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Trombinoscope "Chercheurs d’humanité"
Chercheurs de sens
(art, religion, philosophie, spiritualité)
2 – Préhistoire et Antiquité
jusqu’à J.-C.
Étienne Godinot .08.01.2024
La préhistoire
L’homme de Néanderthal
Depuis quand les êtres humains ont-ils des préoccupations
spirituelles ? À quand remonte homo credens ou homo religiosus ?
Selon les découvertes de la paléoanthropologie, les premiers
hominidés connus (Toumaï, Tchad, 2001) auraient vécu il y a 7 millions
d’années, et les australopithèques (Lucy, Éthiopie, 1974), entre 4 et 3
millions d’années.
Homo habilis (- 2,5 millions d’années), bipède, possède un
langage articulé rudimentaire et sait confectionner des outils simples.
Homo ergaster (-1,9 million d’années, Kenya, 1971) et Homo
georgicus (ou homme de Dmanissi, -1,8 million d’années, Géorgie, 1991)
précèdent Homo erectus (- 1 500 000 ans), qui maîtrise le feu à partir
de - 790 000 ans*.
../..
* site archéologique de Gesher Benot Ya`aqov, au bord du Jourdain
Photos : - Crâne de l’homme de Tautavel (Pyrénées orientales, 1971), représentant européen
d'Homo heidelbergensis (- 450 000 à - 300 000 ans).
- Peinture de la grotte Chauvet (Pont d’Arc, 1974), occupée entre - 37 000 et - 28 000 ans.
Les hommes préhistoriques
Homo neanderthalensis (- 200 000 à - 40 000 ans) précède
homo sapiens (Cro-Magnon, Dordogne, 1868).
Homo sapiens développe l’agriculture (née avec la mise en
terre volontaire de premières semences et la domestication des
animaux) lors de la révolution néolithique, 12 000 ans avant notre ère.
Depuis Hiroshima, l’homme moderne est homo demens…
Si nous voulons que l’humanité subsiste dans un environne-
ment sain, il doit devenir homo viabilis…
Photos :
- Reconstitution de l’homo georgicus
- Reconstitution d’un l’homme de Néanderthal ( env. - 45 000 ans) à partir du crâne trouvé en
1908 dans la grotte de la Chapelle-aux-Saints, au sud de la Corrèze.
- Reconstitution de l’homme de Cro-Magnon ( Dordogne, découvert en 1868)
L’homme de Néanderthal
André Leroi-Gourhan retient de nombreux indices témoignant
sinon d'une religion, du moins de rites préhistoriques, d'une " aptitude à
traduire par des symboles la réalité matérielle du monde environnant ".
* Il y a 176 500 ans, à Bruniquel (Tarn-et-Garonne), des Néanderthaliens faisaient des feux
au fond d’une grotte, à 336 mètres de l’entrée, pour manger, s’éclairer et probablement pour
des pratiques cultuelles…
Le plus ancien dessin de l'histoire de l'humanité, daté de - 73 000 ans, identifié en 2015 en
Afrique du Sud, est un dessin abstrait, composé de quelques lignes ou hachures, découvert
dans la grotte de Blombos.
On fait généralement remonter la spiritualité dans l’histoire de
l’homme aux premières sépultures, qui traduisent l’affirmation que le
corps de l’être aimé est sacré, que l’amour subsiste malgré la mort et
qu’il existe peut-être un au-delà de la vie terrestre.
Les premières sépultures font leur apparition au cours du
paléolithique moyen, il y a environ 100 000 ans et probablement plus
tôt*. Elles sont liées à l'Homme de Néanderthal en Europe et aux
premiers humains anatomiquement modernes au Proche-Orient. Des
vestiges osseux animaux considérés comme des offrandes sont
parfois associés aux individus ensevelis.
Les hommes préhistoriques
Au Gravettien*, le thème des Vénus paléolithiques est
présent dans différentes régions d'Europe, du sud-ouest de la
France à l'Ukraine en passant par l'Italie et l'Allemagne.
Il est interprété par certains auteurs comme le témoignage
d'un ancien culte de la déesse.
** phase du paléolithique supérieur qui doit son nom au site de La Gravette
(Dordogne).
- Vénus de Hohle Fels (env. - 35 000 ans) découverte en 2008 à
Schelklingen (Jura souabe, Allemagne du Sud)
- Vénus de Willendorf (env. - 25 000 ans) découverte en Autriche en 1908
- Vénus de Lespugues (Haute-Garonne), env. - 23 000 ans, découverte en
1922
Gilgamesh
en akkadien, "celui qui a tout vu", ou "celui qui a vu la
profondeur", personnage semi-légendaire de la Mésopotamie antique.
Roi de la cité d'Uruk où il aurait régné vers 2650 av. J.-C., divinisé après
sa mort, et dieu des Enfers dans la mythologie mésopotamienne.
Personnage principal de plusieurs récits épiques, dont le plus célèbre
est l'Épopée de Gilgamesh, première œuvre littéraire que nous
connaissions, transmise par le premier système d’écriture inventé par
les humains vers le début du 4e millénaire
Le roi Gilgamesh comprend que la seule forme d’immortalité à
laquelle il peut accéder est moins liée à la gloire acquise par ses
exploits guerriers qu’au renom que lui confèrent la construction des
murailles protégeant la cité et sa connaissance du monde, détenue
grâce à un périple extraordinaire.
Fort de ses expériences, il devient un homme sage dont le
règne est commémoré par les générations futures. L’Épopée est un récit
sur la condition humaine et ses limites, la vie, la mort, l'amitié, la vanité
de la recherche de la gloire, et plus largement un récit d'apprentissage
sur l'éveil de son héros à la sagesse. La morale de l'Épopée est qu'on
ne peut échapper à la mort, réalité de la condition humaine, et qu'il vaut
mieux chercher à profiter au maximum de son existence sur Terre.
Gudea
ou selon sa forme francisée Goudéa (" l'Appelé"), souverain de
la civilisation mésopotamienne, gouverneur de la cité-État de Lagash,
en basse Mésopotamie de 2141 à 2122 av. J.-C. Si ses inscriptions
revendiquent une campagne victorieuse contre Anshan, c’est un prince
avant tout bâtisseur de temples à Girsu-Tello, Ur, Nippur, Adab, Uruk
(et Bad-Tibira, indice de l'influence de Gudea à Sumer).
La statuaire correspondant à son règne, surtout constituée de
ses propres représentations, est empreinte de cette piété qui contraste
avec les thèmes belliqueux de l'art de la période akkadienne. De
nombreuses statues sont en diorite, roche magmatique noire très dure
provenant de l’actuel sultanat d’Oman. L'inscription que porte la
statuette la consacre au dieu Ningishzida. Il faut voir ces statues
comme l'expression de la piété de Gudea. Son visage est empreint de
sérénité, et le souverain est souvent représenté dans la position de
l'orant, les deux mains jointes.
« Comme les enfants d’une même mère, nous sommes unis
dans ce cœur de Lumière »
(rapporté par Marguerite Kardos, spécialiste de Sumer)
Abraham
‟Père de multiples nations”, vers 1900 ans avant J.-C.
Personnage probablement plus symbolique qu’historique, patriarche
des Hébreux et père des trois religions monothéistes, judaïsme,
christianisme et islam. Ibrahim pour les Musulmans. Associé aux
concepts de foi, d’alliance et de promesse.
Chef d’une tribu de pasteurs semi-nomadiques, aurait vécu en
Haute Mésopotamie à Ur, puis à Harân. Non loin des sanctuaires
élevés en l’honneur des dieux de la fécondité, ces tribus et leurs
chefs ont peu à peu la certitude d’un Dieu unique. Certaines d’entre
elles acquièrent probablement peu à peu la conviction que Dieu ne
peut pas supporter et refuse les sacrifices humains.
Dans la tradition biblique, part au pays de Canaan*, est invité
par un ange de Dieu à ne pas immoler son fils Isaac, et le remplace
sur l’autel par un bélier.
* Leckh-lekha : « Va vers toi », terre de toi, terre que je te ferai voir !
« Le messager du Seigneur l’appela alors de la part de Dieu :
« Abraham, Abraham ! (…) Ne touche pas à l’enfant, ne lui fais aucun
mal » Genèse, 22, 11
Images : - Ziggurat d’Ur en Chaldée (vallée du Tigre et de l’Euphrate, époque sumérienne)
- Abraham vu par Ephraïm Moses Lilen (1874-1925)
- Tableau de Laurent de La Hyre, 1650. Abraham sacrifiant Isaac
Hammurabi
(v. - 1810 - v. -1750), 6ème roi de Babylone (Irak actuel. En amorrite et
en akkadien "l'aïeul guérisseur"). Son règne, après - 1992, est l'un des plus
longs de l’Antiquité proche-orientale et prestigieux par l'ampleur de son
œuvre politique et législative, au-delà des conquêtes militaires. Fait écrire le
code de Hammurabi, l'un des textes de lois les plus anciens jamais trouvés.
Des tablettes d'argile (photo du bas) complètent les gravures sur la stèle en
basalte.
Le Code contient 282 articles, écrits en cunéiforme akkadien. De
nombreux délits entraînent des châtiments tels que la mort, la défiguration
ou l'application de la loi du talion ("œil pour œil, dent pour dent", également
dans la Bible, qui est quand-même un progrès par rapport au "mort pour
œil" de la vendetta). Le code pose la présomption d'innocence et suggère
que l'accusateur et l'accusé ont la possibilité d'apporter des preuves.
« Pour que le fort n’opprime pas le faible, pour faire justice à l'orphelin
et à la veuve, (…) pour faire justice à l'opprimé, j'ai écrit mes paroles
précieuses sur ma stèle etc. »
« Faire éclater la justice pour que le puissant cesse de causer tort au
faible ».
NB : Une inscription sur un sarcophage égyptien de la XIème dynastie,
(fin du 3ème millénaire) dit déjà : « J’ai fait chaque homme égal à son
prochain »
Akhenaton
Amenhotep IV, 10ème pharaon de la XVIIIème dynastie de l’Égypte
ancienne, époux de la reine Néfertiti. Règne de -1355 à -1338 ?.
Considéré par les uns comme l’un des grands mystiques de
l’Antiquité, par d’autres comme un dictateur intolérant. Pour des raisons
encore mal connues, vraisemblablement en butte au conservatisme et à
l'hostilité du clergé de Thèbes, abolit le culte d’Amon, le ‟dieu caché”, lui
substitue celui d’Aton, ‟le disque solaire”.
Ordonne de détruire les images de culte des anciennes divinités à
l'exception de Rê. Abandonne Thèbes pour fonder une nouvelle capitale
300 km au Nord, la cité d’Akh-en-aton (‟l’Horizon du disque solaire”),
l’actuelle Armana, en déracinant en plein désert et en épuisant les
milliers d’ouvriers affectés à cette tâche, inhumés sans respecter les rites
traditionnels.
Répudiant le vaste syncrétisme de la religion officielle, engage
l’Égypte dans la voie du monothéisme, affirme la bonté providentielle du
Soleil qui chaque matin fait renaître la vie.
Photo du bas : El-Amarna,, site archéologique d'Akhetaton
../..
Akhenaton
Absorbé par ses activités religieuses, le ‟roi ivre de Dieu”
néglige la politique étrangère et laisse l’Égypte perdre toutes ses
possessions extérieures.
Considéré comme hérétique par ses successeurs. Dès sa
mort, Néfertiti puis Toutankhamon, son successeur, font effacer son
nom et rétablissent le polythéisme hénothéiste* traditionnel.
Son Hymne au Soleil est paraphrasé par le Psaume 104, dans
lequel toutefois le Soleil n’est pas Dieu mais une créature de Dieu.
AkhenAton
Ton apparition est belle à l'horizon du ciel, ô soleil vivant qui a vécu le
premier... Tu es beau et grand, tu étincelles et tu es au-dessus de tout Pays.
Tes rayons entourent les pays autant que tu en as créés.
Psaume 104
Eternel, mon Dieu, tu es infiniment grand.
Tu es revêtu d'éclat et de magnificence.
Il s'enveloppe de lumière, comme d'un manteau.
* Hénothéisme : croyance en une pluralité de dieux dans laquelle chacun d'entre eux
joue successivement un rôle prédominant par rapport aux autres et reçoit un culte
préférentiel.
Moïse
(v. - 1392, v. - 1272), Personnage biblique, premier prophète
du judaïsme, considéré comme légendaire ou symbolique par la
grande majorité des archéologues, philologues et autres scientifi-
ques spécialistes de la Bible et des lieux bibliques. Le récit de sa
naissance ressemble de près à la légende de la naissance de
Sargon, roi légendaire, fondateur de l'Empire assyrien.
Dans la tradition biblique, fils d’Amran et de Jocabed, conduit
le peuple d’Israël hors d’Égypte en ouvrant la mer Rouge. L’exode
de 40 ans dans le désert, dont on ne trouve aucune trace
archéologique, est aujourd’hui considéré par beaucoup comme une
construction théologique ou un parcours spirituel.
Selon l'historien israélien Nadav Naaman, ce récit de l'Exode
et de la conquête de Canaan constitue probablement une construc-
tion biblique littéraire et théologique qui évoque la perte du contrôle
militaire égyptien en Canaan vécue comme une libération, la
mémoire culturelle juive transférant cette situation par la mise en
scène d'une sortie d'Égypte. ../..
Photos : - Moïse recevant les tables de la loi, par Marc Chagall
Moïse
Moïse vit sur le mont Horeb une expérience spirituelle traduite
symboliquement par la vision d’un buisson ardent, comme des genêts en
fleurs. Il demande à la chose : « Dis-moi quel est ton nom ? *», et elle lui
répond : « Je suis ce que je suis. Tu sauras qui je suis quand tu verras
que je suis à tes côtés. »** Le Dieu de Moïse s’expérimente dans la vie.
On ne peut rien savoir de lui, sinon qu’il est là. Inutile d’essayer de le
décrire, il est là et cela suffit.
* S’il faut nommer Dieu, les Juifs emploient dans la Bible une périphrase ou quatre lettres
qui n’ont aucun sens, YHVH. Aujourd’hui encore, quand ils écrivent, les Juifs utilisent pour
désigner Dieu la plus petite lettre de l’alphabet hébreu, le yod – une simple virgule.
** Marcel Légaut traduit cette intuition en disant que Dieu se manifeste en
moi quand je suis fidèle à mes exigences intérieures dans ma pensée, mes paroles,
mon activité créatrice: « Il y a en moi une action qui est de moi, qui ne peut pas être
sans moi, mais qui n’est pas que de moi. J’affirme que cette action qui m’est propre
est Dieu. »
Écrit "sous la dictée de Dieu" sur le mont Sinaï les dix paroles
(Décalogue) ou commandements, dont le 6ème, "Tu ne tueras pas". La
traduction d'André Chouraqui "Tu n'assassineras pas" donne une autre
interprétation de ce commandement, qui ne couvre pas l'homicide en cas
de guerre, de légitime défense, ou prononcé par un tribunal régulier
(peine de mort). ../..
- Moïse devant la buisson ardent, par Marc Chagall
- Les 10 commandements en hébreu sur un parchemin
Nouvelles découvertes sur Moïse
Dans son livre Moïse l’insurgé, Jacob Rogozinski se demande qui
était Moïse (Freud pensait que Moïse était un Égyptien, un auteur juif
suggère que Moïse était peut-être une femme), pourquoi la Bible le
présente comme un lépreux né d’un inceste dans une tribu maudite. Ne
croit pas à la traversée de la mer Rouge et du désert, mais grâce aux
découvertes les plus récentes des historiens et des archéologues (cité
cananéenne de Hatsor à 15 km au nord du lac de Tibériade), explore le
noyau de vérité du récit de l’Exode.
Un soulèvement a eu lieu en Canaan dans l’Antiquité. Il a donné
naissance à une société sans roi et sans État, dont les lois sont hospita-
lières aux étrangers, favorables aux asservis, aux exclus. Cette insur-
rection n’aurait pas été possible si un homme surnommé Moïse n’avait
pas introduit un dieu étranger, un dieu qui ne sanctifie pas le pouvoir des
rois, mais soutient les opprimés dans leur combat pour la justice.
L’enquête se centre alors sur le dieu de Moïse afin d’élucider la genèse
du monothéisme.
../..
Photo du haut : la cité cananéenne de Hatsor (ou Tel Hazor), cité importante de l'âge du
bronze et de l'âge du fer, des environs de 2600 jusqu'à sa destruction par les Assyriens en 732
avant notre ère.
Moïse
Moïse remet en cause la monarchie sacrée, introduit « une théo-
démocratie », la République des hébreux, la séparation des pouvoirs, le
refus de la servitude volontaire.
Un passage de la Bible* suggère qu’Abraham, Isaac et Jacob
n’adoraient pas le vrai Dieu (ils adoraient Elohim, un dieu tout-puissant,
créateur de l’univers, etc.) mais que le Dieu de Moïse, à vocation
universelle, est un Dieu intime, discret (YHVH) et libérateur, dressé
contre toutes les idoles, oppressions et aliénations, et qui n’a que nos
mains pour agir.
Images : - Michel Ange (1475-1564) , La création du soleil et de la lune, Chapelle sixtine, Vatican.
- Pantocrator est le surnom de Jupiter, le dieu romain qui gouverne la terre et le ciel, ainsi que
tous les êtres vivants s'y trouvant, Zeus dans la mythologie grecque. Du latin religieux
pantocrator, issu du grec ancien παντοκράτωρ , pantokrátôr (grec pan, «tout» et kratos
«puissance » : « maitre de tout, Tout Puissant »). Le Dieu que présente le livre de Jean-Pierre
Batut, malgré la couverture un peu trompeuse de sa thèse Pantocrator, Dieu le Père tout
puissant. Recherche sur une expression de la foi dans les théologies anténicéennes , est le "
Père des miséricordes " et le " Dieu de toute consolation. »
- L’ouvrage de John Caputo, philosophe de la religion étatsunien, pose des questions centrales
sur la possibilité d’un « Dieu faible » et d’un renversement de la notion même de « Dieu ». C’est
aussi l’affirmation d’autres auteurs comme Etty Hillesum ou Jean Sulivan
* Exode, 6, 3
Moïse, Josué et Samuel
Dans le Lévitique (19 -18), où est inscrite la loi de Moïse,
figure le commandement « Tu aimeras ton prochain comme toi-
même. »
Josué ou Yehoshua ("Dieu sauve"), fils de Noun, membre de
la Tribu d'Éphraïm. Homme de conquête et chef de guerre, mais un
passage de la Bible (Jos 17,16-18) laisse percevoir un scénario tout
autre, l’implantation pacifique dans la montagne centrale (Éphraïm),
hors du domaine des puissantes cités-États de la plaine.
Premier réalisateur de la promesse faite à Abraham.
Samuel ("Son nom est Dieu", v. - 931- v. - 877)
Grand-prêtre de la tradition de Moïse, est qualifié de prophète dans
la Bible bien que son rôle soit plus proche de celui d'un juge, c'est-à-
dire au sens biblique un chef guerrier. Désigne les deux premiers
rois d'Israël, Saül, puis David.
On lui prête d’avoir écrit une grande partie des ‘livres
historiques’ de la Bible.
Photos :
- L’autel des holocaustes de Josué sur le mont Eyval, selon le professeur Adam Zartal
- Icône représentant Samuel
Élie
Ėliyyahou, nom qui signifie : "Yahou (abréviation de Yhwh) est
mon Dieu", prophète d’Israël né vers - 930 ? à l’époque où son peuple est
installé en terre de Canaan. Traverse la dépression, l’incompréhension et
le rejet, passe par la violence, l’intolérance, l’impatience et le zèle. Tient
tête au puissant roi Achab, fait mettre à mort les 450 prêtres des Baals
(dieux cananéens de la fertilité) qui entourent Jézabel, la femme du roi.
Prend peur et s’enfuit.
Marche 40 jours et 40 nuits jusqu’à la montagne, l’Horeb. Fait alors
une expérience mystique de rencontre avec Dieu, dans le silence et la
douceur, à l’opposé de ce qu’il pouvait attendre : le divin n’est pas dans la
violence ni dans le spectaculaire.
Dans ce silence, une parole le renvoie à sa mission. Élie y
retourne, jusqu’au jour de sa mort où il est "enlevé" dans les Cieux.
«(…) le Seigneur n’était pas dans l’ouragan. (…) le Seigneur n’était pas
dans le tremblement de terre. (…) le Seigneur n’était pas dans le feu. Et
après le feu, le bruissement d’un souffle ténu* ("Qol D’mamah Daqqa").
Alors en l’entendant, Élie se voila le visage avec son manteau. »
* Le mot hébreu demamah signifie silence. « Les traducteurs sont tellement
embarrassés par ce fait qu'il a entendu le silence qu'ils traduisent ce mot de
demamah par "petit bruit" ; or la chose forte dans ce texte, c'est qu'il a entendu le
silence. » Emmanuel Lévinas, conférence avec Marcel Légaut, 1987.
Photos : - Statue d’Élie égorgeur des prêtres des Baals (Mont Carmel, Israël)
- Représentation de l’expérience mystique d’Élie (Théobule)
David *
Guerrier, musicien et poète, deuxième roi d'Israël règne au 10ème
siècle avant J.-C. Présenté dans le récit biblique, avec son fils
Salomon, comme l'un des deux fondateurs de l'ancien État israélite.
Jeune berger de la tribu de Juda, fils de Jessé, est appelé aux
côtés du roi Saül pour l'apaiser par ses chants. Selon la tadition, met en
déroute les ennemis philistins en vainquant le géant Goliath à l'aide de
sa fronde. Devenu le héros d'Israël, s'attire la jalousie puis la vindicte de
Saül, doit s'enfuir et prend la tête de maquisards, opérant la vengeance
divine et redistribuant les butins aux pauvres.
Devenu roi, à la tête de son armée, vainc les ennemis d'Israël,
conquiert Jérusalem, où il transfère l'Arche d'alliance, et fonde un vaste
royaume qui s'étend des frontières de l'Égypte jusqu'à l'Euphrate.
Pour épouser Bethsabée, épouse d'un officier dévoué, Urie le
Hittite, fait mettre celui-ci en première ligne au siège de Rabba où il est
tué. À l'occasion d'une calamité publique, livre 7 descendants de Saül à
la vindicte des Gabaonites qui les exécutent rituellement.
* Cette diapo est réalisée non pour présenter un humaniste, mais en vue du
parallèle fait plus loin entre David et Mahomet, et entre Jésus et al-Hallâj.
Osée
De l’hébreu hôšea, c'est-à-dire ‟Sauve !”. Prophète d’Israël,
berger, vivant à la fin du règne de Jéroboam II (v. - 782, v. - 753).
Marié, découvre avec douleur et détresse l'infidélité de sa
femme Gomer, considérée dès lors comme prostituée..
Amour humain, union et progéniture sont mis en scène pour
signifier les rapports tumultueux entre le peuple qui se dit ‟élu”
et son Dieu.
Le peuple est comparé à une épouse infidèle parce qu'il s’est voué au
culte des idoles.
Dieu en revanche est l’époux, fidèle et surtout « unique », qui « parle au
cœur » du peuple et s'emploie, en l'éprouvant, à le reconquérir, prêt à pardonner
au moindre signe de repentir.
« C’est pourquoi je vais la séduire, je la conduirai au désert
et je parlerai à son cœur. »
Photo du haut : Osée peint par Alessandro Bonvicino (1521-24)
Zoroastre
ou Zarathoustra, penseur, sage et prophète, fondateur du
zoroastrisme, ayant existé, selon les études, entre le 15è et le 11è siècle,
ou entre le 7è et le 6è siècle avant J.-C., au nord-est de l'Iran actuel.
Réforme le mazdéisme sur la base de trois principes, « les bonnes
pensées, les bonnes paroles et les bonnes actions », d’une démarche
éthique et d’une conscience claire en vue d’atteindre la plénitude
spirituelle.
Combat les sacrifices d’animaux, considère tous les hommes et toutes
les femmes sur un pied d’égalité, indépendamment de leurs croyances et
opinions, appartenance ethnique ou raciale.
Non seulement ses idées ne plaisent pas, mais surtout elles remettent
en cause le pouvoir établi. Pourchassé par le peuple, doit s'enfuir pour
sauver sa vie.
« Le bonheur appartient à celui qui apporte le bonheur aux autres. »
Les Zoroastriens ont été victimes de persécutions, particulièrement par les
Musulmans pour qui Mahomet est le dernier Prophète. Ceux qui ont fui en Inde sont
connus sous le nom de Parsi.
Photo du haut : le Farvahar symbolise le Fravashi, ange gardien d’un individu, l’univers sans fin
( le grand anneau central), la sagesse et l’amour (le petit anneau) se déplaçant vers l’avant pour
conduire l’homme au progrès, à la droiture, au bonheur
Le premier Isaïe
"Isaïe" (en hébreu, Yeshayahu : ‘Yahweh sauve’) est le nom de
trois prophètes de l’histoire judéo-chrétienne dont les textes ont été
composés sur trois siècles entre 750 et 400 avant J.-C.
Le prophète est celui qui rappelle, à temps et à contre temps, les
exigences de la conscience.
« Nul ne brandira plus le glaive meurtrier et l’on n’apprendra plus la
guerre. Alors de leurs épées, ils forgeront des socs de charrue, et de leurs
javelots des serpes. (…) Le loup vivra avec l’agneau. Le tigre gîtera près
du chevreau. Le veau, le lionceau seront nourris ensemble, et un enfant
les conduira. »
« Cet homme d’action est sans doute le premier homme que le rêve d’une
humanité entièrement pacifiée ait hanté, qui ait pensé à la défaite de l’injustice, de la
guerre (…) et qui ait annoncé une mutation cosmique. Il a été choqué non seulement
par la violence des hommes, mais par celle qui règne dans la nature. Marx, Lénine
et Mao ont-ils jamais eu comme lui leur nuit troublée par la lutte des espèces dans la
jungle ? Il est en cela le premier, et peut-être le seul révolutionnaire de l’histoire. »
André Chouraqui (photo du bas)
Photo du haut : Le forgeron transformant l’épée en charrue. Statue offerte par l’URSS à l’ONU en
1959, installée devant le siège de l’ONU à New-York
Amos
Prophète d’Israël, berger et originaire de Tekoa près de
Jérusalem, dans le royaume de Juda. Prend la parole sous les règnes
de Jéroboam II, roi d'Israël et d'Ozias, roi de Juda (vers 750 avant J.-
C.), contre les riches et les puissants, hypocritement dévots ou
idolâtres affichés. Dénonce le mal social et la perversion de la religion.
Son court ministère est interrompu par la police royale sur demande
du chef du clergé de Béthel.
À l'adresse des femmes de Samarie : « Écoutez, vaches du
Bashan, vous qui paissez sur la montagne de Samarie, opprimant les
indigents, broyant les pauvres. »
Contre le sanctuaire de Bethel, fait parler Dieu ainsi : « Je
hais, je méprise vos fêtes, Je ne puis sentir vos assemblées.
Quand vous me présentez des holocaustes et des offrandes, Je
n'y prends aucun plaisir ; Et les veaux engraissés que vous
sacrifiez en actions de grâces, Je ne les regarde pas. Éloigne
de moi le bruit de tes cantiques ; Je n'écoute pas le son de tes
luths. Mais que la droiture soit comme un courant d'eau, Et la
justice comme un torrent qui jamais ne tarit. »
Photo du haut : Amos berger (cathédrale d’Amiens)
Jérémie
(v. - 640, v. - 588, de l'hébreu « sur les lieux élevés, Yhvh"),
prophète d’Israël. Durant ses 50 ans de ministère, connaît 5 rois et un
gouverneur, est témoin de 4 invasions, subit le long siège de Jérusalem,
où il est emprisonné.
Ressent la vue d’un rameau d’amandier (même mot que "veilleur"
en hébreu) comme un appel : se sent appelé par Dieu à parler et agir
"arracher et renverser, pour exterminer et démolir", mais aussi à "bâtir et
planter". Pendant l’exil de Juifs à Babylone, les dissuade avec réalisme
de se rebeller car ils seraient écrasés, les encourage à procréer, bâtir et
planter, à entretenir l’espoir, à cultiver leur identité et à se préparer au
retour.
Encourage la réforme de Josias, dénonce l'idolâtrie (c’est-à-dire
le fait de donner une valeur absolue à ce qui a une valeur toute relative) :
pouvoir, argent, exploitation des pauvres, formalisme du culte, culte des
dieux étrangers, sacrifice des enfants au dieu Molek. Persécuté et
contraint au silence. Termine sa vie en Égypte.
Sur sa révélation, son père Helqias met en place les premiers
livres bibliques (réforme de Josias)
« Si vous améliorez réellement vos voies et vos œuvres, si vous
avez un vrai souci du droit, si vous n’opprimez pas l’étranger, l’orphelin et
la veuve (…), alors je vous ferai demeurer en ce lieu. »
Thalès de Milet
(v. - 625 -v. - 547) philosophe, mathématicien, astronome et physi-
cien grec. Commerçant, ingénieur, conseiller militaire et politique, participe
au groupe des "Sept Sages". Aurait été initié en Égypte aux sciences
égyptienne et babylonienne. Auteur de nombreuses recherches mathémati-
ques, notamment en géométrie (théorème de Thalès). On lui attribue le
calcul de la hauteur de la grande pyramide, la prédiction d'une éclipse.
Effectue les premières expériences sur l’électricité avec de l’ambre et de
l’oxyde de fer.
Sa renommée se fonde essentiellement sur des anecdotes comme
l’épisode du puits rapporté par Platon : « Il observait les astres et, comme il
avait les yeux au ciel, il tomba dans un puits. »
S'écarte des discours explicatifs délivrés par la mythologie, privilégie
une approche naturaliste caractérisée par l'observation et la démonstration.
Fait de l'eau le principe matériel (αρχή : arkhè) explicatif de l'univers, d'où
procèdent les autres éléments : air, feu et terre.
Figure de transition entre l’interprétation universalisante des grands
mythes et l’argumentation d’une compréhension du monde. Promoteur
d'une science ouverte, lui permettant de jongler entre des disciplines
scientifiques diverses et spécialisées.
Photo du bas : ambre. Le mot électricité vient du grec ancien ἤλεκτρον / elektron, signifiant
"ambre".
Ésope
(v. - 620 - v. - 564), écrivain en langue grecque, peut-être originaire de
Nubie (actuel Soudan) et emmené comme esclave en Phrygie (actuelle
Turquie). On a souvent mis en doute la réalité historique de la prodi-
gieuse destinée de cet ancien esclave bègue et difforme qui réussit à se
faire affranchir et en vient à conseiller les rois grâce à son habileté à
résoudre des énigmes.
Auteur de fables, brefs récits de morale pratique, en prose et sans
prétention littéraire. Il est presque certain qu'il ne les écrivait pas et
qu’elles ont été recueillies par d’autres, comme Démétrios de Phalère. Le
nom d'Ésope a servi à regrouper plusieurs centaines récits qui circulaient
jusque-là de façon orale et qui présentaient des caractéristiques com-
munes.
Tout le récit de sa vie est parcouru par la thématique du rire, de la
bonne blague au moyen de laquelle le faible, l'exploité, prend le dessus
sur les maîtres, les puissants. En ce sens, Ésope est un précurseur de
l'antihéros, laid, méprisé, sans pouvoir initial, mais qui parvient à se tirer
d'affaire par son habileté et sa sagesse.
Socrate aurait consacré ses derniers moments de prison avant sa mort à
mettre en vers des fables d’Ésope. Phèdre (v. - 14 - v. + 50), autre fabuliste, et
beaucoup d’autres, dont Jean de la Fontaine (1621-1695), ont repris et adapté les
fables d’Ésope.
Le nom d'Ésope est attaché au palindrome : « Ésope reste ici et se repose »
Le deuxième Isaïe
Le prophète juif anonyme auteur des chapitres 11 à 55 du
livre d'Isaïe a vécu à la fin de l'exil babylonien, en terre étrangère.
Son intervention se situe entre les années 550 et 538, c'est-à-dire
entre les premiers grands succès remportés par le souverain perse
Cyrus et la victoire définitive de celui-ci contre Babylone.
Alors que le premier Isaïe présentait l’Éternel comme un Dieu fort,
puissant, et surtout très sévère, punissant impitoyablement toutes les
incartades de son peuple rebelle, le deuxième Isaïe est le prophète de la
tendresse de Dieu. Il présente Dieu comme une mère pleine de délicatesse
et de miséricorde, dont les entrailles tressaillent dès que ses enfants sont
en danger. C’est ce Dieu d’amour que révèlera Jésus, « le Serviteur fidèle,
le Serviteur souffrant » révélé par le 2ème Isaïe, que l’on peut qualifier de
prophète mystique.
« De même que la pluie et la neige descendent des cieux et n'y
retournent pas sans avoir arrosé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait
germer, pour fournir la semence au semeur et le pain à manger, ainsi en
est-il de la parole qui sort de ma bouche : elle ne retourne point à moi sans
effet, sans avoir exécuté ma volonté et réalisé l’objet de ma mission. »
« Voici que je fais un monde nouveau. Il germe déjà, ne le voyez-
vous pas ? Je vais tracer dans le désert une route et faire jaillir un fleuve
dans la steppe. »
Photo : Le prophète Isaïe, par Marc Chagall (1968)
Ézéchiel
("Que le Seigneur le fortifie"), prophète de l'Ancien Testament au
début du 6ème siècle av. J.-C. Avant la conquête babylonienne, est sans
doute un prêtre attaché au Temple. Après la première prise de Jérusalem
par Nabuchodonosor, déporté en 597, avec sa femme, dans un village de
Basse-Mésopotamie appelé Tel Aviv.
Sa prédication morale, à laquelle se mêle parfois la perspective d’un
avenir meilleur, fait place à des "visions" (le genre apocalyptique) qui
dévoilent l’achèvement de l’histoire et révèlent les mystères de l’au-delà.
Affermit l’idée, déjà introduite par Jérémie, d’une responsabilité
individuelle et non plus collective. Affirme que le péché de violence est aussi
grave que celui d’impiété. Le don de la loi gravée sur le cœur de l’homme
devient le don de l’esprit même du Seigneur.
A la vision que les os reprennent chair, que la mort sera vaincue.
« Un fils ne porte aucune responsabilité pour la faute de son père, ni
un père pour celle du fils. »
« Est-ce que je pourrais prendre plaisir à la mort du méchant ?
C’est moi, le Seigneur, qui le demande. Mon souhait n’est-il pas plutôt qu’il
change de conduite et qu’il vive ? »
Photo : Ézéchiel par Michel Ange, Chapelle Sixtine
Mahāvīra
("Le Grand Héros", - 599, - 527), ascète jaïn, né dans le Bihar
(Inde), dernier des 24 Tirthankara (guides de la voie de la libération)
jaïn.
La tradition jaïna indique que le premier des 24 "Tirthankara" est
Rsabha, considéré comme le précurseur de la civilisation humaine. Des preuves
historiques permettent d'affirmer l'existence du 23ème instructeur, Parsva (- 877 -
-777). De même, les historiens acceptent celle du 22ème , Nemi, que la tradition
considère comme cousin de Krishna.
À l'âge de 30 ans, devient un sadhana (ascète), abandonne
tout vêtement, jugeant que le détachement du monde exige la pratique
de la nudité (bodiya pratiquée par les Digambara et certains Sâdhus)
et se livre pendant 12 ans à la méditation.
L'emblème du jaïnisme est une main symbolisant le réconfort
moral et la compassion, dans laquelle est inscrit ahimsa c'est-à-dire
non-violence. La phrase en sanskrit sous la main signifie : " Toutes les
vies sont interdépendantes et donc se doivent un mutuel respect, une
mutuelle assistance".
../..
Mahāvīra
Les 4 principes du jaïnisme sont les suivants :
- L’identité de l’homme est à la fois matérielle et spirituelle,
- L'homme n'est pas parfait,
- L'homme est capable de vaincre sa nature matérielle,
- L'homme est seul responsable de son avenir.
Les 5 vœux principaux (mahavratas) sont exposés à travers
un dialogue entre Mahavira et l'un de ses disciples :
- Ne pas exercer de violence sur les êtres vivants,
- Ne pas faire de tort par la parole,
- Ne pas voler,
- Fidélité sexuelle (couples) ou chasteté (moines),
- Ne pas s'attacher aux biens matériels.
. Les 4 vertus du jaïnisme sont :
- le bienveillance pour tous les êtres vivants,
- la joie de voir des êtres plus avancés que soi sur la voie de la
libération,
- la compassion envers les personnes et créatures malheureuses,
- l’indifférence envers ceux qui se conduisent mal. ../..
Photos : - L’hôpital pour oiseaux à Delhi
. - Élevage industriel de poulets en France
Mahāvīra
Pour les occidentaux, jaïnisme et bouddhisme semblent très proches par la
réincarnation et le karma. Toutefois, au-delà des nombreuses différences, notam-
ment dans les détails de la vie religieuse, le jaïnisme ne vénère pas de Dieu et
considère que le monde existe depuis toujours, l'hindouisme considère que l'univers
a été crée et vénère les différentes formes d'un seul Dieu, créateur.
Le jaïnisme est la seule grande religion à avoir toujours prescrit le strict
végétarisme et la non-violence absolue envers tous les animaux. Outre les 5 vœux
du laïc, les vertus de base du jaïn s'incarnent dans l'abstention de consommer la
viande, le vin et le miel.
L’incitation jaïna à la non-violence attire l’attention sur
- les supports de la violence (action physique, parole, pensée),
- les processus engageant la violence (préparatifs, planification),
- les modalités de la violence (directe, incitation, approbation),
- la motivation de l’action violente (colère, avidité, manipulation).
Photos : - À la différence des végaliens, les végétariens mangent les produits issus des animaux (beurre, œufs,
fromage, miel, etc.) et s’en vêtissent (laine, cuir).
- Femmes jaïns portant un voile sur la bouche et sur le nez pour ne pas avaler de moustiques. Les Occidentaux,
s’étonnant de cette pratique, voire la décriant, oublient l’essentiel, à savoir les vœux et les vertus du jaïnisme
Pythagore
( v. 580 ?, v. - 495), né sur l’île de Samos ? Philosophe grec,
philosophe et mathématicien, réformateur religieux, penseur de la
science politique.
Se forme au cours de voyages : Italie, Phénicie (Syrie), Égypte,
Perse, Crète, Thrace (Balkans). Revenu à Samos, en repart pour fuir
le tyran Policrates. S’installe à Crotone, dans le sud de l’Italie, fonde
des communautés - proches d’un ordre franc-maçon, dirait-on
aujourd’hui - à vocation philosophique, scientifique, politique,
religieuse, initiatique, ascétique.
Affirme que la Terre est une sphère et non un disque plat, que la
pensée naît dans le cerveau et non dans le cœur, invente les mots et
concepts de ‟philosophie” et de ‟mathématiques”, la table de multipli-
cation, découvre les nombres irrationnels, démontre des théorèmes en
géométrie, défend la beauté tout autant que la logique des nombres.
../..
La gamme de Pythagore
Affirme que « tout est nombre » : pyramides, arithmétique,
géométrie, intervalles de musique, nature, cosmos. La structure de
l’octave* va servir de structure littéraire dans l’écriture biblique.
Végétarien, pense que l’âme est immortelle et se réincarne
après la mort. A influencé toutes les époques et toutes les cultures
d'Occident et d'Orient, toutes les disciplines : mathématiques,
musique, philosophie, astronomie.
* réunion de la proportion d’égalité et de la proportion du simple au
double, utilisée dans le Timée de Platon pour caractériser « l’âme » qui lie le
monde intelligible (Dieu) et le monde sensible (‘homme). Au temple de
Jérusalem, cette double proportion devient le signe de l’Écriture sacrée.
Cette équation lie le Pentateuque et les livres historiques, dont l’ordre est
immuable, et dans le Nouveau Testament les 4 évangiles dans l’ordre Mt, Jn,
Lc, Mc.
C’est en visitant une forge que, selon la légende (rapportée par Boèce),
Pythagore découvrit le rapport stable entre les deux toniques (1, 2 : do) et
deux notes intermédiaires divisant l’octave en quarte + quinte (4/3 : fa) et
quinte + quarte (3/2 : sol) Christian Amphoux
Épiménide de Knossos
Sage, poète, philosophe et chaman, originaire de Cnossos ou
plus probablement de Phaestos, en Crète centrale. Actif vers 556 av.
J.-C. selon Platon, vers 595 selon Aristote. On lui attribue la fameuse
affirmation : "Tous les Crétois sont des menteurs" dont les logiciens
antiques ont fait le paradoxe par excellence.
Son corps a été trouvé couvert de tatouages - pratique inconnue
en Grèce antique sauf pour le marquage des esclaves - ce qui le
rattache à la tradition thrace du chamanisme.
Pour lui, l'homme ne doit pas rechercher l'ataraxie, l'absence de
passion, sinon ce serait un mortel repos. La colère est bonne, car elle
est un puissant ressort de la nature pour repousser sa propre destruc-
tion. Enseigne toutefois à prévenir l'excès.
« Ceux qui t'ont construit un tombeau, être saint et noble, sont les
Crétois menteurs, méchants et bêtes, ventres paresseux. Car loin
d'être mort, à jamais tu vis et tu subsistes. Car c'est en toi que nous
avons la vie, le mouvement et l'être. »
D’après les traducteurs de la Bible de Jérusalem, cette phrase a
inspiré le discours de Paul à Athènes (Ac, 17, 28) : « C’est en lui qu’il
nous est donné de nous mouvoir, de vivre et d’exister. »
Photo du bas : fresques de Knossos
Héraclite
(v. - 576, v. - 480), philosophe grec, né à Éphèse. Vie peu connue,
famille riche et puissante, prend parti dans les luttes politiques qui
déchirent sa cité.
Ne voit partout que multiplicité et changement : sommeil/veille,
jour/nuit, été/hiver, joie/détresse, santé/ maladie, paix/guerre, vie/mort.
Rien dans le monde entier ne demeure un seul instant identique à soi-
même : tout passe, tout change, tout meurt à chaque moment, mais tout
s’achève dans l’harmonie. Philosophe de l’éternel devenir où les
contraires s’opposent et s’unissent tout à tour et dont le principe premier
est le feu divin, principe de transformation incessante des choses.
. Philosophe du Logos qui parle et du chiffre scellé, manifeste un
grand respect pour les croyances religieuses populaires. Affirmant l’unité
dynamique des contraires, est souvent considéré comme le père de la
pensée dialectique.
Accablé d'infirmités précoces, se laisse mourir de faim.
« Pour ceux qui entrent dans les mêmes fleuves, autres et toujours
autres sont les eaux qui s'écoulent . »
. « Rien n’est permanent, sauf le changement. Seul le changement
est éternel.» .
. « À tout homme il est accordé de se connaître soi-même et de
faire preuve de sagesse. »
Lao Tseu
ou Lao Zi ("le vieux maître"), (v. - 571, v. - 531) philosophe chinois
(considéré par certains comme une personnalité symbolique),
contemporain de Confucius. La légende lui prête une conception
extraordinaire, d’autres affirment qu’il s’est réincarné. Serait né dans le
pays de Chu du royaume des Zhou.
Sa doctrine, le taoïsme, est condensée dans un ouvrage de 5 000
caractères, le Livre de la Voie et de la Vertu ( ou Tao Te King).
Il aurait rédigé cette œuvre au cours d’un long voyage vers l’ouest ,
à dos de buffle, qui marque le dernier épisode connu de sa vie. Selon
certaines sources, il aurait fini par vivre en ermite avec sa femme.
« Je traite avec bonté ceux qui ont la bonté. Je traite avec bonté ceux
qui sont sans bonté. Et ainsi gagne la bonté. »
« La bonté en parole amène la confiance. La bonté en pensée amène
la profondeur. La bonté en donnant amène l'amour. »
« La graine se souvient de l’arbre qu’elle sera.» ../..
Lao Tseu et le Tao
« Le Tao que l'on peut nommer n'est pas le Tao. » Lao Tseu.
Le Tao (image du haut), mot de langue courante qui signifie "route,
voie, chemin" mais aussi "dire, expliquer, ordre, règle, doctrine", est la
"Mère du monde", le principe qui engendre tout ce qui existe, la force
fondamentale qui coule en toutes choses de l’univers. C'est l’essence
même de la réalité, par nature ineffable et indescriptible. Il est
représenté par le taìjítú, symbole représentant l’unité au-delà de la
dualité yin-yang (image du bas).
Jour-nuit, masculin-féminin, chaud-froid, etc, se nourrissent l'un
l'autre et sont des polarités complémentaires d'une même énergie. Le
perpétuel mouvement entre ces polarités est à l'origine de la prin-
cipale caractéristique du monde matériel : l'impermanence. Comme
les autres philosophies orientales, le Tao est largement inspiré par
l'observation et la contemplation de la nature.
Il est orienté par la pratique de la transformations des émo-
tions négatives en émotions positives, ce qui doit être vécu intérieu-
rement. La pratique a comme résultat un état d'être : le pardon et la
compassion.
K’ong Fou Tseu
ou Kongfuzi, (nom latinisé en Confucius par les missionnaires du
16ème siècle). Philosophe chinois (- 552, - 479 avant J.-C.), contemporain
du Bouddha, de Nabuchodonosor et de Pythagore. Homme de grande
érudition et de caractère, profondément respectueux des idéaux de la
tradition. Fonctionnaire, maître d’école, gouverneur de la ville puis
intendant des travaux publics de la principauté de Zongdhu. Victime d'une
conspiration suscitée par ses résultats, exilé, erre pendant 14 ans, puis
rentre au pays natal.
Instaure une morale sociale axée sur la vertu d’humanité, l’équité et
le respect des rites cultuels. Enseigne que la nature humaine est sans
cesse perfectible. Attache une grande valeur au pouvoir de l’exemple,
soutient que les gouvernants doivent mener une vie exem-plaire. Veut
appliquer la morale à la vie politique. Les 5 vertus majeures sont pour lui
: la courtoisie, la magnanimité, la bonne foi, la diligence et la bonté.
Son enseignement a donné naissance au confucianisme, doctrine
politique et sociale érigée en religion d'État dès la dynastie Han et qui ne
fut officiellement bannie qu'au début du 20ème siècle.
« Entre les 4 mers, tous les hommes sont frères. » Confucius
«Le maître-mot de Confucius est “apprendre”.» Anne Cheng
siècle,
Le troisième Isaïe
Nom donné aux hommes qui ont clamé ce qu’on appelle abusi-
vement la "parole de Dieu" après l’exil du peuple israélite à Babylone, de
538 à 520 avant notre ère, et dont les écrits se trouvent groupés dans
les chapitres 56 à 66 du livre d’Isaïe.
« Vous tyrannisez ceux qui peinent pour vous, querellez, chicanez,
brutalisez. Est-ce là le moyen que votre voix m’atteigne (…), le jeûne
qui me plait ? Courber la tête comme un jonc, coucher sur le sac et la
cendre, serait-ce là pour vous un jour de jeûne ? (…)
Le jeûne qui me plaît est d’un autre tour : dénoue plutôt les liens
injustes, renvoie libres les opprimés, saisis les jougs et brise les. (…)
Vois-tu un démuni ? Partage avec lui ton repas. Un pauvre sans abri ?
Ramène le chez-toi. Un homme dévêtu ? Donne-lui ton manteau. (…)
Alors, ta lumière illuminera comme l’aurore. (…) »
« Si tu bannis de ton pays le doigt accusateur, la parole de fraude,
l’exploitation de tes frères, si tu prends de ton bien pour l’affamé et
assouvis l’âme de l’opprimé, l’obscurité en toi sera lumière. »
« Les grands prophètes ont la conviction profonde d'être les interprètes de
Dieu, et ce Dieu tend à devenir, à travers eux, le Dieu juste de toute l'humanité ;
cette universalisation est, de fait, un grand tournant dans l'histoire des religions. »
Adolphe Lods
Photo : Isaïe (église de Souillac).
- Adolphe Lods (1867-1948), pasteur luthérien, orientaliste, professeur de langue et de
littérature hébraïque à la Sorbonne et directeur d'études à l'École Pratique des Hautes Études
Michée
ou Mycahyaou (en hébreu, "Qui est semblable Yahweh"), ou Mika,
prophète hébreu originaire de Morescheth, au 8ème siècle avant notre ère,
sous les règnes de Jotham, Achaz et Ézéchias, tous 3 rois de Juda, proba-
blement 15 ans après 3ème Isaïe.
Dénonce la vénalité des grands, les prêtres riches, les puissants et
les faux prophètes s'assurant pouvoir et privilèges. Rejette l’idolâtrie
(superstition, magie, caractère fastueux mais vide du culte), l’exploitation
des pauvres par les possédants, l'abus de l'aristocratie de Jérusalem
contre la majorité des gens du pays, et l'instrumentalisation de la religion
pour cacher les injustices sociales.
« Mes paroles ne font-elles pas du bien à celui qui marche avec
droiture ? »
« Avec quoi me présenterais-je, Seigneur, quand je viens t’adorer ?
Avec un holocauste ? Avec un veau d’un an ? Quel plaisir prendrais-tu aux
béliers par milliers ? (…) Le Seigneur, lui, t’a fait savoir ce qui est bon, ce
qu’il attend de toi. Rien d’autre que pratiquer la justice, aimer loyalement et
marcher humblement avec lui. »
Image : Michée (icône russe du 15è siècle)
James Darmesteter (1849-1894), érudit du judaïsme, du zoroastrisme et du mazdé-
isme, professeur au ‘Collège de France’ et à ‘l'École Pratique des Hautes Études’, écrit
: « L’esprit des prophètes est dans l’âme moderne. Il importe peu qu’ils aient parlé au
nom d’un dieu et que l’âme moderne parle au nom de la pensée humaine, car leur
dieu n’était que leur propre conscience… À force de croire en la justice, ils l’ont mise
en marche dans l’histoire. »
Job
Personnage biblique présenté dans le Livre de Job, écrit proba-
blement au 6ème ou 5ème siècle avant J.-C par plusieurs auteurs anony-
mes et peut-être inspiré d’un texte sumérien. Ce texte poétique aborde le
problème du mal dans le monde, et particulièrement la souffrance des
innocents.
Cet homme riche et puissant, suite à un "pari" effectué entre Dieu
et Satan, tombe dans la plus complète déchéance (perte de tous ses
biens, assassinat de ses serviteurs, mort de ses enfants, ulcère purulent)
et se retrouve assis sur un tas de fumier. Il n’explique pas, mais il cons-
tate que le mal existe. Nu il est sorti du sein de sa mère pour une vie de
risque où la richesse n'est qu'un manteau ; nu il retournera au sein de la
terre-mère, et tout le cours de son existence se déploie devant Dieu sous
le signe de la nudité et de la faiblesse. Job, au-travers de sa révolte,
accomplit un véritable acte de foi.
Par la restauration du bonheur matériel de Job, l'auteur du poème
symbolise cette harmonie retrouvée.
« Je ne savais de toi que ce qu’ "on" m’en avait dit, mais
maintenant c’est de mes yeux que je t’ai vu. »
Images : - Léon Bonnat, Job (1880) en couverture du livre d’Ernest Renan
- William Blake, Job réprimandé par ses amis
Le Bouddha
Siddharta Gautama (v. - 560 à v. - 480), dit le Bouddha
(« l’éveillé »), prince népalais issu de la tribu guerrière des Sakya. À
l’âge de 29 ans, s’enfuit de son palais pour se mettre en quête de la
vérité, qu’il découvre après une vie errante et de dures ascèses.
L’existence est la souffrance, et la souffrance a son origine dans
le désir, qui ne peut jamais être comblé. La sagesse consiste donc à
vaincre le désir par la méditation, la compassion, la distance par rapport
au bonheur et aux malheurs, et à avoir conscience de l’impermanence.
Selon le Dictionnaire de la sagesse orientale, la pensée juste (ou
parfaite) implique une « volonté de renoncement, de tolérance et de
bienveillance envers tous les êtres vivants », et le mode de vie juste
signifie « la volonté d'éviter toute profession pouvant nuire à d'autres
êtres vivants ».
Le comportement juste se décline généralement en 5 préceptes,
souvent exprimés de façon négative : 1 - s'efforcer de ne pas nuire aux
êtres vivants ni prendre la vie (principe d'ahimsa), 2 - de ne pas prendre
ce qui n'est pas donné, 3 - de ne pas avoir une conduite sexuelle
incorrecte, 4 - de ne pas user de paroles fausses ou mensongères, 5 -
de s'abstenir d'alcool et de tous les intoxicants. ../..
Le Bouddha
Bouddha abolit le système des castes au sein du sangha, la
communauté spirituelle des pratiquants.
Dans la pensée bouddhiste, « la manière dont nous voyons et
comprenons la réalité pèse de tout son poids sur notre bien-être, et
s’avère responsable, si elle est inadéquate, d’une part importante de
nos souffrances et de celles du monde* » :
Interdépendance : je dois ma vie et ma survie à une infinité
d’autres humains et à la nature.
Vacuité : ce que nous voyons est instable, mobile, subjectif,
complexe, (un peu comme un arc-en-ciel dont l’existence dépend de ma
position, de celle du soleil, des nuages, etc.)
Impermanence : rien n’est destiné à durer, tout ce qui advient est
affaire de composition et de décomposition, organisations et désorgani-
sation, toutes transitoires et éphémères.
Compassion :
- amour bienveillant envers ceux qui nous sont chers,
- méditation et émotions de compassion envers ceux qui souffrent,
- réjouissance altruiste : se réjouir sincèrement du bonheur d’autrui,
- équanimité : souhaiter le bien de tous les humains, y compris lointains,
inconnus, antipathiques ou malveillants *. ../..
* d’après Christophe André, Je médite jour après jour.
Le Bouddha
Pour Albert Schweitzer (1875-1965), l'ahimsa dans le bouddhisme
se distingue du jaïnisme en ce sens qu'il est fondé sur la pitié et non pas
sur l'idée de se préserver à l'écart de la souillure du monde.
Pour Carl-Albert Keller (1920-2008), théologien protestant et histo-
rien des religions, l'ahimsa, dans la philosophie bouddhiste, « implique
une attitude positive envers les êtres qui respirent », « s'appuie sur un
sentiment d'amitié et de solidarité avec les êtres vivants », est « un
comportement fait de bienveillance et de disponibilité ».
Pour Cécile Becker, historienne des religions asiatiques, « en
désignant le fait de s'abstenir de porter atteinte, de blesser ou de tuer
tout être vivant comme un thème fondamental de son enseignement, le
Bouddha s'oppose en fait implicitement à la violence sacrificielle et à
l'ordre socioreligieux brahmanique, et énonce une nouvelle échelle de
valeurs. »
«Ne blesse pas autrui de la manière qui te blesserait.»
«N’ayez qu’une seule passion : celle du bien des autres (…). Tous
ceux qui sont malheureux le sont pour avoir cherché leur propre
bonheur. Tous ceux qui sont heureux le sont pour avoir cherché le
bonheur d’autrui. »
Parménide
(v. - 540, v. - 450), né à Élée (actuelle Italie du Sud), philosophe et
poète grec présocratique, pythagoricien. Le premier à affirmer que la
Terre est sphérique et située au centre de l'univers. Discute les distances
des astres entre eux et par rapport à la Terre. Divise les choses en deux
éléments : le feu et la terre. Le premier à proposer la théorie des zones
climatiques qui divise le globe terrestre en 5 zones : 2 zones glacées, une
zone torride et 2 zones tempérées.
Père de l’ontologie, partie de la métaphysique* qui s’applique à
l’être, indépendamment de ses déterminations particulières (par ex. : un
cheval, une table), c’est-à-dire par rapport au néant. Leibniz résumera
ainsi la question ontologique : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que
rien ? »
Dans son poème De la nature, traite de la vérité, ou de l’unité et
de l’éternité de l’être. Divise la connaissance en deux chemins de pensée
nettement opposés, la vérité et l'opinion. On ne peut penser que ce qui
est. Il faut donc croire et affirmer que l'être est, qu’il est non créé et
intemporel, et que le non-être n'est rien.
Réfuté par le sophiste Gorgias de Leontium (v. - 480, v. - 375),
élève d’Empédocle d’Agrigente (- 490, - 435)
* Métaphysique : recherche ayant pour objet la connaissance des causes de l’univers et
des principes premiers de la connaissance.
Eschyle
Aiskhúlos (v. - 525, - 456), le plus ancien des trois grands tragiques
grecs. Participe à la naissance du genre tragique grâce à certaines
innovations, comme le nombre d'acteurs qu'il porte à deux. Auteur
d'environ 110 pièces dont 7 seulement nous ont été transmises.
S'il ne développe pas la psychologie des personnages, ses choix
lui permettent de mettre en valeur ses conceptions puissantes sur
l'équilibre de la cité, le dégoût de la démesure (hybris) qui met en danger
cet ordre, et le poids de la décision des dieux dans la conduite des
affaires humaines.
« Il (Zeus) a ouvert aux hommes les voies de la prudence, en leur
donnant pour loi : souffrir pour comprendre.»
C'est le "pour" qui est important. En elle même la souffrance n'a pas de
valeur. Il ne saurait être question de la cultiver pour elle-même. Elle ne
vaut que par ce qu'elle engendre. Parfois le pire, chez la personne qui se
venge, parfois le bien ou la sagesse, et très souvent rien du tout.
« Il ne s’agit plus seulement de s’instruire par l’épreuve, mais
davantage de devenir plus forts à partir de ce qui nous rend vulnérables,
plus vivants à partir de ce qui nous blesse à mort. »
Nathalie Sarthou-Lajus
Anaxagore
(v. - 500,- 428, dit "de Clazomènes" en Ionie; en grec, "chef de
l'assemblée"), philosophe grec. Aurait donné des cours à Athènes
pendant près d'une trentaine d'années, à partir de - 450. Disciple
d'Anaximène (v. - 585 - v. - 525), introduit le concept de noûs*, qui
équivaut à l’intelligence organisatrice et directrice du monde. Le cosmos
est formé de substances diverses qui n‘ont ni naissance ni fin, mais
s'agencent seulement par combinaisons et séparations.
Enseigne que la Lune reflète la lumière du Soleil. Ses adversaires
lui reprochent sa théorie cosmique : là où le regard théologique voit des
dieux dans les astres, lui ne les considère que comme des masses
incandescentes. Condamné à mort vers 437 lors d’un procès pour
impiété, mais échappe à la sentence grâce à son ami Périclès, et s'exile
à Lampsaque, en Asie mineure.
Selon Diogène Laërce, est le premier auteur à publier un livre
illustré avec des dessins ou diagrammes.
« Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se
combinent, puis se séparent de nouveau. »
* La noosphère, selon la pensée de Vladimir Vernadsky et de Pierre Teilhard
de Chardin, désigne la « sphère de la pensée humaine ».
Pindare
(- 518, - 438), poète lyrique grec. Profondément attaché à la religion
traditionnelle et à l'antique aristocratie dorienne qui prédomine à Thèbes.
Considéré dès l'Antiquité comme le maître incontesté et inimitable du
lyrisme choral grec, synthèse de l'art poétique, musical et chorégraphique.
Assiste le plus souvent aux jeux panhelléniques, dirige généralement lui-
même l'exécution de ses odes triomphales.
Subit l'influence des courants mystiques de son temps, orphisme,
pythagorisme, culte d’Éleusis. Sans être adepte d'aucune secte ni école
philosophique, éprouve un indéniable attrait pour les questions eschatolo-
giques* et mystiques, a connaissance d'une doctrine sur les destinées de
l'âme, croit à la métempsychose **
« Ne crois pas, ma chère âme, à la vie éternelle, mais épuise le champ
du possible ! » (Traduction de Paul Valéry)
« Qu’est ce que l’homme ? Que n’est-il pas ? L’homme est le songe de
l’ombre. »
« Principe de grande vertu, Vérité, ô Souveraine, fais que jamais mon
propos n'achoppe contre l'écueil du mensonge ! »
« Deviens qui tu es, quand tu l'auras appris. »***
* discours sur la fin du monde ou la fin des temps, derniers événements de l’histoire du monde ou
l’ultime destinée du genre humain.
** passage d'une âme dans un autre corps, qu'elle va animer.
*** ou encore « Ne deviens pas la copie de quiconque tu admires, et n’attends pas d’une personne
que tu aimes qu’elle devienne la copie de toi-même ! »
Empédocle
(Empedoklès, v. – 490, - v. - 430), philosophe, poète, ingénieur et
médecin grec d’Agrigente (Sicile). Propose, le premier en Occident, une
explication correcte des éclipses de Soleil. Décrit sa philosophie dans
deux poèmes dont il ne nous reste que des fragments : De la nature et
les Purifications.
Influencé par Parménide et par Pythagore, fait partie des philoso-
phes présocratiques, ces premiers penseurs qui ont tenté de découvrir
l‘origine et les schéma du cosmos. À l’opposé du chaos (désordre), le mot
grec cosmos a le triple sens de ‘univers’, de ‘sens’ et de ‘beauté’.
Pose 2 principes qui règnent cycliquement sur l'univers, l'Amour et la Haine.
Ces principes engendrent les 4 éléments dont sont composées toutes les choses
matérielles : l'eau, la terre, le feu et l'éther (ou l'air). L'Amour est une force
d'unification et de cohésion qui fait tendre les choses vers l'unité (par exemple les
organismes vivants) ou même l'Un quand il s'agit du cosmos. La Haine est une force
de division et de destruction qui fait tendre les choses vers le multiple.
En accord avec sa théorie de la transmigration des âmes des
êtres vivants, son enseignement condamne les sacrifices et les rituels
sanglants.
« Ne cesserez-vous jamais le douloureux carnage ? (…) Jeûnez
de la méchanceté ! »
Photo du haut : Empédocle (statues des philosophes au Parlement de Vienne - Autriche)
Sophocle
(- 495, - 406), dramaturge grec. Auteur de 123 pièces (dont une cen-
taine de tragédies), mais dont seules 8 nous sont parvenues. Ses pièces
mettent en scène des héros, souvent solitaires et même rejetés (Ajax,
Antigone, Œdipe, Élecre) confrontés à des problèmes moraux desquels
naît la situation tragique.
Le climat de ses pièces ne baigne plus dans le ritualisme religieux
des origines du théâtre, mais l'homme est "éphémère" et son sort dérisoire
devant le temps qui passe.
« Il n'est rien que n'efface le temps tout puissant. »
« Il est bien des merveilles en ce monde, il n’en est pas de plus
grande que l’homme. (…) Mais, ainsi maître d’un savoir dont les ingénieu-
ses ressources dépassent toute espérance, il peut prendre ensuite la route
du mal tout comme du bien. »
Pour lui (comme pour Qohélet), la sagesse tragique ne consiste
pas à se détacher des choses parce qu’elle sont changeantes et fragiles,
mais à accorder plus de valeur et d’attention à ce qui est en devenir et va
mourir. Elle suggère une voie de connaissance de soi et de transforma-
tion : « C’est quand je ne suis plus rien que je deviens vraiment un
homme. » La compassion est alors la passion dernière, portée par le
chœur dans la tragédie.
Mo Tseu
ou Mozi, ou Möti, latinisé Micius (littéralement "maître Mo"), de
son vrai nom Mo Di (v.- 479, v. - 392), philosophe chinois. Commence
par adhérer au confucianisme avant de s'en démarquer et de créer sa
propre école de pensée (moïsme) dont les thèses remettent en cause à
la fois des enseignements confucianiste et taoïste.
Voyant l'origine de la guerre et de tous les crimes dans l'hostilité
avec laquelle l'homme considère ceux de ses semblables qui lui sont
étrangers, prêche pour une vaste communauté humaine solidaire où
chacun traiterait autrui, si éloigné qu'il soit, en prochain, par la pratique
de l'amour universel. L’être humain doit convertir son intérêt individuel
en intérêt général, chacun trouvant son compte dans le bien commun.
« Voici certainement la maxime d’amour : ne pas faire aux
autres ce que l’on ne veut pas qu’ils vous fassent. »
« L’attaque des petits États par les grands, le pillage des faibles
par les forts, l’oppression de la minorité par la majorité, la tromperie du
simple par la ruse, le dédain du noble pour l’humble sont quelques unes
des calamités du monde. (…) À quelle loi du Ciel obéirons-nous ? À
celle d’aimer tous les hommes universellement. »
Socrate
(- 470, - 399 avant J.-C.), philosophe grec, un des premiers
penseurs de la philosophie morale et politique.
N’a laissé aucun écrit, mais sa pensée et réputation se sont
transmises par des témoignages indirects (Platon, Xénophon, Aristo-
phane et Aristote). Met au centre la connaissance, qui donne à l’homme
une quête universelle.
Citoyen exemplaire, s'oppose à la démagogie qui règne alors
à Athènes. Dans des discussions avec les habitants de la ville, répond à
des questions par des questions, pousse chacun, tel un accoucheur, à
dépasser le niveau des vérités de sens commun et à partir en quête de
la connaissance vraie.
Insoumis au tyran Citrias, refuse de fuir la ville à la suite de son
procès. Condamné à mort par le tribunal de l’Héliée, boit lui-même la
ciguë qui le fait mourir.
« Il ne faut donc pas répondre à l’injustice ni faire du mal à
aucun homme, quoi qu’il nous ait fait »
« S’il me fallait absolument commettre l’injustice ou la subir, je
préférerais la subir plutôt que la commettre »
Esdras
(Ezra dans le judaïsme), prêtre et scribe juif issu de la tribu de Lévi
et descendant d’Aaron. Pour Christian Amphoux, personnage probable-
ment fictif du 2èmesiècle avant notre ère, représente l’école pharisienne et
son ambition de s’installer au Temple.
Pendant le règne du roi perse Artaxercès 1er (465-424 avant J-C),
mène en 459 environ 5 000 exilés Judéens de Babylone à Jérusalem.
Considéré avec Néhémie par plusieurs exégètes (Andreas Masius,
Richard Simon, Richard Friedman, etc.) et même par Baruch Spinoza,
comme l’auteur principal du Pentateuque et notamment du Lévitique.
« J'en appelle aujourd'hui au ciel et à la terre : j'ai mis devant toi la
vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu
vives, toi et ta postérité ! » (Dt, 30, 19)
../..
Esdras : sortir du marasme et regarder devant soi
Affirme ainsi que Dieu laisse à ses créatures la liberté de choix.
La malédiction est la conséquence d’un choix personnel* et non une
punition divine.
Cet appel à sortir du marasme et des négativités sera repris par
Jésus de Nazareth : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! ».
Selon Maurice Bellet, la « traversée de l’en-bas » consiste à
vaincre en soi chaque jour la honte, la peur et la haine.
* Pareillement, dans la Genèse, la femme de Loth se retourne
pour voir derrière elle la destruction de Sodome et Gomorrhe et se
trouve transformée en « statue de sel », alors que les filles de Loth
regardent devant elles (enivrent leur père et couchent avec lui !) et sont
à l’origine de deux grands peuples.
Photo du bas : "La femme de Loth" sur le mont Sodome, Israël.
Démocrite
(- 460, - 370), philosophe et savant grec né à Abdère, en Thrace
(Balkans). Voyage beaucoup pour s'instruire, passe 5 ans avec des
géomètres égyptiens, élève de Leucippe (mêmes dates). Vit à Athènes
où il ne semble pas avoir connu Socrate. Vers - 420, fonde son école
dans sa ville natale.
Développe une théorie matérialiste mécaniste, l'atomisme, qui considère
la matière comme constituée d'atomes indivisibles et éternels. Le vide existe et
permet le mouvement des atomes. Les figures que forme la matière se distinguent
par leur taille, leur poids et leur vitesse. Les corps complexes sont formés de corps
plus simples qui se désagrègent après la mort. L'âme est composée d'atomes
particuliers, subtils, légers et chauds. La perception de la matière est provoquée
par l'émission de substances très fines qui interagissent avec les sens de l'homme.
. Son déterminisme total permet de concevoir le monde réel
(matériel) sans création, ni référence à Dieu ou au surnaturel. Les dieux
ne sont que la représentation de l'idée que les hommes s'en font, des
rêves en quelque sorte.
Prescrit à l’homme la modération dans ses désirs. Son carac-
tère rieur est légendaire. La joie est la finalité de la morale, l'utilité est le
critère du bien. Se prive de nourriture pour mettre fin à ses jours.
« En réalité nous ne savons rien, car la vérité est au fond de
l'abîme.»
Thiruvalluvar
Poète et philosophe tamoul, très probablement jaïniste, ayant vécu
selon les auteurs entre le 4ème siècle avant J.-C et le début du 5ème siècle
après J.-C. Originaire d'un village situé près de Chennai (Madras), auteur
du Tirukkuṟaḷ.
À travers un ensemble de 1 330 maximes, livre sa vision de l'art de
vivre des Tamouls au début de notre ère. S'adresse à tout être humain
sans distinction de castes, classes sociales ou convictions. Propose des
recommandations pour une bonne conduite morale à travers des maximes
sur la connaissance de soi, la spiritualité, la prospérité et le bien-être, la
politique, l'économie, l'amour et les relations humaines.
Définit trois objectifs majeurs de la vie : la sagesse (bienfait de la
pluie, vie conjugale, enfants, hospitalité, équité, contrôle de soi, charité,
non consommation de viande, gestion de la colère, non-violence), la
fortune (politique, justice, richesse, éducation, agriculture) et l'amour.
Une traduction anglaise du Tirukkural a été établie en 1886 par le missionnaire
anglican George Uglow Pope (1820-1908), érudit en tamoul, en télougou et en
sanskrit, fondateur de plusieurs écoles, enseignant le latin, l'anglais, l'hébreu, les
mathématiques et la philosophie.
Photo : statue de Thiruvalluvar d'une hauteur de 40,5 m, érigée en 2000 à Kânyâkumârî
(Tamil Nadu).
Platon
(- 428, - 348) philosophe de la Grèce classique, contemporain
de la démocratie athénienne, élève de Socrate, d’Euclide, et du pytha-
goricien Philolaos, fondateur de l’Académie, première école de philo-
sophie.
Son œuvre, essentiellement sous forme de dialogues, se pré-
sente comme une recherche rigoureuse de la vérité, sans limitation de
domaine. Sa réflexion porte aussi bien sur la politique que sur la
morale, l’esthétique ou la science.
À partir de la conviction que le réel est connaissable, elle
s’oriente dans deux directions complémentaires : d’une part, chercher
la vérité à propos de réalités déterminées (par ex., la justice, le
monde) ; d’autre part, chercher à justifier la possibilité même de
connaître la vérité.
Le dialogue entre interlocuteurs est un questionnement intérieur,
mouvement délibéré et difficile vers la recherche de la vérité :
connaître, prendre conscience de ce qui n’est pas, de ce qui est faux,
de ce qui est. Deux moyens privilégiés sont la dialectique et la rémi-
niscence.
Dans la célèbre allégorie de la caverne, se détourner des
opinions fausses est une démarche en 4 étapes.
Diogène de Sinope
ou le Cynique* (- v. 413, - v. 327), philosophe grec. Fils de
banquier, a été faussaire avec son père. * de kunos, le chien
Ascète mendiant, original, excentrique, grossier, provocateur,
spirituel et libre. Surnommé "le Chien", car il agace tout le monde.
Toujours pieds nus, habite dans un tonneau, n'ayant pour meubles qu'une
besace, un bâton et une écuelle. Aurait même jeté son écuelle après
avoir vu un jeune enfant boire dans le creux de sa main ? …
Exigeant envers ses contemporains, se promène un jour en plein
midi une lanterne à la main, répondant à ceux qui l'interrogent :
νθρωπον ζητῶ (Antrhôpon’ dzètô), que l’on peut traduire "Je cherche un
être humain digne de ce nom !".
À Alexandre le Grand, de passage à Corinthe en - 336, qui lui
demande ce qu'il peut faire pour lui, répond : « Te retirer de mon soleil ! »
Demande l’aumône à une statue pour s’exercer à essuyer les échecs…
Affirme que la seule chose que l'homme possède véritablement
par lui-même, c'est les biens de l'âme. Dénonce la fausseté des hon-
neurs, pouvoirs, richesses, savoirs, plaisirs même, toutes ces choses que
les humains estiment tant.
Se proclame, pour la première fois sans doute dans l'histoire,
"citoyen du monde".
Image du bas : Diogène et Alexandre. Huile sur toile de Nicolas-André Monsiau, 1818.
Zacharie
(vers - 520 - 480), en hébreu "L’Éternel se souvient", prophète de
la Bible, proclamant les exigences de bonté, de justice et de vérité sous le
règne de Darius 1er, roi de Perse, mais les auteurs anonymes désignés
sous le nom de Deutéro-Zacharie écrivent au 4ème et au 3ème siècle avant
J.-C. (Za, 9 et suivants).
« Réjouis-toi, crie de joie, Jérusalem ! Crie de joie ! Voici ton roi. Il
vient à toi, juste et victorieux, humble et monté sur un âne, un tout jeune
ânon. D’Israël, il fera disparaître les chars de guerre, et de Jérusalem,
les chevaux de combat. Il brisera l’arc des guerriers et annoncera la paix
aux nations. » (Za, 9, 9-10)
Jésus de Nazareth répond clairement à ce passage quand il entre
dans Jérusalem sur un ânon avant de chasser du Temple les vendeurs et
les animaux destinés au sacrifice et d’être condamné à mort. C’est un
symbole d’opposition à Pilate qui, au même moment, entre à Jérusalem
sur un cheval de guerre.
À l’époque de Zacharie et plus encore du temps de Jésus, le
cheval symbolise le pouvoir des puissants tandis que l’âne est l’animal du
pauvre et du pacifique. L’oracle de Zacharie décrit un dirigeant d’un genre
nouveau qui apporte à l’humanité l’exigence de non-violence et de
simplicité.
Photo : Zacharie par Claus Sluter (v.1355-1406). Puits de Moïse, Chartreuse de Champmol à
Dijon (Bourgogne)
Aristote
(- 384, - 322), philosophe grec de l'Antiquité. Disciple de Platon à
l'Académie, précepteur d’Alexandre le Grand. Un des penseurs les plus
influents que le monde ait connus. Aborde presque tous les domaines de
connaissance de son temps : biologie, physique, métaphysique, logique,
poétique, politique, rhétorique et de façon ponctuelle l'économie. Chez lui,
la philosophie est à la fois recherche du savoir pour lui-même, interroga-
tion sur le monde et science des sciences.
Considère la logique comme l'instrument qui permet de faire pro-
gresser les sciences*. Son éthique est très marquée par les notions de
mesure et de phronêsis (prudence ou sagacité) et par la philanthrôpia
(compassion). Tout comme sa politique et son économie, elle est tournée
vers la recherche du Bien. A une vison très inégalitaire du monde, mais
considère la cité comme une entité naturelle qui ne peut perdurer sans
justice et sans amitié.
Nous invite à « penser avec les mains » : ce que je crois réellement,
c’est ce que j’accomplis par mes pensées, mes paroles, mes écrits, mes
actes.
* La logique aristotélicienne repose sur deux concepts centraux :
- le syllogisme, qui marquera fortement la scolastique (philosophie développée et
enseignée au Moyen-Âge dans les universités), -
les catégories (Qu'est-ce ? Pourquoi ? Où ? Quand ? Combien ? etc.).
Tchouang Tseu
ou Zhuang Zi ( "Maître Zhuang"), ou Zhuāng Zhōu (v. - 370 - v. - 286),
penseur chinois. S’il a existé, aurait occupé une charge administrative
subalterne et refusé un poste de Premier ministre offert par le roi Wei de
Chu. Aurait terminé sa vie retiré du monde, menant une vie nomade et
proche du peuple.
On lui attribue la paternité d'un texte essentiel du taoïsme appelé de
son nom, le Zhuangzi, ou encore le Classique véritable de Nanhua. Prône
le non-agir qui, loin d'être synonyme d'indolence, de passivité ou de repli,
définit l'action en tant qu'elle est conforme à la nature des choses et des
êtres.
L’être humain est ainsi invité à se débarrasser de son égocentrisme et
de sa volonté de plier la réalité à ses fantasmes. Son non-agir est une
démarche strictement individuelle, sans prétention politique.
« Ceux qui savent ne parlent pas. Ceux qui parlent ne savent pas.
Le sage enseigne par ses actes, non par ses paroles. »
« Vouloir éviter l'inévitable, n'est-ce pas augmenter sa douleur ? »
« Celui qui a pénétré le sens de la vie ne se donne plus de peine
pour ce qui ne contribue pas à la vie. »
Épicure
( - 342, - 270) philosophe grec. Fonde en - 306 à Athènes l’école
philosophique ‘du Jardin’, recherche un bonheur et une sagesse dont
le but est l'ataraxie, la paix de l'âme. Vie simple et frugale, végétarien.
Aura pour disciple le latin Lucrèce (v. - 98 - v. - 55).
En physique, soutient comme Démocrite (- 460, - 370) que tout ce
qui existe est composé d'atomes indivisibles qui se meuvent dans le vide
et se combinent pour former des agrégats de matière. L'âme est un de
ces agrégats d'atomes, et non une entité spirituelle.
S’intéresse à l’homme et non pas aux dieux. En logique,
considère que la sensation est à l'origine de toute connaissance.
En éthique, affirme que le souverain bien est le plaisir, défini
comme absence de douleur : dissiper les terreurs de l'esprit, se suffire à
soi-même et se contenter de peu.
. Définit 4 voies vers le bonheur :
1 - Ne pas craindre les dieux;
2 - Ne pas craindre la mort;
3 - On peut atteindre le bonheur;
4 - Le mal est supportable.
../..
Épicure
Classe les désirs en trois catégories :
1 - Les désirs naturels et nécessaires (par ex., boire quand on a soif.
on peut boire jusqu'à ne plus avoir soif). Ces plaisirs sont bons : on
peut s’y adonner.
2 - Les désirs naturels, mais non nécessaires, comme ceux qui
diversifient les plaisirs, mais n’éliminent pas les douleurs (par ex. :
boire et manger avec raffinement, au-delà du besoin). En user avec
modération
3 - Les désirs ni naturels, ni nécessaires : ceux qui naissent des
jugements illusoires, le désir de richesses et d'honneurs. Les éviter,
car ils sont générateurs de troubles.
Les consolations apportées par Épicure sont chantées par
Lucrèce comme des dons divins, propres à régénérer l'homme
tourmenté par les passions, les superstitions, la peur des dieux, etc.
C'est pourquoi certains philosophes, tels que Nietzsche, n'hésitent
pas à voir en cette pensée une sorte de christianisme païen.
Photos : désir naturel nécessaire, désir naturel non nécessaire, désir nocif
de puissance (Louis XIV)
Tobie
("Dieu est bon" en hébreu), personnage principal du Livre de
Tobie, fiction littéraire de la Bible hébraïque composée v. - 300. Avec le
fiel d'un poisson, comme le lui indique l‘archange Raphaël qui l'accom-
pagne, guérit à Ninive la cécité de son père Tobit.
Auparavant, il récupère, en Médie, de l’argent déposé chez
Gabaël en lui présentant une moitié d’un reçu qui avait été coupé en
deux, un morceau pour le déposant, un autre pour le dépositaire.
Le symbole, du grec sun (ensemble) - ballein (jeter, mettre avec
dynamisme), qui signifie "remettre ensemble", c’est le signe formé par
les deux moitiés d’un objet brisé quand on les rapproche, c’est ce qui
permet l’accession à une nouvelle unité.
« Le symbole est une dimension de la réalité. Dans un même
mouvement de connaissance et d’amour, il rallie l’humain, le cosmique
et le divin. Nous ne nous connaissons nous-mêmes, nous connais-
sons les autres et nous ne pouvons percevoir l’existence d’autres
univers que par la perception des symboles qui nous relient les uns aux
autres.» Jean Chevalier
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Tobie - Symbole, division, idole
Au contraire, dia-ballein signifie diviser, et a donné le mot diable (le diviseur).
L’idole (du grec eidon : voir), l’image idolâtre que l’homme fabrique, est le résultat
des projections fausses qu’il met sur l’autre ou sur les choses en les déformant, en les
pervertissant. L’idole est une fausse image que l’homme fabrique quand il est coupé de
son être profond.
- Ainsi, Dieu, que des hommes inspirés ressentent comme un "Père" ou comme "le
Miséricordieux", devient un Zeus, un Jupiter, un Pantocrator tout-puissant, un juge, un
espion, un contrôleur.
- Ainsi, le temps, qui nous est donné comme un cadeau pour accomplir notre vie et notre
potentiel (kairos), devient une idole qui nous dévore (chronos).
- Ainsi, l’argent, qui devrait être un serviteur, devient un maître.
- Ainsi, la machine et la technologie, qui devraient être au service de
l’homme, deviennent les instruments de son asservissement.
- Ainsi, la politique, qui devrait servir le bien commun, devient un
moyen de pouvoir et de notoriété.
Quand une personne ne peut se libérer de ses idoles, l’inter-
vention d’un autre est nécessaire pour lui faire accepter ses ombres
et ses lumières, pour qu’elle puisse rétablir une relation vraie avec
son être et avec son entourage.
Ashoka
(v. 304, -232 avant J.-C.), troisième empereur de la dynastie
indienne des Maurya, parvenu au pouvoir en faisant assassiner ses
frères et 99 membres de sa famille. Devient maître d’un immense
empire. Subit une profonde crise morale à cause des horreurs de la
guerre du Kalinga (- 261). Retourné par son neveu bouddhiste
Nigrodha, se convertit lors de son voyage à Bodhgaya, fait une retraite
d’un an dans un monastère.
Son comportement et sa politique s’inspirent ensuite par la non-
violence et la compassion : la guerre est abolie, les fonctionnaires ont
pour mission de garantir la justice et la tolérance religieuse. Met un
terme aux sacrifices d’animaux dans les rituels brahmaniques.
Premier souverain au monde à faire de la non-violence un
principe d’organisation politique. À sa mort, après 37 ans de règne, ses
enfants se partagent son empire et les règles habituelles de la vie
sociale et politique reprennent leurs droits…
« Aux fonctionnaires : gagnons donc l’affection des hommes.»
« Le roi ami des dieux au regard amical veut que toutes les
écoles de pensée et religions puissent résider partout. Car toutes
veulent la maîtrise des sens et la pureté de l’âme.»
«Le but suprême est de faire le bien du monde entier.»
Image : chapiteau aux lions surmontant les colonnes dressées dans l’empire, devenu l’emblème
de la République de l’Union Indienne
Qohélet
L’Écclésiaste ou Qohélet* (en hébreu, "l’homme de l’assemblée"),
est un texte écrit par un philosophe juif anonyme vers - 200. Son pessi-
misme désabusé et son insolence envers l’ordre établi sont probablement
influencés par l’épicurisme et le stoïcisme grecs.
La vie de l’homme est soumise aux caprices du temps et des
circonstances qu’il ne peut maîtriser. Elle est triste, vide, monotone, injuste
et violente, lourde de souffrances et chargée de malheurs. La sagesse, le
meilleur des dons, est incapable d’apporter apaisement, repos, et de
permettre de découvrir Dieu.
Tout est vain, c'est-à-dire futile, insignifiant, éphémère et absurde.
Le sage et l’insensé connaissent le même sort dans la mort et l’oubli.
../..
* NB : L’auteur de l’Ecclésiaste est à distinguer de Ben Sira, ou
Ieshoua Ben Sirac, Ben Sirakh, Ben Sirach, Sirac le Sage, auteur
du Siracide, appelé aussi l’Écclésiastique ou La Sagesse de Ben Sira,
un des livres sapientiaux de l'Ancien Testament écrit en hébreu.
Ben Sira est un notable de Jérusalem, pénétré de l’amour de la
loi, du temple, du sacerdoce, du culte, vers 200 avant J.-C.
L’Ecclésiaste ou Qohélet
La menace constante de la mort, l'injustice régnant parmi les hommes,
l'impossibilité de connaître les plans de Dieu pour le monde rendent le
destin de l'homme fragile et insaisissable. La vie est le seul champ
d'activité et de réalisations pour l’être humain avant qu'il ne disparaisse du
monde. Respecter les commandements de Dieu, c'est là tout son devoir.
« Il est tout à l’honneur de la tradition biblique qu’un message d’un
tel réalisme ait été retenu. Mais sans doute est-ce parce que, derrière les
interrogations sur le sens de la vie, transparaît une foi malgré tout invin-
cible, dans la transcendance et la toute-puissance divine. » (Commentaire
dans la Bible de Stanislas Lyonnet, présentée par Pierre de Beaumont)
« Il y a un moment pour tout, et sous le ciel, chaque chose a son
temps : un temps pour enfanter et un temps pour mourir, un temps pour
mettre en terre, un autre pour récolter, (…) un temps pour le malheur, un
autre pour danser, un temps pour se déchirer et un temps pour recoudre. »
« Vanités des vanités, tout est vanité. »
« Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. »
« Tout va dans un même lieu, tout a été fait de la poussière et
retournera en poussière. »
« Tel juste périt malgré sa justice et tel méchant prolonge ses jours
malgré sa malice. » ../..
Qohélet ou l’Ecclésiaste
« Seule l’ironie indirecte peut, au travers de son cheminement
tortueux, conduire l’homme non pas dans la vérité, mais peut-être au
début de son chemin, à l’orée de son bois, à l’embranchement et au
carrefour de la décision. »
« Surtout ne rien exagérer, ni trop pieux ou sage, ni pas assez :
car l’excès en tout est un défaut. (…) D’un côté tout relativiser, oui,
tout est relatif. Tout doit être mesuré à l’absolu, et par conséquent
devient rien; ou seulement à la limite impérative de la mort, et que
reste-t-il ? Et cependant ce relatif (bonheur, travail, justice…), il faut le
faire et le vivre, en tant que relatif, c’est dire dans la libération du
souci accablant de l’inquiétude et de la hantise du lendemain. Voilà le
bien. »
« Après tout il y a un temps à vivre, un temps complexe et fait
de toute chose. Des choses relatives, mais ce sont les seules à notre
hauteur. »
« Quohélet ne préconise nullement le suicide. »
« Tu n’as pas à casser une gangue pour trouver un trésor, tu as
à apporter ton trésor pour que ce temps soit riche. Il est disponible, et
c’est toi qui lui attribues un sens. »
« Il manque à Quohélet ce qui sera si fortement affirmé par
Paul : l’espérance ». Jacques Ellul
Térence
Publius Terentius Afer (v. -190, v. -159), poète comique latin,
Esclave vraisemblablement d'origine berbère, né à Carthage. Affranchi
par son maître Terentius Lucanus, fréquente les cercles cultivés des
Scipion et des Aemilii. Fait représenter 6 comédies de 166 à 160.
Ses pièces présentent un théâtre de la mesure et de l'équilibre où
l'analyse psychologique et le problème moral l'emportent sur les péri-
péties dramatiques et les rebondissements comiques.
Peu goûté du public romain qui préfère les effets purement comi-
ques et la fantaisie de Plaute, devient un modèle pour les classiques
français, notamment pour Molière.
« Il n'y a rien de si avantageux à l'homme que la complaisance et
la douceur. »
« La chance seconde le courage. »
« Plus on est puissant, riche, heureux, bien né, plus on doit se
porter à pratiquer la justice, si l'on veut passer pour homme de bien. »
../..
Térence
« Qui ne peut comme il veut, doit vouloir comme il peut.»*
« Les actes font croire aux paroles.»
« Summa jus, summa injuria. La justice rigoureuse (ou l’appli-
cation aveugle des lois) est souvent une grande injustice. » (image du
haut)
« Un sage capitaine doit tenter toutes les voies de pacification
avant de recourir aux armes. »
« Homo sum : humani nihil a me alienum puto. Je suis
homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger .»**
* Le contraire de Hans im Schnokeloch, ( "Jean du trou aux moustiques")
dans la célèbre chanson populaire alsacienne : « Et ce qu'il a, il n'en veut pas,
Et ce qu'il veut, il ne l'a pas »
** Cette phrase, reprise dès l’Antiquité par Cicéron, Sénèque et les
Stoïciens, puis par Montaigne à la Renaissance, est considérée comme la devise
de l’humanisme antique.
Les 7 frères Maccabées
Attaché au culte hellénique, l'empereur syrien Antiochus IV
Épiphane introduit ce culte dans Jérusalem et toute la Judée entre -175
et - 140, profane le Temple en y érigeant la statue du dieu olympien Zeus
et oblige les Juifs à l'adorer.
En 166 avant J.-C, après leur précepteur Eléazar, âgé de plus de
90 ans, les sept frères Maccabées, Abim, Antoine, Gourias, Eléazar,
Eusébon, Alim et Marcel, sont horriblement torturés et mis à mort pour
avoir refusé de manger du porc et d’adorer un autre Dieu que celui
auquel ils croient.
Leur mère Salomé meurt la dernière après avoir dit à ses
enfants : « Le Créateur du monde, qui a formé l'homme à sa naissance
et qui préside à l'origine de toutes choses, vous rendra dans sa
miséricorde et l'esprit et la vie, parce que maintenant vous vous
méprisez vous-mêmes pour l'amour de sa loi. »
Ces événements sont relatés dans le 2ème livre des Maccabées. Le
surnom de "Maccabée" est celui de Judas, troisième fils du prêtre Mattathias.
L’insistance de ce deuxième livre sur le martyre et sur la résurrection des morts est
probablement à l'origine du sens dérivé de "cadavre" qu’a pris le mot macchabée.
Photo : Les Maccabées sur la Menorah de la Knesset par Benno Elkan.
Cicéron
Marcus Tullius Cicero (-106, + 43), homme politique romain, avocat
et écrivain latin. Formation à la rhétorique et au droit, avocat, édile,
questeur en Sicile puis consul, grand orateur. Fait exécuter les partisans
Catilina sans jugement public, exilé pour cela en Thessalie. Critique
Crassus, Pompée et César, généraux et chefs de parti qui provoquent
une guerre civile en se disputant le pouvoir, et leurs ambitions quasi
monarchiques, contraires au vieil idéal républicain qu’il défend.
Adapte en latin des théories philosophiques grecques. Après sa
retraite politique, met en avant trois domaines : la philosophie morale, la
logique et la philosophie naturelle. Ses œuvres maîtresses portent sur
les fins de l'action humaine (De finibus), sur les devoirs (De officiis), sur
le bonheur et l'immortalité de l'âme (Tusculanae disputationes) et sur
l’amitié (De amicitia)
Assassiné sur ordre de Marc-Antoine, comme une centaine d’au-
tres orateurs. Sa tête et ses mains, avec lesquelles il avait écrit Les
Philippiques, sont coupées et exposées à la tribune des Rostres.
« C'est dans l'adversité que se révèlent les vrais amis. »
« La vie des morts consiste à survivre dans l'esprit des vivants. »
« Qui n'empêche pas le mal le favorise. »
Lucrèce
Titus Lucretius Carus (v. -98 - v. - 55), poète philosophe latin.
Premier auteur à exposer la doctrine épicurienne en langue latine. Auteur
d'un seul ouvrage en 6 parties, le De rerum natura (De la nature des
choses), long poème passionné qui décrit le monde selon les principes
d'Épicure, appel constant à l'avènement de la lumière. Vit dans une époque
troublée par les guerres civiles, les bannissements, la corruption, l’anarchie
politique, le banditisme, d’où ses pages sombres sur la mort, le dégoût de
la vie, la peste d’Athènes.
Sa passion anti-religieuse s’en prend avec acharnement aux cultes
et aux prêtres des religions romaines de son époque. Contre les positions
des univers cléricaux antiques (romains, grecs, etc.), propose de se
soustraire aux craintes religieuses, auxquelles il oppose une dimension
rationnelle.
Explique ainsi de façon matérielle les objets et le vivant, qui prennent
forme via des combinaisons d'atomes. Comme Épicure, pense que
l’univers ne se réduit pas à notre système solaire. Pressent la sélection
naturelle.
Unit à la science épicurienne, souvent difficile, la douceur et la
dimension visionnaire de la poésie.
Rabbi Hillel
Mis au défi de résumer toute la Loi à une personne debout sur un
pied avant qu’elle ne doive se remettre sur ses 2 pieds, formule cette
phrase qui est la ‟règle d’or” des religions et spiritualités : « Ce que tu
ne voudrais pas qu’on te fasse, ne le fais pas à tes semblables : voilà
toute la loi, le reste est un simple commentaire.»
« Ne juge pas ton prochain avant de te trouver à sa place. »
Son petit-fils Gamaliel enseignera à Paul de Tarse et interviendra en faveur des
apôtres de Jésus.
* d’où l’expression "se chamailler"
Hillel Hazaken (: l’Ancien, -70, +10), né à Babylone, d’abord
bucheron puis docteur juif pharisien. À l'âge de 40 ans, s’installe en Israël.
Passe de longues années à étudier, est pendant une vingtaine d’années
président du Sanhédrin, chef spirituel du peuple juif. Vie exemplaire et
vertueuse, caractérisée par la patience, la civilité et la compassion pour ses
semblables, Juifs ou non, et le souci des plus pauvres.
Interprète l'esprit de la Torah et des règles de la vie ordinaire de façon
ouverte, renvoie les personnes à leur conscience. Opposé âprement au
rabbi Shammaï*, son adjoint (et successeur), légaliste et rigoriste, pour qui
une poule qui pond le jour du Shabbat ne respecte pas la Torah…
Menahem l’Essénien
Juif Tanna (sage), leader de la secte des Esséniens, vivant à l'épo-
que du roi de Judée Hérode le Grand (- 37, - 4 av. J.-C.). Forme un zoug
(paire) avec Hillel l'Ancien, et officie probablement au Av beit din (tribunal
ou Sanhédrin). Selon Flavius Josèphe, aurait été en bons termes avec
Hérode tout en critiquant les Romains. En se fondant sur certaines men-
tions de la Mishna, plusieurs critiques estiment qu'il est devenu un de ses
conseils ou de ses ministres.
Dans certains des hymnes trouvés en 1947 parmi les manuscrits de
la Mer Morte, se décrit lui-même comme siégeant sur un trône céleste
entouré d’anges. Se voit lui-même comme le "serviteur souffrant" d’Isaïe 53
qui fait advenir une nouvelle ère, l’âge de la rédemption et du pardon dans
lequel le péché et la culpabilité n’ont plus de place. Ces idées audacieuses
conduisent à son rejet et à son excommunication par les sages pharisiens
emmenés par Hillel.
Tué à Jérusalem par les Romains en l’an 4 avant J.-C. c’est à dire
deux ans après la naissance de Jésus. Son corps est laissé dans la rue
pendant trois jours, afin que tous le voient, avant d’être enterré. Ses
disciples croient qu’il est ressuscité après trois jours et qu’il est monté au
ciel dans une nuée.
Selon le chercheur et historien israélien Israël Knohl, Menahem
constitue le chaînon manquant qui nous permet de comprendre comment
le christianisme est issu du judaïsme.
Philon d’Alexandrie
Philo Judaeus (v. -13 - v. + 54), philosophe juif pétri de culture
grecque, moraliste et exégète. Ambassadeur à Rome ( + 39 - + 41)
auprès de Caligula pour défendre le droit de cité de la très importante
communauté judéenne d’Alexandrie, victime d’un pogrom.
Probablement mort avant d’avoir pu entendre parler de Jésus,
mais son œuvre (57 traités) a survécu grâce aux apologistes chrétiens.
Représentant le plus éminent de l'école philosophique juive
d'Alexandrie qui interprète la Bible selon les catégories hellénistiques et
jette un pont entre la révélation biblique et la philosophie grecque.
Son éclectisme est une vision religieuse du monde, fidèle aux
affirmations bibliques traditionnelles (grandeur du Dieu unique, Israël
peuple "élu"), mais intègre des concepts philosophiques puisés aux
diverses écoles grecques (sauf l’épicurisme), sans recherche de
cohérence.
La culture hellénistique illustre les données bibliques et en
transforme souvent le sens.
../..
Philon d’Alexandrie
Étend la définition biblique du "prochain" aux étrangers, qu’il
recommande d’aimer « non seulement comme des amis, comme des
parents, mais comme soi-même. »
Sa conception du Logos (le Verbe), "fils-premier né de Dieu",
"médiateur universel", "instrument de la création", "ambassadeur",
inspire le prologue de l’Évangile de Jean. Le Logos n’est pas Dieu, il
est la révélation de Dieu à l’âme vertueuse, car il est aussi la parole.
Son influence s’exerce sur des auteurs du Nouveau Testa-
ment, sur plusieurs Pères de l’Église (Clément de Rome, évêque de
Rome de 88 à 97, auteur d’une épitre aux Corinthiens), Clément
d’Alexandrie (v. 150 - v. 220), Origène (v. 185-254), Grégoire de
Nysse (v. 335- v. 394), et même sur l’exégèse occidentale (Ambroise
de Milan, v. 333-397) et, à un degré moindre, sur la formation de
l’idéal monastique.
« Représentant l’union de la philosophie et de la foi, de la
philosophie grecque qui ne fut qu’une philosophie et de la religion
juive qui ne fut qu’une religion, véhiculant des idées qui sont
devenues chrétiennes, Philon le Juif (qui ne s’est jamais converti)
n’est pas loin, ô paradoxe, de mériter le titre de "premier des Pères
de l’Église". » Michel Desforges
Jean le Baptiste
(v. -10 ? - v. + 29) prédicateur et prophète juif du temps de Jésus
de Nazareth. Sa vie est racontée de façon différente dans les récits de
l'historien juif Flavius Josèphe et dans les textes religieux des évangiles
et du Coran.
Fils d’Élisabeth et de Zacharie, mène une vie d’ascèse dans la
steppe de Judée, près du fleuve Jourdain. Annonce que "le royaume des
cieux" est tout proche. Homme à la parole libre, n’hésite pas à pointer les
fautes des pécheurs et à les appeler à se purifier. Les foules viennent à
lui pour être immergées ("baptisées" en grec) dans le fleuve Jourdain,
d’où son surnom. Cette ablution sacrée est le signe d’un changement de
vie intérieure.
Mis à mort à Machéronte par Hérode Antipas. Selon Marc, dans
un récit à l’historicité discutée, exécuté pour avoir critiqué le mariage
d‘Hérode Antipas avec Hérodiade, l’épouse de son demi-frère.
Le Coran parle aussi de Jean le Baptiste, sous le nom Yahya : il
est le cousin de Jésus (Îsa dans le Coran).
« Moi je vous baptise dans l'eau; mais celui qui vient après moi
est plus grand que moi, et je ne suis pas digne de porter ses sandales.
Lui, il vous baptisera dans l'Esprit et le feu. »
Photo du bas : Salomé avec la tête du Baptiste, par Caravage
Sénèque
Lucius Annaeus Seneca, (- 2 ?, + 65) philosophe, dramaturge et
homme d'État romain. Conseiller à la cour impériale sous Caligula, exilé à
l'avènement de Claude puis rappelé comme précepteur de Néron, joue un
rôle important de conseiller auprès de ce dernier avant d'être discrédité.
Contraint à un suicide forcé, se donne la mort en s'ouvrant les veines sur
l'ordre de Néron.
Ses traités philosophiques comme De la colère, De la vie heureuse
ou De la brièveté de la vie, et surtout ses Lettres à Lucilius exposent ses
conceptions philosophiques stoïciennes. La métaphysique chez lui tient fort
peu de place : les malheureux nous appellent, c'est de l'homme qu'il faut
s'occuper ; c’est lui qu'il faut affermir, consoler, encourager.
« Hâte-toi de bien vivre et songe que chaque jour est à lui seul une
vie. »
« Ce n'est pas parce que les choses nous paraissent difficiles que
nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles nous
paraissent difficiles ».
« La philosophie (…) forme et forge l’âme, elle ordonne la vie, elle
régit les actions, elle indique ce qu’on doit faire ou négliger, elle siège au
gouvernail et dirige la course des hommes ballottés à travers les écueils. »
Photo : Statue de Sénèque à Cordoue, sa ville natale ■

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  • 2. La préhistoire L’homme de Néanderthal Depuis quand les êtres humains ont-ils des préoccupations spirituelles ? À quand remonte homo credens ou homo religiosus ? Selon les découvertes de la paléoanthropologie, les premiers hominidés connus (Toumaï, Tchad, 2001) auraient vécu il y a 7 millions d’années, et les australopithèques (Lucy, Éthiopie, 1974), entre 4 et 3 millions d’années. Homo habilis (- 2,5 millions d’années), bipède, possède un langage articulé rudimentaire et sait confectionner des outils simples. Homo ergaster (-1,9 million d’années, Kenya, 1971) et Homo georgicus (ou homme de Dmanissi, -1,8 million d’années, Géorgie, 1991) précèdent Homo erectus (- 1 500 000 ans), qui maîtrise le feu à partir de - 790 000 ans*. ../.. * site archéologique de Gesher Benot Ya`aqov, au bord du Jourdain Photos : - Crâne de l’homme de Tautavel (Pyrénées orientales, 1971), représentant européen d'Homo heidelbergensis (- 450 000 à - 300 000 ans). - Peinture de la grotte Chauvet (Pont d’Arc, 1974), occupée entre - 37 000 et - 28 000 ans.
  • 3. Les hommes préhistoriques Homo neanderthalensis (- 200 000 à - 40 000 ans) précède homo sapiens (Cro-Magnon, Dordogne, 1868). Homo sapiens développe l’agriculture (née avec la mise en terre volontaire de premières semences et la domestication des animaux) lors de la révolution néolithique, 12 000 ans avant notre ère. Depuis Hiroshima, l’homme moderne est homo demens… Si nous voulons que l’humanité subsiste dans un environne- ment sain, il doit devenir homo viabilis… Photos : - Reconstitution de l’homo georgicus - Reconstitution d’un l’homme de Néanderthal ( env. - 45 000 ans) à partir du crâne trouvé en 1908 dans la grotte de la Chapelle-aux-Saints, au sud de la Corrèze. - Reconstitution de l’homme de Cro-Magnon ( Dordogne, découvert en 1868)
  • 4. L’homme de Néanderthal André Leroi-Gourhan retient de nombreux indices témoignant sinon d'une religion, du moins de rites préhistoriques, d'une " aptitude à traduire par des symboles la réalité matérielle du monde environnant ". * Il y a 176 500 ans, à Bruniquel (Tarn-et-Garonne), des Néanderthaliens faisaient des feux au fond d’une grotte, à 336 mètres de l’entrée, pour manger, s’éclairer et probablement pour des pratiques cultuelles… Le plus ancien dessin de l'histoire de l'humanité, daté de - 73 000 ans, identifié en 2015 en Afrique du Sud, est un dessin abstrait, composé de quelques lignes ou hachures, découvert dans la grotte de Blombos. On fait généralement remonter la spiritualité dans l’histoire de l’homme aux premières sépultures, qui traduisent l’affirmation que le corps de l’être aimé est sacré, que l’amour subsiste malgré la mort et qu’il existe peut-être un au-delà de la vie terrestre. Les premières sépultures font leur apparition au cours du paléolithique moyen, il y a environ 100 000 ans et probablement plus tôt*. Elles sont liées à l'Homme de Néanderthal en Europe et aux premiers humains anatomiquement modernes au Proche-Orient. Des vestiges osseux animaux considérés comme des offrandes sont parfois associés aux individus ensevelis.
  • 5. Les hommes préhistoriques Au Gravettien*, le thème des Vénus paléolithiques est présent dans différentes régions d'Europe, du sud-ouest de la France à l'Ukraine en passant par l'Italie et l'Allemagne. Il est interprété par certains auteurs comme le témoignage d'un ancien culte de la déesse. ** phase du paléolithique supérieur qui doit son nom au site de La Gravette (Dordogne). - Vénus de Hohle Fels (env. - 35 000 ans) découverte en 2008 à Schelklingen (Jura souabe, Allemagne du Sud) - Vénus de Willendorf (env. - 25 000 ans) découverte en Autriche en 1908 - Vénus de Lespugues (Haute-Garonne), env. - 23 000 ans, découverte en 1922
  • 6. Gilgamesh en akkadien, "celui qui a tout vu", ou "celui qui a vu la profondeur", personnage semi-légendaire de la Mésopotamie antique. Roi de la cité d'Uruk où il aurait régné vers 2650 av. J.-C., divinisé après sa mort, et dieu des Enfers dans la mythologie mésopotamienne. Personnage principal de plusieurs récits épiques, dont le plus célèbre est l'Épopée de Gilgamesh, première œuvre littéraire que nous connaissions, transmise par le premier système d’écriture inventé par les humains vers le début du 4e millénaire Le roi Gilgamesh comprend que la seule forme d’immortalité à laquelle il peut accéder est moins liée à la gloire acquise par ses exploits guerriers qu’au renom que lui confèrent la construction des murailles protégeant la cité et sa connaissance du monde, détenue grâce à un périple extraordinaire. Fort de ses expériences, il devient un homme sage dont le règne est commémoré par les générations futures. L’Épopée est un récit sur la condition humaine et ses limites, la vie, la mort, l'amitié, la vanité de la recherche de la gloire, et plus largement un récit d'apprentissage sur l'éveil de son héros à la sagesse. La morale de l'Épopée est qu'on ne peut échapper à la mort, réalité de la condition humaine, et qu'il vaut mieux chercher à profiter au maximum de son existence sur Terre.
  • 7. Gudea ou selon sa forme francisée Goudéa (" l'Appelé"), souverain de la civilisation mésopotamienne, gouverneur de la cité-État de Lagash, en basse Mésopotamie de 2141 à 2122 av. J.-C. Si ses inscriptions revendiquent une campagne victorieuse contre Anshan, c’est un prince avant tout bâtisseur de temples à Girsu-Tello, Ur, Nippur, Adab, Uruk (et Bad-Tibira, indice de l'influence de Gudea à Sumer). La statuaire correspondant à son règne, surtout constituée de ses propres représentations, est empreinte de cette piété qui contraste avec les thèmes belliqueux de l'art de la période akkadienne. De nombreuses statues sont en diorite, roche magmatique noire très dure provenant de l’actuel sultanat d’Oman. L'inscription que porte la statuette la consacre au dieu Ningishzida. Il faut voir ces statues comme l'expression de la piété de Gudea. Son visage est empreint de sérénité, et le souverain est souvent représenté dans la position de l'orant, les deux mains jointes. « Comme les enfants d’une même mère, nous sommes unis dans ce cœur de Lumière » (rapporté par Marguerite Kardos, spécialiste de Sumer)
  • 8. Abraham ‟Père de multiples nations”, vers 1900 ans avant J.-C. Personnage probablement plus symbolique qu’historique, patriarche des Hébreux et père des trois religions monothéistes, judaïsme, christianisme et islam. Ibrahim pour les Musulmans. Associé aux concepts de foi, d’alliance et de promesse. Chef d’une tribu de pasteurs semi-nomadiques, aurait vécu en Haute Mésopotamie à Ur, puis à Harân. Non loin des sanctuaires élevés en l’honneur des dieux de la fécondité, ces tribus et leurs chefs ont peu à peu la certitude d’un Dieu unique. Certaines d’entre elles acquièrent probablement peu à peu la conviction que Dieu ne peut pas supporter et refuse les sacrifices humains. Dans la tradition biblique, part au pays de Canaan*, est invité par un ange de Dieu à ne pas immoler son fils Isaac, et le remplace sur l’autel par un bélier. * Leckh-lekha : « Va vers toi », terre de toi, terre que je te ferai voir ! « Le messager du Seigneur l’appela alors de la part de Dieu : « Abraham, Abraham ! (…) Ne touche pas à l’enfant, ne lui fais aucun mal » Genèse, 22, 11 Images : - Ziggurat d’Ur en Chaldée (vallée du Tigre et de l’Euphrate, époque sumérienne) - Abraham vu par Ephraïm Moses Lilen (1874-1925) - Tableau de Laurent de La Hyre, 1650. Abraham sacrifiant Isaac
  • 9. Hammurabi (v. - 1810 - v. -1750), 6ème roi de Babylone (Irak actuel. En amorrite et en akkadien "l'aïeul guérisseur"). Son règne, après - 1992, est l'un des plus longs de l’Antiquité proche-orientale et prestigieux par l'ampleur de son œuvre politique et législative, au-delà des conquêtes militaires. Fait écrire le code de Hammurabi, l'un des textes de lois les plus anciens jamais trouvés. Des tablettes d'argile (photo du bas) complètent les gravures sur la stèle en basalte. Le Code contient 282 articles, écrits en cunéiforme akkadien. De nombreux délits entraînent des châtiments tels que la mort, la défiguration ou l'application de la loi du talion ("œil pour œil, dent pour dent", également dans la Bible, qui est quand-même un progrès par rapport au "mort pour œil" de la vendetta). Le code pose la présomption d'innocence et suggère que l'accusateur et l'accusé ont la possibilité d'apporter des preuves. « Pour que le fort n’opprime pas le faible, pour faire justice à l'orphelin et à la veuve, (…) pour faire justice à l'opprimé, j'ai écrit mes paroles précieuses sur ma stèle etc. » « Faire éclater la justice pour que le puissant cesse de causer tort au faible ». NB : Une inscription sur un sarcophage égyptien de la XIème dynastie, (fin du 3ème millénaire) dit déjà : « J’ai fait chaque homme égal à son prochain »
  • 10. Akhenaton Amenhotep IV, 10ème pharaon de la XVIIIème dynastie de l’Égypte ancienne, époux de la reine Néfertiti. Règne de -1355 à -1338 ?. Considéré par les uns comme l’un des grands mystiques de l’Antiquité, par d’autres comme un dictateur intolérant. Pour des raisons encore mal connues, vraisemblablement en butte au conservatisme et à l'hostilité du clergé de Thèbes, abolit le culte d’Amon, le ‟dieu caché”, lui substitue celui d’Aton, ‟le disque solaire”. Ordonne de détruire les images de culte des anciennes divinités à l'exception de Rê. Abandonne Thèbes pour fonder une nouvelle capitale 300 km au Nord, la cité d’Akh-en-aton (‟l’Horizon du disque solaire”), l’actuelle Armana, en déracinant en plein désert et en épuisant les milliers d’ouvriers affectés à cette tâche, inhumés sans respecter les rites traditionnels. Répudiant le vaste syncrétisme de la religion officielle, engage l’Égypte dans la voie du monothéisme, affirme la bonté providentielle du Soleil qui chaque matin fait renaître la vie. Photo du bas : El-Amarna,, site archéologique d'Akhetaton ../..
  • 11. Akhenaton Absorbé par ses activités religieuses, le ‟roi ivre de Dieu” néglige la politique étrangère et laisse l’Égypte perdre toutes ses possessions extérieures. Considéré comme hérétique par ses successeurs. Dès sa mort, Néfertiti puis Toutankhamon, son successeur, font effacer son nom et rétablissent le polythéisme hénothéiste* traditionnel. Son Hymne au Soleil est paraphrasé par le Psaume 104, dans lequel toutefois le Soleil n’est pas Dieu mais une créature de Dieu. AkhenAton Ton apparition est belle à l'horizon du ciel, ô soleil vivant qui a vécu le premier... Tu es beau et grand, tu étincelles et tu es au-dessus de tout Pays. Tes rayons entourent les pays autant que tu en as créés. Psaume 104 Eternel, mon Dieu, tu es infiniment grand. Tu es revêtu d'éclat et de magnificence. Il s'enveloppe de lumière, comme d'un manteau. * Hénothéisme : croyance en une pluralité de dieux dans laquelle chacun d'entre eux joue successivement un rôle prédominant par rapport aux autres et reçoit un culte préférentiel.
  • 12. Moïse (v. - 1392, v. - 1272), Personnage biblique, premier prophète du judaïsme, considéré comme légendaire ou symbolique par la grande majorité des archéologues, philologues et autres scientifi- ques spécialistes de la Bible et des lieux bibliques. Le récit de sa naissance ressemble de près à la légende de la naissance de Sargon, roi légendaire, fondateur de l'Empire assyrien. Dans la tradition biblique, fils d’Amran et de Jocabed, conduit le peuple d’Israël hors d’Égypte en ouvrant la mer Rouge. L’exode de 40 ans dans le désert, dont on ne trouve aucune trace archéologique, est aujourd’hui considéré par beaucoup comme une construction théologique ou un parcours spirituel. Selon l'historien israélien Nadav Naaman, ce récit de l'Exode et de la conquête de Canaan constitue probablement une construc- tion biblique littéraire et théologique qui évoque la perte du contrôle militaire égyptien en Canaan vécue comme une libération, la mémoire culturelle juive transférant cette situation par la mise en scène d'une sortie d'Égypte. ../.. Photos : - Moïse recevant les tables de la loi, par Marc Chagall
  • 13. Moïse Moïse vit sur le mont Horeb une expérience spirituelle traduite symboliquement par la vision d’un buisson ardent, comme des genêts en fleurs. Il demande à la chose : « Dis-moi quel est ton nom ? *», et elle lui répond : « Je suis ce que je suis. Tu sauras qui je suis quand tu verras que je suis à tes côtés. »** Le Dieu de Moïse s’expérimente dans la vie. On ne peut rien savoir de lui, sinon qu’il est là. Inutile d’essayer de le décrire, il est là et cela suffit. * S’il faut nommer Dieu, les Juifs emploient dans la Bible une périphrase ou quatre lettres qui n’ont aucun sens, YHVH. Aujourd’hui encore, quand ils écrivent, les Juifs utilisent pour désigner Dieu la plus petite lettre de l’alphabet hébreu, le yod – une simple virgule. ** Marcel Légaut traduit cette intuition en disant que Dieu se manifeste en moi quand je suis fidèle à mes exigences intérieures dans ma pensée, mes paroles, mon activité créatrice: « Il y a en moi une action qui est de moi, qui ne peut pas être sans moi, mais qui n’est pas que de moi. J’affirme que cette action qui m’est propre est Dieu. » Écrit "sous la dictée de Dieu" sur le mont Sinaï les dix paroles (Décalogue) ou commandements, dont le 6ème, "Tu ne tueras pas". La traduction d'André Chouraqui "Tu n'assassineras pas" donne une autre interprétation de ce commandement, qui ne couvre pas l'homicide en cas de guerre, de légitime défense, ou prononcé par un tribunal régulier (peine de mort). ../.. - Moïse devant la buisson ardent, par Marc Chagall - Les 10 commandements en hébreu sur un parchemin
  • 14. Nouvelles découvertes sur Moïse Dans son livre Moïse l’insurgé, Jacob Rogozinski se demande qui était Moïse (Freud pensait que Moïse était un Égyptien, un auteur juif suggère que Moïse était peut-être une femme), pourquoi la Bible le présente comme un lépreux né d’un inceste dans une tribu maudite. Ne croit pas à la traversée de la mer Rouge et du désert, mais grâce aux découvertes les plus récentes des historiens et des archéologues (cité cananéenne de Hatsor à 15 km au nord du lac de Tibériade), explore le noyau de vérité du récit de l’Exode. Un soulèvement a eu lieu en Canaan dans l’Antiquité. Il a donné naissance à une société sans roi et sans État, dont les lois sont hospita- lières aux étrangers, favorables aux asservis, aux exclus. Cette insur- rection n’aurait pas été possible si un homme surnommé Moïse n’avait pas introduit un dieu étranger, un dieu qui ne sanctifie pas le pouvoir des rois, mais soutient les opprimés dans leur combat pour la justice. L’enquête se centre alors sur le dieu de Moïse afin d’élucider la genèse du monothéisme. ../.. Photo du haut : la cité cananéenne de Hatsor (ou Tel Hazor), cité importante de l'âge du bronze et de l'âge du fer, des environs de 2600 jusqu'à sa destruction par les Assyriens en 732 avant notre ère.
  • 15. Moïse Moïse remet en cause la monarchie sacrée, introduit « une théo- démocratie », la République des hébreux, la séparation des pouvoirs, le refus de la servitude volontaire. Un passage de la Bible* suggère qu’Abraham, Isaac et Jacob n’adoraient pas le vrai Dieu (ils adoraient Elohim, un dieu tout-puissant, créateur de l’univers, etc.) mais que le Dieu de Moïse, à vocation universelle, est un Dieu intime, discret (YHVH) et libérateur, dressé contre toutes les idoles, oppressions et aliénations, et qui n’a que nos mains pour agir. Images : - Michel Ange (1475-1564) , La création du soleil et de la lune, Chapelle sixtine, Vatican. - Pantocrator est le surnom de Jupiter, le dieu romain qui gouverne la terre et le ciel, ainsi que tous les êtres vivants s'y trouvant, Zeus dans la mythologie grecque. Du latin religieux pantocrator, issu du grec ancien παντοκράτωρ , pantokrátôr (grec pan, «tout» et kratos «puissance » : « maitre de tout, Tout Puissant »). Le Dieu que présente le livre de Jean-Pierre Batut, malgré la couverture un peu trompeuse de sa thèse Pantocrator, Dieu le Père tout puissant. Recherche sur une expression de la foi dans les théologies anténicéennes , est le " Père des miséricordes " et le " Dieu de toute consolation. » - L’ouvrage de John Caputo, philosophe de la religion étatsunien, pose des questions centrales sur la possibilité d’un « Dieu faible » et d’un renversement de la notion même de « Dieu ». C’est aussi l’affirmation d’autres auteurs comme Etty Hillesum ou Jean Sulivan * Exode, 6, 3
  • 16. Moïse, Josué et Samuel Dans le Lévitique (19 -18), où est inscrite la loi de Moïse, figure le commandement « Tu aimeras ton prochain comme toi- même. » Josué ou Yehoshua ("Dieu sauve"), fils de Noun, membre de la Tribu d'Éphraïm. Homme de conquête et chef de guerre, mais un passage de la Bible (Jos 17,16-18) laisse percevoir un scénario tout autre, l’implantation pacifique dans la montagne centrale (Éphraïm), hors du domaine des puissantes cités-États de la plaine. Premier réalisateur de la promesse faite à Abraham. Samuel ("Son nom est Dieu", v. - 931- v. - 877) Grand-prêtre de la tradition de Moïse, est qualifié de prophète dans la Bible bien que son rôle soit plus proche de celui d'un juge, c'est-à- dire au sens biblique un chef guerrier. Désigne les deux premiers rois d'Israël, Saül, puis David. On lui prête d’avoir écrit une grande partie des ‘livres historiques’ de la Bible. Photos : - L’autel des holocaustes de Josué sur le mont Eyval, selon le professeur Adam Zartal - Icône représentant Samuel
  • 17. Élie Ėliyyahou, nom qui signifie : "Yahou (abréviation de Yhwh) est mon Dieu", prophète d’Israël né vers - 930 ? à l’époque où son peuple est installé en terre de Canaan. Traverse la dépression, l’incompréhension et le rejet, passe par la violence, l’intolérance, l’impatience et le zèle. Tient tête au puissant roi Achab, fait mettre à mort les 450 prêtres des Baals (dieux cananéens de la fertilité) qui entourent Jézabel, la femme du roi. Prend peur et s’enfuit. Marche 40 jours et 40 nuits jusqu’à la montagne, l’Horeb. Fait alors une expérience mystique de rencontre avec Dieu, dans le silence et la douceur, à l’opposé de ce qu’il pouvait attendre : le divin n’est pas dans la violence ni dans le spectaculaire. Dans ce silence, une parole le renvoie à sa mission. Élie y retourne, jusqu’au jour de sa mort où il est "enlevé" dans les Cieux. «(…) le Seigneur n’était pas dans l’ouragan. (…) le Seigneur n’était pas dans le tremblement de terre. (…) le Seigneur n’était pas dans le feu. Et après le feu, le bruissement d’un souffle ténu* ("Qol D’mamah Daqqa"). Alors en l’entendant, Élie se voila le visage avec son manteau. » * Le mot hébreu demamah signifie silence. « Les traducteurs sont tellement embarrassés par ce fait qu'il a entendu le silence qu'ils traduisent ce mot de demamah par "petit bruit" ; or la chose forte dans ce texte, c'est qu'il a entendu le silence. » Emmanuel Lévinas, conférence avec Marcel Légaut, 1987. Photos : - Statue d’Élie égorgeur des prêtres des Baals (Mont Carmel, Israël) - Représentation de l’expérience mystique d’Élie (Théobule)
  • 18. David * Guerrier, musicien et poète, deuxième roi d'Israël règne au 10ème siècle avant J.-C. Présenté dans le récit biblique, avec son fils Salomon, comme l'un des deux fondateurs de l'ancien État israélite. Jeune berger de la tribu de Juda, fils de Jessé, est appelé aux côtés du roi Saül pour l'apaiser par ses chants. Selon la tadition, met en déroute les ennemis philistins en vainquant le géant Goliath à l'aide de sa fronde. Devenu le héros d'Israël, s'attire la jalousie puis la vindicte de Saül, doit s'enfuir et prend la tête de maquisards, opérant la vengeance divine et redistribuant les butins aux pauvres. Devenu roi, à la tête de son armée, vainc les ennemis d'Israël, conquiert Jérusalem, où il transfère l'Arche d'alliance, et fonde un vaste royaume qui s'étend des frontières de l'Égypte jusqu'à l'Euphrate. Pour épouser Bethsabée, épouse d'un officier dévoué, Urie le Hittite, fait mettre celui-ci en première ligne au siège de Rabba où il est tué. À l'occasion d'une calamité publique, livre 7 descendants de Saül à la vindicte des Gabaonites qui les exécutent rituellement. * Cette diapo est réalisée non pour présenter un humaniste, mais en vue du parallèle fait plus loin entre David et Mahomet, et entre Jésus et al-Hallâj.
  • 19. Osée De l’hébreu hôšea, c'est-à-dire ‟Sauve !”. Prophète d’Israël, berger, vivant à la fin du règne de Jéroboam II (v. - 782, v. - 753). Marié, découvre avec douleur et détresse l'infidélité de sa femme Gomer, considérée dès lors comme prostituée.. Amour humain, union et progéniture sont mis en scène pour signifier les rapports tumultueux entre le peuple qui se dit ‟élu” et son Dieu. Le peuple est comparé à une épouse infidèle parce qu'il s’est voué au culte des idoles. Dieu en revanche est l’époux, fidèle et surtout « unique », qui « parle au cœur » du peuple et s'emploie, en l'éprouvant, à le reconquérir, prêt à pardonner au moindre signe de repentir. « C’est pourquoi je vais la séduire, je la conduirai au désert et je parlerai à son cœur. » Photo du haut : Osée peint par Alessandro Bonvicino (1521-24)
  • 20. Zoroastre ou Zarathoustra, penseur, sage et prophète, fondateur du zoroastrisme, ayant existé, selon les études, entre le 15è et le 11è siècle, ou entre le 7è et le 6è siècle avant J.-C., au nord-est de l'Iran actuel. Réforme le mazdéisme sur la base de trois principes, « les bonnes pensées, les bonnes paroles et les bonnes actions », d’une démarche éthique et d’une conscience claire en vue d’atteindre la plénitude spirituelle. Combat les sacrifices d’animaux, considère tous les hommes et toutes les femmes sur un pied d’égalité, indépendamment de leurs croyances et opinions, appartenance ethnique ou raciale. Non seulement ses idées ne plaisent pas, mais surtout elles remettent en cause le pouvoir établi. Pourchassé par le peuple, doit s'enfuir pour sauver sa vie. « Le bonheur appartient à celui qui apporte le bonheur aux autres. » Les Zoroastriens ont été victimes de persécutions, particulièrement par les Musulmans pour qui Mahomet est le dernier Prophète. Ceux qui ont fui en Inde sont connus sous le nom de Parsi. Photo du haut : le Farvahar symbolise le Fravashi, ange gardien d’un individu, l’univers sans fin ( le grand anneau central), la sagesse et l’amour (le petit anneau) se déplaçant vers l’avant pour conduire l’homme au progrès, à la droiture, au bonheur
  • 21. Le premier Isaïe "Isaïe" (en hébreu, Yeshayahu : ‘Yahweh sauve’) est le nom de trois prophètes de l’histoire judéo-chrétienne dont les textes ont été composés sur trois siècles entre 750 et 400 avant J.-C. Le prophète est celui qui rappelle, à temps et à contre temps, les exigences de la conscience. « Nul ne brandira plus le glaive meurtrier et l’on n’apprendra plus la guerre. Alors de leurs épées, ils forgeront des socs de charrue, et de leurs javelots des serpes. (…) Le loup vivra avec l’agneau. Le tigre gîtera près du chevreau. Le veau, le lionceau seront nourris ensemble, et un enfant les conduira. » « Cet homme d’action est sans doute le premier homme que le rêve d’une humanité entièrement pacifiée ait hanté, qui ait pensé à la défaite de l’injustice, de la guerre (…) et qui ait annoncé une mutation cosmique. Il a été choqué non seulement par la violence des hommes, mais par celle qui règne dans la nature. Marx, Lénine et Mao ont-ils jamais eu comme lui leur nuit troublée par la lutte des espèces dans la jungle ? Il est en cela le premier, et peut-être le seul révolutionnaire de l’histoire. » André Chouraqui (photo du bas) Photo du haut : Le forgeron transformant l’épée en charrue. Statue offerte par l’URSS à l’ONU en 1959, installée devant le siège de l’ONU à New-York
  • 22. Amos Prophète d’Israël, berger et originaire de Tekoa près de Jérusalem, dans le royaume de Juda. Prend la parole sous les règnes de Jéroboam II, roi d'Israël et d'Ozias, roi de Juda (vers 750 avant J.- C.), contre les riches et les puissants, hypocritement dévots ou idolâtres affichés. Dénonce le mal social et la perversion de la religion. Son court ministère est interrompu par la police royale sur demande du chef du clergé de Béthel. À l'adresse des femmes de Samarie : « Écoutez, vaches du Bashan, vous qui paissez sur la montagne de Samarie, opprimant les indigents, broyant les pauvres. » Contre le sanctuaire de Bethel, fait parler Dieu ainsi : « Je hais, je méprise vos fêtes, Je ne puis sentir vos assemblées. Quand vous me présentez des holocaustes et des offrandes, Je n'y prends aucun plaisir ; Et les veaux engraissés que vous sacrifiez en actions de grâces, Je ne les regarde pas. Éloigne de moi le bruit de tes cantiques ; Je n'écoute pas le son de tes luths. Mais que la droiture soit comme un courant d'eau, Et la justice comme un torrent qui jamais ne tarit. » Photo du haut : Amos berger (cathédrale d’Amiens)
  • 23. Jérémie (v. - 640, v. - 588, de l'hébreu « sur les lieux élevés, Yhvh"), prophète d’Israël. Durant ses 50 ans de ministère, connaît 5 rois et un gouverneur, est témoin de 4 invasions, subit le long siège de Jérusalem, où il est emprisonné. Ressent la vue d’un rameau d’amandier (même mot que "veilleur" en hébreu) comme un appel : se sent appelé par Dieu à parler et agir "arracher et renverser, pour exterminer et démolir", mais aussi à "bâtir et planter". Pendant l’exil de Juifs à Babylone, les dissuade avec réalisme de se rebeller car ils seraient écrasés, les encourage à procréer, bâtir et planter, à entretenir l’espoir, à cultiver leur identité et à se préparer au retour. Encourage la réforme de Josias, dénonce l'idolâtrie (c’est-à-dire le fait de donner une valeur absolue à ce qui a une valeur toute relative) : pouvoir, argent, exploitation des pauvres, formalisme du culte, culte des dieux étrangers, sacrifice des enfants au dieu Molek. Persécuté et contraint au silence. Termine sa vie en Égypte. Sur sa révélation, son père Helqias met en place les premiers livres bibliques (réforme de Josias) « Si vous améliorez réellement vos voies et vos œuvres, si vous avez un vrai souci du droit, si vous n’opprimez pas l’étranger, l’orphelin et la veuve (…), alors je vous ferai demeurer en ce lieu. »
  • 24. Thalès de Milet (v. - 625 -v. - 547) philosophe, mathématicien, astronome et physi- cien grec. Commerçant, ingénieur, conseiller militaire et politique, participe au groupe des "Sept Sages". Aurait été initié en Égypte aux sciences égyptienne et babylonienne. Auteur de nombreuses recherches mathémati- ques, notamment en géométrie (théorème de Thalès). On lui attribue le calcul de la hauteur de la grande pyramide, la prédiction d'une éclipse. Effectue les premières expériences sur l’électricité avec de l’ambre et de l’oxyde de fer. Sa renommée se fonde essentiellement sur des anecdotes comme l’épisode du puits rapporté par Platon : « Il observait les astres et, comme il avait les yeux au ciel, il tomba dans un puits. » S'écarte des discours explicatifs délivrés par la mythologie, privilégie une approche naturaliste caractérisée par l'observation et la démonstration. Fait de l'eau le principe matériel (αρχή : arkhè) explicatif de l'univers, d'où procèdent les autres éléments : air, feu et terre. Figure de transition entre l’interprétation universalisante des grands mythes et l’argumentation d’une compréhension du monde. Promoteur d'une science ouverte, lui permettant de jongler entre des disciplines scientifiques diverses et spécialisées. Photo du bas : ambre. Le mot électricité vient du grec ancien ἤλεκτρον / elektron, signifiant "ambre".
  • 25. Ésope (v. - 620 - v. - 564), écrivain en langue grecque, peut-être originaire de Nubie (actuel Soudan) et emmené comme esclave en Phrygie (actuelle Turquie). On a souvent mis en doute la réalité historique de la prodi- gieuse destinée de cet ancien esclave bègue et difforme qui réussit à se faire affranchir et en vient à conseiller les rois grâce à son habileté à résoudre des énigmes. Auteur de fables, brefs récits de morale pratique, en prose et sans prétention littéraire. Il est presque certain qu'il ne les écrivait pas et qu’elles ont été recueillies par d’autres, comme Démétrios de Phalère. Le nom d'Ésope a servi à regrouper plusieurs centaines récits qui circulaient jusque-là de façon orale et qui présentaient des caractéristiques com- munes. Tout le récit de sa vie est parcouru par la thématique du rire, de la bonne blague au moyen de laquelle le faible, l'exploité, prend le dessus sur les maîtres, les puissants. En ce sens, Ésope est un précurseur de l'antihéros, laid, méprisé, sans pouvoir initial, mais qui parvient à se tirer d'affaire par son habileté et sa sagesse. Socrate aurait consacré ses derniers moments de prison avant sa mort à mettre en vers des fables d’Ésope. Phèdre (v. - 14 - v. + 50), autre fabuliste, et beaucoup d’autres, dont Jean de la Fontaine (1621-1695), ont repris et adapté les fables d’Ésope. Le nom d'Ésope est attaché au palindrome : « Ésope reste ici et se repose »
  • 26. Le deuxième Isaïe Le prophète juif anonyme auteur des chapitres 11 à 55 du livre d'Isaïe a vécu à la fin de l'exil babylonien, en terre étrangère. Son intervention se situe entre les années 550 et 538, c'est-à-dire entre les premiers grands succès remportés par le souverain perse Cyrus et la victoire définitive de celui-ci contre Babylone. Alors que le premier Isaïe présentait l’Éternel comme un Dieu fort, puissant, et surtout très sévère, punissant impitoyablement toutes les incartades de son peuple rebelle, le deuxième Isaïe est le prophète de la tendresse de Dieu. Il présente Dieu comme une mère pleine de délicatesse et de miséricorde, dont les entrailles tressaillent dès que ses enfants sont en danger. C’est ce Dieu d’amour que révèlera Jésus, « le Serviteur fidèle, le Serviteur souffrant » révélé par le 2ème Isaïe, que l’on peut qualifier de prophète mystique. « De même que la pluie et la neige descendent des cieux et n'y retournent pas sans avoir arrosé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, pour fournir la semence au semeur et le pain à manger, ainsi en est-il de la parole qui sort de ma bouche : elle ne retourne point à moi sans effet, sans avoir exécuté ma volonté et réalisé l’objet de ma mission. » « Voici que je fais un monde nouveau. Il germe déjà, ne le voyez- vous pas ? Je vais tracer dans le désert une route et faire jaillir un fleuve dans la steppe. » Photo : Le prophète Isaïe, par Marc Chagall (1968)
  • 27. Ézéchiel ("Que le Seigneur le fortifie"), prophète de l'Ancien Testament au début du 6ème siècle av. J.-C. Avant la conquête babylonienne, est sans doute un prêtre attaché au Temple. Après la première prise de Jérusalem par Nabuchodonosor, déporté en 597, avec sa femme, dans un village de Basse-Mésopotamie appelé Tel Aviv. Sa prédication morale, à laquelle se mêle parfois la perspective d’un avenir meilleur, fait place à des "visions" (le genre apocalyptique) qui dévoilent l’achèvement de l’histoire et révèlent les mystères de l’au-delà. Affermit l’idée, déjà introduite par Jérémie, d’une responsabilité individuelle et non plus collective. Affirme que le péché de violence est aussi grave que celui d’impiété. Le don de la loi gravée sur le cœur de l’homme devient le don de l’esprit même du Seigneur. A la vision que les os reprennent chair, que la mort sera vaincue. « Un fils ne porte aucune responsabilité pour la faute de son père, ni un père pour celle du fils. » « Est-ce que je pourrais prendre plaisir à la mort du méchant ? C’est moi, le Seigneur, qui le demande. Mon souhait n’est-il pas plutôt qu’il change de conduite et qu’il vive ? » Photo : Ézéchiel par Michel Ange, Chapelle Sixtine
  • 28. Mahāvīra ("Le Grand Héros", - 599, - 527), ascète jaïn, né dans le Bihar (Inde), dernier des 24 Tirthankara (guides de la voie de la libération) jaïn. La tradition jaïna indique que le premier des 24 "Tirthankara" est Rsabha, considéré comme le précurseur de la civilisation humaine. Des preuves historiques permettent d'affirmer l'existence du 23ème instructeur, Parsva (- 877 - -777). De même, les historiens acceptent celle du 22ème , Nemi, que la tradition considère comme cousin de Krishna. À l'âge de 30 ans, devient un sadhana (ascète), abandonne tout vêtement, jugeant que le détachement du monde exige la pratique de la nudité (bodiya pratiquée par les Digambara et certains Sâdhus) et se livre pendant 12 ans à la méditation. L'emblème du jaïnisme est une main symbolisant le réconfort moral et la compassion, dans laquelle est inscrit ahimsa c'est-à-dire non-violence. La phrase en sanskrit sous la main signifie : " Toutes les vies sont interdépendantes et donc se doivent un mutuel respect, une mutuelle assistance". ../..
  • 29. Mahāvīra Les 4 principes du jaïnisme sont les suivants : - L’identité de l’homme est à la fois matérielle et spirituelle, - L'homme n'est pas parfait, - L'homme est capable de vaincre sa nature matérielle, - L'homme est seul responsable de son avenir. Les 5 vœux principaux (mahavratas) sont exposés à travers un dialogue entre Mahavira et l'un de ses disciples : - Ne pas exercer de violence sur les êtres vivants, - Ne pas faire de tort par la parole, - Ne pas voler, - Fidélité sexuelle (couples) ou chasteté (moines), - Ne pas s'attacher aux biens matériels. . Les 4 vertus du jaïnisme sont : - le bienveillance pour tous les êtres vivants, - la joie de voir des êtres plus avancés que soi sur la voie de la libération, - la compassion envers les personnes et créatures malheureuses, - l’indifférence envers ceux qui se conduisent mal. ../.. Photos : - L’hôpital pour oiseaux à Delhi . - Élevage industriel de poulets en France
  • 30. Mahāvīra Pour les occidentaux, jaïnisme et bouddhisme semblent très proches par la réincarnation et le karma. Toutefois, au-delà des nombreuses différences, notam- ment dans les détails de la vie religieuse, le jaïnisme ne vénère pas de Dieu et considère que le monde existe depuis toujours, l'hindouisme considère que l'univers a été crée et vénère les différentes formes d'un seul Dieu, créateur. Le jaïnisme est la seule grande religion à avoir toujours prescrit le strict végétarisme et la non-violence absolue envers tous les animaux. Outre les 5 vœux du laïc, les vertus de base du jaïn s'incarnent dans l'abstention de consommer la viande, le vin et le miel. L’incitation jaïna à la non-violence attire l’attention sur - les supports de la violence (action physique, parole, pensée), - les processus engageant la violence (préparatifs, planification), - les modalités de la violence (directe, incitation, approbation), - la motivation de l’action violente (colère, avidité, manipulation). Photos : - À la différence des végaliens, les végétariens mangent les produits issus des animaux (beurre, œufs, fromage, miel, etc.) et s’en vêtissent (laine, cuir). - Femmes jaïns portant un voile sur la bouche et sur le nez pour ne pas avaler de moustiques. Les Occidentaux, s’étonnant de cette pratique, voire la décriant, oublient l’essentiel, à savoir les vœux et les vertus du jaïnisme
  • 31. Pythagore ( v. 580 ?, v. - 495), né sur l’île de Samos ? Philosophe grec, philosophe et mathématicien, réformateur religieux, penseur de la science politique. Se forme au cours de voyages : Italie, Phénicie (Syrie), Égypte, Perse, Crète, Thrace (Balkans). Revenu à Samos, en repart pour fuir le tyran Policrates. S’installe à Crotone, dans le sud de l’Italie, fonde des communautés - proches d’un ordre franc-maçon, dirait-on aujourd’hui - à vocation philosophique, scientifique, politique, religieuse, initiatique, ascétique. Affirme que la Terre est une sphère et non un disque plat, que la pensée naît dans le cerveau et non dans le cœur, invente les mots et concepts de ‟philosophie” et de ‟mathématiques”, la table de multipli- cation, découvre les nombres irrationnels, démontre des théorèmes en géométrie, défend la beauté tout autant que la logique des nombres. ../..
  • 32. La gamme de Pythagore Affirme que « tout est nombre » : pyramides, arithmétique, géométrie, intervalles de musique, nature, cosmos. La structure de l’octave* va servir de structure littéraire dans l’écriture biblique. Végétarien, pense que l’âme est immortelle et se réincarne après la mort. A influencé toutes les époques et toutes les cultures d'Occident et d'Orient, toutes les disciplines : mathématiques, musique, philosophie, astronomie. * réunion de la proportion d’égalité et de la proportion du simple au double, utilisée dans le Timée de Platon pour caractériser « l’âme » qui lie le monde intelligible (Dieu) et le monde sensible (‘homme). Au temple de Jérusalem, cette double proportion devient le signe de l’Écriture sacrée. Cette équation lie le Pentateuque et les livres historiques, dont l’ordre est immuable, et dans le Nouveau Testament les 4 évangiles dans l’ordre Mt, Jn, Lc, Mc. C’est en visitant une forge que, selon la légende (rapportée par Boèce), Pythagore découvrit le rapport stable entre les deux toniques (1, 2 : do) et deux notes intermédiaires divisant l’octave en quarte + quinte (4/3 : fa) et quinte + quarte (3/2 : sol) Christian Amphoux
  • 33. Épiménide de Knossos Sage, poète, philosophe et chaman, originaire de Cnossos ou plus probablement de Phaestos, en Crète centrale. Actif vers 556 av. J.-C. selon Platon, vers 595 selon Aristote. On lui attribue la fameuse affirmation : "Tous les Crétois sont des menteurs" dont les logiciens antiques ont fait le paradoxe par excellence. Son corps a été trouvé couvert de tatouages - pratique inconnue en Grèce antique sauf pour le marquage des esclaves - ce qui le rattache à la tradition thrace du chamanisme. Pour lui, l'homme ne doit pas rechercher l'ataraxie, l'absence de passion, sinon ce serait un mortel repos. La colère est bonne, car elle est un puissant ressort de la nature pour repousser sa propre destruc- tion. Enseigne toutefois à prévenir l'excès. « Ceux qui t'ont construit un tombeau, être saint et noble, sont les Crétois menteurs, méchants et bêtes, ventres paresseux. Car loin d'être mort, à jamais tu vis et tu subsistes. Car c'est en toi que nous avons la vie, le mouvement et l'être. » D’après les traducteurs de la Bible de Jérusalem, cette phrase a inspiré le discours de Paul à Athènes (Ac, 17, 28) : « C’est en lui qu’il nous est donné de nous mouvoir, de vivre et d’exister. » Photo du bas : fresques de Knossos
  • 34. Héraclite (v. - 576, v. - 480), philosophe grec, né à Éphèse. Vie peu connue, famille riche et puissante, prend parti dans les luttes politiques qui déchirent sa cité. Ne voit partout que multiplicité et changement : sommeil/veille, jour/nuit, été/hiver, joie/détresse, santé/ maladie, paix/guerre, vie/mort. Rien dans le monde entier ne demeure un seul instant identique à soi- même : tout passe, tout change, tout meurt à chaque moment, mais tout s’achève dans l’harmonie. Philosophe de l’éternel devenir où les contraires s’opposent et s’unissent tout à tour et dont le principe premier est le feu divin, principe de transformation incessante des choses. . Philosophe du Logos qui parle et du chiffre scellé, manifeste un grand respect pour les croyances religieuses populaires. Affirmant l’unité dynamique des contraires, est souvent considéré comme le père de la pensée dialectique. Accablé d'infirmités précoces, se laisse mourir de faim. « Pour ceux qui entrent dans les mêmes fleuves, autres et toujours autres sont les eaux qui s'écoulent . » . « Rien n’est permanent, sauf le changement. Seul le changement est éternel.» . . « À tout homme il est accordé de se connaître soi-même et de faire preuve de sagesse. »
  • 35. Lao Tseu ou Lao Zi ("le vieux maître"), (v. - 571, v. - 531) philosophe chinois (considéré par certains comme une personnalité symbolique), contemporain de Confucius. La légende lui prête une conception extraordinaire, d’autres affirment qu’il s’est réincarné. Serait né dans le pays de Chu du royaume des Zhou. Sa doctrine, le taoïsme, est condensée dans un ouvrage de 5 000 caractères, le Livre de la Voie et de la Vertu ( ou Tao Te King). Il aurait rédigé cette œuvre au cours d’un long voyage vers l’ouest , à dos de buffle, qui marque le dernier épisode connu de sa vie. Selon certaines sources, il aurait fini par vivre en ermite avec sa femme. « Je traite avec bonté ceux qui ont la bonté. Je traite avec bonté ceux qui sont sans bonté. Et ainsi gagne la bonté. » « La bonté en parole amène la confiance. La bonté en pensée amène la profondeur. La bonté en donnant amène l'amour. » « La graine se souvient de l’arbre qu’elle sera.» ../..
  • 36. Lao Tseu et le Tao « Le Tao que l'on peut nommer n'est pas le Tao. » Lao Tseu. Le Tao (image du haut), mot de langue courante qui signifie "route, voie, chemin" mais aussi "dire, expliquer, ordre, règle, doctrine", est la "Mère du monde", le principe qui engendre tout ce qui existe, la force fondamentale qui coule en toutes choses de l’univers. C'est l’essence même de la réalité, par nature ineffable et indescriptible. Il est représenté par le taìjítú, symbole représentant l’unité au-delà de la dualité yin-yang (image du bas). Jour-nuit, masculin-féminin, chaud-froid, etc, se nourrissent l'un l'autre et sont des polarités complémentaires d'une même énergie. Le perpétuel mouvement entre ces polarités est à l'origine de la prin- cipale caractéristique du monde matériel : l'impermanence. Comme les autres philosophies orientales, le Tao est largement inspiré par l'observation et la contemplation de la nature. Il est orienté par la pratique de la transformations des émo- tions négatives en émotions positives, ce qui doit être vécu intérieu- rement. La pratique a comme résultat un état d'être : le pardon et la compassion.
  • 37. K’ong Fou Tseu ou Kongfuzi, (nom latinisé en Confucius par les missionnaires du 16ème siècle). Philosophe chinois (- 552, - 479 avant J.-C.), contemporain du Bouddha, de Nabuchodonosor et de Pythagore. Homme de grande érudition et de caractère, profondément respectueux des idéaux de la tradition. Fonctionnaire, maître d’école, gouverneur de la ville puis intendant des travaux publics de la principauté de Zongdhu. Victime d'une conspiration suscitée par ses résultats, exilé, erre pendant 14 ans, puis rentre au pays natal. Instaure une morale sociale axée sur la vertu d’humanité, l’équité et le respect des rites cultuels. Enseigne que la nature humaine est sans cesse perfectible. Attache une grande valeur au pouvoir de l’exemple, soutient que les gouvernants doivent mener une vie exem-plaire. Veut appliquer la morale à la vie politique. Les 5 vertus majeures sont pour lui : la courtoisie, la magnanimité, la bonne foi, la diligence et la bonté. Son enseignement a donné naissance au confucianisme, doctrine politique et sociale érigée en religion d'État dès la dynastie Han et qui ne fut officiellement bannie qu'au début du 20ème siècle. « Entre les 4 mers, tous les hommes sont frères. » Confucius «Le maître-mot de Confucius est “apprendre”.» Anne Cheng siècle,
  • 38. Le troisième Isaïe Nom donné aux hommes qui ont clamé ce qu’on appelle abusi- vement la "parole de Dieu" après l’exil du peuple israélite à Babylone, de 538 à 520 avant notre ère, et dont les écrits se trouvent groupés dans les chapitres 56 à 66 du livre d’Isaïe. « Vous tyrannisez ceux qui peinent pour vous, querellez, chicanez, brutalisez. Est-ce là le moyen que votre voix m’atteigne (…), le jeûne qui me plait ? Courber la tête comme un jonc, coucher sur le sac et la cendre, serait-ce là pour vous un jour de jeûne ? (…) Le jeûne qui me plaît est d’un autre tour : dénoue plutôt les liens injustes, renvoie libres les opprimés, saisis les jougs et brise les. (…) Vois-tu un démuni ? Partage avec lui ton repas. Un pauvre sans abri ? Ramène le chez-toi. Un homme dévêtu ? Donne-lui ton manteau. (…) Alors, ta lumière illuminera comme l’aurore. (…) » « Si tu bannis de ton pays le doigt accusateur, la parole de fraude, l’exploitation de tes frères, si tu prends de ton bien pour l’affamé et assouvis l’âme de l’opprimé, l’obscurité en toi sera lumière. » « Les grands prophètes ont la conviction profonde d'être les interprètes de Dieu, et ce Dieu tend à devenir, à travers eux, le Dieu juste de toute l'humanité ; cette universalisation est, de fait, un grand tournant dans l'histoire des religions. » Adolphe Lods Photo : Isaïe (église de Souillac). - Adolphe Lods (1867-1948), pasteur luthérien, orientaliste, professeur de langue et de littérature hébraïque à la Sorbonne et directeur d'études à l'École Pratique des Hautes Études
  • 39. Michée ou Mycahyaou (en hébreu, "Qui est semblable Yahweh"), ou Mika, prophète hébreu originaire de Morescheth, au 8ème siècle avant notre ère, sous les règnes de Jotham, Achaz et Ézéchias, tous 3 rois de Juda, proba- blement 15 ans après 3ème Isaïe. Dénonce la vénalité des grands, les prêtres riches, les puissants et les faux prophètes s'assurant pouvoir et privilèges. Rejette l’idolâtrie (superstition, magie, caractère fastueux mais vide du culte), l’exploitation des pauvres par les possédants, l'abus de l'aristocratie de Jérusalem contre la majorité des gens du pays, et l'instrumentalisation de la religion pour cacher les injustices sociales. « Mes paroles ne font-elles pas du bien à celui qui marche avec droiture ? » « Avec quoi me présenterais-je, Seigneur, quand je viens t’adorer ? Avec un holocauste ? Avec un veau d’un an ? Quel plaisir prendrais-tu aux béliers par milliers ? (…) Le Seigneur, lui, t’a fait savoir ce qui est bon, ce qu’il attend de toi. Rien d’autre que pratiquer la justice, aimer loyalement et marcher humblement avec lui. » Image : Michée (icône russe du 15è siècle) James Darmesteter (1849-1894), érudit du judaïsme, du zoroastrisme et du mazdé- isme, professeur au ‘Collège de France’ et à ‘l'École Pratique des Hautes Études’, écrit : « L’esprit des prophètes est dans l’âme moderne. Il importe peu qu’ils aient parlé au nom d’un dieu et que l’âme moderne parle au nom de la pensée humaine, car leur dieu n’était que leur propre conscience… À force de croire en la justice, ils l’ont mise en marche dans l’histoire. »
  • 40. Job Personnage biblique présenté dans le Livre de Job, écrit proba- blement au 6ème ou 5ème siècle avant J.-C par plusieurs auteurs anony- mes et peut-être inspiré d’un texte sumérien. Ce texte poétique aborde le problème du mal dans le monde, et particulièrement la souffrance des innocents. Cet homme riche et puissant, suite à un "pari" effectué entre Dieu et Satan, tombe dans la plus complète déchéance (perte de tous ses biens, assassinat de ses serviteurs, mort de ses enfants, ulcère purulent) et se retrouve assis sur un tas de fumier. Il n’explique pas, mais il cons- tate que le mal existe. Nu il est sorti du sein de sa mère pour une vie de risque où la richesse n'est qu'un manteau ; nu il retournera au sein de la terre-mère, et tout le cours de son existence se déploie devant Dieu sous le signe de la nudité et de la faiblesse. Job, au-travers de sa révolte, accomplit un véritable acte de foi. Par la restauration du bonheur matériel de Job, l'auteur du poème symbolise cette harmonie retrouvée. « Je ne savais de toi que ce qu’ "on" m’en avait dit, mais maintenant c’est de mes yeux que je t’ai vu. » Images : - Léon Bonnat, Job (1880) en couverture du livre d’Ernest Renan - William Blake, Job réprimandé par ses amis
  • 41. Le Bouddha Siddharta Gautama (v. - 560 à v. - 480), dit le Bouddha (« l’éveillé »), prince népalais issu de la tribu guerrière des Sakya. À l’âge de 29 ans, s’enfuit de son palais pour se mettre en quête de la vérité, qu’il découvre après une vie errante et de dures ascèses. L’existence est la souffrance, et la souffrance a son origine dans le désir, qui ne peut jamais être comblé. La sagesse consiste donc à vaincre le désir par la méditation, la compassion, la distance par rapport au bonheur et aux malheurs, et à avoir conscience de l’impermanence. Selon le Dictionnaire de la sagesse orientale, la pensée juste (ou parfaite) implique une « volonté de renoncement, de tolérance et de bienveillance envers tous les êtres vivants », et le mode de vie juste signifie « la volonté d'éviter toute profession pouvant nuire à d'autres êtres vivants ». Le comportement juste se décline généralement en 5 préceptes, souvent exprimés de façon négative : 1 - s'efforcer de ne pas nuire aux êtres vivants ni prendre la vie (principe d'ahimsa), 2 - de ne pas prendre ce qui n'est pas donné, 3 - de ne pas avoir une conduite sexuelle incorrecte, 4 - de ne pas user de paroles fausses ou mensongères, 5 - de s'abstenir d'alcool et de tous les intoxicants. ../..
  • 42. Le Bouddha Bouddha abolit le système des castes au sein du sangha, la communauté spirituelle des pratiquants. Dans la pensée bouddhiste, « la manière dont nous voyons et comprenons la réalité pèse de tout son poids sur notre bien-être, et s’avère responsable, si elle est inadéquate, d’une part importante de nos souffrances et de celles du monde* » : Interdépendance : je dois ma vie et ma survie à une infinité d’autres humains et à la nature. Vacuité : ce que nous voyons est instable, mobile, subjectif, complexe, (un peu comme un arc-en-ciel dont l’existence dépend de ma position, de celle du soleil, des nuages, etc.) Impermanence : rien n’est destiné à durer, tout ce qui advient est affaire de composition et de décomposition, organisations et désorgani- sation, toutes transitoires et éphémères. Compassion : - amour bienveillant envers ceux qui nous sont chers, - méditation et émotions de compassion envers ceux qui souffrent, - réjouissance altruiste : se réjouir sincèrement du bonheur d’autrui, - équanimité : souhaiter le bien de tous les humains, y compris lointains, inconnus, antipathiques ou malveillants *. ../.. * d’après Christophe André, Je médite jour après jour.
  • 43. Le Bouddha Pour Albert Schweitzer (1875-1965), l'ahimsa dans le bouddhisme se distingue du jaïnisme en ce sens qu'il est fondé sur la pitié et non pas sur l'idée de se préserver à l'écart de la souillure du monde. Pour Carl-Albert Keller (1920-2008), théologien protestant et histo- rien des religions, l'ahimsa, dans la philosophie bouddhiste, « implique une attitude positive envers les êtres qui respirent », « s'appuie sur un sentiment d'amitié et de solidarité avec les êtres vivants », est « un comportement fait de bienveillance et de disponibilité ». Pour Cécile Becker, historienne des religions asiatiques, « en désignant le fait de s'abstenir de porter atteinte, de blesser ou de tuer tout être vivant comme un thème fondamental de son enseignement, le Bouddha s'oppose en fait implicitement à la violence sacrificielle et à l'ordre socioreligieux brahmanique, et énonce une nouvelle échelle de valeurs. » «Ne blesse pas autrui de la manière qui te blesserait.» «N’ayez qu’une seule passion : celle du bien des autres (…). Tous ceux qui sont malheureux le sont pour avoir cherché leur propre bonheur. Tous ceux qui sont heureux le sont pour avoir cherché le bonheur d’autrui. »
  • 44. Parménide (v. - 540, v. - 450), né à Élée (actuelle Italie du Sud), philosophe et poète grec présocratique, pythagoricien. Le premier à affirmer que la Terre est sphérique et située au centre de l'univers. Discute les distances des astres entre eux et par rapport à la Terre. Divise les choses en deux éléments : le feu et la terre. Le premier à proposer la théorie des zones climatiques qui divise le globe terrestre en 5 zones : 2 zones glacées, une zone torride et 2 zones tempérées. Père de l’ontologie, partie de la métaphysique* qui s’applique à l’être, indépendamment de ses déterminations particulières (par ex. : un cheval, une table), c’est-à-dire par rapport au néant. Leibniz résumera ainsi la question ontologique : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » Dans son poème De la nature, traite de la vérité, ou de l’unité et de l’éternité de l’être. Divise la connaissance en deux chemins de pensée nettement opposés, la vérité et l'opinion. On ne peut penser que ce qui est. Il faut donc croire et affirmer que l'être est, qu’il est non créé et intemporel, et que le non-être n'est rien. Réfuté par le sophiste Gorgias de Leontium (v. - 480, v. - 375), élève d’Empédocle d’Agrigente (- 490, - 435) * Métaphysique : recherche ayant pour objet la connaissance des causes de l’univers et des principes premiers de la connaissance.
  • 45. Eschyle Aiskhúlos (v. - 525, - 456), le plus ancien des trois grands tragiques grecs. Participe à la naissance du genre tragique grâce à certaines innovations, comme le nombre d'acteurs qu'il porte à deux. Auteur d'environ 110 pièces dont 7 seulement nous ont été transmises. S'il ne développe pas la psychologie des personnages, ses choix lui permettent de mettre en valeur ses conceptions puissantes sur l'équilibre de la cité, le dégoût de la démesure (hybris) qui met en danger cet ordre, et le poids de la décision des dieux dans la conduite des affaires humaines. « Il (Zeus) a ouvert aux hommes les voies de la prudence, en leur donnant pour loi : souffrir pour comprendre.» C'est le "pour" qui est important. En elle même la souffrance n'a pas de valeur. Il ne saurait être question de la cultiver pour elle-même. Elle ne vaut que par ce qu'elle engendre. Parfois le pire, chez la personne qui se venge, parfois le bien ou la sagesse, et très souvent rien du tout. « Il ne s’agit plus seulement de s’instruire par l’épreuve, mais davantage de devenir plus forts à partir de ce qui nous rend vulnérables, plus vivants à partir de ce qui nous blesse à mort. » Nathalie Sarthou-Lajus
  • 46. Anaxagore (v. - 500,- 428, dit "de Clazomènes" en Ionie; en grec, "chef de l'assemblée"), philosophe grec. Aurait donné des cours à Athènes pendant près d'une trentaine d'années, à partir de - 450. Disciple d'Anaximène (v. - 585 - v. - 525), introduit le concept de noûs*, qui équivaut à l’intelligence organisatrice et directrice du monde. Le cosmos est formé de substances diverses qui n‘ont ni naissance ni fin, mais s'agencent seulement par combinaisons et séparations. Enseigne que la Lune reflète la lumière du Soleil. Ses adversaires lui reprochent sa théorie cosmique : là où le regard théologique voit des dieux dans les astres, lui ne les considère que comme des masses incandescentes. Condamné à mort vers 437 lors d’un procès pour impiété, mais échappe à la sentence grâce à son ami Périclès, et s'exile à Lampsaque, en Asie mineure. Selon Diogène Laërce, est le premier auteur à publier un livre illustré avec des dessins ou diagrammes. « Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau. » * La noosphère, selon la pensée de Vladimir Vernadsky et de Pierre Teilhard de Chardin, désigne la « sphère de la pensée humaine ».
  • 47. Pindare (- 518, - 438), poète lyrique grec. Profondément attaché à la religion traditionnelle et à l'antique aristocratie dorienne qui prédomine à Thèbes. Considéré dès l'Antiquité comme le maître incontesté et inimitable du lyrisme choral grec, synthèse de l'art poétique, musical et chorégraphique. Assiste le plus souvent aux jeux panhelléniques, dirige généralement lui- même l'exécution de ses odes triomphales. Subit l'influence des courants mystiques de son temps, orphisme, pythagorisme, culte d’Éleusis. Sans être adepte d'aucune secte ni école philosophique, éprouve un indéniable attrait pour les questions eschatolo- giques* et mystiques, a connaissance d'une doctrine sur les destinées de l'âme, croit à la métempsychose ** « Ne crois pas, ma chère âme, à la vie éternelle, mais épuise le champ du possible ! » (Traduction de Paul Valéry) « Qu’est ce que l’homme ? Que n’est-il pas ? L’homme est le songe de l’ombre. » « Principe de grande vertu, Vérité, ô Souveraine, fais que jamais mon propos n'achoppe contre l'écueil du mensonge ! » « Deviens qui tu es, quand tu l'auras appris. »*** * discours sur la fin du monde ou la fin des temps, derniers événements de l’histoire du monde ou l’ultime destinée du genre humain. ** passage d'une âme dans un autre corps, qu'elle va animer. *** ou encore « Ne deviens pas la copie de quiconque tu admires, et n’attends pas d’une personne que tu aimes qu’elle devienne la copie de toi-même ! »
  • 48. Empédocle (Empedoklès, v. – 490, - v. - 430), philosophe, poète, ingénieur et médecin grec d’Agrigente (Sicile). Propose, le premier en Occident, une explication correcte des éclipses de Soleil. Décrit sa philosophie dans deux poèmes dont il ne nous reste que des fragments : De la nature et les Purifications. Influencé par Parménide et par Pythagore, fait partie des philoso- phes présocratiques, ces premiers penseurs qui ont tenté de découvrir l‘origine et les schéma du cosmos. À l’opposé du chaos (désordre), le mot grec cosmos a le triple sens de ‘univers’, de ‘sens’ et de ‘beauté’. Pose 2 principes qui règnent cycliquement sur l'univers, l'Amour et la Haine. Ces principes engendrent les 4 éléments dont sont composées toutes les choses matérielles : l'eau, la terre, le feu et l'éther (ou l'air). L'Amour est une force d'unification et de cohésion qui fait tendre les choses vers l'unité (par exemple les organismes vivants) ou même l'Un quand il s'agit du cosmos. La Haine est une force de division et de destruction qui fait tendre les choses vers le multiple. En accord avec sa théorie de la transmigration des âmes des êtres vivants, son enseignement condamne les sacrifices et les rituels sanglants. « Ne cesserez-vous jamais le douloureux carnage ? (…) Jeûnez de la méchanceté ! » Photo du haut : Empédocle (statues des philosophes au Parlement de Vienne - Autriche)
  • 49. Sophocle (- 495, - 406), dramaturge grec. Auteur de 123 pièces (dont une cen- taine de tragédies), mais dont seules 8 nous sont parvenues. Ses pièces mettent en scène des héros, souvent solitaires et même rejetés (Ajax, Antigone, Œdipe, Élecre) confrontés à des problèmes moraux desquels naît la situation tragique. Le climat de ses pièces ne baigne plus dans le ritualisme religieux des origines du théâtre, mais l'homme est "éphémère" et son sort dérisoire devant le temps qui passe. « Il n'est rien que n'efface le temps tout puissant. » « Il est bien des merveilles en ce monde, il n’en est pas de plus grande que l’homme. (…) Mais, ainsi maître d’un savoir dont les ingénieu- ses ressources dépassent toute espérance, il peut prendre ensuite la route du mal tout comme du bien. » Pour lui (comme pour Qohélet), la sagesse tragique ne consiste pas à se détacher des choses parce qu’elle sont changeantes et fragiles, mais à accorder plus de valeur et d’attention à ce qui est en devenir et va mourir. Elle suggère une voie de connaissance de soi et de transforma- tion : « C’est quand je ne suis plus rien que je deviens vraiment un homme. » La compassion est alors la passion dernière, portée par le chœur dans la tragédie.
  • 50. Mo Tseu ou Mozi, ou Möti, latinisé Micius (littéralement "maître Mo"), de son vrai nom Mo Di (v.- 479, v. - 392), philosophe chinois. Commence par adhérer au confucianisme avant de s'en démarquer et de créer sa propre école de pensée (moïsme) dont les thèses remettent en cause à la fois des enseignements confucianiste et taoïste. Voyant l'origine de la guerre et de tous les crimes dans l'hostilité avec laquelle l'homme considère ceux de ses semblables qui lui sont étrangers, prêche pour une vaste communauté humaine solidaire où chacun traiterait autrui, si éloigné qu'il soit, en prochain, par la pratique de l'amour universel. L’être humain doit convertir son intérêt individuel en intérêt général, chacun trouvant son compte dans le bien commun. « Voici certainement la maxime d’amour : ne pas faire aux autres ce que l’on ne veut pas qu’ils vous fassent. » « L’attaque des petits États par les grands, le pillage des faibles par les forts, l’oppression de la minorité par la majorité, la tromperie du simple par la ruse, le dédain du noble pour l’humble sont quelques unes des calamités du monde. (…) À quelle loi du Ciel obéirons-nous ? À celle d’aimer tous les hommes universellement. »
  • 51. Socrate (- 470, - 399 avant J.-C.), philosophe grec, un des premiers penseurs de la philosophie morale et politique. N’a laissé aucun écrit, mais sa pensée et réputation se sont transmises par des témoignages indirects (Platon, Xénophon, Aristo- phane et Aristote). Met au centre la connaissance, qui donne à l’homme une quête universelle. Citoyen exemplaire, s'oppose à la démagogie qui règne alors à Athènes. Dans des discussions avec les habitants de la ville, répond à des questions par des questions, pousse chacun, tel un accoucheur, à dépasser le niveau des vérités de sens commun et à partir en quête de la connaissance vraie. Insoumis au tyran Citrias, refuse de fuir la ville à la suite de son procès. Condamné à mort par le tribunal de l’Héliée, boit lui-même la ciguë qui le fait mourir. « Il ne faut donc pas répondre à l’injustice ni faire du mal à aucun homme, quoi qu’il nous ait fait » « S’il me fallait absolument commettre l’injustice ou la subir, je préférerais la subir plutôt que la commettre »
  • 52. Esdras (Ezra dans le judaïsme), prêtre et scribe juif issu de la tribu de Lévi et descendant d’Aaron. Pour Christian Amphoux, personnage probable- ment fictif du 2èmesiècle avant notre ère, représente l’école pharisienne et son ambition de s’installer au Temple. Pendant le règne du roi perse Artaxercès 1er (465-424 avant J-C), mène en 459 environ 5 000 exilés Judéens de Babylone à Jérusalem. Considéré avec Néhémie par plusieurs exégètes (Andreas Masius, Richard Simon, Richard Friedman, etc.) et même par Baruch Spinoza, comme l’auteur principal du Pentateuque et notamment du Lévitique. « J'en appelle aujourd'hui au ciel et à la terre : j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité ! » (Dt, 30, 19) ../..
  • 53. Esdras : sortir du marasme et regarder devant soi Affirme ainsi que Dieu laisse à ses créatures la liberté de choix. La malédiction est la conséquence d’un choix personnel* et non une punition divine. Cet appel à sortir du marasme et des négativités sera repris par Jésus de Nazareth : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! ». Selon Maurice Bellet, la « traversée de l’en-bas » consiste à vaincre en soi chaque jour la honte, la peur et la haine. * Pareillement, dans la Genèse, la femme de Loth se retourne pour voir derrière elle la destruction de Sodome et Gomorrhe et se trouve transformée en « statue de sel », alors que les filles de Loth regardent devant elles (enivrent leur père et couchent avec lui !) et sont à l’origine de deux grands peuples. Photo du bas : "La femme de Loth" sur le mont Sodome, Israël.
  • 54. Démocrite (- 460, - 370), philosophe et savant grec né à Abdère, en Thrace (Balkans). Voyage beaucoup pour s'instruire, passe 5 ans avec des géomètres égyptiens, élève de Leucippe (mêmes dates). Vit à Athènes où il ne semble pas avoir connu Socrate. Vers - 420, fonde son école dans sa ville natale. Développe une théorie matérialiste mécaniste, l'atomisme, qui considère la matière comme constituée d'atomes indivisibles et éternels. Le vide existe et permet le mouvement des atomes. Les figures que forme la matière se distinguent par leur taille, leur poids et leur vitesse. Les corps complexes sont formés de corps plus simples qui se désagrègent après la mort. L'âme est composée d'atomes particuliers, subtils, légers et chauds. La perception de la matière est provoquée par l'émission de substances très fines qui interagissent avec les sens de l'homme. . Son déterminisme total permet de concevoir le monde réel (matériel) sans création, ni référence à Dieu ou au surnaturel. Les dieux ne sont que la représentation de l'idée que les hommes s'en font, des rêves en quelque sorte. Prescrit à l’homme la modération dans ses désirs. Son carac- tère rieur est légendaire. La joie est la finalité de la morale, l'utilité est le critère du bien. Se prive de nourriture pour mettre fin à ses jours. « En réalité nous ne savons rien, car la vérité est au fond de l'abîme.»
  • 55. Thiruvalluvar Poète et philosophe tamoul, très probablement jaïniste, ayant vécu selon les auteurs entre le 4ème siècle avant J.-C et le début du 5ème siècle après J.-C. Originaire d'un village situé près de Chennai (Madras), auteur du Tirukkuṟaḷ. À travers un ensemble de 1 330 maximes, livre sa vision de l'art de vivre des Tamouls au début de notre ère. S'adresse à tout être humain sans distinction de castes, classes sociales ou convictions. Propose des recommandations pour une bonne conduite morale à travers des maximes sur la connaissance de soi, la spiritualité, la prospérité et le bien-être, la politique, l'économie, l'amour et les relations humaines. Définit trois objectifs majeurs de la vie : la sagesse (bienfait de la pluie, vie conjugale, enfants, hospitalité, équité, contrôle de soi, charité, non consommation de viande, gestion de la colère, non-violence), la fortune (politique, justice, richesse, éducation, agriculture) et l'amour. Une traduction anglaise du Tirukkural a été établie en 1886 par le missionnaire anglican George Uglow Pope (1820-1908), érudit en tamoul, en télougou et en sanskrit, fondateur de plusieurs écoles, enseignant le latin, l'anglais, l'hébreu, les mathématiques et la philosophie. Photo : statue de Thiruvalluvar d'une hauteur de 40,5 m, érigée en 2000 à Kânyâkumârî (Tamil Nadu).
  • 56. Platon (- 428, - 348) philosophe de la Grèce classique, contemporain de la démocratie athénienne, élève de Socrate, d’Euclide, et du pytha- goricien Philolaos, fondateur de l’Académie, première école de philo- sophie. Son œuvre, essentiellement sous forme de dialogues, se pré- sente comme une recherche rigoureuse de la vérité, sans limitation de domaine. Sa réflexion porte aussi bien sur la politique que sur la morale, l’esthétique ou la science. À partir de la conviction que le réel est connaissable, elle s’oriente dans deux directions complémentaires : d’une part, chercher la vérité à propos de réalités déterminées (par ex., la justice, le monde) ; d’autre part, chercher à justifier la possibilité même de connaître la vérité. Le dialogue entre interlocuteurs est un questionnement intérieur, mouvement délibéré et difficile vers la recherche de la vérité : connaître, prendre conscience de ce qui n’est pas, de ce qui est faux, de ce qui est. Deux moyens privilégiés sont la dialectique et la rémi- niscence. Dans la célèbre allégorie de la caverne, se détourner des opinions fausses est une démarche en 4 étapes.
  • 57. Diogène de Sinope ou le Cynique* (- v. 413, - v. 327), philosophe grec. Fils de banquier, a été faussaire avec son père. * de kunos, le chien Ascète mendiant, original, excentrique, grossier, provocateur, spirituel et libre. Surnommé "le Chien", car il agace tout le monde. Toujours pieds nus, habite dans un tonneau, n'ayant pour meubles qu'une besace, un bâton et une écuelle. Aurait même jeté son écuelle après avoir vu un jeune enfant boire dans le creux de sa main ? … Exigeant envers ses contemporains, se promène un jour en plein midi une lanterne à la main, répondant à ceux qui l'interrogent : νθρωπον ζητῶ (Antrhôpon’ dzètô), que l’on peut traduire "Je cherche un être humain digne de ce nom !". À Alexandre le Grand, de passage à Corinthe en - 336, qui lui demande ce qu'il peut faire pour lui, répond : « Te retirer de mon soleil ! » Demande l’aumône à une statue pour s’exercer à essuyer les échecs… Affirme que la seule chose que l'homme possède véritablement par lui-même, c'est les biens de l'âme. Dénonce la fausseté des hon- neurs, pouvoirs, richesses, savoirs, plaisirs même, toutes ces choses que les humains estiment tant. Se proclame, pour la première fois sans doute dans l'histoire, "citoyen du monde". Image du bas : Diogène et Alexandre. Huile sur toile de Nicolas-André Monsiau, 1818.
  • 58. Zacharie (vers - 520 - 480), en hébreu "L’Éternel se souvient", prophète de la Bible, proclamant les exigences de bonté, de justice et de vérité sous le règne de Darius 1er, roi de Perse, mais les auteurs anonymes désignés sous le nom de Deutéro-Zacharie écrivent au 4ème et au 3ème siècle avant J.-C. (Za, 9 et suivants). « Réjouis-toi, crie de joie, Jérusalem ! Crie de joie ! Voici ton roi. Il vient à toi, juste et victorieux, humble et monté sur un âne, un tout jeune ânon. D’Israël, il fera disparaître les chars de guerre, et de Jérusalem, les chevaux de combat. Il brisera l’arc des guerriers et annoncera la paix aux nations. » (Za, 9, 9-10) Jésus de Nazareth répond clairement à ce passage quand il entre dans Jérusalem sur un ânon avant de chasser du Temple les vendeurs et les animaux destinés au sacrifice et d’être condamné à mort. C’est un symbole d’opposition à Pilate qui, au même moment, entre à Jérusalem sur un cheval de guerre. À l’époque de Zacharie et plus encore du temps de Jésus, le cheval symbolise le pouvoir des puissants tandis que l’âne est l’animal du pauvre et du pacifique. L’oracle de Zacharie décrit un dirigeant d’un genre nouveau qui apporte à l’humanité l’exigence de non-violence et de simplicité. Photo : Zacharie par Claus Sluter (v.1355-1406). Puits de Moïse, Chartreuse de Champmol à Dijon (Bourgogne)
  • 59. Aristote (- 384, - 322), philosophe grec de l'Antiquité. Disciple de Platon à l'Académie, précepteur d’Alexandre le Grand. Un des penseurs les plus influents que le monde ait connus. Aborde presque tous les domaines de connaissance de son temps : biologie, physique, métaphysique, logique, poétique, politique, rhétorique et de façon ponctuelle l'économie. Chez lui, la philosophie est à la fois recherche du savoir pour lui-même, interroga- tion sur le monde et science des sciences. Considère la logique comme l'instrument qui permet de faire pro- gresser les sciences*. Son éthique est très marquée par les notions de mesure et de phronêsis (prudence ou sagacité) et par la philanthrôpia (compassion). Tout comme sa politique et son économie, elle est tournée vers la recherche du Bien. A une vison très inégalitaire du monde, mais considère la cité comme une entité naturelle qui ne peut perdurer sans justice et sans amitié. Nous invite à « penser avec les mains » : ce que je crois réellement, c’est ce que j’accomplis par mes pensées, mes paroles, mes écrits, mes actes. * La logique aristotélicienne repose sur deux concepts centraux : - le syllogisme, qui marquera fortement la scolastique (philosophie développée et enseignée au Moyen-Âge dans les universités), - les catégories (Qu'est-ce ? Pourquoi ? Où ? Quand ? Combien ? etc.).
  • 60. Tchouang Tseu ou Zhuang Zi ( "Maître Zhuang"), ou Zhuāng Zhōu (v. - 370 - v. - 286), penseur chinois. S’il a existé, aurait occupé une charge administrative subalterne et refusé un poste de Premier ministre offert par le roi Wei de Chu. Aurait terminé sa vie retiré du monde, menant une vie nomade et proche du peuple. On lui attribue la paternité d'un texte essentiel du taoïsme appelé de son nom, le Zhuangzi, ou encore le Classique véritable de Nanhua. Prône le non-agir qui, loin d'être synonyme d'indolence, de passivité ou de repli, définit l'action en tant qu'elle est conforme à la nature des choses et des êtres. L’être humain est ainsi invité à se débarrasser de son égocentrisme et de sa volonté de plier la réalité à ses fantasmes. Son non-agir est une démarche strictement individuelle, sans prétention politique. « Ceux qui savent ne parlent pas. Ceux qui parlent ne savent pas. Le sage enseigne par ses actes, non par ses paroles. » « Vouloir éviter l'inévitable, n'est-ce pas augmenter sa douleur ? » « Celui qui a pénétré le sens de la vie ne se donne plus de peine pour ce qui ne contribue pas à la vie. »
  • 61. Épicure ( - 342, - 270) philosophe grec. Fonde en - 306 à Athènes l’école philosophique ‘du Jardin’, recherche un bonheur et une sagesse dont le but est l'ataraxie, la paix de l'âme. Vie simple et frugale, végétarien. Aura pour disciple le latin Lucrèce (v. - 98 - v. - 55). En physique, soutient comme Démocrite (- 460, - 370) que tout ce qui existe est composé d'atomes indivisibles qui se meuvent dans le vide et se combinent pour former des agrégats de matière. L'âme est un de ces agrégats d'atomes, et non une entité spirituelle. S’intéresse à l’homme et non pas aux dieux. En logique, considère que la sensation est à l'origine de toute connaissance. En éthique, affirme que le souverain bien est le plaisir, défini comme absence de douleur : dissiper les terreurs de l'esprit, se suffire à soi-même et se contenter de peu. . Définit 4 voies vers le bonheur : 1 - Ne pas craindre les dieux; 2 - Ne pas craindre la mort; 3 - On peut atteindre le bonheur; 4 - Le mal est supportable. ../..
  • 62. Épicure Classe les désirs en trois catégories : 1 - Les désirs naturels et nécessaires (par ex., boire quand on a soif. on peut boire jusqu'à ne plus avoir soif). Ces plaisirs sont bons : on peut s’y adonner. 2 - Les désirs naturels, mais non nécessaires, comme ceux qui diversifient les plaisirs, mais n’éliminent pas les douleurs (par ex. : boire et manger avec raffinement, au-delà du besoin). En user avec modération 3 - Les désirs ni naturels, ni nécessaires : ceux qui naissent des jugements illusoires, le désir de richesses et d'honneurs. Les éviter, car ils sont générateurs de troubles. Les consolations apportées par Épicure sont chantées par Lucrèce comme des dons divins, propres à régénérer l'homme tourmenté par les passions, les superstitions, la peur des dieux, etc. C'est pourquoi certains philosophes, tels que Nietzsche, n'hésitent pas à voir en cette pensée une sorte de christianisme païen. Photos : désir naturel nécessaire, désir naturel non nécessaire, désir nocif de puissance (Louis XIV)
  • 63. Tobie ("Dieu est bon" en hébreu), personnage principal du Livre de Tobie, fiction littéraire de la Bible hébraïque composée v. - 300. Avec le fiel d'un poisson, comme le lui indique l‘archange Raphaël qui l'accom- pagne, guérit à Ninive la cécité de son père Tobit. Auparavant, il récupère, en Médie, de l’argent déposé chez Gabaël en lui présentant une moitié d’un reçu qui avait été coupé en deux, un morceau pour le déposant, un autre pour le dépositaire. Le symbole, du grec sun (ensemble) - ballein (jeter, mettre avec dynamisme), qui signifie "remettre ensemble", c’est le signe formé par les deux moitiés d’un objet brisé quand on les rapproche, c’est ce qui permet l’accession à une nouvelle unité. « Le symbole est une dimension de la réalité. Dans un même mouvement de connaissance et d’amour, il rallie l’humain, le cosmique et le divin. Nous ne nous connaissons nous-mêmes, nous connais- sons les autres et nous ne pouvons percevoir l’existence d’autres univers que par la perception des symboles qui nous relient les uns aux autres.» Jean Chevalier ../..
  • 64. Tobie - Symbole, division, idole Au contraire, dia-ballein signifie diviser, et a donné le mot diable (le diviseur). L’idole (du grec eidon : voir), l’image idolâtre que l’homme fabrique, est le résultat des projections fausses qu’il met sur l’autre ou sur les choses en les déformant, en les pervertissant. L’idole est une fausse image que l’homme fabrique quand il est coupé de son être profond. - Ainsi, Dieu, que des hommes inspirés ressentent comme un "Père" ou comme "le Miséricordieux", devient un Zeus, un Jupiter, un Pantocrator tout-puissant, un juge, un espion, un contrôleur. - Ainsi, le temps, qui nous est donné comme un cadeau pour accomplir notre vie et notre potentiel (kairos), devient une idole qui nous dévore (chronos). - Ainsi, l’argent, qui devrait être un serviteur, devient un maître. - Ainsi, la machine et la technologie, qui devraient être au service de l’homme, deviennent les instruments de son asservissement. - Ainsi, la politique, qui devrait servir le bien commun, devient un moyen de pouvoir et de notoriété. Quand une personne ne peut se libérer de ses idoles, l’inter- vention d’un autre est nécessaire pour lui faire accepter ses ombres et ses lumières, pour qu’elle puisse rétablir une relation vraie avec son être et avec son entourage.
  • 65. Ashoka (v. 304, -232 avant J.-C.), troisième empereur de la dynastie indienne des Maurya, parvenu au pouvoir en faisant assassiner ses frères et 99 membres de sa famille. Devient maître d’un immense empire. Subit une profonde crise morale à cause des horreurs de la guerre du Kalinga (- 261). Retourné par son neveu bouddhiste Nigrodha, se convertit lors de son voyage à Bodhgaya, fait une retraite d’un an dans un monastère. Son comportement et sa politique s’inspirent ensuite par la non- violence et la compassion : la guerre est abolie, les fonctionnaires ont pour mission de garantir la justice et la tolérance religieuse. Met un terme aux sacrifices d’animaux dans les rituels brahmaniques. Premier souverain au monde à faire de la non-violence un principe d’organisation politique. À sa mort, après 37 ans de règne, ses enfants se partagent son empire et les règles habituelles de la vie sociale et politique reprennent leurs droits… « Aux fonctionnaires : gagnons donc l’affection des hommes.» « Le roi ami des dieux au regard amical veut que toutes les écoles de pensée et religions puissent résider partout. Car toutes veulent la maîtrise des sens et la pureté de l’âme.» «Le but suprême est de faire le bien du monde entier.» Image : chapiteau aux lions surmontant les colonnes dressées dans l’empire, devenu l’emblème de la République de l’Union Indienne
  • 66. Qohélet L’Écclésiaste ou Qohélet* (en hébreu, "l’homme de l’assemblée"), est un texte écrit par un philosophe juif anonyme vers - 200. Son pessi- misme désabusé et son insolence envers l’ordre établi sont probablement influencés par l’épicurisme et le stoïcisme grecs. La vie de l’homme est soumise aux caprices du temps et des circonstances qu’il ne peut maîtriser. Elle est triste, vide, monotone, injuste et violente, lourde de souffrances et chargée de malheurs. La sagesse, le meilleur des dons, est incapable d’apporter apaisement, repos, et de permettre de découvrir Dieu. Tout est vain, c'est-à-dire futile, insignifiant, éphémère et absurde. Le sage et l’insensé connaissent le même sort dans la mort et l’oubli. ../.. * NB : L’auteur de l’Ecclésiaste est à distinguer de Ben Sira, ou Ieshoua Ben Sirac, Ben Sirakh, Ben Sirach, Sirac le Sage, auteur du Siracide, appelé aussi l’Écclésiastique ou La Sagesse de Ben Sira, un des livres sapientiaux de l'Ancien Testament écrit en hébreu. Ben Sira est un notable de Jérusalem, pénétré de l’amour de la loi, du temple, du sacerdoce, du culte, vers 200 avant J.-C.
  • 67. L’Ecclésiaste ou Qohélet La menace constante de la mort, l'injustice régnant parmi les hommes, l'impossibilité de connaître les plans de Dieu pour le monde rendent le destin de l'homme fragile et insaisissable. La vie est le seul champ d'activité et de réalisations pour l’être humain avant qu'il ne disparaisse du monde. Respecter les commandements de Dieu, c'est là tout son devoir. « Il est tout à l’honneur de la tradition biblique qu’un message d’un tel réalisme ait été retenu. Mais sans doute est-ce parce que, derrière les interrogations sur le sens de la vie, transparaît une foi malgré tout invin- cible, dans la transcendance et la toute-puissance divine. » (Commentaire dans la Bible de Stanislas Lyonnet, présentée par Pierre de Beaumont) « Il y a un moment pour tout, et sous le ciel, chaque chose a son temps : un temps pour enfanter et un temps pour mourir, un temps pour mettre en terre, un autre pour récolter, (…) un temps pour le malheur, un autre pour danser, un temps pour se déchirer et un temps pour recoudre. » « Vanités des vanités, tout est vanité. » « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. » « Tout va dans un même lieu, tout a été fait de la poussière et retournera en poussière. » « Tel juste périt malgré sa justice et tel méchant prolonge ses jours malgré sa malice. » ../..
  • 68. Qohélet ou l’Ecclésiaste « Seule l’ironie indirecte peut, au travers de son cheminement tortueux, conduire l’homme non pas dans la vérité, mais peut-être au début de son chemin, à l’orée de son bois, à l’embranchement et au carrefour de la décision. » « Surtout ne rien exagérer, ni trop pieux ou sage, ni pas assez : car l’excès en tout est un défaut. (…) D’un côté tout relativiser, oui, tout est relatif. Tout doit être mesuré à l’absolu, et par conséquent devient rien; ou seulement à la limite impérative de la mort, et que reste-t-il ? Et cependant ce relatif (bonheur, travail, justice…), il faut le faire et le vivre, en tant que relatif, c’est dire dans la libération du souci accablant de l’inquiétude et de la hantise du lendemain. Voilà le bien. » « Après tout il y a un temps à vivre, un temps complexe et fait de toute chose. Des choses relatives, mais ce sont les seules à notre hauteur. » « Quohélet ne préconise nullement le suicide. » « Tu n’as pas à casser une gangue pour trouver un trésor, tu as à apporter ton trésor pour que ce temps soit riche. Il est disponible, et c’est toi qui lui attribues un sens. » « Il manque à Quohélet ce qui sera si fortement affirmé par Paul : l’espérance ». Jacques Ellul
  • 69. Térence Publius Terentius Afer (v. -190, v. -159), poète comique latin, Esclave vraisemblablement d'origine berbère, né à Carthage. Affranchi par son maître Terentius Lucanus, fréquente les cercles cultivés des Scipion et des Aemilii. Fait représenter 6 comédies de 166 à 160. Ses pièces présentent un théâtre de la mesure et de l'équilibre où l'analyse psychologique et le problème moral l'emportent sur les péri- péties dramatiques et les rebondissements comiques. Peu goûté du public romain qui préfère les effets purement comi- ques et la fantaisie de Plaute, devient un modèle pour les classiques français, notamment pour Molière. « Il n'y a rien de si avantageux à l'homme que la complaisance et la douceur. » « La chance seconde le courage. » « Plus on est puissant, riche, heureux, bien né, plus on doit se porter à pratiquer la justice, si l'on veut passer pour homme de bien. » ../..
  • 70. Térence « Qui ne peut comme il veut, doit vouloir comme il peut.»* « Les actes font croire aux paroles.» « Summa jus, summa injuria. La justice rigoureuse (ou l’appli- cation aveugle des lois) est souvent une grande injustice. » (image du haut) « Un sage capitaine doit tenter toutes les voies de pacification avant de recourir aux armes. » « Homo sum : humani nihil a me alienum puto. Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger .»** * Le contraire de Hans im Schnokeloch, ( "Jean du trou aux moustiques") dans la célèbre chanson populaire alsacienne : « Et ce qu'il a, il n'en veut pas, Et ce qu'il veut, il ne l'a pas » ** Cette phrase, reprise dès l’Antiquité par Cicéron, Sénèque et les Stoïciens, puis par Montaigne à la Renaissance, est considérée comme la devise de l’humanisme antique.
  • 71. Les 7 frères Maccabées Attaché au culte hellénique, l'empereur syrien Antiochus IV Épiphane introduit ce culte dans Jérusalem et toute la Judée entre -175 et - 140, profane le Temple en y érigeant la statue du dieu olympien Zeus et oblige les Juifs à l'adorer. En 166 avant J.-C, après leur précepteur Eléazar, âgé de plus de 90 ans, les sept frères Maccabées, Abim, Antoine, Gourias, Eléazar, Eusébon, Alim et Marcel, sont horriblement torturés et mis à mort pour avoir refusé de manger du porc et d’adorer un autre Dieu que celui auquel ils croient. Leur mère Salomé meurt la dernière après avoir dit à ses enfants : « Le Créateur du monde, qui a formé l'homme à sa naissance et qui préside à l'origine de toutes choses, vous rendra dans sa miséricorde et l'esprit et la vie, parce que maintenant vous vous méprisez vous-mêmes pour l'amour de sa loi. » Ces événements sont relatés dans le 2ème livre des Maccabées. Le surnom de "Maccabée" est celui de Judas, troisième fils du prêtre Mattathias. L’insistance de ce deuxième livre sur le martyre et sur la résurrection des morts est probablement à l'origine du sens dérivé de "cadavre" qu’a pris le mot macchabée. Photo : Les Maccabées sur la Menorah de la Knesset par Benno Elkan.
  • 72. Cicéron Marcus Tullius Cicero (-106, + 43), homme politique romain, avocat et écrivain latin. Formation à la rhétorique et au droit, avocat, édile, questeur en Sicile puis consul, grand orateur. Fait exécuter les partisans Catilina sans jugement public, exilé pour cela en Thessalie. Critique Crassus, Pompée et César, généraux et chefs de parti qui provoquent une guerre civile en se disputant le pouvoir, et leurs ambitions quasi monarchiques, contraires au vieil idéal républicain qu’il défend. Adapte en latin des théories philosophiques grecques. Après sa retraite politique, met en avant trois domaines : la philosophie morale, la logique et la philosophie naturelle. Ses œuvres maîtresses portent sur les fins de l'action humaine (De finibus), sur les devoirs (De officiis), sur le bonheur et l'immortalité de l'âme (Tusculanae disputationes) et sur l’amitié (De amicitia) Assassiné sur ordre de Marc-Antoine, comme une centaine d’au- tres orateurs. Sa tête et ses mains, avec lesquelles il avait écrit Les Philippiques, sont coupées et exposées à la tribune des Rostres. « C'est dans l'adversité que se révèlent les vrais amis. » « La vie des morts consiste à survivre dans l'esprit des vivants. » « Qui n'empêche pas le mal le favorise. »
  • 73. Lucrèce Titus Lucretius Carus (v. -98 - v. - 55), poète philosophe latin. Premier auteur à exposer la doctrine épicurienne en langue latine. Auteur d'un seul ouvrage en 6 parties, le De rerum natura (De la nature des choses), long poème passionné qui décrit le monde selon les principes d'Épicure, appel constant à l'avènement de la lumière. Vit dans une époque troublée par les guerres civiles, les bannissements, la corruption, l’anarchie politique, le banditisme, d’où ses pages sombres sur la mort, le dégoût de la vie, la peste d’Athènes. Sa passion anti-religieuse s’en prend avec acharnement aux cultes et aux prêtres des religions romaines de son époque. Contre les positions des univers cléricaux antiques (romains, grecs, etc.), propose de se soustraire aux craintes religieuses, auxquelles il oppose une dimension rationnelle. Explique ainsi de façon matérielle les objets et le vivant, qui prennent forme via des combinaisons d'atomes. Comme Épicure, pense que l’univers ne se réduit pas à notre système solaire. Pressent la sélection naturelle. Unit à la science épicurienne, souvent difficile, la douceur et la dimension visionnaire de la poésie.
  • 74. Rabbi Hillel Mis au défi de résumer toute la Loi à une personne debout sur un pied avant qu’elle ne doive se remettre sur ses 2 pieds, formule cette phrase qui est la ‟règle d’or” des religions et spiritualités : « Ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse, ne le fais pas à tes semblables : voilà toute la loi, le reste est un simple commentaire.» « Ne juge pas ton prochain avant de te trouver à sa place. » Son petit-fils Gamaliel enseignera à Paul de Tarse et interviendra en faveur des apôtres de Jésus. * d’où l’expression "se chamailler" Hillel Hazaken (: l’Ancien, -70, +10), né à Babylone, d’abord bucheron puis docteur juif pharisien. À l'âge de 40 ans, s’installe en Israël. Passe de longues années à étudier, est pendant une vingtaine d’années président du Sanhédrin, chef spirituel du peuple juif. Vie exemplaire et vertueuse, caractérisée par la patience, la civilité et la compassion pour ses semblables, Juifs ou non, et le souci des plus pauvres. Interprète l'esprit de la Torah et des règles de la vie ordinaire de façon ouverte, renvoie les personnes à leur conscience. Opposé âprement au rabbi Shammaï*, son adjoint (et successeur), légaliste et rigoriste, pour qui une poule qui pond le jour du Shabbat ne respecte pas la Torah…
  • 75. Menahem l’Essénien Juif Tanna (sage), leader de la secte des Esséniens, vivant à l'épo- que du roi de Judée Hérode le Grand (- 37, - 4 av. J.-C.). Forme un zoug (paire) avec Hillel l'Ancien, et officie probablement au Av beit din (tribunal ou Sanhédrin). Selon Flavius Josèphe, aurait été en bons termes avec Hérode tout en critiquant les Romains. En se fondant sur certaines men- tions de la Mishna, plusieurs critiques estiment qu'il est devenu un de ses conseils ou de ses ministres. Dans certains des hymnes trouvés en 1947 parmi les manuscrits de la Mer Morte, se décrit lui-même comme siégeant sur un trône céleste entouré d’anges. Se voit lui-même comme le "serviteur souffrant" d’Isaïe 53 qui fait advenir une nouvelle ère, l’âge de la rédemption et du pardon dans lequel le péché et la culpabilité n’ont plus de place. Ces idées audacieuses conduisent à son rejet et à son excommunication par les sages pharisiens emmenés par Hillel. Tué à Jérusalem par les Romains en l’an 4 avant J.-C. c’est à dire deux ans après la naissance de Jésus. Son corps est laissé dans la rue pendant trois jours, afin que tous le voient, avant d’être enterré. Ses disciples croient qu’il est ressuscité après trois jours et qu’il est monté au ciel dans une nuée. Selon le chercheur et historien israélien Israël Knohl, Menahem constitue le chaînon manquant qui nous permet de comprendre comment le christianisme est issu du judaïsme.
  • 76. Philon d’Alexandrie Philo Judaeus (v. -13 - v. + 54), philosophe juif pétri de culture grecque, moraliste et exégète. Ambassadeur à Rome ( + 39 - + 41) auprès de Caligula pour défendre le droit de cité de la très importante communauté judéenne d’Alexandrie, victime d’un pogrom. Probablement mort avant d’avoir pu entendre parler de Jésus, mais son œuvre (57 traités) a survécu grâce aux apologistes chrétiens. Représentant le plus éminent de l'école philosophique juive d'Alexandrie qui interprète la Bible selon les catégories hellénistiques et jette un pont entre la révélation biblique et la philosophie grecque. Son éclectisme est une vision religieuse du monde, fidèle aux affirmations bibliques traditionnelles (grandeur du Dieu unique, Israël peuple "élu"), mais intègre des concepts philosophiques puisés aux diverses écoles grecques (sauf l’épicurisme), sans recherche de cohérence. La culture hellénistique illustre les données bibliques et en transforme souvent le sens. ../..
  • 77. Philon d’Alexandrie Étend la définition biblique du "prochain" aux étrangers, qu’il recommande d’aimer « non seulement comme des amis, comme des parents, mais comme soi-même. » Sa conception du Logos (le Verbe), "fils-premier né de Dieu", "médiateur universel", "instrument de la création", "ambassadeur", inspire le prologue de l’Évangile de Jean. Le Logos n’est pas Dieu, il est la révélation de Dieu à l’âme vertueuse, car il est aussi la parole. Son influence s’exerce sur des auteurs du Nouveau Testa- ment, sur plusieurs Pères de l’Église (Clément de Rome, évêque de Rome de 88 à 97, auteur d’une épitre aux Corinthiens), Clément d’Alexandrie (v. 150 - v. 220), Origène (v. 185-254), Grégoire de Nysse (v. 335- v. 394), et même sur l’exégèse occidentale (Ambroise de Milan, v. 333-397) et, à un degré moindre, sur la formation de l’idéal monastique. « Représentant l’union de la philosophie et de la foi, de la philosophie grecque qui ne fut qu’une philosophie et de la religion juive qui ne fut qu’une religion, véhiculant des idées qui sont devenues chrétiennes, Philon le Juif (qui ne s’est jamais converti) n’est pas loin, ô paradoxe, de mériter le titre de "premier des Pères de l’Église". » Michel Desforges
  • 78. Jean le Baptiste (v. -10 ? - v. + 29) prédicateur et prophète juif du temps de Jésus de Nazareth. Sa vie est racontée de façon différente dans les récits de l'historien juif Flavius Josèphe et dans les textes religieux des évangiles et du Coran. Fils d’Élisabeth et de Zacharie, mène une vie d’ascèse dans la steppe de Judée, près du fleuve Jourdain. Annonce que "le royaume des cieux" est tout proche. Homme à la parole libre, n’hésite pas à pointer les fautes des pécheurs et à les appeler à se purifier. Les foules viennent à lui pour être immergées ("baptisées" en grec) dans le fleuve Jourdain, d’où son surnom. Cette ablution sacrée est le signe d’un changement de vie intérieure. Mis à mort à Machéronte par Hérode Antipas. Selon Marc, dans un récit à l’historicité discutée, exécuté pour avoir critiqué le mariage d‘Hérode Antipas avec Hérodiade, l’épouse de son demi-frère. Le Coran parle aussi de Jean le Baptiste, sous le nom Yahya : il est le cousin de Jésus (Îsa dans le Coran). « Moi je vous baptise dans l'eau; mais celui qui vient après moi est plus grand que moi, et je ne suis pas digne de porter ses sandales. Lui, il vous baptisera dans l'Esprit et le feu. » Photo du bas : Salomé avec la tête du Baptiste, par Caravage
  • 79. Sénèque Lucius Annaeus Seneca, (- 2 ?, + 65) philosophe, dramaturge et homme d'État romain. Conseiller à la cour impériale sous Caligula, exilé à l'avènement de Claude puis rappelé comme précepteur de Néron, joue un rôle important de conseiller auprès de ce dernier avant d'être discrédité. Contraint à un suicide forcé, se donne la mort en s'ouvrant les veines sur l'ordre de Néron. Ses traités philosophiques comme De la colère, De la vie heureuse ou De la brièveté de la vie, et surtout ses Lettres à Lucilius exposent ses conceptions philosophiques stoïciennes. La métaphysique chez lui tient fort peu de place : les malheureux nous appellent, c'est de l'homme qu'il faut s'occuper ; c’est lui qu'il faut affermir, consoler, encourager. « Hâte-toi de bien vivre et songe que chaque jour est à lui seul une vie. » « Ce n'est pas parce que les choses nous paraissent difficiles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles nous paraissent difficiles ». « La philosophie (…) forme et forge l’âme, elle ordonne la vie, elle régit les actions, elle indique ce qu’on doit faire ou négliger, elle siège au gouvernail et dirige la course des hommes ballottés à travers les écueils. » Photo : Statue de Sénèque à Cordoue, sa ville natale ■