Dr MEHRI TURKI IMEN - Traitement du double menton : Une nouvelle technique tu...
Les œdèmes pulmonaires
1. Dr. KERFAH S.
Médecin résidente en pneumo-
phtisiologie EHUOran
Plan de la question
I. Introduction:
II. Physiopathologie:
A) Élévation de la pression hydrostatique capillaire :
B) Baisse de la pression hydrostatique interstitielle :
C) Baisse de la pression oncotique capillaire :
D) Altération de la perméabilité alvéolo-capillaire :
E) Insuffisance du drainage lymphatique :
III. Etiologies:
A) Œdème pulmonaire « de haute pression » :
B) Œdème pulmonaire « à haute perméabilité » :
IV. Diagnostic :
A)Interrogatoire :
B) Examen clinique :
C) Examens complémentaires :
1- Radiographie thoracique :
2- Biologie :
a/ GDS : b/ Peptide natriurétique de type B (BNP) :
c/ Troponine : d/ Ionogramme sanguin – créatinine plasmatique :
3- Bilan cardiaque :
a/ Échodoppler cardiaque : b/ Cathétérisme cardiaque droit :
c/ Électrocardiogramme (ECG) : d/ Coronarographie :
e/ Holter rythmique :
V. Traitement :
A)Buts :
B) Traitement de l'OAP cardiogénique sans signes de gravité :
C) Traitement de l'OAP cardiogénique grave :
D) Traitement étiologique :
VI. Pronostic :
A) Œdème cardiogénique :
B) Œdème non cardiogénique :
Les œdèmes pulmonaires
Objectifs pédagogiques :
a) Connaitre la physiopathologie de
l’OAP.
b) Connaitre les étiologies de l’OAP.
c) Connaitre les traitements de l’œdème
pulmonaire.
2. I. Introduction :
L'œdème aigu du poumon (OAP) est une affection pulmonaire secondaire à l'inondation ou l'accumulation
brutale de liquides dans les poumons (alvéoles ou des espaces interstitiels pulmonaires). Cet état est
responsable de troubles des échanges gazeux et peut entraîner une insuffisance respiratoire.
Le plus fréquemment, il est d'origine cardiaque et dû à une insuffisance cardiaque gauche aiguë (on parle
d'œdème cardiogénique). Il peut également être lié à des lésions du parenchyme pulmonaire (on parle
d'œdème lésionnel) ou à une transfusion d'un trop gros volume liquidien, tel du sang ou solution saline.
II. Physiopathologie :
Normalement, la quantité de liquide dans l'interstitium pulmonaire est liée à l'équilibre entre le passage de
liquide à travers l'endothélium capillaire pulmonaire vers les espaces interstitiels et son élimination par le
système lymphatique. La physiopathologie des œdèmes découle d'un déséquilibre dans l'équation
de Starling.
Plusieurs modifications des facteurs de l’équation de Starling sont potentiellement génératrices d’OP :
Augmentation de la PHc ;
Baisse initiale de la Phi ;
Baisse de la Poc ;
Augmentation de la perméabilité capillaire (K et s) ;
Insuffisance du drainage lymphatique ; cette condition ne dépend pas directement de la loi
Starling mais de l’intégrité du réseau lymphatique.
En pratique, les deux facteurs déterminants de la formation de l’OP sont d’une part l’élévation de la PHc
(oedème « de haute pression ») et d’autre part les troubles de la perméabilité capillaire (œdème « à haute
perméabilité »). Les autres facteurs constituent des éléments favorisant le développement de l’œdème.
A) Élévation de la pression hydrostatique capillaire :
Les cardiopathies gauches sont majoritairement les affections responsables de l’élévation de la PHc. Les
autres causes sont représentées par les excès de perfusion, l’abus des diurétiques osmotiques ou les rares cas
de gêne non cardiogénique au remplissage de l’atrium gauche.
Les atteintes cardiaques sont susceptibles d'entraîner une des pressions de remplissage du cœur gauche
(pression télédiastolique VG), entraînant ainsi une de la pression capillaire pulmonaire. La pression
hydrostatique augmentant, il y a passage de liquide depuis le compartiment sanguin capillaire pulmonaire
vers le secteur interstitiel et les alvéoles pulmonaires : c'est l'œdème pulmonaire. Cette extravasation de
liquide dans les poumons est à l'origine d'une détresse respiratoire : c'est une urgence thérapeutique.
3. B) Baisse de la pression hydrostatique interstitielle :
La baisse de la PHi ne suffit généralement pas à elle seule à générer un OP. Théoriquement, la chute
brutale de la pression intra-pleurale provoquée par l’aspiration trop rapide d’un épanchement liquidien ou
aérique peut entraîner une forte diminution de la PHi et aboutir à un OP. Cette conséquence d’une ponction
mal conduite est cependant inconnue en pratique.
En revanche, les dyspnées inspiratoires sévères qui résultent d’obstructions des voies respiratoires
supérieures (collapsus trachéal, corps étranger, paralysie laryngée, tumeur pharyngienne) entraînent une
chute spectaculaire de la pression intra-thoracique et, en association avec d’autres mécanismes
(stimulation du système sympathique, hypoxémie) , aboutissent à la formation d’un œdème qui peut
s’installer très rapidement.
C) Baisse de la pression oncotique capillaire :
L’hypoprotéinémie peut être IIaire
à des pertes protéiques digestives, à une insuffisance hépatique,
à un syndrome néphrotique ... Elle est susceptible d’induire un œdème sous-cutané en région déclive, mais
ne suffit pas à provoquer seule un OP. Mais, à l’occasion d’une conjointe de la PHc ou lors d’une
altération de la membrane alvéolo-capillaire, elle peut très efficacement contribuer à la formation de l’OP.
D) Altération de la perméabilité alvéolo-capillaire :
Les lésions de l’endothélium vasculaire et de l’épithélium alvéolaire, quelle que soit leur origine,
permettent le passage des protéines et donc de liquide du compartiment vasculaire au compartiment extra-
vasculaire en modifiant les indices de perméabilité K et d’imperméabilités.
Les altérations de la paroi vasculaire empêchent les colloïdes de l’interstitium de jouer leur rôle protecteur
osmotique, la PHc devient alors un facteur majeur de l’envahissement interstitiel par le liquide et une faible
élévation de cette pression peut conduire rapidement à une accumulation excessive. La libération de
médiateurs vasoactifs contribue également à l’augmentation de PHc.
E) Insuffisance du drainage lymphatique :
L’OP dû à l’obstruction ou à la compression des voies lymphatiques est rare et essentiellement secondaire
à un processus néoplasique du système lymphatique (carcinomatose) ou le comprimant. La gêne du retour de
la lymphe dans le courant veineux lors d’hypertension veineuse systémique est un facteur favorisant de l’OP.
III. Etiologies :
A) Œdème pulmonaire « de haute pression » :
4. B) Œdème pulmonaire « à haute perméabilité » :
IV. Diagnostic :
A) Interrogatoire :
L’anamnèse peut conduire à une présomption quant à l’étiologie de l’œdème : antécédents de souffle
cardiaque, de paralysie laryngée, suspicion d’intoxication, traumatisme cérébral, pancréatite…
B) Examen clinique :
Dyspnée : maitre symptôme. Polypnée, survenue plus ou moins brutale surtout nocturne (orthopnée : assis
ou plusieurs oreillers).
Toux : quinteuse, incessante, sèche ou quelques expectorations mousseuses.
Grésillement laryngé.
Cyanose, sueurs, signes de lutte.
Auscultation pulmonaire: crépitants bilatéraux, d'abord aux bases puis s'étendent jusqu'aux sommets ;
formes atypiques : asthme cardiaque (sibilants).
Auscultation cardiaque : normale, tachycardie ou autres anomalies selon l'étiologie (souffle, galop proto-
diastolique en cas d'IVG).
TA (normale, basse ou élevée) oriente vers le mécanisme étiologique, et peut guider le traitement.
Critères de gravité :
Signes d'épuisement : tirage, sueurs, balancement thoraco-abdominal, signes d'hypercapnie,
troubles de la conscience.
État de choc cardiogénique : avec les signes d'hypoperfusion.
5. C) Examens complémentaires :
1- Radiographie pulmonaire :
D'abord oedème interstitiel ⇒ lignes de Kerley (A: apex, obliques orientées vers les hiles, B: bases,
perpendiculaires à la paroi, C: péri-hilaires).
Puis oedème alvéolaire ⇒ opacités floconneuses, mal limitées, confluentes, bilatérales, symétriques,
prédominant aux régions hilaires (en “ailes de papillon”), parfois asymétriques voir unilatérale.
Les émoussements des culs-de-sac pleuraux sont fréquents, voir des épanchements.
Cardiomégalie fréquente également dans le contexte d’œdème cardiogénique.
2- Biologie :
a/ Gaz du sang :
OAP non sévère : hypoxie hypocapnie (effet shunt).
OAP sévère : hypoxie normocapnie puis hypercapnie et acidose respiratoire.
b/ Peptide natriurétique de type B (BNP) :
La synthèse en est en cas de distension des myocytes, comme on le voit typiquement dans une IC.
Son utilité diagnostique est d’éliminer l’origine cardiaque de l’œdème pulmonaire grâce à son excellente
valeur prédictive négative.
Le pro-BNP est parfois dosé. Son interprétation est la même mais les seuils sont différents.
Faux positifs : insuffisance rénale, hypertrophie myocardique, âge et processus infectieux.
c/ Troponine :
Pas indispensable, mais peut orienter vers une ischémie myocardique
d/ Ionogramme sanguin – créatinine plasmatique : indispensables.
3- Bilan cardiaque :
a/ Échodoppler cardiaque :
C’est l’examen de choix à la phase aiguë en cas d’OAP mal toléré ou de difficultés diagnostiques, et son
utilité est incontestable dans le bilan de la pathologie cardiaque sous-jacente en examinant la fonction
myocardique et valvulaire.
Elle évalue la fonction ventriculaire gauche et permet de diagnostiquer une insuffisance cardiaque
systolique (FEVG < 40 %, du débit aortique et de la fraction de raccourcissement du VG) ou diastolique
(FEVG > 40 % et troubles de la relaxation du VG).
Le Doppler permet de mettre en évidence une augmentation des pressions de remplissage du ventricule
gauche, dont le retentissement en amont est une augmentation des pressions capillaires pulmonaires.
6. b/ Cathétérisme cardiaque droit :
Cet examen invasif ne doit pas être réalisé en première intention en cas d’OAP, ce d’autant plus qu’une
cause cardiogénique est suspectée.
On note de façon constante une de la pression capillaire (>18 mmHg) quel que soit le mécanisme
étiologique précis de l’œdème. La pression dans l’OD est le plus souvent élevée.
c/ Électrocardiogramme (ECG) :
Sa réalisation est indispensable. Il permet d’objectiver des troubles du rythme ou de la conduction, d’une
ischémie …etc, orientant vers la cardiopathie sous-jacente.
d/ Coronarographie :
À visée diagnostique et thérapeutique en urgence en cas de syndrome coronarien aigu.
Dans un second temps s’il existe une suspicion de cardiopathie ischémique sous jacente.
e/ Holter rythmique :
À distance de la phase aiguë, proposé chez tout patient présentant des signes d'arythmie (palpitations,
dyspnées spontanées résolutive, syncopes…).
7. V. Traitement :
A) Buts :
Diminuer la pression capillaire pulmonaire.
Corriger les conséquences de l'œdème sur l'hématose (hypoxie, hypercapnie).
B) Traitement de l'OAP cardiogénique sans signes de gravité :
Position demi-assise.
Oxygénothérapie pour SpO2 ≥ 96%.
Diurétiques : ont la propriété essentielle de diminuer la PHc pulmonaire. Ils luttent efficacement contre
les œdèmes « de haute pression ». Leur utilisation est également indiquée dans les OP à haute perméabilité
car la pression hydrostatique favorise l’exsudation de fluide riche en protéines dans le parenchyme
pulmonaire.
- Le diurétique le plus utilisé car le plus efficace est un « diurétique de l’anse », le furosémide par voie
intraveineuse initialement.
- Ils possèdent également un effet vasodilatateur par voie intraveineuse. Les posologies sont à adapter à la
réponse diurétique et à ses effets sur l’hématose.
- En cas de nécessité de fortes doses, l’administration à la seringue électrique en continu sur 24 h est préférée
aux bolus répétés.
- Le furosémide augmentant la kaliurèse, une surveillance au minimum quotidienne du ionogramme sanguin
est indispensable ainsi qu’une supplémentation potassique.
- La pose systématique d’une sonde urinaire dans le seul but de quantifier la diurèse n’est pas recommandée.
Vasodilatateurs veineux (dérivés nitrés) : en première ligne, en association avec les diurétiques, dès
que la TA le permet ; 1 à 3 mg/h, arrêt si la PAS < 100 mmHg.
C) Traitement de l'OAP cardiogénique grave :
Prise en charge en soins intensifs.
Ventilation non invasive (CPAP et BiPAP) ou invasive (si trouble de la conscience ou arrêt
cardiorespiratoire)
Inotropes positifs : dobutamine puis adrénaline.
D) Traitement étiologique :
Toujours indiqué.
Doit être instauré le plus rapidement possible.
Arrêt des éventuels traitements inotropes négatifs (bêta-bloquants, inhibiteurs calciques…)
VI. Pronostic :
A) Œdème cardiogénique :
Toujours grave, surtout dans sa forme alvéolaire. Il dépend essentiellement de la pathologie cardiaque
causale et de la réponse au traitement.
B) Œdème non cardiogénique :
Son pronostic est généralement sombre et dépend directement de la réversibilité de l’affection qui le
provoque. Malgré les efforts de réanimation, le taux de survie n’excède pas 20 %.