1.
1
Congrès 2015, enjeux et objectifs
Le congrès de Saragosse a profondément modifié notre compréhension des congrès annuels de
l’association ; c’est un bon exemple de l’influence du numérique sur les organisations, par les codes, les
méthodes, l’approche relationnelle qu’il induit. Alors même qu’il s’agissait au départ d’inviter à réfléchir
les établissements de la Mlf sur leur « entrée en numérique », c’est la Mlf qui s’est d’abord trouvée
interrogée sur les ouvertures que suggérait voire imposait l’objet même du congrès dans sa façon de
piloter son réseau, de repenser ses méthodes et outils en ligne, de mettre ces outils en relation avec les
axes d’animation pédagogique de ce réseau et à leur service. Tout cela pour l’élève, notre raison d’être,
et qui pour la première fois y est intervenu en direct, en acteur, en sujet, par la voix d’un de ces
exemples de surdoué numérique de sa génération. On n’oubliera pas à Dijon que le numérique place
vraiment cette fois l’élève au centre de son propre processus d’apprentissage. Et on se donnera les
outils pour le montrer.
Si ce congrès a été jugé passionnant par les participants, c’est qu’il a induit un changement de méthode
et de posture : on a vu que le numérique interdisait toute verticalité du message ; qu’il imposait une
curiosité et une modestie partagées devant le potentiel inconnu ; qu’il mettait en œuvre une dynamique
collective fondée sur une lucidité commune devant l’enjeu. Une sorte de sentiment de combativité à la
hauteur de la compétitivité découlait de l’irruption du numérique dans le paysage éducatif
international. Ce ne sera pas le moindre des enjeux du congrès 2015 que de retrouver l’oxygène
qu’apporte la promesse d’une culture renouvelée par les langages et une égalité entre acteurs,
condition de leur mobilisation autour d’un projet commun… sans naïveté ni espoirs excessifs, mais avec
la certitude tout de même que la pédagogie doit faire sens avec le numérique si l’on veut éviter que
l’usage numérique ne fasse sens par lui-même à l’école.
L’étape suivante sera réussie en conservant la dynamique, une sorte d’enthousiasme inquiet, en lui
assignant des objectifs à la fois ambitieux, réalistes et concrets :
-‐ Le premier enjeu désigne l’humain dans le numérique. Non pas que le numérique serait a
priori l’inhumain, mais la Mlf souhaite mettre en évidence ce que le numérique peut enrichir
d’humain en l’homme « scolaire » : l’élève et l’équipe qui agit autour de lui et pour lui. Dans le
premier cas, les compétences à construire sont visées, nous les avons synthétisées :
communiquer, devenir citoyen, construire son autonomie. Dans le second cas, on voudra
savoir comment le numérique peut construire une communauté plus solidaire autour des
2.
2
apprentissages, et plus conviviale dans les relations qui l’unissent pour la réussite des élèves
qui lui sont confiés.
-‐ Le second enjeu désigne le fonctionnement de l’organisation éducative révisé voire rebâti
par le numérique. Il n’y a pas de miracle par le numérique, c’est un parcours vers une culture :
autant qu’il soit le moins individualiste, le plus participatif, et le plus réflexif possible. La charte
numérique permettant de faire cheminer l’établissement vers une conscience et des modalités
d’action partagées constitue un outil immédiat, facile d’accès, d’usage, peut-être adaptable, en
tout cas objectif pour une mobilisation efficace. En même temps, c’est tout le projet
d’établissement qui se trouve interrogé, mais aussi revitalisé si besoin était car lui aussi est
une démarche vers une culture commune. Il n’est pas impossible que le numérique ait besoin
de ce point d’appui-là, et que le projet retrouve des couleurs c’est-à-dire une légitimité et une
nécessité que trop d’usage et l’usure ont ternies pour un certain nombre d’enseignants.
-‐ Le troisième enjeu est celui de la coopération, de la circulation des idées, des projets, de la
mobilité des élèves et de leurs enseignants avec le numérique ou sans lui car rien ne remplace
le voyage et le contact humains pour grandir. L’immense apport du congrès de Saragosse est
d’avoir ouvert la voie d’une coopération entre le petit monde éducatif Mlf (l’étranger) et ses
partenaires hexagonaux et la Mlf en est fière. Ces mondes qui aspirent à se découvrir, au motif
que l’éducation est un face à face avec le Monde, ont été si peu sensibles l’un à l’autre dans le
passé qu’on peut s’étonner de la sous-exploitation mutuelle de leurs potentiels respectifs. Avec
le numérique, il n’y a plus de sachants et d’apprenants, tout le monde tâtonne, apprend des
autres. Et un établissement scolaire apprend qu’il se construit avec les autres, dans sa
proximité, sa périphérie, sa source (nationale). On attend du congrès de 2015 qu’il conforte
cette mise en relation, entre nos institutions, qu’à l’échelle gérable d’organisations curieuses les
unes des autres, des partenariats se développent (entre établissements), des circulations se
mettent en place sur projets (la vie scolaire, les CVL, la pédagogie des langues, la réflexion sur
les programmes en contexte), des expertises circulent au service de la compétence des
personnels. Le numérique est ici un moteur, un prétexte, un outil d’une culture de la quête, de
la complicité, du partage.
En somme, ce congrès, nous le souhaitons comme une coproduction, un moment de hardiesse et
d’inventions partagées autour de la pédagogie, une vision concrète de l’établissement d’enseignement
français tel que le numérique peut apporter dès maintenant, demain, aux élèves qui nous font
confiance.
Jean-Christophe DEBERRE
Directeur général