivantes qui arriveront de toute façon. 2-Considérer les contraintes avec réalisme Qui parle d'urbanisme souterrain, doit aborder d'office ses contraintes, qui varient selon le lieu mais qui ressortent généralement à trois domaines. Technique. Même si les avancées techniques et technologiques ont été énormes depuis Haussmann, le facteur technique reste prépondérant ; tout n'est pas possible sous terre, compte tenu de la géologie ou de la présence des nappes phréatiques. Juridique. Si la technique a progressé, le droit du sous-sol reste en France aujourd'hui globalement le même qu'en 1855 ; l'article 552 du Code civil s'applique toujours : le tréfonds appartient à celui qui possède le sol en surface et les dérogations sont rares et/ou coûteuses. Financier. La technique permet de faire beaucoup mais c'est quelquefois pour un coût exorbitant. Il convient donc toujours de se référer au « coefficient de terrage » défini par Édouard Utudjian, c'est-à- dire à la différence de coût entre une même installation en surface et en sous-sol, le coût devant être entendu au sens le plus large tant financier que social ou environnemental. 3-Intégrer le sous-sol dans une politique globale C'est un des chevaux de bataille d’Édouard Utudjian. Toute sa vie il ne cesse de militer pour un urbanisme qui prenne en compte tant la surface que le sous-sol, c'est le sens de sa notion de « ville épaisse ». car surface et sous-sol interagissent et on peut projeter un plan de ville uniquement dans une dimension. Cette problématique qui recoupe la première est pleinement d'actualité et explique notamment les saignées nombreuses et répétées dans les chaussées et trottoirs des villes. 15
  • 17. 4-La « Ville intérieure » de Montréal et Subtropolis à Kansas City. Montréal est sans doute l'exemple le plus cité de réussite souterraine. Mais on oublie souvent d'ajouter que la « Ville intérieure » a nécessité près de cinquante ans de maturation entre les premières idées et sa réalisation. On omet également la grande différence de cadre juridique du sous-sol avec la France, par exemple35. Il n'en demeure pas moins que l'installation d'activités diverses autour de pôles de transports collectifs est une des bonnes solutions à suivre pour travailler sur le développement de l'urbanisme souterrain. C'est d'ailleurs sur ce principe que sont conçues les Halles. Le deuxième exemple est à la fois très différent mais en même temps plus proche des catégories originelles d’utilisation du sous-sol définies par Utudjian. Il s'agit de Subtropolis, un gigantesque complexe souterrain de stockage de 5 millions de m 3 qui est ouvert depuis 2007 et peut accueillir à peu près tout ce qui roule ou flotte. Il est parcouru de 11 kilomètres de routes et de nombreuses voies de chemin de fer. C'est le stockage souterrain porté à son extrême mais cela semble fonctionner 36, ce qui prouve que l'utilisation traditionnelle du sous-sol a encore des marges de progression. B-Les épigones du GECUS : une évolution de l'architecture vers l’ingénierie 1-De « Espace souterrain » au « Comité Espace souterrain » de l'AFTES Après la mort d’Édouard Utudjian et la disparition du GECUS, certains souhaitent continuer son œuvre. Or il semble que les épigones se scindent dans un premier temps en deux entités différentes. L'une, appelée « Espace souterrain », regroupe plutôt les tenants des « sciences molles », ce sont des architectes , des urbanistes et des sociologues. L'autre, qui prend le nom d'Association française des travaux en souterrain, est créée en 1970, pour répondre aux préconisations internationales. Elle regroupe des ingénieurs, spécialistes des tunnels. Ce n'est qu'en 2005 que l'association « Espace souterrain » est absorbée par l'AFTS qui devient l’Association française des tunnels et de l'espace souterrain (AFTES) et crée le Comité Espace souterrain. Cette courte histoire est symptomatique d'un mouvement de fond qui concerne l'ensemble des domaines relatifs à l'acte de construire mais plus particulièrement l'urbanisme souterrain : la domination des ingénieurs. D'ailleurs, on n'évoque plus la notion d'urbanisme souterrain qui, soit disant, est trop restrictive. Mais cette évolution n'est malheureusement pas postérieure à la disparition d’Édouard Utudjian. La lecture des numéros du « Monde souterrain », qui prend le sous-titre de « Techniques de l'urbanisme souterrain et des travaux souterrains » à compter du numéro 150 en 1967, permet de sentir cette évolution lente mais continue des domaines de l'architecte et de l'urbanisme vers ceux de l'ingénieur. Or au sein du Comité Espace souterrain, co-dirigé par Monique Labbé et Pierre Duffaut, seule la première est architecte et il semble que ce soit la seule de son espèce parmi les gens « qui comptent » au sein de l'AFTES. 2-ITACUS, le successeur du CPIUS L'AFTES se décline au niveau international avec l'Association internationale des travaux et de l'espace souterrain (AITES, ITA en anglais) au sein duquel un comité Espace souterrain trouve sa place, l'ITACUS. Là aussi la part belle est faite aux spécialistes des tunnels. L'onglet « architecture » du site Internet de l'association ne regroupe qu'une série de photos montrant l'histoire des relations entre 35 Voir à ce sujet : Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, op. cit. 36 Voir en annexe un prospectus de publicité. 16
  • 18. l'homme et le sous-sol. 3-Mastère Tunnels et ouvrages souterrains Le dernier avatar de cette évolution est la création par l'AFTES d'un mastère spécialisé, en collaboration avec l'INSA de Lyon, qui s'adresse aux ingénieurs BTP généralistes, soucieux de perfectionner leurs connaissances en matière de travaux souterrains. La prise en compte de la nécessité de former des spécialistes aux travaux souterrains est une bonne chose mais là encore l'architecture a été balayée au profit de la technique des tunnels37. Le rapide tour d'horizon des épigones du GECUS montre clairement la direction qui a été choisie. Les travaux souterrains, et en l'espèce le tunnel, semble au centre des débats, pendant que l'architecture et l'urbanisme occupent la portion congrue. Pour paraphraser Clémenceau, il semble que le sous-sol soit considéré comme une chose trop sérieuse pour être confiée à des urbanistes et des architectes. Heureusement, les projets fous des architectes sont encore là pour nous faire rêver. C-Prospective : de Maymont à Fromboluti 1-Paul Maymont et Max Abramovitz Dans les années 1960, Paul Maymont, prenant en compte la contrainte juridique des travaux souterrains à Paris, remarque que la Seine constitue un large domaine public inoccupé, qui traverse Paris de part en part. Il propose donc l'équipement complet du sous-sol de la Seine en voies routières, parkings et autres activités38. Avec une largeur de la Seine allant de 150 à 200 mètres sur 12 kilomètres de longueur, la surface approche 2 km² ; avec une dizaine d'étages, le volume utile équivaut à celui du bâti d'un arrondissement entier. Ce projet ne prend bien sûr en compte ni les contraintes géologiques, techniques ou financières du creusement d'un immeuble de dix étages sous la Seine, long d'une dizaine de kilomètres mais il a le mérite d'une réflexion qui sort des sentiers battus. Dans le même ordre d'idée, Max Abramovitz propose en 1964 une projet de ville souterraine pour Pittsburgh. Elle regroupe à la fois des parkings, des zones de stockage et des activités. Là aussi le projet ne dépasse pas l'étape de l'ébauche et il est difficile de trouver de plus amples informations sur le projet. 2-Fromboluti : projet « Above Below » Plus près de nous, un jeune architecte de l'université Washington de Saint-Louis dans le Missouri, propose un « gratte-ciel souterrain » destiné à réparer le paysage meurtri par l'exploitation minière dans le désert de l’Arizona, à proximité de la ville de Bisbee39. Son projet, baptisé "Above Below" est en effet pensé pour combler une ancienne mine à ciel ouvert de 275 mètres de profondeur sur plus de 1,2 km². Il imagine un programme qui comporte à la fois des espaces réservés à l’habitation et au travail, des surfaces dédiées à l’agriculture et enfin des zones pour le temps libre et les loisirs. L'ouvrage est auto-suffisant en énergie et en eau grâce à ses propres sources d’énergie, à un système de recyclage d’eau et à des cheminées solaires pour réguler un climat local 37 Voir en annexe la page de garde de la plaquette d'information 38 Voir illustration en annexe 39 idem 17
  • 19. artificiel. Dissimulé sous un dôme, le projet est entièrement construit sous terre, avec uniquement quelques zones profitant de la lumière du soleil, disposées de façon idoine pour contrôler le climat et accéder à la surface. Cependant, loin d’être coupés du monde, les habitants de la structure ont la possibilité de se rendre à la ville voisine grâce à un train fonctionnant à l'énergie solaire. Ce concept renouvelle l'urbanisme souterrain et ne modifie le paysage désertique que de façon mineure ; en effet Matthew Fromboluti prévoit qu'un sol artificiel au-dessus du dôme permette à la végétation de se développer à nouveau. 18
  • 20. Conclusion Ainsi, cette étude, non exhaustive de l'urbanisme souterrain parisien, tend à montrer que son apparition est concomitante avec celle de la ville à l'âge industriel. Comme souvent, le fait précède le mot puisque le concept n'apparaît qu'à partir de 1933, lorsque Édouard Utudjian crée le GECUS et développe ses premiers projets souterrains. Les travaux relatifs aux égouts et à l'adduction d'eau, engagés à partir de 1855 par le baron Haussmann, apparaissent a posteriori d'une grande modernité, tant dans la conception que dans la mise en œuvre avec la notion d'organisation du sous-sol et notamment cette idée géniale d'une galerie visitable, qui sont en partie oubliées par ses successeurs. La construction du métro clôt cette période révolutionnaire, très courte compte tenu de la réalisation de travaux titanesques avec des moyens techniques rudimentaires. Le témoin de l'urbanisme souterrain se passe ensuite entre Eugène Hénard et Édouard Utudjian, le second développant et mettant en forme les intuitions du premier. En effet, le père de l'urbanisme souterrain est incontestablement cet architecte franco-arménien qui voue sa vie à promouvoir inlassablement les perspectives de ce développement sous la surface. Même si son cheval de bataille, les autoroutes souterraines, ne voient pas le jour, n'étant pas suffisamment ancrées dans la réalité, nombre de ses projets, comme le stationnement automobile souterrain, sont développés et la réalisation des Halles et du RER lui doivent beaucoup. Plus largement, il ne cesse de mettre le doigt sur la nécessité de penser le développement de la ville dans son épaisseur, le sous-sol et la surface étant par essence liés et interdépendants. Malheureusement, le concept, dans sa forme originelle, ne survit pas à son concepteur. En effet, pris dans le mouvement plus vaste de l'acte de construire, le travail de l'architecte et de l'urbaniste a été réduit au profit de l'ingénierie. À l'heure où il n'est question que de densification et de libération d'espace pour une installation accrue du végétal dans la ville, l'urbanisme souterrain retrouve toute sa place. Le sous-sol doit donc pour cela être réinvesti méthodiquement et avec réalisme par les architectes et les urbanistes et ne pas être uniquement l'apanage des constructeurs de tunnels. 19
  • 21. Bibliographie et sources : livres : Édouard Utudjian, Architecture et urbanisme souterrains, Paris, Robert Laffont, 1966. Édouard Utudjian, L'Urbanisme souterrain, Paris, Presses universitaires de France, collection « Que sais-je , »1952. revues et brochures : Sabine Barles, Sarah Jardel, L'Urbanisme souterrain, étude comparée exploratoire, Paris, Atelier parisien d'urbanisme, 2005. Jean Castex, Catherine Blain, Virginie Lefebvre, Sols artificiels, sursols, dalles : étude historique comparative, Paris, Atelier parisien d'urbanisme, 2005. Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°3 « Le sous-sol de Paris et l’urbanisme – Les Champs Élysées », Paris, 1970. Atelier parisien d'urbanisme, Paris Projet n°1 « Les Halles», Paris, 1969. Association pour les espaces naturels, Aménagement et nature n°5 « Espaces naturels », Paris, 1967. Bernard Lafay, « Plan – Solutions aux problèmes de Paris », Comité du nouveau Paris, 1954. presse généraliste : Paris Match n°951, 1er juillet 1967, « Paris dans 20 ans ». Fonds Édouard Utudjian, archives de l'Institut français d'architecture : cartons 413 IFA 8, 413 IFA 9, 413 IFA 11 et 413 IFA 13. 20
  • 22. Annexes Liste des documents iconographiques 1. Schéma des propositions de M. Henry Bernard pour l'aménagement du parvis Notre-Dame (Paris Projet n°3, p.12). 2. Coupe type d'une galerie d’égout (Paris Projet n°3, p.12) 3. projet de rue à étages, présenté par Eugène Hénard, lors de la conférence de Londres en 1910 (www.cornell) 4. Projet de réseau d'autoroutes souterraines d’Édouard Utudjian (QSJ ? E. Utudjan, p. 116) 5. Dessin d'une rampe hélicoïdale de liaison entre le réseau d'autoroutes souterraines et la surface par Jean Tschumi, présenté lors de l'Exposition internationale des arts et techniques de Paris en 1937 (http://urbanites.rsr.ch/galerie-photos/paris-souterrain/) 6. Plans des projets respectivement de la RATP et du GECUS pour l'implantation de la station de RER des Halles (Combat, 19 mai 1971) 7. Projet du GECUS pour l'aménagement des Halles (Baumeister n°5 de mai 1969, p.539) 8. Interview d'Edouard Utudjain par Paul Dreyfus (Le Dauphiné libéré, 16 janvier 1969) 9. Dessin d'artiste illustrant le projet des Halles (Femme pratique, n°102, décembre 1971) 10. Coupe du projet de Paul Maymont d'installation d'un complexe sous la Seine (5 Colonnes à la une, n°3, semaine du 20 au 26 octobre 1971) 11. Prospectus de publicité pour la location d'emplacements dans Subtropolis (http://www.subtropolis.biz/pdfs/sub_store_rates_flyer.pdf) 12. page de garde de la brochure présentant le mastère spécialisé tunnels et ouvrages souterrains (http://mstunnels.insa-lyon.fr/) 13. coupe du projet « Above Below » de Matthew Fromboluti (http://frombo.com/folio- Evolo10.html) 21