4. 2-0010 - Maladies allergiques et réactions pseudoallergiques : définitions, mécanismes, épidémiologie
2 Atopie et allergie dans
la population générale.
Population générale
Terrain atopique
L'atopie
Hypersensibilité
IgE-dépendante
N'importe qui : mécanismes
immunologiques variés
Environnement
naturel
Allergènes variés
Maladies atopiques :
– asthme allergique
– rhinite allergique
– dermatite atopique
– allergies alimentaires
Maladies allergiques :
– allergies aux hyménoptères
– allergies médicamenteuses
– allergies professionnelles
– eczémas de contact
Maladies allergiques non atopiques
Ce sont les allergies médicamenteuses, l’allergie
aux hyménoptères, les eczémas de contact, les
allergies professionnelles… Elles peuvent affecter
« n’importe qui » et même en l’absence de terrain
génétiquement défini comme l’atopie. En revanche, un
sujet atopique peut en être atteint (fig 2). Elles
répondent à des mécanismes immunologiques variés
(cf infra) vis-à-vis de multiples allergènes de
l’environnement.
‚ Hypersensibilité dite cytotoxique
ou hypersensibilité de type II
première fois en contact avec l’allergène, induit une
réponse immunologique silencieuse. Lors d’un contact
ultérieur, dit déclenchant, l’allergène se trouve en
présence d’un organisme sensibilisé ; il induit alors une
réaction immunologique responsable d’une
symptomatologie clinique.
La classification de Gell et Coombs, établie il y a près
de 40 ans, comporte quatre types d’hypersensibilité ;
elle demeure toujours la référence malgré un
approfondissement des connaissances et une réalité
plus complexe (tableau I).
‚ Hypersensibilité de type immédiat
ou hypersensibilité de type I
ou IgE-dépendante
s
Mécanismes immunologiques
des pathologies
immunoallergologiques
Toutes les réactions immunologiques nécessitent
un contact préparant où, l’organisme, entré une
produit une réaction clinique dans les minutes qui
suivent ; les allergènes sont reconnus par les IgE
spécifiques, elles-mêmes fixées sur les polynucléaires
basophiles et les mastocytes ; la liaison allergène-IgE
spécifiques entraîne un signal aboutissant à la
libération par ces cellules de médiateurs dont le plus
important est l’histamine ; à cette phase immédiate
succède de façon inconstante une phase tardive
inflammatoire cellulaire (infiltrat de polynucléaires
éosinophiles) survenant quelques heures plus tard. Les
allergènes sont très variés : allergènes de
l’environnement comme les pneumallergènes ou les
trophallergènes, médicaments, venins d’hyménoptères… Les manifestations cliniques peuvent être une
urticaire, un choc anaphylactique ou les manifestations cliniques de l’atopie.
Après une phase silencieuse biologique de
sensibilisation (c’est-à-dire de synthèse des IgE
spécifiques) et lors d’une réexposition à l’allergène, il se
L’hypersensibilité de type II concerne la destruction
d’une lignée sanguine qui est en relation avec des
anticorps IgG ou IgM et une activation du complément.
Les déterminants antigéniques sont présents sur les
membranes cellulaires, ou bien un antigène ou un
haptène circulant (médicament par exemple) se fixe
secondairement sur la membrane cellulaire puis
l’anticorps et le complément viennent se fixer
conjointement.
‚ Hypersensibilité semi-retardée
ou hypersensibilité de type III
L’hypersensibilité de type III regroupe des
pathologies d’organe et des pathologies systémiques
avec des lésions tissulaires en relation avec des dépôts
de complexes immuns comme la maladie sérique
(pouvant être actuellement due à certains
médicaments), les alvéolites extrinsèques (poumons
d’éleveurs d’oiseaux dus à certaines protéines
contenues dans les fientes, poumons de fermier dus à
certaines moisissures…)... La création de telles lésions
nécessite une grande quantité d’anticorps, une grande
Tableau I. – Classification de Gell et Coombs
Type
Dénomination
1
Hypersensibilité immédiate
Délai de survenue
moins de 30 minutes
Effecteurs
IgE spécifiques
Mécanisme
Principales maladies
Liaison entre les IgE spécifiques et les allergènes
Activation des mastocytes et
des polynucléaires basophiles avec libération des médiateurs (histamine, tryptase, leucotriènes,
prostaglandines...)
Choc anaphylactique
IgG, IgM
Réaction antigène-anticorps
Complément
Activation du complément
suivie d’une lyse cellulaire
Cytopénies médicamenteuses (anémies, neutropénies,
thrombopénies)
Anémies hémolytiques autoimmunes
IgG, IgM
Formation de complexes
immuns activant le complément et créant des lésions
tissulaires
Pneumopathies d’hypersensibilité à précipitines
Maladie sérique
Maladies à complexes immuns circulants : vascularites, glomérulopathies...
Action pro-inflammatoire
des cytokines libérées par
les lymphocytes T sensibilisés
Formation d’un infiltrat à
cellules mononucléées puis
d’un granulome
Eczémas de contact
Mastocytes, polynucléaires
basophiles
II
III
Hypersensibilité par cytotoxicité
Hypersensibilité semiretardée
8 à 16 heures
Complément
Polynucléaires neutrophiles
et leurs médiateurs
IV
Hypersensibilité retardée
24 à 48 heures
Lymphocytes T
IgE, IgG, IgM : immunoglobulines E, G, M.
2
Urticaire
Maladies atopiques
Hypersensibilité à la tuberculine et à d’autres agents
infectieux
5. Maladies allergiques et réactions pseudoallergiques : définitions, mécanismes, épidémiologie - 2-0010
Tableau II. – Principaux tableaux cliniques orientant vers des réactions immunoallergiques et des réactions pseudoallergiques.
Réactions immunoallergiques
Réactions pseudoallergiques
Choc anaphylactique
Choc anaphylactoïde
Urticaire
Urticaire
Œdème de Quincke
Œdème de Quincke
Rash
(généralisé > localisé)
Rash
(visage et décolleté plus évocateurs)
Purpuras
Symptômes cutanés ou généraux au soleil, au froid, à la pression, au stress
Dermatite atopique
Éruptions eczématiformes
Eczéma de contact
Dermite orthoergique
Conjonctivites, kératites, uvéites
Conjonctivites, kératites, uvéites virales
Rhinites allergiques
Rhinites vasomotrices et rhinite non allergique à éosinophiles (NARES)
Polypose nasosinusienne (rare)
Polypose nasosinusienne (fréquente)
Bronchites « asthmatiformes » (spastiques) du jeune enfant
Bronchites virales du nourrisson « sans lendemain »
Asthme allergique
Asthme dit « intrinsèque »
Maladie cœliaque
Syndromes divers de malabsorption
Allergie aux protéines du lait
Intolérance au lactose
quantité d’antigènes et l’intervention du complément
et de cellules comme les plaquettes et les
polynucléaires neutrophiles.
‚ Hypersensibilité retardée
ou hypersensibilité de type IV
On note deux phases chronologiques : une phase
de sensibilisation silencieuse où les macrophages
présentent au système immunitaire un allergène
aboutissant à l’expansion clonale de lymphocytes T
spécifiques de l’allergène ; une phase de révélation
lors de la réintroduction du même allergène, avec
activation des lymphocytes T spécifiques libérant des
cytokines elles-même permettant de recruter des
cellules sur le site de l’inflammation (lymphocytes T,
macrophages, mastocytes, polynucléaires
neutrophiles…). Les réactions cliniques se produisent
entre 24 et 48 heures après contact avec l’antigène,
c’est pourquoi l’on parle d’hypersensibilité retardée.
Cliniquement, l’hypersensibilité retardée correspond
aux eczémas de contact à divers produits chimiques
(parfums, métaux, caoutchouc…) et à l’hypersensibilité
microbienne ou mycosique.
s
Réactions pseudoallergiques
Ce sont des affections qui miment les maladies
allergiques avec des tableaux cliniques semblables et
parfois des agents étiologiques identiques (tableau II).
Les cellules et les médiateurs chimiques sont les
mêmes mais leur mise en jeu aboutissant à la
libération ne relève pas d’un mécanisme immunologique, c’est-à-dire sans l’intervention d’anticorps IgE ou
de lymphocytes sensibilisés. On relève trois principaux
mécanismes : libération non immunologique
d’histamine, libération non immunologique d’acide
arachidonique, libération non immunologique de
bradykinine.
‚ Libération non immunologique
d’histamine
L’anormale facilité de la libération d’histamine à
partir des mastocytes et des polynucléaires basophiles
par des stimuli non immunologiques représente
l’histaminolibération non spécifique. Les facteurs
exogènes peuvent être des agents physiques (froid,
chaleur, pression, effort…) ou des substances
chimiques comme certains aliments (poisson,
crustacés, porc et charcuterie, fraise et tomate…) ou
comme certains médicaments (produits de contraste
iodés, codéine et morphiniques…). On relève chez
certains sujets une anormale facilité à l’histaminolibération en raison d’un état de stress et perpétuée par
des perturbations du métabolisme de l’histamine
(dégradation).
‚ Libération non immunologique d’acide
arachidonique
L’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens
agissent en inhibant la voie métabolique des
prostaglandines à partir de l’acide arachidonique. Chez
les patients intolérants à l’aspirine et aux antiinflammatoires non stéroïdiens, les leucotriènes
libérées en grande quantité entraînent l’apparition
d’urticaire, d’œdème de Quincke, de crise d’asthme.
On rappellera la triade clinique de Fernand-Widal qui
associe intolérance à l’aspirine et aux antiinflammatoires non stéroïdiens, polypose
nasosinusienne et asthme.
3
‚ Libération non immunologique
de bradykinine
Certains chocs en hémodialyse ou chocs de
patients traités par inhibiteurs de l’enzyme de
conversion qui bloquent la dégradation de
bradykinine, relèvent de ce mécanisme.
s
Épidémiologie
La fréquence des maladies atopiques a doublé
depuis une vingtaine d’années. Toutes les études
épidémiologiques vont en ce sens. Cette augmentation touche tout particulièrement les pays industrialisés
et économiquement développés ainsi que les enfants,
les adolescents et les adultes jeunes. Ainsi, en France,
on estime la prévalence de la dermatite atopique à
10 %, celle de l’asthme entre 7 et 9 % pour les enfants,
et 10 à 15 % pour les adolescents ; la prévalence de la
rhinoconjonctivite atteint de 11 à 25 % des
adolescents. Dans une étude épidémiologique récente
menée par notre équipe, il apparaît que la fréquence
de l’allergie alimentaire atteigne 3,2 % de la
population générale. Les raisons de cette fréquence
accrue des maladies sont multifactorielles et encore
pas toutes déterminées et élucidées. Nous retiendrons
une pression sans cesse croissante de l’environnement
sur l’organisme, étant bien entendu que génétiquement la population n’a pas évolué en moins d’une
génération : modifications des conditions d’habitat
liées à des conditions économiques et socioculturelles,
modifications des comportements individuels et
collectifs concernant notre mode de vie et notre
alimentation… Il faut également tenir compte d’une
réactivité différente de l’organisme vis-à-vis
d’allergènes environnementaux.
6. 2-0010 - Maladies allergiques et réactions pseudoallergiques : définitions, mécanismes, épidémiologie
Étienne Beaudouin : Médecin des Hôpitaux.
Gisèle Kanny : Médecin des Hôpitaux.
Jenny Flabbee : Généraliste allergologue.
Denise-Anne Moneret-Vautrin : Professeur des Universités, chef de service.
Service de médecine interne - immunologie clinique et allergologie, hôpital Central, 29, avenue de-Lattre-De-Tassigny, C0 n° 34, 54035 Nancy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : E Beaudouin, G Kanny, J Flabbee et DA Moneret-Vautrin.
Maladies allergiques et réactions pseudoallergiques : définitions, mécanismes, épidémiologie.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 2-0010, 2001, 4 p
Références
[1] Demoly P. Allergologie - CD-ROM encyclopédique - Tome 1. Casamar : Sol
Portes, 1999
[4] Paupe P, Scheinmann P, De Blic J. Allergologie pédiatrique. Paris : Médecine
Science Flammarion, 1994 : 1-636
[2] European allergy white paper. The UCB Institute -Braine-Alleud, 1997 : 1-179
[3] Moneret-Vautrin DA. Guide du praticien en immuno-allergologie. Paris : Masson, 1994 : 1-179
4
8. 2-0020 - Circonstances permettant d’évoquer une manifestation allergique
Malgré un bilan approfondi et variable selon les
équipes, l’urticaire chronique ne connaît pas, dans
certains cas, d’étiologie identifiable ; on parle alors
d’urticaire idiopathique.
s
Eczémas
‚ Eczémas de contact
C’est une réaction d’hypersensibilité se traduisant
par un eczéma au niveau de la zone de contact à
des allergènes externes. Dans certains cas, des
lésions à distance sont possibles. L’eczéma peut
apparaître après ingestion de l’allergène responsable
de l’eczéma de contact (nickel, baume du Pérou…).
Causes
Elles sont multiples :
– les eczémas de contact dus à la profession ou à
des loisirs (eczéma des mains lié à la manipulation
de ciment en rapport avec une hypersensibilité au
chrome) ;
– les eczémas de contact dus à des médicaments
(l’allergie aux dermocorticoïdes est possible et doit
être suspectée devant une non-guérison ou
l’aggravation d’une dermatose habituellement
corticosensible) ;
– les eczémas de contact dus aux cosmétiques
(teintures, parfums…) ;
– les eczémas de contact dus aux contacts
vestimentaires (boutons de jeans, colorants
textiles…).
L’interrogatoire avant tout bilan allergologique
oriente la recherche de l’allergène particulier et
précise :
– la topographie de l’eczéma (un eczéma des
aisselles permet de suspecter une allergie aux
parfums) ;
– la chronologie par rapport à certains contacts
particuliers dans les 24 à 48 heures précédentes ;
– les activités du patient : ménage, loisirs… ;
– la profession du patient : les manifestations
d’eczéma apparaissant après un contact
professionnel et disparaissant lors des périodes de
congés doivent faire évoquer une pathologie
d’origine professionnelle ; une collaboration avec le
médecin du travail est nécessaire.
Le diagnostic principal de l’eczéma de contact est
la dermite orthoergique correspondant à des effets
irritatifs de la substance sans intervention de
phénomène immunologique.
Deux tableaux particuliers doivent être évoqués :
– la dyshidrose, qui se caractérise par une
éruption vésiculeuse très prurigineuse palmoplantaire et de la face latérale des doigts, reconnaît
diverses étiologies :
– la dyshidrose secondaire à une candidose, à un
foyer infectieux à distance, à des allergènes
exogènes ingérés (nickel, baume du Pérou…) ;
– la dyshidrose primitive évoluant dans un
contexte d’atopie ou une dyshidrose saisonnière où
le rôle de la sudation est discuté ;
– l’eczéma aéroporté est localisé aux parties
découvertes (région cervicofaciale, paupières, dos
des mains…) et est grossièrement symétrique ;
l’allergène est véhiculé comme un pneumallergène ;
les agents étiologiques sont variés comme la
mousse de chêne ou frullania (eczéma apparaissant
en forêt ou après manipulation de bois) ou la
primevère... Le diagnostic différentiel est les
photodermatoses.
‚ Dermatite atopique
La dermatite atopique est une des manifestations
cliniques de l’atopie dont elle peut être la première
expression. Chez l’enfant plus âgé peuvent
apparaître une rhinite ou un asthme.
La topographie des lésions d’eczéma varie en
fonction de l’âge :
– chez l’enfant de moins de 2 ans, les lésions
siègent principalement au niveau des régions
convexes : front, genoux, menton, cuisses ;
– chez l’enfant de plus de 2 ans, les zones
atteintes sont les plis : coudes, creux poplités,
poignets, chevilles, plis rétroauriculaires) ;
– chez l’adulte, les lésions sont polymorphes :
placards eczématiformes, lésions lichénifiées,
papules indurées de prurigo, lésions nummulaires
avec une topographie symétrique.
L’allergologue réalise un bilan dans différentes
directions en fonction des données anamnestiques
et de l’interrogatoire :
– recherche d’une allergie alimentaire d’autant
que le patient est un jeune enfant ;
– recherche d’une sensibilisation aux
pneumallergènes qui peuvent être responsables non
seulement de manifestations respiratoires, mais
encore des manifestations de dermatite atopique ;
– recherche d’allergie à des réactogènes
chimiques ou naturels rencontrés lors de l’eczéma de
contact qui entretient et aggrave les lésions de la
dermatite atopique ;
– recherche d’autres manifestations de l’atopie.
s
Rhinites
Le nez joue le rôle de filtre des muqueuses
respiratoires sous-jacentes. Parmi les particules
inhalées, les allergènes, les micro-organismes, les
polluants peuvent entraîner une inflammation
responsable de rhinites de natures diverses :
allergique, vasomotrice, iatrogène ou d’autres
étiologies.
Les symptômes majeurs permettant d’évoquer
une rhinite associent diversement prurit, troubles de
l’olfaction, rhinorrhée, éternuements, obstruction.
L’importance relative des symptômes oriente vers
une étiologie particulière : l’obstruction prédomine
dans les rhinites non allergiques perannuelles ;
l’anosmie est rare dans les rhinites allergiques.
Devant une rhinite il apparaît nécessaire de :
– rechercher des symptômes d’asthme plus ou
moins patent (toux nocturne en particulier) ;
– s’enquérir d’un avis spécialisé en oto-rhinolaryngologie (ORL) qui programme le cas échéant
certaines explorations paracliniques ; la réalisation
d’une endoscopie nasale précise l’état de la
muqueuse nasale (coloration, hypertrophie,
présence de polypes…) et l’existence d’anomalies
architecturales.
Dans le cas particulier de la rhinite saisonnière
pollinique, l’avis spécialisé ORL n’est pas
indispensable.
L’interrogatoire peut orienter vers une rhinite
allergique :
– existence d’un terrain atopique personnel ou
familial ;
2
– début de la symptomatologie avant 20 ans ;
– présence de signes évocateurs : manifestations
oculaires associées (conjonctivite), éternuements
associés à une rhinorrhée et à un prurit nasal ou
pharyngé ;
– circonstances de déclenchement :
– en milieu professionnel, l’apparition de
symptômes sur le lieu de travail et disparaissant lors
des périodes de congés oriente vers une pathologie
d’origine professionnelle ; la rhinite allergique
professionnelle précède le plus souvent l’apparition
de l’asthme dont le pronostic est plus péjoratif ;
– le caractère saisonnier (allergique) ou
perannuel (soit allergique ou non allergique).
‚ Rhinites saisonnières
L’attention est attirée par la chronologie des
événements, par le caractère saisonnier des
symptômes identiques, à quelques jours près, d’une
année sur l’autre. La comparaison avec le calendrier
pollinique de la région permet de suspecter le pollen
responsable : de janvier à avril dans le nord et l’est
de la France, on suspecte une allergie aux pollens de
bétulacées, c’est-à-dire bouleau, noisetier, charme ;
dans le Midi, ceux des cyprès ; de la fin du printemps
à l’été, c’est la grande saison pollinique des
graminées. Un tableau clinique qui traîne doit faire
évoquer une allergie à des pollens de nature
différente (graminées et bétulacées, par exemple).
Une symptomatologie de pseudopollinose fait
suspecter une allergie à certaines moisissures
(Alternaria ou Stemphilium).
Le diagnostic de rhinite pollinique est aisé et, au
vu du bilan allergologique, l’allergologue propose, le
cas échéant, une hyposensibilisation spécifique ou
immunothérapie.
‚ Rhinites perannuelles
L’interrogatoire et l’avis spécialisé ORL sont des
éléments indispensables. Il convient de distinguer les
rhinites allergiques perannuelles, les rhinites
vasomotrices et le syndrome de rhinite non
allergique à éosinophiles (NARES : non allergic rhinitis
eosinophilic syndrome).
Rhinites allergiques perannuelles
Les caractéristiques des rhinites allergiques
perannuelles sont :
– l’existence d’un terrain atopique familial ou
personnel ;
– un début précoce avant 20 ans ;
– la recrudescence pendant certaines saisons
(automne chez un sujet allergique aux acariens) ;
– l’association à un asthme ;
– l’apparition après un contact avec des
animaux ;
– une profession exposant à un risque allergique
(boulangerie, par exemple) ;
– la positivité d’un test biologique de dépistage
aux pneumallergènes (Phadiatopt, par exemple).
Rhinites vasomotrices
La rhinite vasomotrice est, souvent chez l’adulte,
la traduction d’une hyperréactivité de la muqueuse
nasale, se traduisant par des épisodes d’obstruction
alternant avec des épisodes de rhinorrhée.
On évoque une rhinite vasomotrice devant :
– un début à la puberté ;
– lorsqu’il existe des facteurs de stress ;
– quand les symptômes sont dominés par des
éternuements suivis de rhinorrhée ;
9. Circonstances permettant d’évoquer une manifestation allergique - 2-0020
– quand les symptômes surviennent par accès
dans des circonstances inopinées.
NARES
Il se singularise par :
– un tableau clinique particulier avec une gêne
importante et des troubles de l’olfaction fréquents
(élément d’orientation) ;
– l’absence de sensibilisation à des pneumallergènes et à des allergènes professionnels ;
– l’existence d’une éosinophilie dépassant 20 %
dans les sécrétions nasales (élément de
confirmation).
¶ Cas particuliers
– La polypose nasosinusienne, dont le diagnostic
est fait à l’endoscopie nasale, est rarement
allergique. L’allergologue s’attache toutefois à
rechercher une triade de Fernand Widal : asthme
non allergique, intolérance aux anti-inflammatoires
non stéroïdiens et à l’aspirine, polypose
nasosinusienne.
– Les infections rhinosinusiennes doivent
rechercher en particulier un terrain atopique car
l’allergie fait le lit des infections.
s
Asthme
La définition reconnue sur le plan international
est : « L’asthme est un désordre inflammatoire des
voies aériennes ; cette inflammation est secondaire
à un infiltrat inflammatoire polymorphe,
comprenant des mastocytes et des éosinophiles. Sur
un terrain particulier, cette inflammation entraîne
des symptômes qui sont en général en rapport avec
une obstruction bronchique diffuse et variable,
réversible spontanément ou sous l’effet du
traitement ; par ailleurs cette inflammation est la
cause d’une hyperréactivité bronchique à de
nombreux stimuli. »
Les formes cliniques sont très variées :
– les formes classiques : la crise typique, l’asthme
d’effort, l’attaque d’asthme, l’asthme instable,
l’asthme à dyspnée continue, l’asthme aigu grave ou
état de mal asthmatique ;
– les formes en fonction de l’âge :
– chez le nourrisson, c’est un syndrome obstructif
récidivant ou chronique caractérisé par la survenue
d’au moins trois épisodes de dyspnée sifflante avec
ou sans intervalle libre entre les épisodes aigus ;
– chez le plus grand enfant, l’asthme doit être
suspecté devant une toux récidivante, accompagnée
ou non de dyspnée ou de sibilances.
Les facteurs étiologiques ou déclenchants de
l’asthme sont multiples car l’asthme est une maladie
multifactorielle :
– les virus responsables d’aggravation de
l’hyperréactivité bronchique ;
– l’effort ;
– l’exposition aux polluants (tabac et pollution
atmosphérique) ;
– l’intolérance à l’aspirine et aux autres
anti-inflammatoires non stéroïdiens, et aux sulfites ;
– le reflux gastroœsophagien ;
– les facteurs hormonaux (asthme
prémenstruel) ;
– le stress ;
– les facteurs professionnels ;
– l’exposition aux allergènes inhalés.
L’allergologue précise tout particulièrement :
– les antécédents atopiques personnels ou
familiaux du sujet ;
– les circonstances de début et le mode évolutif
des manifestations ;
– les conditions de vie du patient : habitat
(tabagisme actif ou passif, type de logement,
existence ou non de moquette, présence d’animaux,
présence et types de plantes vertes, qualité et
ancienneté de la literie…), loisirs (équitation…) ; chez
l’enfant on n’omet pas de connaître l’environnement
à l’école ainsi que chez la nourrice ;
– l’environnement professionnel : une
collaboration avec le médecin du travail est
nécessaire afin de préciser au mieux les produits
utilisés au sein de l’entreprise.
C’est en fonction de toutes ces données que
l’allergologue réalise un bilan à la recherche d’un
allergène responsable. Dans certains cas, il n’est pas
retrouvé de composante allergique, on parle alors
d’asthme intrinsèque (qui est surtout l’apanage de
l’asthme à début tardif) par opposition à l’asthme
extrinsèque avec facteur allergique.
s
Conjonctivites allergiques
La conjonctivite allergique représente le quart des
conjonctivites. Elle s’associe, dans la moitié des cas, à
une rhinite allergique.
On distingue :
– la conjonctivite aiguë qui est due à l’exposition
transitoire à un allergène auquel l’organisme est
sensibilisé : allergie aux épithélia de chat, allergie aux
pollens… ; le diagnostic différentiel est la
conjonctivite virale ou microbienne ;
– la conjonctivite perannuelle ; les allergènes
concernés sont les mêmes pneumallergènes que
dans les rhinites perannuelles allergiques, les collyres
(principe actif ou les conservateurs comme le
benzalkonium et le thiomersal), les produits de
désinfection des lentilles.
s
Conclusion
Une bonne connaissance des maladies
allergiques en permet une meilleure approche
clinique et par conséquent une meilleure
identification des allergènes dont l’éviction est un
élément majeur dans le succès thérapeutique.
Étienne Beaudouin : Médecin des Hôpitaux.
Gisèle Kanny : Médecin des Hôpitaux.
Jenny Flabbee : Généraliste allergologue.
Denise-Anne Moneret-Vautrin : Professeur des Universités, chef de service.
Service de médecine interne, immunologie clinique et allergologie,
centre hospitalier universitaire, hôpital central, 29, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 54035 Nancy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : E Beaudouin, G Kanny, J Flabbee et DA Moneret-Vautrin.
Circonstances permettant d’évoquer une manifestation allergique.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 2-0020, 2001, 3 p
Références
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Rev Fr Allergol 1998 ; 38 : 541-543
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Masson, 1994 : 1-180
[2] De Blay F, Lieuher-Colas F. La pollution domestique. Allergie Immunol 1996 ;
31 : 268-269
[6] Ponvert C, Paupe J, Scheinmann P. L’exposition précoce aux allergènes représente un facteur déterminant du risque de développement ultérieur des maladies
allergiques chez les enfants à risque d’atopie. Hypothèses sur les mécanismes
susceptibles d’être en cause. Rev Fr Allergol 1996 ; 36 : 701-705
[3] Kanny G, Moneret-Vautrin DA. Mise en place d’une structure prédictive et
préventive de l’allergie alimentaire et des maladies atopiques. Alim Inter 1998 ; 3 :
17-21
[4] Kanny G, Moneret-Vautrin DA, Sergeant P, Hatahet R. Diversification de
l’alimentation de l’enfant. Applications au cas de l’enfant de famille atopique.
Méd Nutr 1996 ; 3 : 127-131
3
11. 2-0050 - Réactions d’hypersensibilité médicamenteuse
¶ Action sur les récepteurs bronchiques
Les bêtabloqueurs, en bloquant les récepteurs
bêta, peuvent démasquer une hyperréactivité
bronchique latente. Les sulfites contenus dans
certains médicaments peuvent interférer avec les
récepteurs cholinergiques et induire un
bronchospasme chez les asthmatiques.
¶ Interférence avec le métabolisme d’autres
médiateurs
Ainsi, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion
peuvent provoquer une toux quinteuse, un
angioœdème. Le rôle de la bradykinine non détruite
est suspecté.
Réaction de type Jarisch-Herxheimer
Un antibiotique induit la lyse des germes
conduisant à une réponse immunologique ou non
immunologique aux substances libérées (antigènes
ou toxines). Certaines éruptions sous antibiotiques
reconnaissent cette origine. D’autre part, le
diagnostic d’allergie médicamenteuse peut être
porté abusivement chez un patient sous
antibiotiques pour une infection virale dont le
tableau clinique se complète d’une éruption cutanée.
Interférence avec le système immunitaire
Certains médicaments peuvent induire la
prolifération de cellules lymphoïdes (pseudolymphome), d’autres déprimer le système immunitaire.
s
Principaux tableaux cliniques
– Chocs anaphylactique et anaphylactoïde.
Les chocs anaphylactiques sont dominés par les
chocs en milieu anesthésique. Les médicaments
incriminés par ordre de fréquence sont : les
myorelaxants (71 %), le latex (10,5 %), les
antibiotiques (7,8 %), les hypnotiques (4 %), les
macromolécules (2,2 %), les morphiniques (2,9 %).
De nombreux médicaments peuvent être
responsables d’accidents anaphylactiques et
anaphylactoïdes : antibiotiques (pénicillines),
produits de contraste iodés, AINS, etc.
– Maladie sérique.
Fréquemment décrite avec l’utilisation des
protéines hétérologues, la maladie sérique peut être
induite par certains antibiotiques (céphalosporine de
première génération).
– Atteintes cutanées et muqueuses.
Elles sont très variées : urticaire, œdème de
Quincke, érythème morbilliforme, scarlatiniforme,
érythème pigmenté fixe, syndrome de Lyell,
syndrome de Steven-Johnson, érythème
polymorphe, eczéma, purpura, etc.
Au niveau des muqueuses, on peut observer des
tableaux de stomatite ou de conjonctivite.
– Fièvre isolée.
La fièvre d’origine médicamenteuse reste un
diagnostic d’élimination.
– Manifestations respiratoires.
Ce peut être un asthme, une alvéolite allergique,
des infiltrats labiles, etc.
– Atteintes hépatiques.
Il peut s’agir d’une hépatite cytolytique ou
cholestatique.
– Cytopénies médicamenteuses.
Toutes les lignées sanguines peuvent être
atteintes : agranulocytose, thrombopénie, anémie
hémolytique.
– Atteintes rénales.
Différentes atteintes rénales sont observées :
néphrite interstitielle, glomérulonéphrite, syndrome
néphrotique, etc.
– Lymphadénopathie bénigne : « pseudolymphome ».
– Lupus induit.
– Manifestations neurologiques.
Des tableaux de polyradiculonévrite ou de
méningite peuvent être observés.
– Manifestations digestives.
Elles sont le plus souvent fonctionnelles.
s
Éléments du diagnostic
Tests de réintroduction
(cas particuliers)
Tests cutanés + biologiques
Effet de l'arrêt du médicament
‚ Prise en charge initiale
par le médecin traitant
Bilan biologique de débrouillage
Arrêt du traitement en cours
Examen clinique
Au début de toute suspicion de réactions
d’hypersensibilité à un médicament, il faut cesser
immédiatement la thérapeutique en cours. Il n’est
souvent pas possible au début d’une réaction
médicamenteuse de connaître son évolution et sa
gravité. Une éruption cutanée peut évoluer vers un
syndrome de Lyell de pronostic sévère ou n’être que
la manifestation visible d’une pathologie d’organe
grave sous-jacente avec atteinte hépatique, rénale,
etc.
Interrogatoire et examen clinique initial
De la qualité de cette étape dépend en grande
partie le succès du bilan diagnostique. L’interrogatoire et l’anamnèse sont essentiels. Le médecin
s’attache à relever toutes les prises médicamenteuses et leur chronologie dans les heures précédant
l’accident.
La qualité et la précision de l’examen clinique
initial et du rapport qui en est fait au médecin
allergologue permettent d’orienter au mieux vers la
nature de la réaction. L’analyse précise des
symptômes cliniques oriente le diagnostic
étiologique : urticaire aiguë de la réaction allergique
ou pseudoallergique par histaminolibération,
éruption maculopapuleuse par hypersensibilité
retardée, purpura, flush facial, etc.
Les facteurs de risque associés sont précisés : tares
viscérales, maladie virale, antécédents d’allergies
médicamenteuses multiples, antécédents familiaux.
Bilan biologique de débrouillage
Certains examens biologiques simples sont d’une
aide considérable au diagnostic. La numérationformule sanguine oriente vers une affection virale ou
retrouve une hyperéosinophilie fréquente dans les
réactions d’hypersensibilité médicamenteuse. On
s’attache à doser les paramètres biologiques
nécessaires au dépistage d’une atteinte d’organe
sous-jacente infraclinique : cytolyse hépatique,
atteinte rénale, cytopénie.
Le dosage de la tryptase sérique est utile lors d’un
accident anaphylactoïde. Élevé, il signe la
dégranulation des mastocytes. Ce dosage est
possible dans le sang prélevé dans les 24 heures
suivant l’accident. Il y a un parallélisme entre les taux
de tryptase et la gravité de l’accident.
Le dosage de l’histamine plasmatique a peu
d’intérêt du fait de sa demi-vie courte et des
2
Interrogatoire et anamnèse
1 Principe du bilan allergologique.
fluctuations importantes de ses taux liées aux
conditions de prélèvement et de transport des tubes.
Devant certains tableaux cliniques, la recherche
de paramètres d’une auto-immunité éventuelle peut
être indiquée ; la réalisation d’un prélèvement
biopsique aide au diagnostic.
‚ Information du centre
de pharmacovigilance régionale
La déclaration d’une réaction adverse à un
médicament est une obligation légale de tout
médecin. Le centre de pharmacovigilance, outre son
rôle de recueil des effets secondaires aux
médicaments, offre une aide précieuse au
diagnostic, en apportant les données bibliographiques et épidémiologiques permettant d’aider le
clinicien dans son cheminement diagnostique. Ces
informations permettent de déterminer l’imputabilité
d’un médicament dans une réaction adverse, à la
fois sur des critères chronologiques, sémiologiques
et bibliographiques.
‚ Bilan allergologique
Principe (fig 1)
Il faut proposer une consultation allergologique
aussi proche que possible de l’accident. Les relations
chronologiques (début de la prise, durée, arrêt)
orientent beaucoup le diagnostic.
Le bilan allergologique répond toujours à la
même logique diagnostique. Pour identifier le
médicament et le mécanisme de l’accident,
l’allergologue « lance une fusée ». La base de
lancement est large, se fondant sur l’interrogatoire,
l’anamnèse et l’analyse bibliographique. Le second
étage est celui de l’examen clinique. Le troisième
étage est celui du bilan biologique de débrouillage
12. Réactions d’hypersensibilité médicamenteuse - 2-0050
réalisé par le médecin en charge du patient au
moment de l’accident. L’effet des mesures d’éviction
du médicament est un élément essentiel du
diagnostic et constitue le quatrième étage. Le
cinquième étage est celui des tests cutanés,
éventuellement complétés par des tests biologiques.
Le dernier étage est celui de l’indication des tests de
réintroduction qui ont pour but d’asseoir l’absence
de sensibilité au médicament. Ils n’ont de but
diagnostique que dans l’intolérance aux AINS dont
ils constituent le seul moyen diagnostique.
Indications
Un bilan allergologique s’impose si la réaction a
été grave et/ou si les réactions médicamenteuses
sont récidivantes et qu’elles conduisent à une
situation de difficulté thérapeutique.
Dans de rares situations, l’allergologue peut
réaliser un bilan prédictif d’allergie. C’est le cas
notamment de la recherche de sensibilisation
antérieure à la chymopapaïne avant
chimionucléolyse.
Le but du bilan allergologique est de préciser le
mécanisme pour, dans un second temps, proposer
au médecin traitant et au patient une conduite
thérapeutique raisonnable. Ainsi, par exemple, lors
d’une réaction survenue lors d’une anesthésie locale
pour soin dentaire, le médecin allergologue tente de
déterminer si la réaction est liée à une réaction
vasovagale, un syndrome d’hyperventilation, une
réaction toxique, une réaction aux conservateurs ou
à l’adrénaline, un œdème postchirurgical, une
allergie au latex des gants du chirurgien-dentiste…
De la même façon, une éruption urticarienne
survenant sous traitement antibiotique peut certes
être liée à une allergie à l’antibiotique, mais
également appartenir au tableau clinique de la
maladie virale évolutive qui a justifié le traitement,
correspondre à une lyse microbienne sous
antibiothérapie, à une intolérance aux AINS, ou
encore à un événement extérieur sans relation.
Modalités
¶ Tests cutanés
Ils tentent d’identifier le médicament responsable
de l’allergie en reproduisant la réaction
immunoallergique au niveau de la peau. Selon le
mécanisme suspecté, des tests à lecture immédiate
(prick-tests, intradermoréactions) ou à lecture
retardée sont réalisés (patch-tests, intradermoréactions). La spécificité et la sensibilité de ces tests sont
variables selon le médicament testé. Si les tests
cutanés sont bien standardisés pour certains
médicaments comme les curares ou les pénicillines,
leur valeur diagnostique reste le plus souvent à
établir pour les autres médicaments.
Positifs, ils constituent un élément d’orientation
précieux pour l’immunoallergologue. Toutefois, leur
interprétation est délicate : positifs, ils peuvent
témoigner du potentiel histaminolibérateur du
médicament ou d’une sensibilisation IgE
dépendante.
Ces tests peuvent être faussement négatifs car la
substance en cause n’est pas le médicament
lui-même mais un de ses métabolites. Le sujet peut
réagir au métabolite mais pas au médicament testé.
¶ Test de réintroduction
Ces tests ne sont en général pas utilisés dans un
but diagnostique. Ils sont réservés aux médicaments
qui paraissent les moins imputables, dans le but d’en
autoriser le réemploi. L’absence d’hypersensibilité
démontrée à un médicament suspect permet de
réinstaurer un traitement nécessaire au patient. En
revanche, le test de réintroduction est le seul moyen
diagnostique de l’intolérance aux AINS liée à des
troubles du métabolisme de l’acide arachidonique.
L’intolérance aux AINS est démontrée par la
réalisation de tests de réintroduction de l’aspirine, à
doses croissantes, selon des protocoles bien
standardisés en milieu hospitalier spécialisé.
santé, en signalant le médicament suspecté et en
citant les autres médicaments pris de façon
concomitante.
– Remettre au patient une liste de noms
commerciaux de médicaments : son exhaustivité
n’est qu’éphémère.
– Généraliser une réaction à un médicament à
ceux de toute sa classe pharmacologique. Dans la
réaction allergique, c’est la communauté antigénique
qui est responsable des réactions croisées et non la
communauté pharmacologique. À l’inverse, dans les
réactions d’intolérance, c’est la classe pharmacologique qui est en cause.
Prévention et prise en charge
ultérieure d’un patient ayant
présenté des réactions
allergiques médicamenteuses
multiples
s
Conclusions
Le médecin allergologue rédige un compte rendu
informatif et délivre une carte d’allergie spécifiant les
médicaments contre-indiqués et les médicaments
utilisables en substitution. Il dénomme les
médicaments en cause par leur dénomination
commune internationale (DCI). En effet, toute liste de
noms commerciaux devient rapidement désuète et
non exhaustive du fait de la mise sur le marché de
nouvelles formes pharmaceutiques. Le malade
pourrait ainsi être conduit à consommer un nouveau
médicament auquel il est allergique et dont le nom
ne figure pas sur la liste.
Accoutumance rapide
Le diagnostic d’une allergie ou d’une intolérance
conduit usuellement à une proposition d’éviction
ultérieure d’une molécule médicamenteuse, parfois
étendue à sa famille, car la proximité de structure
moléculaire laisse craindre des réactions croisées. Il
existe cependant des cas où l’affection rend
indispensable l’utilisation du médicament, comme la
vitamine B12 dans l’anémie de Biermer, l’insuline
dans le diabète insulinodépendant, les antiinflammatoires dans certaines pathologies
rhumatismales… C’est dans ces cas que
l’accoutumance rapide peut être proposée.
Elle consiste en l’administration à intervalles
rapprochés de doses progressivement croissantes
jusqu’à l’obtention de la dose thérapeutique dans un
délai moyen de quelques heures à 24 heures, sous
surveillance médicale stricte, en milieu hospitalier.
Les effets de cette accoutumance sont temporaires. Il
ne s’agit pas d’une immunothérapie. Dès l’arrêt du
traitement, le sujet revient à son état antérieur de
sensibilisation.
‚ Écueils à éviter devant une suspicion
d’hypersensibilité médicamenteuse
– Poser le diagnostic d’allergie pour toute
réaction survenant sous traitement. Il est préférable
de décrire précisément la réaction dans le carnet de
3
‚ Conseils au médecin traitant
– Prescrire un minimum d’associations
médicamenteuses.
– Préférer pour chaque classe pharmacologique
les médicaments connus comme moins allergisants
que les autres.
– Éviter les médicaments non indispensables.
– Éviter les médicaments connus pour aggraver
une réaction allergique : bêtabloqueurs (généraux et
locaux), inhibiteurs de l’enzyme de conversion.
– Inscrire les traitements, leurs dates de début et
de fin sur le carnet de santé.
‚ Conseils au patient
– Ne pas faire d’automédication, ne pas prendre
un médicament sans avis médical.
– Montrer la carte d’allergie médicamenteuse à
tout médecin, dentiste ou pharmacien délivrant ou
honorant une ordonnance.
– En cas de réaction suspecte, arrêter tout
traitement et ne le reprendre qu’après avis médical
uniquement.
s
Conclusion
Les réactions adverses aux médicaments sont
une préoccupation courante du médecin généraliste.
Une prise en charge initiale optimale, suivie d’un
bilan allergologique soigneusement conduit, permet
de maîtriser au mieux la réaction et les prescriptions
thérapeutiques ultérieures. La multiplicité des
mécanismes et des médicaments en cause rend le
diagnostic d’hypersensibilité médicamenteuse
particulièrement délicat. Des principes de précaution
et de prévention simples peuvent limiter leur
incidence.
13. 2-0050 - Réactions d’hypersensibilité médicamenteuse
Gisèle Kanny : Médecin des Hôpitaux.
Étienne Beaudouin : Médecin des Hôpitaux.
Jenny Flabbee : Généraliste allergologue.
Denise-Anne Moneret-Vautrin : Professeur des Universités, chef de service.
Service de médecine interne, immunologie clinique et allergologie, centre hospitalier universitaire,
hôpital central, 29, avenue du Maréchal-de-Lattre-De-Tassigny, 54035 Nancy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : G Kanny, E Beaudouin, J Flabbee et DA Moneret-Vautrin. Réactions d’hypersensibilité médicamenteuse.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 2-0050, 2001, 4 p
Références
[1] Agence du médicament, Association des centres régionaux de pharmacovigilance, Syndicat national de l’industrie pharmaceutique : bonnes pratiques de pharmacovigilance. Médicaments à usage humain. Thérapie 1995 ; 50 : 547-555
[4] Laxenaire MC et le groupe d’étude des réactions anaphylactoïdes peranesthésiques. Épidémiologie des réactions anaphylactoïdes peranesthésiques. Quatrième
enquête multicentrique française (juillet1994-décembre1996). Ann Fr Anesth Réanim 1999 ; 18 : 796-809
[2] Bégaud B, Evreux JC, Jouglard J, Lagier G. Imputabilité des effets inattendus
ou toxiques des médicaments. Actualisation de la méthode utilisée en France.
Thérapie 1985 ; 40 : 111-118
[5] Moneret-Vautrin DA, Kanny G, Beaudouin E. Accoutumance rapide aux médicaments : éléments de rationalisation des protocoles. Allergie Immunol 1999 ;
31 : 73-78
[3] Imbs JL, Pouyanne P, Harambu F, Welsch M, Decker N, Blayac JP et al et le
réseau des centres régionaux de pharmacovigilance : iatrogénie médicamenteuse :
estimation de sa prévalence dans les hôpitaux publics français. Thérapie 1999 ;
54 : 21-27
4
15. 2-0070 - Prévention des maladies atopiques
grande humidité relative. Elles se développent au
niveau des ponts thermiques par formation de
condensation sur les parties froides, condensation qui
ne peut s’éliminer. Il faut éviter la surisolation et
favoriser la ventilation. Un papier peint qui se décolle
peut correspondre à une plaque de moisissures. Il faut
éviter de faire sécher le linge dans une pièce de vie de
l’habitation et veiller à une bonne ventilation des
pièces humides (salle de bain, lingerie).
Certaines plantes vertes comme le ficus, les
caoutchoucs sont allergisantes. De plus, les
moisissures se développent sur la terre des pots.
‚ Polluants
La pollution intérieure : un citadin passe 70 à 80 %
de son temps dans des bâtiments et l’exposition à la
pollution intérieure est loin d’être négligeable. Les
polluants chimiques sont les composés photooxydants (ozone, oxydes d’azote, monoxyde de
carbone [CO]), les composés organiques volatils (COV)
et la pollution particulaire (dioxyde de soufre [SO2]).
Le NO2 est capable de provoquer des crises
d’asthme, soit par une agression directe des bronches
ou bien en augmentant la réponse à un allergène. Les
COV et le formol sont rarement en quantité suffisante.
Les endotoxines bactériennes provenant des
poussières de maison seraient un facteur
d’aggravation de l’asthme.
Les effets sur la santé de la pollution extérieure
dépassent largement la responsabilité individuelle
pour être un problème de santé publique.
s
Prévention des maladies
professionnelles allergiques
Il est utile de bien distinguer les métiers exposant
aux substances protéiques des professions exposant
aux substances chimiques. En effet, seuls les premiers
offrent un risque plus élevé pour les sujets atopiques.
Les agents susceptibles d’induire des maladies
professionnelles allergiques à forme respiratoire ou
cutanée sont variés : protéines animales (animaux de
laboratoire, allergènes de l’industrie agroalimentaire :
porc, œufs…), substances végétales (farines, latex).
D’autres risques de sensibilisation peuvent exister sur
le lieu de travail : ficus ornemental, climatiseur
défectueux…
Le praticien a un rôle essentiel de conseil dans le
choix de l’orientation professionnelle de l’enfant
atopique. La détection de l’atopie chez un enfant ou un
adolescent, surtout s’il présente une maladie atopique,
amène à proposer une orientation professionnelle,
déconseillant les métiers exposant aux substances
protéiques (tableau II). En revanche, il n’est pas
nécessaire d’avoir un terrain atopique pour contracter
une sensibilisation aux produits chimiques :
« n’importe qui » peut présenter un asthme aux
isocyanates ou une dermite de contact au ciment (sels
de chrome)…
Il faut s’attacher à expliquer au patient atopique le
risque allergique particulier de certaines professions
pour qu’il envisage de s’orienter vers la profession la
moins à risque possible (tableau II). Il faut actuellement
insister sur la nécessité de mettre en place des
stratégies de prévention sur le lieu de travail pour
réduire au maximum la densité allergénique de
l’environnement professionnel (hotte aspirante,
masque, port de gants sans latex…). Il faut donner
toutes les informations au patient et c’est lui qui décide
en dernier recours, d’où l’intérêt d’une prise en charge
précoce du problème.
Tableau II. – Métiers exposant aux substances
protéiques (risque accru chez les atopiques).
- Agriculteurs
- Arboriculteurs et horticulteurs
- Boulangers
- Éleveurs ou vendeurs d’animaux, animaliers (laboratoires de recherche)
- Fromagers
- Industries agroalimentaires
- Industries du caoutchouc (latex), industries textiles
- Industries des produits de nettoyage (enzymes)
- Industries pharmaceutiques
- Industries de la soie
- Pomiculteurs
- Professions paramédicales, chirurgicales ou médicales (latex)
- Profession exposant au contact des bois exotiques
- Ébénisterie
- Fabricants d’instruments de musique
- Constructeurs de bateaux
- Meuniers, travailleurs des silos à grains
- Menuisiers
- Palefreniers
- Pharmaciens
- Vétérinaires
s
Atopie et loisirs
Il faut savoir aider l’atopique à choisir ses activités
de loisirs sans risquer d’aggraver sa maladie ou de
créer de nouvelles sensibilisations. On déconseille la
pratique de l’équitation, de la piscine, surtout en cas
d’infections oto-rhino-laryngologiques récidivantes ou
de dermatite atopique, alors que la natation doit être
recommandée à l’asthmatique.
Il faut être particulièrement vigilant sur les lieux de
séjour de vacances qui peuvent être très riches en
acariens et moisissures et être à l’origine de crises
d’asthme aux sports d’hiver ou à la mer !
s
Prévention des allergies
alimentaires
L’allergie alimentaire est chronologiquement la
première manifestation de l’atopie. Sa prévalence
croissante (actuellement 3,5 %) rend nécessaire la mise
en œuvre de stratégie de prévention. Ces mesures
préventives sont proposées chez l’enfant à risque
atopique.
La sensibilisation aux allergènes alimentaires in
utero a été démontrée et ce dès la 22e semaine de
grossesse. Un régime d’éviction est instauré dès le
quatrième mois de grossesse, excluant les deux
allergènes principaux de l’enfant : œuf et arachide. Ce
régime n’expose pas au risque de carence
nutritionnelle. Ce régime est maintenu chez la mère
pendant l’allaitement et chez le nourrisson jusqu’à la
fin de sa première année de vie. En l’absence
d’allaitement, on choisit de préférence un lait
hypoallergénique chez ces enfants. Pendant toute
cette période, on évite les allergènes à haut risque
allergique comme le sésame, les fruits exotiques… On
préfère les tétines en silicone aux tétines en latex.
La diversification de l’alimentation correspond à
l’éducation du système immunitaire digestif pour
mettre en place un système de tolérance aux aliments.
La diversification doit être prudente et tardive (fig 1). Il
faut également être vigilant quant aux protéines
alimentaires présentes dans les médicaments ou les
cosmétiques comme les huiles végétales, d’arachide
ou de sésame utilisées comme excipient, le lysozyme,
les céréales comme l’avoine... et éviter d’utiliser ces
produits chez les enfants à risque atopique.
Préparations
pour nourrissons (1)
Lait de femme
0-4 mois
Légumes (2)
Fruits (3)
Farines
sans gluten
4 mois
Viandes
Poissons (4)
Œufs (4)
Préparation
de suite
5-6 mois
Produits laitiers
autres que le lait
Gluten
7-12 mois
Petites pâtes
Semoule
Matières grasses
ajoutées (5)
> 12 mois
Pâtes
Riz
Lait de vache
et/ou lait pour enfants
en bas âge
(Eau seule boisson indispensable en dehors du lait)
2
1 Diversification de l’alimentation chez l’enfant
à risque atopique. 1. Lait
HA (hypoallergénique) :
à utiliser en prévention ; ne
convient pas en cas d’allergie aux protéines de lait
de vache ; 2. légumes :
commencer par un seul légume à la fois et éviter les
petits pois ; 3. fruits : commencer par un seul fruit
(pomme, pêche, poire,
abricot, prune), supprimer
les fruits exotiques (kiwi,
mangue, papaye, fruits
de la passion...), éviter
la banane ; 4. œuf et poisson : l’introduction doit
être reculée à 1 an ; 5. matières grasses : ne pas utiliser d’huile d’arachide, ni
de margarine contenant
la mention « graisse végétale non précisée ».
16. Prévention des maladies atopiques - 2-0070
Bien évidemment, toutes ces recommandations
sont associées aux conseils de prévention du risque
allergique de l’habitat.
s
Conclusion
Les possibilités actuelles de traitement étiologique
des maladies atopiques sont réduites. Le traitement
des manifestations est symptomatique et la
prévention de nouvelles manifestations passe par la
mise en place de stratégies d’éviction. Dans l’état des
connaissances actuelles, la mise en place de stratégies
de prévention secondaire visant à diminuer la densité
allergénique pour réduire le risque de sensibilisation et
d’apparition de la maladie apparaît essentielle. Le
médecin généraliste, en prise directe avec
l’environnement familier du patient, est un acteur
important de la maîtrise de l’environnement
allergénique. La mise en place de ces mesures doit
s’adapter au mieux aux particularités psychologique,
professionnelle et surtout financière du patient. L’aide
de professionnels tels que la diététicienne spécialisée
en allergie alimentaire ou la technicienne de
l’environnement apparaît essentielle pour
personnaliser au mieux les stratégies d’éviction. Le
médecin entreprend un dialogue au long cours car un
patient est atopique pour toute sa vie et chaque âge a
ses particularités.
Jenny Flabbee : Généraliste allergologue.
Gisèle Kanny : Médecin des Hôpitaux.
Étienne Beaudouin : Médecin des Hôpitaux.
Denise-Anne Moneret-Vautrin : Professeur des Universités, chef de service.
Service de médecine interne, immunologie clinique et allergologie, centre hospitalier universitaire, hôpital central,
29, avenue du Maréchal-de-Lattre-De-Tassigny, 54035 Nancy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : J Flabbee, G Kanny, E Beaudouin et DA Moneret-Vautrin. Prévention des maladies atopiques.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 2-0070, 2001, 3 p
Références
[1] Chabeau G, Dupuoy M, Buisson I. Orientation professionnelle de l’atopique.
Rev Fr Allergol 1998 ; 38 : 541-543
[5] Moneret-Vautrin DA. Guide du praticien en immunoallergologie. Paris :
Masson, 1994 : 1-180
[2] De Blay F, Lieuher-Colas F. La pollution domestique. Allergie Immunol 1996 ;
31 : 268-269
[6] Ponvert C, Paupe J, Scheinmann P. L’exposition précoce aux allergènes représente un facteur déterminant du risque de développement ultérieur des maladies
allergiques chez les enfants à risque d’atopie. Hypothèses sur les mécanismes
susceptibles d’être en cause. Rev Fr Allergol 1996 ; 36 : 701-705
[3] Kanny G, Moneret-Vautrin DA. Mise en place d’une structure prédictive et
préventive de l’allergie alimentaire et des maladies atopiques. Alim Inter 1998 ; 3 :
17-21
[4] Kanny G, Moneret-Vautrin DA, Sergeant P, Hatahet R. Diversification de
l’alimentation de l’enfant. Applications au cas de l’enfant de famille atopique.
Méd Nutr 1996 ; 3 : 127-131
3
18. 2-0080 - Traitements symptomatiques des maladies allergiques
Les collyres corticoïdes doivent être utilisés de
façon exceptionnelle et ne le sont qu’après avis
ophtalmologique spécialisé.
s
Tableau II. – Score de sévérité de l’asthme selon le consensus international.
Stade 1 : léger intermittent
Symptômes : moins d’une fois par semaine
Exacerbations brèves
Asthme nocturne : moins de deux fois par mois
Absence de symptôme et fonction respiratoire normale entre les crises
DEP ou VEMS supérieurs à 80 % - variabilité inférieure à 20 %
Stade 2 : léger persistant
Symptômes : plus d’une fois par semaine mais moins d’une fois par jour
Crises pouvant retentir sur l’activité et le sommeil
Symptômes d’asthme nocturne plus de deux fois par mois
DEP ou VEMS supérieurs à 80 % - variabilité 20 à 30 %
Stade 3 : modéré persistant
Symptômes quotidiens : plus d’une fois par jour
Crises retentissant sur l’activité et le sommeil
Symptômes d’asthme nocturne : plus d’une fois par semaine
Utilisation quotidienne de bêta-2-mimétiques inhalés d’action brève
DEP ou VEMS entre 60 et 80 % - variabilité supérieure à 30 %
Stade 4 : sévère persistant
Symptômes permanents
Crises fréquentes
Symptômes d’asthme nocturne fréquents
Activités physiques limitées par l’asthme
DEP ou VEMS inférieurs à 60 % - variabilité supérieure à 30 %
Asthme
Les buts du traitement de l’asthme sont :
– obtenir le contrôle des symptômes ;
– empêcher les exacerbations ;
– maintenir la fonction pulmonaire aussi
normale que possible ;
– conserver des niveaux d’activité normaux
(exercice physique y compris) ;
– é v i t e r l e s eff e t s i n d é s i r a b l e s d e s
thérapeutiques ;
– empêcher le développement d’une obstruction
bronchique irréversible ;
– empêcher la mortalité.
On ne revient pas sur l’éviction des agents
déclenchants identifiés. L’institution d’une
désensibilisation, lorsque ces indications sont
remplies, fait l’objet d’un chapitre particulier.
‚ Éducation
L’éducation des patients est de première
importance. Il faut expliquer que l’asthme est une
maladie inflammatoire chronique qui nécessite une
surveillance et un traitement continus.
« L’asthme est comme le diabète : une maladie
que l’on surveille et que l’on traite tous les jours. Le
diabétique surveille son sucre, l’asthmatique surveille
son souffle. »
Rien ne se fait sans l’adhésion du patient à ce
principe. Expliquer et convaincre sont les bases de
l’observance thérapeutique.
L’asthme est une maladie chronique. Elle va durer
et le patient doit apprendre à vivre normalement
avec sa maladie.
L’asthme se caractérise par des épisodes
d’obstruction bronchique qui se traduisent par une
difficulté à respirer. L’obstruction des bronches peut
être due soit à la contraction des muscles
bronchiques qui réduisent le calibre des « tuyaux »,
soit à une inflammation de la muqueuse qui tapisse
les bronches. Cette inflammation entraîne un
œdème et un épaississement de la muqueuse qui va
diminuer le diamètre intérieur des bronches.
Les crises ne constituent que la partie émergée de
l’iceberg, l’inflammation bronchique sous-jacente est
le substratum de la maladie asthmatique.
‚ Différents stades selon le consensus
(tableau II)
Le suivi de la maladie asthmatique nécessite des
mesures objectives de la fonction respiratoire.
La spirométrie est nécessaire lors du premier bilan
pour évaluer précisément l’importance du syndrome
obstructif. La prise en charge de la maladie
asthmatique justifie une éducation du patient. À
l’aide d’un débitmètre de pointe, l’asthmatique
mesure son débit expiratoire de pointe (DEP) matin
et soir avant la prise de son traitement, et veille ainsi
à l’équilibre de sa maladie et à la bonne adaptation
de son traitement. Les chiffres relevés permettent au
patient de se situer dans les zones de normalité,
d’alerte ou de gravité de son asthme : le DEP normal
est au-dessus de 80 % de la valeur théorique définie
en fonction de l’âge et de la taille ; entre 60 et 80 %,
DEP : débit expiratoire de pointe ; VEMS : volume expiratoire maximal seconde.
le patient est en zone d’alerte conduisant à modifier
son traitement ; un DEP en dessous de 60 % doit
amener le patient à consulter dans les meilleurs
délais son médecin traitant.
Le patient doit aussi connaître les signes
d’alarme : épisodes de toux ou de dyspnée pendant
les activités habituelles, existence de réveils
nocturnes par gêne respiratoire, aggravation d’une
dyspnée d’effort, baisse ou instabilité des DEP sur
plusieurs jours. Si le patient ne sait pas réagir devant
ces signaux d’alarme, il risque d’arriver au stade
grave qui justifie une médecine d’urgence : chute de
50 % du DEP, inefficacité des thérapeutiques
habituelles, cyanose, dyspnée de repos.
‚ Traitement de l’asthme
L’asthme est une maladie inflammatoire
chronique des bronches dont le traitement de fond
repose sur la prescription de bronchodilatateurs et
d’anti-inflammatoires dont les principales molécules
sont les corticoïdes inhalés. D’autres médicaments
sont possibles : les cromones, les théophyllines, les
antileucotriènes. Les indications de ces différentes
molécules sont précisées par le consensus sur la
maladie asthmatique et varient en fonction du stade
de cette affection.
Voie d’administration des médicaments
Le traitement par inhalation est préférable à la
voie générale ou orale et permet d’administrer les
produits directement dans les bronches en
minimisant le passage systémique.
Les médicaments peuvent être sous forme de
spray (inhalateurs doseurs), poudre (inhalateurs à
poudre sèche) ou en solution ou suspension pour
nébulisation. L’administration sous forme de spray
nécessite un apprentissage pour coordonner la
délivrance du produit et l’inhalation. La chambre
d’inhalation permet d’améliorer la prise des
médicaments en inhalateur doseur en diminuant la
vitesse initiale des particules et leur impaction au
niveau oropharyngé.
Ces chambres, adaptées à l’enfant, permettent
aux plus jeunes asthmatiques de bénéficier des
traitements inhalés. Il faut effectuer un lavage
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soigneux de la chambre d’inhalation avec un
détergent ionique, suivi d’un rinçage soigneux et
d’un séchage à l’air ambiant.
Traitements
Nous présentons dans ce chapitre le traitement
de fond de la maladie asthmatique (tableau III). Le
traitement de la crise d’asthme est, lui, présenté dans
le chapitre consacré aux urgences allergiques.
¶ Traitements de fond inhalés
Bêta-2-mimétiques
Ils induisent une bronchodilatation.
Les bêta-2-mimétiques de durée d’action brève,
salbutamol, terbutaline, fénotérol, pirbutérol, ont
pour effet principal de lever le spasme bronchique.
Ils augmentent la clairance mucociliaire et diminuent
la perméabilité vasculaire pulmonaire et, par ce biais,
l’œdème muqueux. Leur durée d’action est limitée :
de 4 à 6 heures. L’effet bronchodilatateur est
supérieur pour les formes inhalées par rapport aux
formes orales. Leurs effets secondaires sont :
tachycardie, tremblements, crampes, nervosité,
hyperglycémie, hypokaliémie.
Les bêta-2-mimétiques à longue durée d’action
(formotérol, salmétérol) ont une durée d’action plus
longue de plus de 12 heures. Leur indication
privilégiée est représentée par les exacerbations
nocturnes de l’asthme, les asthmes instables ou ceux
du petit matin mesurés par le DEP.
La prise de ces traitements précède celle des
corticoïdes inhalés car ils en facilitent la pénétration
par la bronchodilatation qu’ils induisent.
Corticoïdes inhalés
Ce sont les anti-inflammatoires les plus efficaces
par leur mode d’action : interférence avec le
métabolisme de l’acide arachidonique, synthèse des
leucotriènes et prostaglandines, diminution de la
perméabilité capillaire, inhibition de la production
des cytokines et augmentation de la sensibilité des
récepteurs b des muscles lisses des voies aériennes.
Ils sont bien tolérés à dose modérée pendant une
longue période ou à de fortes doses sur de courtes
périodes. Certaines études suggèrent que des doses
supérieures à 1 mg par jour de béclométasone