4. * Alexandro Gonzalez Inarritu en 1991 crée la
société Zeta Films, qui produit différents
types de programmes audiovisuels.. En
1995, il écrit pour Televisa une série de
moyens-métrages dont il réalise le premier
épisode, un thriller avec Miguel Bosé.
Lorsqu'Inarritu souhaite se lancer dans
l'écriture d'un scénario, sa rencontre
avec Guillermo Arriaga, qui sera ensuite un
de ses fidèles collaborateurs, se révèle
décisive. Après deux ans d'écriture, il
tourne son premier long-métrage, le
virtuose Amours chiennes, une peinture
réaliste et décapante de Mexico qui suit les
destins parallèles d'une dizaine de
personnages réunis par un accident de
voiture.
* En 2015, le réalisateur mexicain présente
son nouveau long métrage pour lequel il est
récompensé de l'Oscar du Meilleur
réalisateur : Birdman.
* Plus tard, en 2016, le cinéaste remporte à
nouveau la prestigieuse récompense du
Meilleur réalisateur aux Oscars avec The
Revenant, porté par un Leonardo
DiCaprio méconnaissable.
*
5.
6.
7. ENKI BILAL ROBIN CAMPILLO MAIMOUNA N'DIAYE ELLE FANNING
YORGOS LANTHIMOS
PAWEL PAWLIKOWSKI
KELLY
REICHARDT ALICE ROHRWACHER
9. FILMS EN COMPÉTITION
The Dead Don't Die de Jim Jarmusch (Etats-Unis) - Film d'ouverture
Les misérables de Ladj Ly (France)
Bacurau de Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles (Brésil)
Sorry we missed you de Ken Loach (Grande-Bretagne)
Atlantique de Mati Diop (Sénégal)
Little Joe de Jessica Hausner (Autriche)
Douleur et gloire de Pedro Almodovar (Espagne)
Il Traditore de Marco Bellochio (Italie)
The Wild Goose Lake de Diao Yinan (Chine)
Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma (France)
La Gomera de Corneliu Porumboiu (Roumanie)
A Hidden Life de Terence Malick (Etats-Unis)
Le jeune Ahmed de Jean-Pierre et Luc Dardenne (Belgique)
Once Upon A Time In Hollywood de Quentin Tarantino (Etats-Unis)
Roubaix, une lumière d'Arnaud Desplechin (France)
Mathias et Maxime de Xavier Dolan (Canada)
Parasite de Bong Joon Ho (Corée du Sud)
Frankie de Ira Sachs (Etats-Unis)
It must be heaven de Elia Suleiman (Palestine)
Mektoub My Love : Intermezzo de Abdellatif Kechiche (France)
Sybil de Justine Triet (France)
11. *Contre toute attente, le film
de zombies selon Jarmusch,
qui ouvre le Festival de
Cannes, s’avère sans
originalité. Dommage, le
casting (Bill Murray, Adam
Driver, Tilda Swinton, Chloë
Sevigny, Steve Buscemi...)
était appétissant !
Dans la sereine petite ville de Centerville, quelque chose
cloche. La lune est omniprésente dans le ciel, la lumière du
jour se manifeste à des horaires imprévisibles et les
animaux commencent à avoir des comportements
inhabituels. Personne ne sait vraiment pourquoi. Les
nouvelles sont effrayantes et les scientifiques sont inquiets.
Mais personne ne pouvait prévoir l’évènement le plus
étrange et dangereux qui allait s’abattre sur Centerville :
THE DEAD DON’T DIE – les morts sortent de leurs tombes et
s’attaquent sauvagement aux vivants pour s’en nourrir.
12. *
*
* Ladj Ly, membre du collectif
Kourtrajmé, réalise en 2016 Les
Misérables, sélectionné en compétition
au Festival du court métrage de
Clermont-Ferrand, douze ans après un
premier film sur les émeutes de 2005
en banlieue parisienne : 365 jours à
Clichy-Montfermeil.
* Son héros, Pento, flic sous pression,
intègre la brigade anticriminalité de
Seine-Saint-Denis et se retrouve témoin
d’une bavure dès son premier jour sur
ce terrain qu’il ne connaît pas. Une
interpellation musclée filmée avec un
drone… De cette fiction, sélectionnée
aux César, Ladj Ly a tiré, avec le même
casting – et notamment Damien
Bonnard dans le rôle de Pento – son
long métrage. Il sera probablement
tout aussi ardent.
13. *Bacurau est un village perdu
dans les immensités du Sertão
brésilien, au bout de nulle
part. Tellement que son nom
semble avoir disparu des
cartes du pays. Délaissés par
l’Etat, ses habitants y forment
une communauté énergique et
disparate, résistant vaille que
vaille à la pauvreté et aux
maladies galopantes, à
l’abrutissement du monde
moderne, à la cupidité de
politiciens qui sont à la solde
des Américains. Dans cette
ambiance de western, Kleber
Mendonça Filho et Juliano
Dornelles tissent une fable
d’anticipation ultra violente
qui brosse un portrait haut en
couleur et néanmoins très
sombre d’un pays en pleine
décomposition.
Dystopie brasilienne contre Bolsonaro
14. *Dans une banlieue
populaire de Dakar, les
ouvriers du chantier d’une
tour futuriste, sans salaire
depuis des mois, décident
de quitter le pays par
l’océan pour un avenir
meilleur. Parmi eux se
trouve Souleiman, l’amant
d’Ada, promise à un
autre. Quelques jours
après le départ des
garçons, un incendie
dévaste la fête de
mariage de la jeune
femme et de mystérieuses
fièvres s'emparent des
filles du quartier. Ada est
loin de se douter que
Souleiman est revenu.
Atlantique de Mati Diop (Sénégal)
15. *
*Ricky, Abby et leurs deux enfants vivent à Newcastle.
Leur famille est soudée et les parents travaillent dur.
Alors qu’Abby travaille avec dévouement pour des
personnes âgées à domicile, Ricky enchaîne les jobs
mal payés ; ils réalisent que jamais ils ne pourront
devenir indépendants ni propriétaires de leur maison.
C’est maintenant ou jamais ! Une réelle opportunité
semble leur être offerte par la révolution numérique :
Abby vend alors sa voiture pour que Ricky puisse
acheter une camionnette afin de devenir chauffeur-
livreur à son compte. Mais les dérives de ce nouveau
monde moderne auront des répercussions majeures sur
toute la famille…
16.
17. Ken Loach, dont l’investissement pour la cause sociale n’est plus à démontrer, dénonce les
pratiques en vigueur des employeurs. Les valeurs humaines s’effacent au profit de la marge des
entreprises, allant jusqu’au burn out, sinon au suicide. Le procès France Télécom en cours en
France en est une tragique illustration. Le réalisateur britannique double ce constat de la vision
d’un adolescent laissé à lui-même suite à l’accaparement des parents par leurs obligations
professionnelles. Car comme Ricky, son épouse Abby, assistante de vie dévouée, n’est pas
mieux lotie que lui.
On ne serait néanmoins pas surpris de retrouver le film au palmarès, notamment pour ses
acteurs.
18. *
* Alice, mère célibataire, est une phytogénéticienne chevronnée qui travaille pour une société
spécialisée dans le développement de nouvelles espèces de plantes. Elle a conçu une fleur très
particulière, rouge vermillon, remarquable tant pour sa beauté que pour son intérêt
thérapeutique.
* En effet, si on la conserve à la bonne température, si on la nourrit correctement et si on lui
parle régulièrement, la plante rend son propriétaire heureux. Alice va enfreindre le règlement
intérieur de sa société en offrant une de ces fleurs à son fils adolescent, Joe.
* Ensemble, ils vont la baptiser Little Joe. Mais, à mesure que la plante grandit, Alice est saisie
de doutes quant à sa création: peut-être que cette plante n’est finalement pas aussi
inoffensive que ne le suggère son petit nom.
19. *
*Salvador Mallo, la soixantaine, est un cinéaste reconnu mais en
panne d’inspiration, déprimé par des douleurs physiques qui lui
font ressentir le temps qui passe. Alors que la Cinémathèque
veut lui rendre hommage en projetant la version restaurée du
premier film qui l’a rendu célèbre, Salva décide de recontacter
l’acteur principal de ce film, avec qui il s’est brouillé trente ans
plus tôt. Lors de leurs retrouvailles, l’acteur lui propose, pour
fêter ça, d’inhaler ensemble de l’héroïne. Salva accepte, y
prend goût, et à la faveur de ses trips, se remémore les émotions
de son enfance et va essayer de se réconcilier avec son passé
20. Qu’est-ce qui est autobiographique et qu’est-ce qui ne l’est pas dans « Douleur et gloire
» ? La question se pose quand on voit Antonio Banderas habillé et coiffé comme
Almodovar pour incarner Salva, et habiter dans une réplique de l’appartement du
cinéaste. Mais l’ex-enfant terrible de la movida de Madrid brouille délibérément les
pistes, et mêle le vrai au fictif dans ce portrait mélancolique d’un cinéaste homosexuel
vieillissant. Un portrait qui se révèle d’inspiration inégale : si certaines scènes sont
émouvantes et originales, d’autres sont plus anecdotiques – c’est le risque encouru avec
ce genre de projet qui flirte avec le nombrilisme. Mais celui qui fera l’unanimité, c’est
Banderas : sa remarquable prestation, toute en retenue et en subtilité, marque son
retour en force, sur les écrans et dans la compétition cannoise.
21. *
*En 2016, il faisait l'ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs. Mais il faut
remonter dix années en arrière pour retrouver la dernière participation de Marco
Bellocchio à la Compétition : c'était avec Vincere, reparti bredouille de la
Croisette en 2009. Pour son grand retour, le cinéaste italien va de nouveau se
pencher sur le passé de son pays à travers ce biopic aux allures de film policier
centré sur un gangster membre de Cosa Nostra, qui décide de trahir les siens au
coeur de la décennie 80. Thierry Frémaux annonce un renouveau des codes
esthétiques du film noir pour décrire cet Il Traditore qu'il rapproche du cinéma de
Fritz Lang. Si le résultat est à la hauteur de son modèle dans le genre, il y a de
fortes chances pour que l'on retrouve un traître au palmarès. Et pourquoi pas
l'acteur Pierfrancesco Favino, révélé au grand public par Romanzo Criminale ?
22. *
*D’un côté, une jeune
prostituée coincée par les
lois terribles de la mafia. De
l’autre, un voyou, chef de
gang, rongé par la
culpabilité. Compagnons
d’un jour, ils sont engagés
tous les deux dans une vaste
chasse à l’homme.
23. *
* Les Siffleurs (La Gomera), comédie policière franco-germano-
roumaine de Corneliu Porumbiou Avec Vlad Ivanov, Catrinel Marlon et
Rodica Lazar.
* Un inspecteur de police de Bucarest s’installe sur l’île espagnole de
La Gomera (le titre original du film) pour :
* 1) apprendre l’étrange langage sifflé pratiqué sur place.
* 2) tomber amoureux
* 3) obtenir des informations qui pourraient le faire délivrer un homme
d’affaires ripou incarcéré en Roumanie.
* De quoi permettre au réalisateur de Policier, adjectif de développer
à nouveau son sens burlesque à mèche lente, ses plans-séquences
contemplatifs et son goût pour la théorie ludique – tous ses films,
documentaires comme fictions, sont des réflexions sur la mise en
scène.
24. *
*1770. Marianne est peintre
et doit réaliser le portrait
de mariage d’Héloïse, une
jeune femme qui vient de
quitter le couvent. Héloïse
résiste à son destin
d’épouse en refusant de
poser. Marianne va devoir
la peindre en secret.
Introduite auprès d’elle en
tant que dame de
compagnie, elle la
regarde.
25. *
*Inspiré de faits réels.
*Franz Jägerstätter, paysan autrichien, refuse de se
battre aux côtés des nazis. Reconnu coupable de
trahison par le régime hitlérien, il est passible de la
peine capitale. Mais porté par sa foi inébranlable et
son amour pour sa femme, Fani, et ses enfants,
Franz reste un homme libre. Une vie cachée raconte
l'histoire de ces héros méconnus.
26. * Vite ! Il n’a pas de temps à perdre, Ahmed : il a
quelqu’un à tuer. Sa professeure de soutien
scolaire est à ses yeux une pécheresse. Elle
veut utiliser des chansons populaires et
dansantes dans son enseignement, ce que
l’imam local condamne fermement. Ahmed est
donc déterminé à égorger sans délai la jeune
femme, qui, par ailleurs, exprime beaucoup de
sollicitude et de sympathie pour lui. Ahmed
(Idir Ben Addi, exceptionnel) a une bonne tête
et des lunettes qui lui donnent un air sérieux.
Il vit en Belgique, chez sa mère, avec son frère
et sa sœur. Il a 13 ans.
* Vite aussi, les frères Dardenne courent derrière
ce personnage qu’ils ont créé, mais qui, à bien
des égards, leur échappe. Rien que son
extrême jeunesse et son prénom arabe
constituent une altérité pour eux, sexagénaires
et occidentaux : le titre, Le Jeune Ahmed,
sonne comme La Fille inconnue, celui de leur
précédent film. Plus que jamais, les
réalisateurs œuvrent en artisans modestes.
* Pour tenter de comprendre un être humain et,
en l’occurrence, un mécanisme mental
particulièrement opaque, ils captent des signes
extérieurs, du plus infime au plus
spectaculaire. Leur attention, leur acuité de
chaque seconde font de ce neuvième long
métrage le plus fort.
*
27. * Le cinéaste dévoilait mardi Once upon a time...
in Hollywood en compétition à Cannes. Avec de
superbes Brad Pitt et Leonardo DiCaprio, il y
tient son chant d'amour pour un Hollywood
perdu, mais pas jusqu'au bout, ruinant le tout
dans un dernier mouvement révulsant.
* C’est d’autant plus navrant qu’on a le sentiment
de se voir resservir une recette usée, celle d’un
ado n’arrivant toujours pas à sortir de sa
chambre aux merveilles pour tenter un truc plus
grand que lui.
* il y a deux films dans Once Upon a Time… Une
première heure et demie qui est un chant
d’amour à la ville telle qu’elle existait en 1969,
c’est-à-dire tout juste avant son deuxième âge
d’or, ce « Nouvel Hollywood » décrit par Peter
Biskind dans un livre fameux, où pouvaient
encore espérer se côtoyer stars de téloche sur
le retour et metteurs en scène en vue, c’est-à-
dire la télévision et le cinéma.
*
TARANTINO, IL ÉTAIT UN FAKE À HOLLYWOOD
28. * Deux amis d’enfance s’embrassent
pour les besoins d’un court métrage
amateur.
* Suite à ce baiser d’apparence
anodine, un doute récurrent
s’installe, confrontant les deux
garçons à leur préférence,
bouleversant l’équilibre de leur cercle
social et, bientôt, leurs existences.
* Compte tenu de ses faits d’arme,
Xavier Dolan aspire logiquement,
aujourd’hui, à une Palme d’or. Après
Ma vie avec John F. Donovan, son
ambitieux film anglophone, qui a
divisé le public et la critique, Mathias
& Maxime marque son retour à son
essence québécoise. Mais aussi à un
rôle de premier plan en tant
qu’acteur. Ce qui lui permet de
concourir, aussi, pour le Prix
d’interprétation masculine.
*
29. *
* Arnaud Desplechin, souvent sélectionné à Cannes
mais jamais récompensé, revient cette année avec un
film puissant et lumineux. Pour la première fois le
réalisateur s’y confronte avec le réel. Celui d’un fait
divers sordide qui s’est déroulé il y a une dizaine
d’années et dont les images n’ont cessé, depuis, de
le hanter.
* Il retrouve sa ville d’origine, Roubaix, et ses
illuminations de Noël, sauf que son histoire n’a rien
d’un conte. On quitte le confort des intérieurs
bourgeois de son enfance pour plonger directement
dans le chaudron d’une des villes les plus pauvres de
France. Une ville qui « a le souvenir d’avoir compté
et de n’être plus rien », résume le commissaire à
l’intention de son jeune collègue novice. 75 % de la
commune est classée en zone urbaine sensible et
45 % de la population vit sous le seuil de la pauvreté.
La première partie, à la manière d’un documentaire, nous entraîne dans son sillage à la rencontre de
l’ordinaire des policiers : fraude à l’assurance, violences domestiques, incendies crapuleux, petits
braquages et fugues d’adolescent. À chaque fois Daoud garde son calme, désamorce la colère,
rassure.
Puis, lorsque la vieille dame est retrouvée assassinée, le film se resserre sur les deux suspectes.
Patiemment, avec infiniment de douceur et d’habileté, le policier va tirer sur le fil de leur
conscience et de leur culpabilité pour les amener à avouer et se libérer. Le réalisateur réunit alors
dans une même humanité le policier et les deux coupables. Les auditions, la confrontation puis la
reconstitution offrent des moments d’une grande intensité reposant sur le travail remarquable de ses
deux actrices, Léa Seydoux et Sara Forestier.
30. * Toute la famille de Ki-taek est au
chômage, et s’intéresse fortement au
train de vie de la richissime famille
Park. Un jour, leur fils réussit à se
faire recommander pour donner des
cours particuliers d’anglais chez les
Park. C’est le début d’un engrenage
incontrôlable, dont personne ne
sortira véritablement indemne...
* Dans Parasite, le sous-sol est un
endroit très angoissant, d’où surgit
l‘horreur. En Corée, de nombreux
immeubles comportent des entre-sols
où la lumière a du mal à passer. Il a
accentué cette angoisse en abaissant
le plafond pour obliger les acteurs –
de la famille pauvre – à jouer
littéralement courbés en deux. Le
sens du détail, c’est la « Bong Joon
Ho’ touch »
*
31. La famille Kim survit dans un entresol à moitié inondé de fuites et de l’urine des ivrognes
qui se soulagent à ras de leurs fenêtres. Nous les rencontrons entourés de cartons à pizzas
qu’ils sont censés confectionner à la vitesse d’une démonstration en vidéo. Les parents et
les deux jeunes adultes, garçon et fille, n’ont manifestement pas d’autre emploi. Obligés
de ramper pour s’approprier le réseau Wifi de la voisine, on devine qu’ils ont développé un
sens particulier de la débrouille. Non qu’il soit rare, dans la vie comme au cinéma, mais la
mise en scène de Bong Joon-ho fait coïncider de manière extraordinaire grotesque et
poignant, trivial et symbolique. Ki-woo, le fils (Choi Woo-sik) se voit proposer par un ami
étudiant l’occasion de dispenser des cours d’anglais chez les richissimes Park. Il a raté tant
de fois ses examens qu’il représente le candidat idéal. À condition bien sûr de fondre son
apparence dans le corps social auquel appartiennent les Park, rôle exigeant que le jeune
homme revêt avec une aisance de prestidigitateur. Le voilà embauché par une madame
Park délicatement égarée. Et d’autant plus crédule qu’elle ne connaît d’autres codes que
ceux de son milieu. La famille Kim s’est soudée autour de son rejeton afin de créditer
l’abus. Tout le processus suit sa trajectoire comique avec l’adresse nécessaire à son
renouvellement. Une légère hésitation de Ki-woo dans les ruelles impeccables qui cernent
la maison des Park, les verdoyants reflets d’un jardin à l’ouverture du portail, la
découverte éberluée de la splendeur des lieux signés d’un architecte de renom, tout va
concourir à une confrontation inusitée des classes et places.
« Le réalisateur coréen a concocté une
implosion cinématographique magistrale à la
superbe d’opéra. Parasite est un film politique
drôle et noir foncé placé haut dans notre
palmarès. Parasite. Bong Joon-ho. »
L’Humanité
32. * Ira Sachs avec Frankie traverse pour la première
fois l’Atlantique. Direction : Sintra au Portugal où
une actrice française gravement malade a décidé
de réunir tous ses proches – familles, ex, amis… -
pour vivre ensemble les dernières vacances de son
existence. On y retrouve certes toute la délicatesse
du cinéaste dans une histoire qui aurait pu
facilement basculer dans le larmoyant ou le mélo
étouffant et ne succombe jamais à ces travers.
Sauf qu’à force de délicatesse, Frankie tend vers la
neurasthénie.
* Toute cette distance frustrante que maintient ce
film avec ses spectateurs trouve son origine dès ses
premières minutes. Jamais ainsi on ne s’attache
ainsi au personnage de Frankie campée par Isabelle
Huppert. Sachs nous en montre tous les défauts,
mais jamais ce qui pourrait expliquer pourquoi tous
les personnages qui l’entourent tiennent autant à
elle. Et en multipliant justement ces personnages
tout en essayant de faire exister chacun, Ira Sachs
se piège lui- même.
* Avec Frankie, Ira Sachs s’ajoute donc à la longue
liste de cinéastes étrangers qui, en s’éloignant de
leur terrain de jeu habituel, de leur culture et de
leurs sources d’inspiration, ont perdu en route ce
qui faisait le sel, la singularité et la force de leurs
œuvres. Décidément, ce n’était pas le film idéal
pour affronter la compétition cannois
33. * ES fuit la Palestine à la recherche
d'une nouvelle terre d'accueil, avant
de réaliser que son pays d'origine le
suit toujours comme une ombre. La
promesse d'une vie nouvelle se
transforme vite en comédie de
l'absurde. Aussi loin qu'il voyage, de
Paris à New York, quelque chose lui
rappelle sa patrie.
* Un conte burlesque explorant
l'identité, la nationalité et
l'appartenance, dans lequel Elia
Suleiman pose une question
fondamentale : où peut-on se sentir «
chez soi » ?
*
34. *
*Six ans après La Vie
d’Adèle, Abdellatif
Kechiche revient sur la
Croisette avec Mektoub,
My Love: Intermezzo, la
suite de son long-
métrage Canto Uno, sorti
l’an dernier. On y
retrouvera Amin et sa
bande d’amis dragueurs
sur les plages de Sète.
35. Sibyl est une romancière reconvertie en psychanalyste. Rattrapée par le désir
d'écrire, elle décide de quitter la plupart de ses patients. Alors qu'elle
cherche l'inspiration, Margot, une jeune actrice en détresse, la supplie de la
recevoir. En plein tournage, elle est enceinte de l'acteur principal… qui est en
couple avec la réalisatrice du film. Tandis qu'elle lui expose son dilemme
passionnel, Sibyl, fascinée, l’enregistre secrètement. La parole de sa patiente
nourrit son roman et la replonge dans le tourbillon de son passé. Quand
Margot implore Sibyl de la rejoindre à Stromboli pour la fin du tournage, tout
s'accélère à une allure vertigineuse.
Sibyl de Justine Triet
42. *
* Ce film s'attarde à la relation entre une sœur et un frère –
interprétés par Anne-Élisabeth Bossé et Patrick Hivon – qui sera
ébranlée par la nouvelle relation amoureuse de ce dernier. Il y a
peu de films sur la relation frère-sœur, estime Monia Chokri.
* En évoquant des relations intenses au sein d'une famille, le film
de Monia Chokri fait inexorablement penser au cinéma de Xavier
Dolan, dont elle est très proche.
* La femme de mon frère se penche sur la relation entre Sophia,
une jeune femme qui galère après sa thèse et logeant chez son
frère Karim, séducteur impénitent et complice de toujours.
Jusqu'à ce que ce dernier tombe amoureux de la gynécologue de
Sophia, ce qui va rebattre les équilibres et plonger cette
dernière dans un désarroi profond, mais drolatique à l'écran.
La femme de mon frère de Monia Chokri
43. *Beanpole de Kantemir Balagov
*1945. La Deuxième Guerre mondiale a ravagé Léningrad. Au
sein de ces ruines, deux jeunes femmes, Iya et Masha,
tentent de se reconstruire et de donner un sens à leur vie.
44. *
* Adapté du roman éponyme de l’écrivain algérien Yasmina Khadra, le film prend
place sous le régime des talibans, lors de l’été 1998, alors que l’application de
la charia restreint drastiquement les libertés publiques et que des femmes sont
lapidées dans la rue.
* Le récit croise les destins tragiques de deux couples, l’un d’âge mûr et l’autre
plus jeune, en butte à la coercition du régime. : Atiq, ex-moudjahidin devenu
chef d’une prison pour femmes, veille sur Mussarat, son épouse agonisante,
tandis que Zunaira et Mohsen tentent de vivre tant bien que mal leur amour
dans la misère quotidienne. Le jour où Zunaira atterrit dans ses geôles, Atiq se
rend compte qu’elle a pu être condamnée à tort, et dans le même temps du
rôle peu reluisant qu’il tient dans ce système arbitraire.
45. * Ce film est aussi une promenade dans
la cinémathèque personnelle du
cinéaste, mais cette fois le film ouvre
des corridors qu’on ne soupçonnait
pas. Le canevas est américain , sous-
genre mythique de la comédie
hollywoodienne classique, auquel le
philosophe Stanley Cavell a consacré
un ouvrage sublime (A la poursuite du
bonheur, 1981
* Richard (Benjamin Biolay) et
Catherine (Chiara Mastroianni) sont
mariés depuis vingt ans. Jusqu’à ce
que la révélation d’un adultère
précipite le couple dans une grande
remise en question. Il suffit de
traverser la rue et prendre une
chambre dans l’hôtel d’en face pour
voir sa vie projetée face à soi comme
sur un écran de cinéma .
* Bref: c’est un film qui délivre plus
de doutes que de réponses.
*
46. Dans l’Algérie des années 1990, où le
fondamentalisme islamiste étend
insidieusement sa chape de plomb sur toute la
société, Nedjma (Lyna Khoudri) mène des
études de français à l’université d’Alger. Son
rêve serait de devenir couturière et d’organiser
un défilé pour montrer ses créations, mais
partout autour d’elle la pression religieuse
s’intensifie. Le tissu devient, pour l’étudiante,
le terrain d’une résistance symbolique : coudre
des robes qui glorifient la beauté des femmes
plutôt que de les recouvrir d’un voile pudique.
Premier long-métrage de fiction de la
réalisatrice Mounia Meddour, née
en 1978, Papicha (« jolie fille » en argot
algérien) fait partie de ces films qui s’enrobent
d’une idée de la liberté passant moins par un
discours articulé, que par l’élan, la vitalité et
la spontanéité de la jeunesse portraiturée.
Dénonçant l’oppression du corps féminin, le
film trace une ligne clairement délimitée entre
partisans de la liberté et obscurantistes,
scindant en deux son évocation du passé
proche et troublé de l’Algérie.
*
48. * Amador Coro a été condamné pour
avoir provoqué un incendie.
Lorsqu’il sort de prison, personne
ne l’attend. Il retourne dans son
village niché dans les montagnes de
la Galice où vivent sa mère,
Benedicta, et leurs trois vaches.
Leurs vies s’écoulent lentement, au
rythme apaisé de la nature.
Jusqu’au jour où un feu vient à
dévaster la région.
*
Viendra le feu d’Olivier Laxe
49. * Madame de Dumeval, le Duc de Tesis et le
Duc de Wand, libertins expulsés de la cour
puritaine de Louis XVI, recherchent l’appui
du légendaire Duc de Walchen, séducteur
et libre penseur allemand, esseulé dans un
pays où règnent hypocrisie et fausse vertu.
Leur mission : exporter en Allemagne le
libertinage, philosophie des Lumières
fondée sur le rejet de la morale et de
l’autorité, mais aussi, et surtout,
retrouver un lieu sûr où poursuivre leurs
jeux dévoyés. Les novices du couvent
voisin se laisseront-elles entraîner dans
cette nuit folle où la recherche du plaisir
n’obéit plus à d’autres lois que celles que
dictent les désirs inassouvis?
*
50. *
* Le Daim de Quentin Dupieux avec Jean
Dujardin et Adèle Haenel en serveuse de bar
doucement frappée.
Après le lifting, le pneu et le
gémissement, Quentin Dupieux nous
présente sa nouvelle obsession : le
blouson en daim. Ou plutôt
l'obsession de son héros, Georges,
un quadra qui plaque sa vie dans
une banlieue pavillonnaire pour
succomber à une envie folle :
posséder une veste 100% daim.
51. *Levan Akin,le cinéaste, a expliqué qu’il avait décidé de faire le film
après avoir assisté à la terrible Gay Pride embryonnaire de 2013 à
Tbilissi (un cortège d’une cinquantaine de LGBT courageux) qui fut
bloqué et pris d’assaut par une horde de plusieurs centaines de
militants réactionnaires,chauffés à blanc par les prêtres de la toute-
puissante Eglise orthodoxe. Même si depuis une loi censée protéger les
personnes LGBT a été promulguée, la situation reste peu enviable pour
les minorités sexuelles. Le flirt de Merab et d’Irakli est vite dénoncé et
vilipendé comme contre-nature.
*And Then We Danced, dans ses rebondissements, ne se montre pas
d’une grande originalité, et les étapes attendues d’une romance homo
contrariée sont sauvées à la fois par la curiosité que suscite un contexte
géorgien objectivement peu filmé et l’aisance et la fraîcheur lumineuse
du comédien principal, Levan Gelbakhiani. Le film est évidemment en
lice pour la Queer Palm…
And Then We Danced
52. *
*Dans un noir et blanc très léché, Melina León narre dans «Canción sin
nombre» un trafic de bébés au Pérou dans les années 80. A plusieurs
titres, Canción sin nombre rappelle Roma d’Alfonso Cuarón. Dans un
noir et blanc comparable, la prometteuse Melina León dessine elle aussi
le portrait ému d’une femme humble, Georgina Condori dans un pays
divisé par de fortes inégalités sociales, marqué par la violence et la
corruption politiques.
*L’investigation journalistique permet de rebrancher le film sur la réalité
sociale et historique dans laquelle s’inscrit son triste récit. D’autant que
pour le reporter, le dévoilement d’un trafic emblématique de toute la
misère et de toutes les malversations de son pays se double de la
découverte de son homosexualité avec un acteur cubain en exil. A
travers la rencontre de Georgina et Pedro, la réalisatrice réunit ainsi
deux sortes de rejetés de la société.
53. *
*
*Fabrice Luchini campe un maire de Lyon lessivé,
Anaïs Demoustier la jeune normalienne chargée
de lui redonner la niaque. Nicolas Pariser cite
“L’Arbre, le Maire et la Médiathèque”, de
Rohmer, et livre une réflexion didactique et
lucide sur l’exercice du pouvoir.
54. * Tout péter, déjà : c’est à la fois ouvrir un chemin et le refermer
derrière soi, c’est la politique kamikaze, c’est le rapport de toutes
les forces, jusqu’à la victoire, jusqu’à la défaite. On va tout péter,
c’est le titre de ce film tourné dans la Creuse, repris du slogan
tagué bien haut et bien fort, accompagné de bouteilles de gaz et
d’une bombe artisanale amorcée en bonne et due forme, qui
accueillait à l’époque les visiteurs de leur fabrique de pièces
automobiles, occupée jour et nuit pour s’opposer aux
licenciements qu’annonçait la reprise de la boîte.
* Tout péter, c’est bien du Kowalski : tout ouvrir et tout refermer,
menacer de tout perdre dans le bras de fer têtu contre le
désespoir. Le film nous plonge à la fois dans la mêlée et dans la
mélancolie, se jette à corps perdu dans l’une comme dans l’autre.
On va tout péter se pose en permanence, et en acte, des questions
de représentation, qui ne concernent donc pas seulement le
cinéma, mais aussi la situation politique quotidienne la plus
urgente : pour filmer ou pour mener ensemble une lutte, faut-il
mettre l’accent sur l’héroïsme de l’action collective, mû par
l’espoir de peser dans la bagarre, ou sur l’analyse du système, de
la malédiction capitaliste, par essence productrice de chômage,
s’alimentant du malheur des gens, dont nous ne savons comment
sortir ?
* A l’alternative entre volontarisme et fatalisme Kowalski propose
peut-être une tangente : une sorte de compromis punk, si une
telle chose est possible. Il ne filme que les intervalles entre les
deux, il montre tous les moments indécidables entre le bonheur de
l’occupation ou de l’organisation collective et le pressentiment de
la défaite - les GM & S, lors de la réouverture de l’usine,
n’obtiennent pas satisfaction sur tous les points, une bonne partie
des salariés recevant leur lettre de licenciement, ici brandie sous
forme d’avis de passage du facteur au cours d’une grande et belle
scène d’au revoir.
*
*
55. *
* Nous voilà plongés dans le
Kaboul de la fin des années
1980. Le communiste
Mohammad Najibullah est le
président de la République
démocratique d’Afghanistan,
soutenue par l’Union
soviétique. Le pays est en
guerre. Les moudjahidin,
forces islamistes soutenues
par les pays occidentaux, sont
aux portes d’une capitale qui
continue malgré tout à vivre.
Les femmes portent des
jupes, ont les cheveux
défaits. On s’entasse dans des
baraques en bois qui font
office de salles de cinéma
pour rire et s’extasier devant
les performances des héros
venus de Bollywood Oodrat
56. *
* Le film s’ouvre sur des tremblements
de caméra à l’épaule. L’héroïne traque
dans Paris son chéri qui dort chez une
autre. Le gars a l’air stupide,
inintéressant au possible. C’est pour
cela que des femmes se battent?
* Et pourtant, Tu mérites un amour est
une réussite.
* Lila se nourrira de ce qui l’intéresse,
au propre et au figuré : certains
deviennent des alliés, d’autres des
amants, celui-ci passe sans accrocher,
celui-là quitte l’histoire pour ne plus y
revenir.
* Lila aspire l’expérience des autres et
en profite pour découvrir une certaine
solidarité, une altérité apaisante
propre à l’aider. Elle aimerait crever
seule dans son coin, comme à peu près
tout le monde après une rupture, mais
la société l’en empêche.
* Tout en promenant sur le film un regard
hagard, Lila se retrouve peu à peu
allongée sur un lit de bons conseils.
Même dans le Paris d’aujourd’hui, une
humanité existe.
La semaine de la critique
57. *
*Le documentaire For Sama de Waad Al-Kateab et Edward Watts,
extrêmement impressionnant, est projeté hors-compétition au Festival
de Cannes.
*Le film doit son titre au fait que le récit est structuré autour d'une
lettre cinématographique à sa fille, Sama, où elle explique à la petite
pourquoi sa maman a rejoint la révolution et pourquoi elle a décidé de
rester à Alep, avec son père docteur, Hamza, et de vivre dans un hôpital
de fortune malgré la menace inhérente à cette vie et la mort de tant de
leurs amis. En effet, la différence entre For Sama et la pléthore de
documentaires sur la Syrie qui sont faits en ce moment, c'est l'analyse
brillante que le film propose quant aux raisons qui font que les gens
décident de rester dans des zones de guerre, analyse qui vaut n'importe
où dans le monde.
58. * Lorsque Que sea ley, qui pourrait être traduit
par « il faut absolument une loi », titre du film
du cinéaste argentin Juan Solanas, devient le
mot d’ordre qui envahit de toutes parts le
Festival de Cannes, nous nous mettons à croire
au pouvoir du cinéma. Lorsque les foulards
verts apportés par les femmes d’Argentine se
mettent à fleurir aux cous et aux poignets de
tout un chacun, de Penélope Cruz à
Almodovar, de Claire Denis à Charlotte
Gainsbourg, une loi interne à un pays devient
le désir de tous. Et le slogan de la Campagne
nationale pour le droit à l’avortement légal,
sans risque et gratuit : « L’éduction sexuelle
pour décider, les contraceptifs pour ne pas
avorter, l’avortement légal pour ne pas
mourir », devient universel.
* Que sea ley, de Juan Solanas. Argentine,
1 h 25. Visions sociales est une manifestation
où depuis plus de vingt ans les Activités
sociales de l’énergie montrent un cinéma
d’auteur ouvert et exigeant questionnant
l’ordre social et l’état du monde.
*
UN CINÉMA POUR CHANGER LE MONDE
59.
60. *
* Des militantes du Planning familial,
de la Fondation des Femmes et des
anonymes ont gravi les marches du
Palais du Festival vers ce samedi
après-midi pour assister à la
présentation du documentaire du
Franco-argentin Juan Solanas, "Que
sea ley" (Une loi, vite !), consacré
au combat des Argentines pour
obtenir le droit à l’avortement.
* Toutes portaient des vêtements de
couleur verte, emblème de la lutte
pour la légalisation de l’avortement
qui a embrasé l’Argentine en 2018.
Si le projet de loi a été adopté par
la Chambre des députés, il a été
ensuite rejeté par le Sénat. Dans
son film, Juan Solanas, 52 ans, a
parcouru pendant huit mois le pays
pour recueillir des témoignages
dans les provinces les plus éloignées
de la capitale Buenos Aires.