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Série ‘Vers une politique de sécurité et de paix au XXIème siècle’
1 – Sous-série ‘Les armes nucléaires’
Diaporama n° 1
1 - Les sept vices
de la dissuasion nucléaire
Étienne Godinot
17.01.2024
Vers une politique de sécurité et de paix
au XXIème siècle :
un ensemble de trois sous-séries de diaporamas
1 – Abolir les armes nucléaires
2 – Développer l’intervention civile de paix
3 – Préparer une défense civile non-violente
Rappel : ce diaporama fait partie de la sous-série
1 - ‘Abolir l’arme nucléaire’ qui fait elle-même partie
de la série ‘Vers une politique de sécurité et de paix au
XXIème siècle’ sur irnc.org
Abolir l’arme nucléaire : un ensemble de 10 diaporamas
1 - Les sept vices de la dissuasion nucléaire
2 – La France et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN)
3 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - 1869-1925
4 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - de 1926 à 1945
5 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - depuis 1946
6 - Quelques personnalités qui ont remis ou remettent en cause la dissuasion
nucléaire ou se posent des questions à son sujet
7 - La position de l’Église catholique et des Églises chrétiennes sur l’arme nucléaire
8 - Les combats non-violents pour le désarmement nucléaire en France
9 - Le site CEA-DAM de Valduc
10 - Quel consensus sur la dissuasion nucléaire française ?
Photos : Angie Zelter, Paul Stehlin, Beatrice Fihn, Paul Quilès
Rappel : ce diaporama fait partie de la sous-série
1 - ‘Abolir l’arme nucléaire’ qui fait elle-même partie
de la série ‘Vers une politique de sécurité et de
paix au XXIème siècle’ sur irnc.org
Le nucléaire civil …
L’énergie nucléaire, sauf peut-être dans certains dévelop-
pements en cours comme les réacteurs nucléaires à sels fondus
de 4ème génération, est une énergie du passé :
- Elle repose sur l’extraction d’uranium, une ressource minérale
limitée (dont la France ne dispose d’ailleurs pas sur son territoire);
- Elle est dangereuse (Three Misle Island, Tchernobyl, Fuku-
shima; les centrales sont des cibles idéales en cas d’attaque
étrangère ou terroriste);
- Elle est ruineuse (corrosion-érosion de nombreux compo-
sants du circuit eau-vapeur; coûts réels très supérieurs aux coûts
prévus, par ex. EPR ou ITER; coûts faramineux de démantè-
lement des centrales, alors que les énergies renouvelables sont
de moins en moins chères et que le stockage de l’énergie élec-
trique progresse à grand pas, etc.);
- C’est une fuite en avant : on ne sait pas quoi faire des
déchets, sinon les enfouir et laisser ce cadeau empoisonné aux
générations futures.
…ne doit pas nous faire oublier
le nucléaire militaire
Mais Fukushima ne doit pas nous faire oublier Hiroshima :
l’arme nucléaire est intrinsèquement immorale, elle est fabriquée
à des fins de destruction, elle est infiniment plus dangereuse que
l’énergie nucléaire.
L’enjeu de l’arme nucléaire n’est pas d’abord militaire ; il est
certes politique et culturel, mais il est en premier lieu philosophi-
que et spirituel. Il est existentiel.
Images :
- Hiroshima (6 août 1945)
- Nagasaki (9 août 1945)
- La Tsar Bomba, bombe à hydrogène d’un équivalent de 57 mégatonnes de TNT,
explosée en octobre 1961 au-dessus de l'archipel de la Nouvelle-Zemble dans l'Arctique
russe, alors soviétique. Son énergie destructrice représente l'équivalent de 23 fois la
puissance libérée par l'ensemble des explosifs largués sur l'Allemagne durant la
Seconde Guerre mondiale, ou encore de 4 000 bombes atomiques du type de celle
lancée sur Hiroshima .
La folie nucléaire
L’arme nucléaire pose la question de la poursuite
de l’aventure humaine.
La menace de l’arme nucléaire, qui implique par
elle-même le consentement au meurtre de millions
d’innocents, est le reniement de toutes les valeurs qui
constituent la civilisation.
En anglais et en américain, « destruction mutuelle
assurée » se traduit par Mutual Assured Destruction,
ou MAD. Le mot mad signifie fou…
Image : Hiroshima, 6 août 1945
Une arme politique…
Les bombes atomiques ont été larguées sur Hiroshima et
Nagasaki en août 1945 par le Président états-unien Harry Truman
davantage pour impressionner les Soviétiques que pour mettre fin
à la guerre : les services secrets états-uniens avaient appris que
l’empereur du Japon voulait capituler, l’Armée rouge s’apprêtait à
déclencher son offensive en Mandchourie.
Pour le général de Gaulle, l’arme atomique est surtout conçue
comme l’instrument de la grandeur politique de la France*.
Photo du haut : Little Boy ("Petit garcon", il fallait y penser !), bombe lancée sur
Hiroshima.
* NB : Certains affirment que la dissuasion nucléaire permet à la France d’être
membre du Conseil de sécurité de l’ONU, mais à tort : La France était membre du Conseil
de Sécurité (CS) dès 1946, bien avant d'avoir la bombe atomique. Il se trouve que les 5
membres permanents du CS détiennent l'arme nucléaire, mais la possession de l'arme
nucléaire et le statut de membre du CS sont deux choses différentes et indépendantes.
Le CS est d’ailleurs un vestige de la 2ème Guerre mondiale : il est anormal que
l’Union Européenne ou l’Inde en soient absents, sans parler du Brésil ou de l’Indonésie,
que l’Afrique n’y soit pas représentée, etc.
Emploi, menace de l’emploi
Certes, par elle-même, la dissuasion n’est pas l’emploi,
mais elle est l’emploi de la menace, et l’emploi de la menace
comporte directement la menace de l’emploi.
Dès lors que l’emploi de l’arme nucléaire serait un
crime contre l’humanité, la menace de l’emploi est déjà
criminelle.
Dans un sous-marin nucléaire d’engins de nouvelle
génération (SNLE.ng) comme Le Terrible où Emmanuel
Macron s’est fait hélitreuiller peu après son élection, il est
installé 16 missiles M51 chacun pouvant porter 6 têtes
nucléaires TNO ayant chacune une puissance TNT 10 fois
supérieure à celle de la bombe d'Hiroshima. Soit au total, en
termes de puissance TNT, 16 x 6 x 10 = 960 bombes d’Hiros-
hima, soit plus de 150 millions de morts …
Photo : SNLE Le Terrible
Une arme de dissuasion,
faite pour ne pas être utilisée…
Cependant, la menace de l’emploi veut être
dissuasive, c’est-à-dire qu’elle a pour finalité de
conduire l’agresseur potentiel à renoncer à décider d’attaquer ou de menacer
nos « intérêts vitaux ».*
L’intention de l’emploi semble perdre son caractère criminel, dès lors que
l’objectif de celui qui l’exprime, c’est de ne pas avoir à passer à l’acte.
La dissuasion nucléaire a été pensée à l’origine par les généraux
Charles Ailleret, André Beaufre, Pierre-Marie Gallois et Lucien Poirier,
surnommés "les quatre cavaliers de l’Apocalypse" (cette idée de
destruction étant issue d’une mauvaise interprétation de l’Apocalypse
de St Jean).
Sacrée comme « la clé de voûte de notre défense », la dissuasion
nucléaire fige la pensée stratégique française depuis plusieurs
décennies. Le général Poirier, par exemple, disait qu’afficher du
scepticisme sur la dissuasion nucléaire, c’est faire le jeu de l’adversaire.
* « Notre force de dissuasion nucléaire demeure, en ultime recours, la clé de voûte de
notre sécurité et la garantie de nos intérêts vitaux.» Emmanuel Macron, 7 février 2020,
devant des élèves officiers de l’École de Guerre,
Quelle rationalité ?
« Mais c’est supposer que la rationalité domine les comporte-
ments guerriers, ce qui est contredit en permanence par la réalité des
guerres.
Certes, il existe une part rationnelle dans les logiques guerrières.
Mais celle-ci est subordonnée et le plus souvent débordée par une
pression émotionnelle qui peut être au service de buts barbares.
Ainsi la solution finale nazie était un modèle de rationalité
managériale, tout comme le fut la construction des arsenaux
nucléaires de tous les pays possesseurs de la bombe ».
Patrick Viveret, philosophe, politologue,
Conseiller honoraire à la Cour des Comptes
Images :
- La retraite de Russie (1812) et une colonne de prisonniers de guerre allemands après
la chute de Stalingrad (février 1943). Hitler a commis la même erreur que Napoléon, qui
n’a pas tenu compte du « général Hiver ».
- La Shoah (1941-1945), imaginée par les dignitaires nazis lors de la conférence de
Wannsee (20 janvier 1942) pour mettre au point l'organisation administrative, technique
et économique de la « solution finale de la question juive »
La conscience tranquille…
Puisque la bombe est faite pour ne
pas servir, celui qui a le pouvoir de la
déclencher a la conscience tranquille.
Ni la méchanceté, ni la haine, qui
alimentent d’ordinaire le désir du meurtre,
n’animent la menace de l’emploi de l’arme
nucléaire.
Là se trouve le paradoxe de la dissua-
sion nucléaire.
Pouvoir commettre le crime absolu
Au cœur de ce paradoxe, il y a l’immoralité
absolue de la possibilité et de l’intention de pouvoir
commettre le crime absolu.
Il est en outre totalement insensé de prendre,
pour se défendre, le risque d’être détruit, et de voir
transformer son pays en désert radioactif.
Seuls l’aveuglement, l’irresponsabilité et
l’inconscience peuvent expliquer l’accommodement
qui unit les décideurs et les citoyens.
Les sept vices de la dissuasion nucléaire
Sommaire
1 - Inefficace
2 - Dangereuse
3 - Illégale
4 - Antidémocratique
5 - Démobilisatrice
6 - Immorale
7 - Ruineuse
1 - La dissuasion nucléaire est inefficace
Sommaire
- Une arme non crédible, car inutilisable
- Les déclarations d’un ex-président de la République, Valéry Giscard d’Estaing
- L’inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples historiques
- La non-agression de l’Europe depuis 75 ans grâce à la dissuasion nucléaire ?
- La dissuasion nucléaire n’arrête pas le terrorisme
- Des armes non seulement inutiles, mais nuisibles
Une arme non crédible,
car inutilisable
En réalité, cette arme est inutilisable
- stratégiquement : son usage entrainerait des destructions mutuelles inouïes,
- politiquement : l'utilisateur serait mis au ban de la communauté internationale et de
son propre pays - ou de ce qu’il en resterait,
- moralement : crime de guerre ou crime contre l’humanité selon l’importance des
dégâts,
- écologiquement : la radioactivité n'a pas de frontière, cf. Tchernobyl.
Or une arme inutilisable ne peut avoir aucun effet dissuasif puisque
l’agresseur potentiel sait qu’elle ne sera pas utilisée…
La dissuasion nucléaire, c’est du… pipeau !
Image du haut : Tandem pour fiancés
Tandem pour conjoints en instance de divorce
(tirée du Catalogue des objets introuvables, car inutilisables)
Uniquement du bluff *
Un ancien ambassadeur de France à la conférence du désarmement,
Éric Danon (photo ci-dessus), a pu dire que l’arme nucléaire garantit la sécurité de
la France comme une porte blindée garantit la sécurité d’un logement.
En réalité, lui a répondu Dominique Lalanne, la dissuasion nucléaire
n’est pas une porte blindée, c’est une porte grande ouverte avec, au-dessus
de la porte, un panneau indiquant « Défense d’entrer, danger de mort ! ».
Mais si un voleur ne croit pas à la menace de mort, il entre dans la maison…
Non pas une sécurité… … mais une menace psychologique
* Bluff : Parole, attitude qui cherche à impressionner en faisant illusion .
Synonymes de bluff : boniment, bourrage de crâne, chantage, charlatanisme, chiqué, culot, épate,
esbroufe, illusionnisme, intimidation, mystification, mythe, poker, rodomontade, tromperie, vantardise,
vanterie..
La dissuasion nucléaire,
non crédible
Durant la Guerre froide, dans le scénario envisagé lors d’une
confrontation armée avec l’Union Soviétique, l’emploi des armes
nucléaires françaises contre les armées du Pacte de Varsovie n’aurait
pas manqué de déclencher les représailles nucléaires massives de
l’adversaire qui auraient provoqué la destruction de la France.
La France était donc dissuadée de dissuader…
Valéry Giscard d’Estaing, au sujet d’un scénario d’invasion
massive des forces soviétiques en direction de l’Europe de l’Ouest
durant la guerre froide, écrit dans ses Mémoires en 1992* :
« Une conclusion se fait jour peu à peu : ni de loin, où je suis, ni
sur le terrain, où se situent les responsables militaires, la décision
d’employer l’arme nucléaire tactique n’apparaît opportune. ( …) Quoi
qu’il arrive je ne prendrai jamais l’initiative d’un geste qui conduirait à
l’anéantissement de la France. »
* V. Giscard d’Estaing, Le pouvoir et la vie - T2 L’affrontement, Poche, p. 1965
L’interview de Valéry Giscard d’Estaing
Dans une interview*, V. Giscard d’Estaing répond : « Moi je
savais que je n’appuierais sans doute jamais sur le bouton nucléaire,
pour une raison simple, qui a sa valeur : c’était la fin de la France ! Si on
utilisait, nous, notre armement, ce serait contre les Russes qui
évidemment riposteraient tout de suite et la France serait détruite. »
Il est regrettable que cette déclaration soit intervenue plus de 30 ans après
la fin de son mandat présidentiel, au cours duquel il a pourtant défendu la position
gaullienne traditionnelle. C’est ainsi qu’en mars 1979, il déclarait à la télévision
française : « Notre système nucléaire est un moyen qui a pour objet la sécurité
ultime de la France. Si la décision appropriée à la sécurité de la France conduisait
à appuyer sur le bouton de la force nucléaire, je le ferais. (…) »
Comme le commente l’association ‘Initiatives pour le désarmement
nucléaire’ (IDN), « l’État français, quoiqu’il continue de faire la sourde oreille aux
appels au désarmement nucléaire, n’a jamais été dupe de ce coup de bluff bancal
appelé dissuasion ».
* https://www.youtube.com/watch?v=n6OtgP3CrcY&feature=youtu.be
Le passage à l’acte :
inimaginable et irresponsable
Il est facile d’élaborer en chambre et de proclamer sur
une estrade une rhétorique vantant les mérites de la
dissuasion nucléaire. Mais lorsque survient le moment du
passage à l’acte, il apparaît clairement que la rhétorique n’a
aucune prise sur la réalité. Les réflexions de V. Giscard
d’Estaing montrent que le passage à l’acte est véritable-
ment impensable, inconcevable, inimaginable, irréaliste et,
surtout, qu’il serait irresponsable.
On peut légitimement penser qu'Emmanuel Macron
aurait la sagesse de son prédécesseur. Tout le monde sait
cela pertinemment, y compris les agresseurs potentiels, si
bien que la dissuasion est une vaste tragi-comédie (dange-
reuse et ruineuse), un jeu psychologique entre chefs d’État
qui tiennent en otage leurs populations.
Photo du bas : E. Macron à bord du sous-marin nucléaire lanceur
d’engins (SNLE) ‘Le Terrible’ en juillet 2017, peu après son élection.
Se défendre / Se détruire
Dans les stratégies classiques, la menace de
l’emploi des armes avait pour fonction de dissuader
l’agresseur potentiel, et en cas d’échec de la
dissuasion (ex. la ligne Maginot), l’emploi lui-même
avait pour fonction de nous défendre contre
l’agression. Il y avait donc une continuité entre
dissuasion et défense.
Aujourd’hui, si l’agresseur contourne la
dissuasion, la théorie nous enjoint d’employer nos
armes nucléaires, mais la réalité rend cet emploi
impossible, car suicidaire. Les moyens de la
dissuasion ne peuvent plus devenir les moyens de
la défense, car ils seraient ceux de la destruction.
Il y a donc une fracture entre dissuasion et
défense, et cela constitue la faiblesse majeure de
ces systèmes d’armes.
La dissuasion - quelle qu’elle soit, nucléaire,
militaire ou civile - suppose des capacités et une
volonté. Dans le cas de la dissuasion nucléaire,
nous n’avons pas la volonté…
La crédibilité de la menace
pour l’agresseur potentiel et
directement fonction de la proba-
bilité de l’emploi de nos armes
nucléaires.
Si l’emploi est improbable, la
menace de l’emploi n’est pas
crédible.
L’inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples
1 - Le 24 juin 1948, alors que la future Allemagne de l’Est se
trouve occupée par les Soviétiques et que trois puissances occi-
dentales (États-Unis, Grande-Bretagne, France) sont présentes à
Berlin au milieu de cette zone, l’arme nucléaire états-unienne ne
dissuade pas l’URSS de bloquer les accès terrestres vers Berlin.
C’est le début de la "guerre froide". La réponse occidentale est un
pont aérien vers l’aéroport berlinois de Tempelhof destiné au ravitaillement de
la population berlinoise de plus de 2 millions de personnes, jusqu’à ce que
les Soviétiques lèvent le blocus sans contrepartie le 12 mai 1949.
2 - Le 25 novembre 1950, l’arme nucléaire états-unienne,
pourtant installée sur l’île de Guam dans la mer des Philippines,
ne dissuade pas la Chine de s’engager dans la guerre de Corée
aux côtés de la Corée du Nord dirigée par un régime communiste.
Photos :
- Caricature de l’ours soviétique enserrant Berlin dans ses griffes.
- Bataille du Chongchon en Corée du Nord (25 novembre au 2 décembre 1950) : les
troupes chinoises envahissent une des positions de l'ONU.
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Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples
3 - L’Égypte attaque Israël en 1967 et en 1973 malgré l'arme
nucléaire israélienne.
4 - Les armes nucléaires soviétiques et chinoises n’empêchent
pas la guerre russo-chinoise de 1969 au sujet d'une île du
fleuve Oussouri, l'île Zhenbao. De nos jours, la CIA et de nom-
breux historiens estiment le bilan humain à 20 000 morts.
5 - l'Argentine ne craint pas l'arme nucléaire britannique en 1982
quand elle décide d’annexer les îles Malouines.
Photo du milieu : l’île Zhenbao
../..
Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples
6 - Les armes nucléaires indiennes et pakistanaises
n’empêchent pas les crises entre l’Inde et le Pakistan au sujet du
Cachemire, dont celle de Kargil, ("guerre des glaciers") en 1999,
qui cause plus de 1 000 morts.
7 - la Russie dirigée par Vladimir Poutine n'a pas peur des
armes nucléaires de l'Occident en 2014 quand elle phagocyte une
partie du Donbass ukrainien, puis en 2022 quand elle agresse
l’Ukraine*.
Photo du haut : panorama de Kargil
* Il convient toutefois de préciser que l'Ukraine n'est pas membre de l'OTAN.
Certains affirment que si l'Ukraine avait conservé ses armes nucléaires au moment de la
dissolution de l'URSS en déc. 1991, elle n'aurait pas subi d'agression russe en 2014 et
en 2022. Cet argument ne tient pas, car l’Ukraine n’avait pas jusqu’en 1991 la
maîtrise des armes nucléaires installées sur son territoire par l’URSS.
Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples
8 - Les armes nucléaires chinoises et indiennes n’empêchent
pas une confrontation militaire entre la Chine et l’Inde en juin
2020 dans le Ladakh et en janvier 2021 sur le col de Naku
dans l’État indien du Sikkim. Une guerre éclair en 1962 avait
vu les troupes indiennes rapidement défaites par l’armée
chinoise.
9 - L’arme nucléaire israélienne n’empêche pas l’offensive
terroriste du Hamas depuis Gaza le 7 octobre 2023, la plus
meurtrière depuis la Shoah.
Photos :
- Des troupes indiennes se dirigeant vers la frontière sino-indienne, dans
l’Himalaya, le 14 septembre 2017
- Le massacre du festival de musique de Réïm, le 7 octobre 2023, au début de
l'invasion d'Israël par des terroristes du Hamas, dans le cadre de l'attaque du
Hamas contre Israël. 260 personnes au moins sont tuées et de nombreuses autres
blessées. Les terroristes commettent également plusieurs viols et prennent des
otages.
Le bouclier nucléaire protège… l’agresseur
Comme l’écrit Leonidas Kalogeropoulos à propos de la guerre
en Ukraine en 2022, « le bouclier nucléaire ne protège qu'un seul
protagoniste : l'agresseur ! Loin d'empêcher l'attaque du faible par le
fort, l'arme nucléaire ne dissuade que d'une chose : elle prohibe toute
intervention de forces alliées pour venir en aide à la victime, dont nous
sommes condamnés à assister impuissants à l'écrasement par les armes,
sous peine de transformer une guerre territoriale en guerre mondiale. »
Il est frappant de remarquer qu’en cas d’attaque russe sur des villes
ou sites d’Ukraine par des armes nucléaires tactiques, l’Europe annonce
- à juste titre - qu’elle réagirait par des armes conventionnelles.
Cette annonce est une dissuasion beaucoup plus efficace envers V.
Poutine (dont l’armée mesure cruellement l’efficacité des armes conven-
tionnelles occidentales) qu’une menace de frappe nucléaire à laquelle il
ne croit pas de la part de dirigeants humanistes et démocrates.
Photos :
- Léonidas Kalogeropoulos, consultant en affaires publiques, diplômé de l'Institut d'Études Politiques de Paris, de
l'Institut Français de Presse et titulaire d’une maîtrise de droit public, dirige le cabinet Médiation & Arguments. Il défend une
approche éthique du monde des affaires au sein du mouvement patronal Ethic (Entreprises de Taille Humaine Indépen-
dantes et de Croissance).
- Le 13 octobre 2022, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, déclare à Bruges « Toute attaque nucléaire contre
l’Ukraine entraînera une réponse, pas une réponse nucléaire, mais une réponse militaire si puissante que l’armée russe sera
anéantie ».
La non-agression de l’Europe depuis 75 ans
grâce à la dissuasion nucléaire ?
Contrairement à ce qu’on entend dire souvent, l'arme nucléaire
n'a pas fait preuve de son efficacité depuis 75 ans : la preuve principale
est qu'elle génère une course aux armements, et que certains États
ont voulu ou veulent se doter de boucliers anti-missiles au cas où elle
ne fonctionnerait pas...
Expliquer par la dissuasion nucléaire l’absence d’agression de l’Europe depuis plus
75 ans est une affirmation gratuite qui ne repose sur aucune preuve*.
« On ne peut attribuer une cause certaine à un événement qui ne s’est pas
produit », écrit très justement le général B. Norlain. Imagine-t-on un physicien donner une
explication à une absence de mouvement, ou un chimiste à une absence de réaction ?
* Au moins jusqu’en 1974, le dispositif français de dissuasion nucléaire n’était pas techniquement opérationnel
pour remplir la mission qui lui était assignée, et on sait maintenant que les services de renseignements états-uniens,
britanniques et soviétiques le savaient parfaitement…
La croyance à l’absence de guerre en Europe depuis la fin de la 2ème Guerre
mondiale à cause des armes nucléaires ressemble fort à la croyance de l’efficacité de la
poudre anti-éléphants. Un homme dans le train entre Le Mans et Angers jette une poudre
blanche par la fenêtre tous les 20 km. Une femme lui demande ce qu’il fait.
- C’est une poudre pour éloigner les éléphants.
- Mais, Monsieur, il n’y a pas d’éléphants d’ici !
- Bien sûr, Madame ! C’est grâce à ma poudre !
La non-agression de l’Europe depuis 75 ans :
quelques explications
On peut expliquer l'absence d'agression soviétique
- par le souvenir cruel de la 2ème Guerre mondiale en Russie,
- par le fait que le pouvoir communiste avait suffisamment à faire pour
imposer sa domination en URSS, en Europe de l’Est, dans les pays
musulmans,
- par la solidarité politique et militaire des pays d'Europe (OTAN)*,
- par le rôle des organisations internationales (ONU, Union européenne,
OSCE), par le travail des diplomates,
- ou encore par l’interdépendance économique et culturelle croissante.
D’autres même, comme l’historien Basil Liddell Hart,
l’expliquent par la résistance civile qu'auraient opposée les nations
européennes en cas d'agression par les troupes du Pacte de
Varsovie et par la "contagion démocratique" qui aurait menacé la
dictature communiste.
* La Finlande et la Suède neutres et non membres de l’OTAN n’ont pas été
attaquées par l’URSS, ni la Yougoslavie de Tito qui a pris ses distances avec Staline et
avec ses successeurs
Les leçons de l’histoire
Le mur de Berlin et le communisme n’ont pas été
vaincus par les armes de l’Occident. Pour l’essentiel, ils se
sont effondrés sous la pression de la résistance non-violente
des femmes et des hommes des sociétés civiles de l’Est qui
ont eu le courage de prendre les plus grands risques pour
conquérir leur liberté.
La dissuasion nucléaire occidentale n’a joué aucun rôle
dans la chute de l’empire soviétique*.
Photos : Vaclav Havel et la Charte 77 en Tchécoslovaquie
Lech Walesa et Solidarnosc en Pologne
Manifestation du 9 octobre 1989 à Leipzig, Allemagne de l’Est
* sinon peut-être que l'escalade (militaire en général) a eu un coût colossal que l'URSS
n'a pu continuer d'assumer, au détriment de ses services publics et de la population.
« Il n’y a pas de plan B ! »
Lors d’un colloque*, un participant a posé à Jean-Claude Mallet (photo ci-
contre), conseiller spécial de Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, la
question suivante : « Quel est le plan B en cas d’échec de la dissuasion ? ». La
réponse de Jean-Claude Mallet est courte et a le mérite de la clarté : « Il n’y a pas
de plan B ! ».
Cela signifie en clair qu’en cas d’échec de la dissuasion nucléaire, la
France serait soit sous la domination de l’adversaire qu’elle entendait dissuader et
en tous cas ne serait pas en mesure de protéger ses "intérêts vitaux", soit victime
d’une frappe nucléaire en réponse à la frappe française.
Les théoriciens de la dissuasion n’imaginent même pas qu’elle puisse ne pas
fonctionner, car cela reviendrait à remettre en cause sa pertinence… Le dogme de la
dissuasion nucléaire paralyse notre réflexion sur nos réponses possibles en cas de crise.
Une dissuasion sans plan B, c’est comme un navire sans canots de sauvetage, un
hôpital sans groupe électrogène, un député sans suppléant… Qui sont les réalistes
et qui sont les utopistes ? Qui sont les ‘bisounours’ ** ?
* colloque « Résistance et dissuasion - Des origines du programme nucléaire français à nos
jours » organisé à la ‘Bibliothèque Nationale de France’ le 5 octobre 2017. La question est de
Dominique Lalanne.
** terme cher à Hubert Védrine pour désigner les partisans du désarmement nucléaire.
Image : Le Titanic, réputé insubmersible… et dépourvu d’un nombre suffisant de canots
de sauvetage.
« N'envisagez jamais d'utiliser une arme nucléaire »
L’affirmation de Jean-Claude Nallet « Il n’y a pas de plan B ! » est
toutefois contredite par un de ses excellents confrères, Bruno Tertrais,
le « pape de la dissuasion », ex-chargé de mission auprès du directeur
des Affaires stratégiques du ministère de la Défense, ex-membre de la
commission du ‘Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale’
nommé par Nicolas Sarkozy, directeur adjoint de la ‘Fondation pour la
recherche stratégique’ (FRS).
« Mon propos était de dire que les armes nucléaires ne devraient
jamais être considérées sur le plan technique. N'envisagez jamais
d'utiliser une arme nucléaire car "il n'y a pas d'autre solution
technique" pour détruire ou neutraliser une cible. Il y a toujours un
moyen. »*
Alors que la dissuasion est soi-disant « la clé de voûte » de
notre défense, on reste confondu d’entendre un de ses grands
théoriciens affirmer qu’il ne faut jamais envisager d’utiliser l’arme
nucléaire …
* Disarmament and Deterrence - Bridging the Divide : Q&A (questions and answers)
EU Non-Proliferation and Disarmament Conference 2016 - Publication Fondation pour la
recherche stratégique (FRS) : Désarmement et dissuasion - Combler le fossé, 3 novembre
2016
Se préparer pour la guerre :
l’aveu d’échec de la dissuasion nucléaire
La Revue nationale stratégique (RNS) 2022 décidée par le
président Macron actualise des documents similaires de 2017 et
2021. Le retour d’un conflit armé « de haute intensité » sur le sol
européen figure désormais en tête des menaces. Le document
énumère les autres atteintes non militaires à la sécurité du pays
et de la population déjà identifiées par le passé : « les conséquences de la
prolifération, technologique ou autre, et la persistance de la menace
terroriste », les « autres grands défis globaux susceptibles de nourrir des
déséquilibres importants tels que les impacts du changement climatique
(accès à l’eau, insécurité alimentaire, migrations, démographie, pandémies,
etc.) », la « compétition de puissance » dans les « espaces communs
(cyber, spatial, fonds marins et espaces aéromaritimes) », etc.
Or, alors même qu’aucune de ces menaces n’est susceptible d’être
contrée par l’arme nucléaire et avant même d’examiner les moyens les plus
appropriés de répondre à ces défis, le document assène que « les
fondamentaux demeurent » et que donc « la France est et restera une
puissance dotée d’une dissuasion nucléaire robuste et crédible ».
Les contradictions
de la doctrine française de défense
Selon le document, il faut que la France devienne capable de
« passer en économie de guerre, c’est-à-dire de s’organiser pour que
l’industrie française puisse soutenir un effort de guerre dans la durée, en
cas de nécessité. » Il s’agit donc de se préparer à la guerre alors que
l’objectif stratégique affirmé de la dissuasion nucléaire « vise fondamenta-
lement à empêcher une guerre majeure qui menacerait la survie de la
Nation en protégeant la France contre toute agression d’origine étatique
contre ses intérêts vitaux et contre toute tentative de chantage. »
Autant dire que l’on ne fait pas réellement confiance à la dissuasion
nucléaire, pourtant censée être « crédible », pour empêcher la guerre. C’est
d’ailleurs déjà le cas dans la doctrine dite de « l’ultime avertissement »,
prévu pour « rétablir » la dissuasion donc au cas où elle échouerait…
Au total, cette mise à jour de la stratégie de la France compte
tenu du nouveau contexte international ne se traduit que par « la réaffir-
mation de dogmes éculés et des contradictions constantes d’une politique
de défense rendue impuissante par l’endormissement de l’esprit de défense
imputable à la dissuasion nucléaire. »*
* Marc Finaud, diplomate, vice-président de l’association ‘Initiatives pour le Désarmement
Nucléaire’ (IDN)
« L’avertissement nucléaire »
Le concept d’"ultime avertissement" est proposé pour la première
fois par le Premier ministre Raymond Barre en juin 1977. Il change de
nom pour se nommer successivement "armement nucléaire tactique"
(Pierre Mauroy, 1981), "armes préstratégiques" (à partir des années
1960), "armes de champs de bataille" (1974, lanceurs Pluton remplacés
en 1984 par les lanceurs Hadès), "alerte nucléaire", "ultime avertissement"
(Jacques Chirac, 2002 puis François Mitterrand), "avertissement de nature
nucléaire" (François Hollande, 2015) et désormais "avertissement
nucléaire".
L’objectif est, comme le soulignait le général Henri Bentégeat, chef
d’état-major particulier sous le président Chirac, de donner une troisième
option au chef de l’État entre le choix binaire de « ne rien faire » ou « de
provoquer des dégâts inacceptables ».
Le président Macron déclare dans son discours du 7 février 2020 :
« En cas de méprise sur la détermination de la France à préserver ses
intérêts vitaux, un avertissement nucléaire, unique et non renouvelable,
pourrait être délivré à un agresseur étatique pour signifier clairement que
le conflit vient de changer de nature, et rétablir la dissuasion. » ../..
« L’ultime avertissement » :
un aveu d’échec de la dissuasion
Cet "avertissement nucléaire" est une frappe unique en
premier, destinée à "restaurer la dissuasion" si le chef de l’État estime que l’adversaire a
dépassé un seuil de menace de nos "intérêts vitaux". Elle marque la détermination du
dissuadeur à envoyer dans un deuxième temps des missiles anti-cités sur le territoire de
l’agresseur.
La frappe d’avertissement viserait probablement des objectifs militaires ou des
sites industriels de l’agresseur.
Elle serait réalisée principalement par les Forces aériennes stratégiques (FAS : avions Rafale des bases
aériennes terrestres) ou par la Force aéronavale nucléaire (FANu : Rafale du porte-avions Charles de Gaulle). La tête
nucléaire aéroportée (TNA) est une ogive thermonucléaire d'une puissance estimée à 300 kilotonnes (soit 20 fois
Hiroshima), portée par le missile de croisière supersonique air-sol moyenne portée amélioré (ASMPA) d'une portée
maximale estimée à 500 kilomètres. Depuis le discours de Jacques Chirac en 2006, cette frappe peut être aussi
réalisée par les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE). C’est dans ce but que le nombre des têtes nuclé-
aires a été réduit sur certains des missiles de nos SNLE.
Images : Avion Rafale porteur de missiles ASMP-A,
Porte-avions Charles de Gaulle et avions Rafale
Cette utilisation d’arme nucléaire ne signifie rien d‘autre que l’échec
de la dissuasion ! " L’avertissement nucléaire" est tout simplement la
preuve que nos adversaires, mais aussi nos dirigeants, ne croient
pas à notre dissuasion nucléaire… ../..
« L’ultime avertissement » :
un aveu d’échec de la dissuasion
et un risque insensé d’escalade
Le général Patrick Charaix, alors commandant des Forces aériennes stratégiques,
reconnaissait que « si je fais de l’ultime avertissement, c’est que la dissuasion n’a pas
fonctionné et que nous sommes arrivés à la limite de nos intérêts vitaux ».
Par ailleurs, quel que soit l’adversaire, croire que
celui-ci restera sans réaction après avoir subi un raid
nucléaire revient à baser la sécurité de la France sur un
pari totalement fou…
"L’ultime avertissement" est bel et bien la première
étape de la guerre nucléaire avec ses conséquences :
massacres de populations, destructions matérielles,
pollution radioactive, hiver nucléaire, etc.
Image ci-contre : carte de France du nucléaire militaire
La dissuasion nucléaire
n’arrête pas le terrorisme
La dissuasion nucléaire n’offre aucune défense contre les
nombreuses attaques terroristes islamistes subies depuis des
années par les pays occidentaux.
Au contraire, il existe de réelles probabilités pour qu’un
État nucléaire soit jugé comme un acteur majeur auquel
incombe la responsabilité du désordre du monde et que, de ce
fait, il soit jugé comme une cible potentielle par des groupes
terroristes.
Non seulement l’arme nucléaire est inopérante face au
terrorisme, mais elle est, comme d’ailleurs les centrales
nucléaires, une cible idéale des terroristes.
Images :
- L’attentat contre les Twin Towers à New York (2 septembre 2001)
- Les victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo (7 janvier 2015)
- Le camion du massacre sur la Promenade des Anglais à Nice (14 juillet 2016)
Des armes
non seulement inutiles,
mais nuisibles
Les armes nucléaires ne servent à rien non plus
- pour combattre le crime transnational, les paradis fiscaux,
- pour prévenir les conflits ethniques et religieux,
- face aux risques de la guerre cybernétique*,
- et face aux risques de crise climatique, de crise énergétique et
donc alimentaire**.
Par les dépenses qu’elles occasionnent au détriment de
causes vitales et urgentes (lutte contre la faim et les pandémies,
misère, exclusion, analphabétisme, dépollution, etc.), elles
engendrent l’instabilité et l’insécurité.
* Guerre cybernétique : utilisation d'ordinateurs et d'Internet pour mener une
guerre dans le cyberespace, c’est-à-dire dans l’univers d’information et le milieu de
communi-cation lié à l’interconnexion mondiale des ordinateurs
* 30 % des transports routiers sont affectés aux denrées alimentaires. En cas de
grosse crise pétrolière, des famines urbaines sont probables…
2 - La dissuasion nucléaire est
dangereuse
• à cause du stock d’armes et des risques de la prolifération :
D’après le SIPRI*, il y a dans le monde, en 2023, 12 512
armes nucléaires en service, dont 1 800 à 2 000 en état
d’alerte. C’est certes moins que les 70 000 armes nucléaires
dans le monde dans les années 1990, mais c’est suffisant
pour mettre fin à l’aventure humaine.
La puissance de destruction moyenne de chacune étant
d’environ 30 fois celle de la bombe d’Hiroshima, cela signifie
que les États dotés d’armes nucléaires possèdent
l’équivalent de 375 000 bombes d’Hiroshima.
• et à cause des risques d’erreurs ou d’accidents.
* SIPRI : Stockholm International Peace Research Institute
Lees conséquences du passé :
2000 essais nucléaires dans le monde
Au total, plus de 2 000 explosions officielles, dont 543 essais
atmosphériques, ont eu lieu dans le monde. Tous les grands pays
ayant l'arme nucléaire ont procédé à des essais. Près de la moitié
des explosions officielles recensées, soit 1 050 explosions, ont eu
lieu aux États-Unis, suivis par l'Union soviétique, qui ont réalisé
715 explosions officielles. La France est à la troisième place avec
210 explosions.
La puissance cumulée des 67 essais conduits aux Iles
Marshall par les États-Unis de 1946 à 1958 équivaut à l’explosion
d’une fois et demie la bombe d’Hiroshima (15 kilotonnes) chaque
jour pendant douze ans !
L’essai Castle Bravo du 1er mars 1954, une bombe de
15 mégatonnes, 1 000 fois plus puissante que celle d’Hiroshima,
a contaminé mortellement des pêcheurs japonais et provoqué
un mouvement de révolte mondial.
L’essai soviétique de la Tsar Bomba en octobre 1961, la
plus grosse bombe H de l'histoire (57 mégatonnes), a développé
une boule de feu de 7 km de diamètre. L’éclair de l’explosion
fut visible à plus de 1 000 km …
Le danger pour l’avenir : le monde est une poudrière
12 512 armes nucléaires possédées par 9 États
La menace nucléaire
à l’occasion de crises
Dans son livre La menace nucléaire - De Hiroshima à la crise
ukrainienne (2022), l’historien Jean-Marc Le Page recense 29 épisodes
aigus de menaces nucléaires, la plus grave étant la crise de Cuba (1962)
entre l’Union soviétique et les États-Unis*.
Il répertorie aussi les crises de prolifération et quelques accidents
(aériens et sous-marins**)
* mais aussi les crises avec évocation de la menace nucléaire : la guerre de
Corée (1950-1953, entre la Corée du Sud, soutenue par les États-Unis, et la Corée
du Nord, soutenue par la Chine), Dien Bien Phu (1954, entre le Vietnam et la
France), Suez (1956, entre les Occidentaux et l’Égypte, soutenue par l’URSS),
l’Oussouri (1969, guerre russo-chinoise au sujet d'une île du fleuve Oussouri, l'île
Zhenbao), le Kippour (entre Israël et les pays arabes en 1973), le Cachemire (1999-
2003, ‘guerre des glaciers’ entre l’Inde et le Pakistan), le détroit de Formose (1994-
2022, entre la Chine et Taïwan, soutenue par les États-Unis), l’Iran (2001-2022,
contre Israël, soutenu par les États-Unis), l’Ukraine (agressée par la Russie de V.
Poutine en 2022, et soutenue par les Occidentaux,).
** notamment la disparition des sous-marins nucléaires USS Tresher (États-
Unis,1963), K 129 (URSS, mars 1968), USS Scorpion (États-Unis, mai 1968), K-141
‘Koursk’ (Russie, 2000)
Photo du haut : l’USS Scorpion, disparu en mer en mai 1968, avec 99 marins à son bord et 2
torpilles nucléaires anti sous-marines.
Les risques d’accident
Selon le journaliste états-unien Eric Schlosser, au moins 700
accidents ou incidents mettant en cause 1 250 armes nucléaires
auraient eu lieu pour la seule période 1950-1968.
Quelques exemples :
- La catastrophe de Kychtym (29 septembre 1957) est une contami-
nation radioactive qui s'est produite dans le complexe nucléaire militaire
de Maïak, une usine de retraitement de combustible nucléaire située
près de la ville d'Oziorsk en Union soviétique, dans l'actuelle Russie. Le
système de refroidissement de l'un des réservoirs, qui contenait entre
70 et 80 tonnes de liquides radioactifs, tombe en panne. L'explosion,
dont la puissance estimée équivaut à celle de l'explosion de 70 à
100 tonnes de TNT, projette dans les airs le couvercle en béton, d'une
masse de 160 tonnes. Elle provoque l’irradiation d’une zone de 23 000
km² affectant plus de 270 000 habitants.
Kychtym, Goldsboro
200 personnes meurent de cancers dus à l'exposition directe
aux radiations. Selon un rapport de Greenpeace de 2017, jusqu’à
20 000 personnes sont officiellement considérées comme ayant été
affectées par les conséquences de la catastrophe de 1957. Classée
au niveau 6 sur l'échelle internationale des événements nucléaires,
c'est, après la catastrophe de Tchernobyl et celle de Fukushima, le
troisième plus grave accident nucléaire jamais connu.
- Le 23 janvier 1961, un bombardier B 52 de l’US Air Force
laisse échapper ses deux bombes H au-dessus de Goldsboro, en
Caroline du Nord. L’une d’elles (260 x Hiroshima) termine sa course
dans les branches d’un arbre, son parachute déployé et ses
mécanismes de sécurité désactivés. Seul un petit interrupteur à
faible voltage permet d’éviter la catastrophe. Si la bombe avait
explosé, les villes de Washington, Baltimore, Philadelphie et New-
York auraient pu être touchées.
Photos :
- Mesure de radioactivité sur le site de Maïak, près de Kychtym
- L’accident de Goldsboro (1961)
Les risques d’accident : exemples en 1966
- Le 17 janvier 1966, deux avions se percutent au-dessus de
la Méditerranée. Des quatre bombes H que transportait le B 52,
trois sont retrouvées à terre près du village de Palomares en
Andalousie. 2 sont détruites à l'impact au sol, dispersant environ
4,5 kg de plutonium sur 250 hectares. La 3ème bombe touche le
sol et reste presque intacte. La 4ème, tombée dans la mer, est
récupérée intacte après 2 mois et demi de recherches.
- En juillet 1966, un bug se produit dans les transmissions
électriques à cause d'un orage, et la plaquette "DG" (décollage de
guerre), en noir sur rouge = immédiat, s’affiche dans l'escadron
d'alerte. Un bombardier Mirage IV des ‘Forces aériennes
stratégiques’ françaises décolle sur alerte, avec une arme
nucléaire réelle, une bombe AN-21 de 1500 kg. Une fois l’erreur
constatée, l’appareil est rappelé. Aucune procédure d’engage-
ment de tir - et sans doute d’amorçage de l’arme - n’a été
engagée.
Images : Une des bombes de Palomarès retrouvée en mer
Mirage IV de la Force aérienne stratégique
Les risques d’accident : exemples en 1977 et 1980
- En 1977, près de côtes du Kamchatka, un sous-marin soviétique
K-171 (photo) largue accidentellement une ogive nucléaire. Après une fouille
impliquant des douzaines de navires et avions, l'ogive est retrouvée.
- Le 19 septembre 1980 à Damascus (Arkansas), sur le complexe
de lancement 374-7 de la Little Rock Air Force Base, après une fuite
accidentellement provoquée dans l'un de ses réservoirs de propergols,
l’explosion détruit la porte de 700 tonnes censée protéger le missile Titan
(photo) d’une attaque nucléaire soviétique, et projette dans les airs la tête
thermonucléaire W-53, qui équipe alors le missile. Sa puissance explosive
est de 600 bombes d’Hiroshima. Elle est retrouvée le lendemain à
proximité ; ses dispositifs de sécurité ont empêché l'explosion nucléaire et
l'émission de matières radioactives.
Voici les noms de code des incidents et des accidents d'armes nucléaires par le Département
de la Défense des États-Unis :
- Nuke Flash (‘flash nucléaire’) : lancement accidentel et non autorisé d'une arme nucléaire créant
un risque de guerre ;
- Broken Arrow (‘flèche brisée’) : accident d'une arme nucléaire qui ne crée pas un risque de
guerre ;
- Bent Spear (‘lance pliée’) : incident significatif non catégorisé comme les deux premiers
- Dull Sword ( ‘sabre émoussé’) : événement ou déficience sur une arme nucléaire non catégorisé
comme incident, impliquant une arme nucléaire ou une ogive nucléaire, des composants nucléaires,
ou véhicule transportant une arme nucléaire ;
- Empty Quiver (‘carquois vide’) : saisie, vol ou perte d'une arme nucléaire états-unienne.
Les risques d’accident : exemples en 2009 et 2010
- Dans la nuit du 3 au 4 février 2009, collision à faible vitesse
par grand fond entre deux sous-marins nucléaires lanceurs d'engins,
le britannique HMS Vanguard transportant 16 missiles nucléaires
Trident, et le français Le Triomphant transportant lui aussi 16
missiles intercontinentaux M-45.
Les technologies anti-sonar sont tellement sophistiquées qu'il n'est pas
étonnant qu'aucun des deux submersibles n'ait vu l'autre, suggère le quotidien
anglais The Sun… D’après le Daily Telegraph, le coût des réparations pour les
deux sous-marins est estimé à 50 millions de £.
- Un responsable du Pentagone révèle, le 27 octobre 2010, que
l’armée américaine a perdu le contact, quatre jours plus tôt, pendant
45 minutes, avec 50 missiles nucléaires balistiques intercontinentaux
d’une portée de 5 500 km. Une panne informatique est à l’origine de
cet incident… (Le Monde daté du vdi 29 octobre 2010)
Photos : Le Triomphant et missile balistique intercontinental dans son silo
La dangerosité
n’est pas une vertu
Certains partisans de la dissuasion nucléaire objectent que la
dangerosité des armes nucléaires, loin d’être un problème, est une
preuve de la crédibilité de la dissuasion : si les armes nucléaires font
peur à des citoyens français, disent-il, elles font peur aussi à nos
agresseurs potentiels, si bien que les opposants à l’arme nucléaire, en
utilisant l’argument de la dangerosité, confortent involontairement la
dissuasion qu’ils critiquent.
Ces sophistes oublient simplement une différence essentielle :
- la dissuasion est un dispositif volontaire, dont on ne sait d’ailleurs
absolument pas s’il sera efficace,
- alors que les accidents et les défaillances techniques ou humaines
sont involontaires, mais bien réels.
Photos du bas : Le colonel Stanislas Petrov, officier soviétique qui, suspectant une
fausse alerte, à désobéi à une procédure. Grâce à sa perspicacité et à son bon sens, une
guerre nucléaire a été évitée de justesse le 26 septembre 1983. En mémoire de cette date,
l'Assemblée générale de l’ONU, le 26 septembre 2013, proclame le 26 septembre ‘Journée
internationale pour l'élimination totale des armes nucléaires’.
« Un jour, la bombe partira
sans qu’on sache pourquoi ! »
« Un jour, la bombe partira sans qu’on sache pourquoi ! » a
laissé échapper le général de Gaulle, premier des présidents de
la Vème République française.
Cette phrase est citée en 4ème page de couverture par Jean
Toulat dans son livre La bombe ou la vie (Fayard, 1969).
Jean Toulat, ancien Résistant, prêtre et journaliste honnête, ne
précise malheureusement pas où et quand le général a prononcé
cette phrase. Probablement cela lui a-t-il été rapporté par un
proche du général qu’il n’a pas pu citer.
- Photo du haut : Le 14 septembre 1966, le général de Gaulle, en tenue spéciale
anti-radiations, entouré d’Alain Peyrefitte, de Pierre Messmer et du général Pierre
Billotte, assiste depuis la passerelle du croiseur ‘De Grasse’ à l'explosion de la troisième
bombe nucléaire française dans le Pacifique.
- Photo du bas : Le livre de Jean Toulat (1915-1994) La bombe ou la vie (1969),
alors interdit dans les casernes
Le risque ne diminue pas, il ne fait que croître
S’exprimant devant les services de renseignement le 27 juillet
2021, le président des États-Unis Joe Biden a eu ces mots : « Je
pense qu’il est plus que probable que si nous finissons par une guerre
– une vraie guerre contre une puissance majeure – ce soit la consé-
quence d’une cyberintrusion de grande ampleur. »
La croyance que la chance pourra se prolonger indéfiniment fait
penser à cet homme qui tombe du 82ème étage d’un gratte-ciel, et qui
au niveau du 3ème étage se rassure en constatant « Jusqu’ici, tout
s’est bien passé ! »
Le risque d’explosion d’armes nucléaires ou même de guerre
nucléaire, déjà fort du fait de la prolifération, des défaillances
techniques, des erreurs humaines, augmente aujourd’hui avec les
risques d’attaque cybernétique contre les systèmes d’alerte ou de
déclenchement.
Beyza Unal et Patricia Lewis ont ainsi identifié 13 zones vulnérables
aux cyber-risques, parmi lesquelles les différents systèmes de communication,
les données télémétriques des missiles, les cyber-technologies dans les
laboratoires et les installations d’assemblage, les informations météorologiques
et de ciblage provenant de systèmes spatiaux ou de stations au sol, ou encore
les systèmes autonomes robotisés dans l’infrastructure stratégique.
Le risque d’utilisation
par des dirigeants déjantés
ou paranoïaques
Les menaces de guerre nucléaire proférées
- par le président des États-Unis Donald Trump contre la
Corée du Nord en 2017,
- par le dictateur Vladimir Poutine en mars 2022 contre
l’Europe si elle aidait l’Ukraine,
- ou par le dictateur nord-coréen Kim Jong-un en juillet
2022 contre la Corée du Sud et les États-Unis
rappellent que l’abolition des armes nucléaires est une
nécessité impérieuse, notamment pour qu'aucun respon-
sable politique ou militaire, et en particulier des dirigeants
déjantés ou paranoïaques, n'ait la possibilité d'en faire
usage.
3 - La dissuasion nucléaire est illégale
1) au regard du droit international
Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), signé
à l’ONU par les représentations diplomatiques de 122 pays en
juillet 2017, est entré en vigueur le 22 janvier 2021. Il est devenu
alors la norme du droit international.
Les États parties au TIAN s'interdisent « la mise au point,
l'essai, la production, le stockage, le transfert, l'utilisation et la
menace de l'utilisation d'armes nucléaires, en raison des
conséquences humanitaires catastrophiques qu’entraînerait leur
utilisation ». Pour les États dotés d'armes nucléaires y adhérant, le
TIAN prévoit un processus assorti d'un calendrier, conduisant à
l'élimination vérifiée et irréversible de leur programme d'armes
nucléaires.
Certes, les 9 puissances nucléaires, non signataires, ne
sont pas tenues de l’appliquer. Mais elles seront de plus en plus
considérées comme des États irresponsables, par l’opinion publi-
que internationale et par une grande partie de leur propre popu-
lation.
Photo du haut : La salle où le TIAN a été adopté à l’ONU en juillet 2017
La France perfectionne ses armements
en violation du TICE et du TNP
Le Traité d’Interdiction Complète des Essais nucléaires (TICE), signé
par la France en 1998, vise l’interdiction universelle des essais
nucléaires.
Or la France poursuit au Barp (Gironde) le programme ‘Laser
Mégajoule’ qui permettra d’atteindre en laboratoire des conditions thermo-
dynamiques (densité, pression, température) similaires à celles rencontrées
lors d’un essai nucléaire.
Dans le cadre du traité franco-britannique ‘Teutatès’ signé en nov.
2010, le programme ‘Epure’ du site CEA-DAM de Valduc se réalise avec les
Anglais en violation de l’article 6 du Traité de Non-Prolifération (TNP). Il a
pour but d’installer un ensemble de 3 accélérateurs d’électrons pour
radiographier l’explosion du premier étage des bombes nucléaires.
Ce qui est grave au Barp et à Valduc, ce n’est pas seulement le
gaspillage de l’argent public, c’est surtout la perversion de la science à des
fins de destruction.
Images : L’extension du site CEA-DAM de Valduc, l’installation Mégajoule’ au Barp
La mauvaise foi de la France
De même,
- le programme de construction de 60 missiles balistiques
intercontinentaux M-51 destinés à remplacer les missiles M-45 de
la Force océanique stratégique (FOST)
- et le missile de croisière ASMP-A (Air Sol Moyenne Portée
Amélioré) de la composante nucléaire aéroportée
ne respectent ni l’esprit ni même la lettre de l’article 6 du TNP*,
traité auquel la France a adhéré en 1992 (22 ans après l’avoir
refusé).
* « Chacune des Parties au Traité s'engage à poursuivre de bonne foi des
négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course
aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement
nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous un
contrôle international strict et efficace. »
Images : Missile intercontinental M 51, missile de croisière ASPM-A
La dissuasion nucléaire est illégale
2 - au regard du règlement militaire français
* « Le subordonné ne doit pas exécuter un
ordre prescrivant d’accomplir un acte manifes-
tement illégal ou contraire aux règles du droit
international applicable dans les conflits armés
et aux conventions internationales en vigueur en
France ».
Bulletin Officiel des Armées,
décembre 2005, n° 45.
Aujourd’hui, quelle est la crédibilité de la dissuasion nucléaire française,
alors que le règlement militaire français* interdit aux militaires, et donc aux officiers de
tir des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), d’obéir à des ordres
contraires à la loi internationale et à la morale ?
Le 8 juillet 1996, sur demande de l'AG de l'OMS et de l'AG de l’ONU, la Cour Internationale de
Justice (La Haye), conclut que l'emploi des armes nucléaires est, en principe, illégal après avoir
notamment constaté que ces armes sont « potentiellement d'une nature catastrophique », car leur
« pouvoir destructeur ne peut être endigué ni dans l'espace ni dans le temps. Ces armes ont le pouvoir
de détruire toute civilisation, ainsi que l'écosystème tout entier de la planète ».
Une discrimination inacceptable
Le traité de non prolifération (TNP) introduit de manière discriminatoire
un déséquilibre dans les rapports entre les États.
Il exige que les États non-nucléaires renoncent à acquérir l’arme
nucléaire alors même que les États nucléaires (USA, Russie, Royaume Uni,
France, Chine) n’ont pas renoncé à les posséder.
Une discrimination inacceptable
Les États nucléaires qui ne n’ont pas signé le TNP
(Inde, Israël, Pakistan) ne subissent pas la menace de
sanctions.
Corée du Nord, Arabie saoudite, Iran, Syrie
possèdent ou peuvent posséder l’arme nucléaire.
L’Allemagne*, le Japon, le Brésil, géants économi-
ques et politiques, n’ont pas l’arme nucléaire.
Le Brésil et l’Afrique du Sud y ont renoncé et ne
s’en portent pas plus mal…
* Toutefois, l’Allemagne, comme la Belgique, les Pays-Bas,
l’Italie et la Turquie, accepte d’abriter des armes nucléaires
états-uniennes dans le cadre de l’OTAN
4 - La dissuasion nucléaire est
antidémocratique
Par sa structure même, la dissuasion nucléaire implique la
démission des citoyen(ne)s qui abandonnent leur destin à la seule
décision du Président de la République.
Par les pouvoirs qu’elle confère au Chef d’État, l’arme nucléaire
instaure de facto une monarchie absolue de droit divin qui écarte et
éloigne le peuple de décisions qui concernent son existence. De même
que Louis XIV, le Roi Soleil, disait : « L’État, c’est moi ! », François
Mitterrand a pu dire : « La bombe atomique, c’est moi. » (1)
Même si l’on doit se méfier des sondages et de la "sondocratie",
une majorité des citoyens sont pour un désarmement nucléaire en
France. 76 % des Français en 2018 étaient en faveur de l’engagement
de la France dans un processus d’élimination des armes nucléaires (2).
À la question : « Vous personnellement, pensez-vous que la France doive
maintenant s’engager dans ce processus, c’est-à-dire signer et ratifier ce Traité
d’interdiction des armes nucléaires », 67 % des Français répondent favorablement,
soit plus des 2/3 de la population.
1 - Intervention de F. Mitterrand sur la politique de défense de la France, 5 mai 1994.
2 - Sondage IFOP du 4 juillet 2018 commandé par La Croix et le ‘Mouvement de la Paix’.
Un débat refusé
Le débat sur l’arme et la dissuasion nucléaires est totalement
étouffé en France.
La séance parlementaire du 23 mai 2018 est révélatrice : Une
sénatrice, Hélène Conway-Mouret (photo du haut), propose un débat national
sur la question : « Il nous paraît opportun d’organiser un débat au niveau
national sur cette question, afin d’informer et de sensibiliser nos concitoyens. Il
ne s’agirait en aucun lieu d’un sondage ni même d’un référendum. Ce serait une
occasion pour les Français d’être correctement informés et de s’approprier le thème
du nucléaire militaire au travers d’un débat porté, par exemple, par les parlemen-
taires. »
Réponse du rapporteur, Christian Cambon, Président de la
commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat (photo du
milieu) : « Un an après la campagne pour l’élection présidentielle, au cours de
laquelle ce sujet a été abordé, j’ai le sentiment que le débat a été tranché. Il ne
me paraît pas judicieux de le relancer, au risque de mettre ainsi à nouveau en
lumière toutes les oppositions sur le sujet et de donner la parole à tous ceux qui
souhaitent se manifester contre le nucléaire d’une manière générale. »
Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État (photo du bas) : « Même
avis : le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. »
5 - La dissuasion nucléaire est
démobilisatrice
Comme naguère la ligne Maginot face au nazisme, le risque principal de la
dissuasion nucléaire, en la faisant reposer sur un seul homme, le chef de l’État, est de
démobiliser la population au sujet de sa défense, et de la laisser complètement
démunie en cas de crise ou d'agression, d'où qu'elle vienne.
En décembre 1929, le ministre de la Guerre, André Maginot, présentait au Parlement
son ‘projet de loi relatif à l'organisation défensive des frontières’. Plusieurs députés répon-
dirent que la ‘Ligne Maginot’ coûterait très cher et n'offrirait aucune garantie contre les
véritables risques encourus par le pays. Ainsi, Jean-Marie Thomas (SFIO, Saône-et-
Loire) qui disait : « La France, c'est non seulement le territoire, mais peut-être aussi ceux
qui vivent sur ce territoire. »
À grands frais, on a construit jusqu'en 1936 sur les frontières Est et Nord-Est de la
France un énorme système de fortifications, qui a contribué à démobiliser la population
contre le risque réel que représentait le régime national-socialiste allemand.
../..
Le précédent de la ‘ligne Maginot’
La presse de 1939 proclamait le dogme sécuritaire de la
ligne Maginot en affirmant son caractère infaillible.
Mais, quelques mois plus tard, l'armée allemande contour-
nait cette dissuasion illusoire, infligeait aux armées françaises une
défaite éclair et occupait le territoire national. La défense militaire
ayant échoué, et aucune défense civile n'ayant été préparée, la
société française s'est retrouvée littéralement sans défense.
Ne sachant que faire, la plupart des Français se sont alors
résignés, à la suite des pouvoirs publics, à une collaboration qui a
permis à l'agresseur d'occuper les institutions de la société politi-
que et de les faire fonctionner à son propre service.
Photos :
- Ligne Maginot : fort de Schoenenboug
- L’exode de 1940
- La collaboration de la police avec les Allemands : la rafle du Vel d’Hiv (16 juillet 1942)
6 - La dissuasion nucléaire est immorale
L’existence même de l’arme nucléaire consacre l’échec de
toutes les morales, de toutes les philosophies, de toutes les spiritua-
lités, de toutes les sagesses, de toutes les religions.
Et cela même si l’arme nucléaire est destinée à ne pas être
utilisée. Un terroriste exerce un chantage, il ne passe pas forcément à
l’action.
Albert Camus, dans Combat le 8 août 1945, écrit : « La civilisa-
tion mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie.
(…) Ce n’est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples
vers les gouvernements, l’ordre de choisir définitivement entre l’enfer et
la raison ».
Le pape François déclare en novembre 2019 à Hiroshima :
« L’utilisation de l’énergie atomique à des fins militaires est
aujourd’hui plus que jamais un crime, non seulement contre
l’homme et sa dignité, mais aussi contre toute possibilité
d’avenir dans notre maison commune. (…) La possession
d’armes nucléaires est immorale. »
Un terrorisme d’État
La logique de la dissuasion implique que les décideurs
politiques soient fermement déterminés à passer à l’acte.
La menace nucléaire s’apparente directement à la prise
d’otage d’une population civile, à du terrorisme d’État*.
Les idéologues ont construit une représentation irénique de
la dissuasion nucléaire totalement éloignée de la réalité guer-
rière de la menace des bombes nucléaires et de leur emploi
potentiel.
* L’État français a d’ailleurs commis un acte terroriste en juillet 1985,
en coulant le Rainbow Warrior, navire-amiral de ‘Greenpeace’ qui
s’apprêtait à protester contre les essais nucléaires à Mururoa : un mort,
Fernando Pereira, une sérieuse crise diplomatique avec la Nouvelle-
Zélande, un "bide" international, la démission du ministre de la Défense,
d’énormes dédommagements à la Nouvelle-Zélande et à ‘Greenpeace’,
etc. Notons que le colonel chef du ‘Service Action’ de la DGSE chargé de
cette opération a été élevé à la dignité de Grand Officier de la Légion
d’Honneur en 1995…
Photos : - Essai de tir d’un missile balistique intercontinental;
- L’attentat contre le Rainbow Warrior
Une double aliénation
de l’homme moderne
En réalité, la croyance dans l’arme nucléaire se fonde
irrationnellement dans la confiance qui nous a été inculquée par
la civilisation moderne dans la technique et dans l’État.
Pour renoncer à la bombe, il faudrait que l’homme
d’aujourd’hui ait le courage d’oser se libérer de cette double
emprise qui le rend inconscient et irresponsable.
En définitive, l’arme nucléaire est une idole, plus dange-
reuse que les autres idoles contemporaines que sont le prestige,
le gigantisme, l’obsession de la vitesse, l’avidité, la course infinie
aux biens matériels en dépit des conséquences sur la planète,
etc.
Image du haut : Charlie Chaplin dans Les temps modernes (1936)
7 - La dissuasion nucléaire est ruineuse
Elle engloutit des sommes gigantesques, alors que les
crédits manquent pour l’hôpital, l’éducation, la transition
écologique. Le coût de l’arsenal nucléaire français de 1945 à
2010 est estimé à 228,67 milliards d’euros. (1)
La France a effectué 210 essais nucléaires, dont 146 en
Polynésie, et doit maintenant indemniser les victimes…
Nos dirigeants ont décidé de moderniser la dissuasion
nucléaire française dans le cadre des lois de programmation
militaire (LPM) et de consacrer un effort budgétaire d'environ
25 milliards d'euros sur la période 2019-2023 et davantage
pour la période 2024-2030.
Images
- Les essais nucléaires à Reggane, dans le Sahara algérien, ont précédé les essais
en galerie dans le Hoggar (1960-1966)
- Les essais nucléaires à Mururoa et Fangataufa, dans l’océan Pacifique (1966-
1996)
- Le site Laser Mégajoule au Barp, en Gironde, où sont faites des simulations
informatiques d’explosions nucléaires.
(1) Brunot Barillot, Audit Atomique, ‘Centre de documentation et de recherche sur la paix
et les conflits’ (CRDPC) devenu L’Observatoire des armements.
La dissuasion nucléaire est ruineuse
Selon le nouveau rapport 2022 « Gaspillage : dépenses
mondiales en armes nucléaires en 2022″, publiée par la Campagne
ICAN,
les 9 pays disposant de l’arme nucléaire ont dépensé 78,84 milliards
d’euros en 2022 pour un arsenal mondial de 12 512 armes nucléaires,
ce qui équivaut à près de 150 000 € par minute…
Pour la France, le gaspillage financier de 5,3 milliards en 2022
pour l’arme nucléaire représente soit plus de 10 000 € chaque minute !
La loi de programmation militaire
2024-2030
La nouvelle Loi de Programmation Militaire (LPM) prévoit un budget
de 413 milliards d’euros pour la période 2024-2030.
La dissuasion nucléaire et le nouveau porte-avions, deux postes
majeurs de dépense dans la LPM, sont franco-français, et ne s'intègrent
pas ou peu dans une politique européenne de sécurité et de défense, la
seule crédible à nos yeux.
On sait tous les vices de la dissuasion nucléaire, dont le principal
est celui de l’inefficacité.
Le nouveau ‘Porte-Avions de Nouvelle Génération’ (PANG)* envi-
sagé par la LPM pour un coût de 5 à 10 milliards d’euros, quant à lui, ne
sera au mieux qu’un outil de gesticulation pour afficher notre "puissance",
au pire une cible idéale pour nos ennemis potentiels. Comme l’écrit Henri
Vernet* : "Ces aéroport flottants formeraient des cibles toutes désirées pour
des missiles hypersoniques russes ou chinois. Et ils seraient difficile-ment
employables dans une guerre comme celle ayant lieu en Ukraine, entravés
dans leurs manoeuvres par l'étroitesse de la mer Noire".
** Rédacteur en chef adjoint de Aujourd'hui, 2 avril 2023
* décrit comme une "cathédrale technologique de 75 000 tonnes" par le ministre des Armées
Sébastien Lecornu, prévu pour être opérationnel en 2038, le PANG (photo du haut) transportera
2.000 marins, 300 avions de chasse comme le Rafale ou encore des drones.
Le poids des lobbys
Derrière toutes ces décisions se profile l’emprise des lobbies de
l’industrie d’armement sur les décideurs politiques.
Les liens forts entre la ‘Direction Générale de l’Armement’ (DGA -
ingénieurs à statut militaire), premier investisseur de l’État, et les entreprises
de défense permettent de parler à juste titre de complexe militaro-industriel.
Paul Quilès, alors que les dirigeants états-unien songeaient à l’Initiative de défense
stratégique (IDS : missiles anti-missiles, "guerre des étoiles") a écrit dans Le Monde que
l’IDS coûterait très cher et ne servirait à rien. Jean-Luc Lagardère, dirigeant de Matra, lui
a reproché cette tribune : « Vous allez nous faire perdre d’énormes contrats ! »
Le général et Président des États-Unis Dwight Eisenhower (1890-1969)
est le plus célèbre des militaires et des hommes politiques à avoir
dénoncé le « complexe militaro-industriel », qu’il faudrait appeler plutôt
complexe militaro-scientifico-industriel.
Son discours télévisé de fin de mandat, prononcé le 17 janvier
1961, reste connu sous le nom de Military-Industrial Complex Speech :
« Dans les conseils du gouvernement, nous devons prendre garde à
l'acquisition d'une influence illégitime, qu'elle soit recherchée ou non, par
le complexe militaro-industriel. Le risque d'un développement désastreux
d'un pouvoir usurpé existe et persistera. »
La mentalité nucléaire
Le plus grave, et donc le plus inquiétant, c’est le triomphe de la
mentalité nucléaire qui inhibe la conscience des citoyens.
Ceux-ci ont perdu toute faculté d’indignation devant le fait que
l’ingéniosité de l’homme se pervertit dans la fabrication d’armes de
destruction massive.
Notre pays a besoin de nombreux lanceurs d’alerte pour
rompre cette compromission et ce silence.
Selon l’article 6 de la ‘loi Sapin II’ du 9 décembre 2016, “Un lanceur
d’alerte est une personne physique qui révèle ou signale, de manière désin-
téressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste
d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France,
d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un
tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice
grave pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance”.
La défaite de la raison
et de l’intelligence
L’existence même de l’arme nucléaire consacre
l’échec de toutes les morales, de toutes les philosophies, de
toutes les spiritualités, de toutes les sagesses, de toutes les
religions.
La dissuasion nucléaire est la défaite de la raison, la
défaite de la pensée, la défaite de l’intelligence.
Images
- Albert Einstein : « Si j’avais su, je me serais fait plombier ! »
- Mohandas Gandhi : « J’affirme que celui qui a inventé la bombe atomique a commis
la plus grande faute dans le domaine de la science »
Abolir les armes
les plus immorales et dangereuses
Les armes nucléaires seront abolies un jour - le plus vite
possible sera le mieux. Les armes de destruction massive ou les
armes les plus immorales sont interdites par la communauté
internationale et peu à peu abolies :
- les armes biologiques (avril 1972)
- les armes chimiques (Paris, janvier 1993)
- les mines antipersonnel (Ottawa, déc. 1997)
- les armes à sous-munitions (Oslo, déc. 2008)
- les armes nucléaires (TIAN, janvier 2021).
Et la menace iranienne ?
Et la bombe nord-coréenne ?
Certains pourront dire : la dissuasion nucléaire nous met à l’abri
des armes nucléaires (existantes, supposées ou à venir) de pays non
démocratiques, tels que l’Iran (qui n’en a pas) et la Corée du Nord.
La réponse tient en 2 points :
1 - Les bombes des pays démocratiques ne dissuadent pas ces
dirigeants de s’armer, puisqu’ils le font ou menacent de le faire…
On n’imagine pas une menace de frappe, nucléaire ou non, pour obliger
ces pays à arrêter leurs programmes d’armement et de recherche.
2 - Au contraire, les bombes atomiques des pays démocratiques
donnent un argument majeur aux dictateurs : « Pourquoi, si l’arme
nucléaire est nécessaire à la sécurité de votre pays, n’aurions-nous pas le
droit de nous en doter nous aussi ? ».
Le seul langage crédible est celui de l’exemplarité. ■
Photos : - Ali Khamenei (Iran, dictature islamique)
- Kim Jong-un (Corée du Nord, monarchie stalinienne)

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Armes nucléaires. — 01. Les sept vices de la dissuasion nucléaire

  • 1. Série ‘Vers une politique de sécurité et de paix au XXIème siècle’ 1 – Sous-série ‘Les armes nucléaires’ Diaporama n° 1 1 - Les sept vices de la dissuasion nucléaire Étienne Godinot 17.01.2024
  • 2. Vers une politique de sécurité et de paix au XXIème siècle : un ensemble de trois sous-séries de diaporamas 1 – Abolir les armes nucléaires 2 – Développer l’intervention civile de paix 3 – Préparer une défense civile non-violente Rappel : ce diaporama fait partie de la sous-série 1 - ‘Abolir l’arme nucléaire’ qui fait elle-même partie de la série ‘Vers une politique de sécurité et de paix au XXIème siècle’ sur irnc.org
  • 3. Abolir l’arme nucléaire : un ensemble de 10 diaporamas 1 - Les sept vices de la dissuasion nucléaire 2 – La France et le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) 3 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - 1869-1925 4 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - de 1926 à 1945 5 - Figures de la résistance à l’arme nucléaire - depuis 1946 6 - Quelques personnalités qui ont remis ou remettent en cause la dissuasion nucléaire ou se posent des questions à son sujet 7 - La position de l’Église catholique et des Églises chrétiennes sur l’arme nucléaire 8 - Les combats non-violents pour le désarmement nucléaire en France 9 - Le site CEA-DAM de Valduc 10 - Quel consensus sur la dissuasion nucléaire française ? Photos : Angie Zelter, Paul Stehlin, Beatrice Fihn, Paul Quilès Rappel : ce diaporama fait partie de la sous-série 1 - ‘Abolir l’arme nucléaire’ qui fait elle-même partie de la série ‘Vers une politique de sécurité et de paix au XXIème siècle’ sur irnc.org
  • 4. Le nucléaire civil … L’énergie nucléaire, sauf peut-être dans certains dévelop- pements en cours comme les réacteurs nucléaires à sels fondus de 4ème génération, est une énergie du passé : - Elle repose sur l’extraction d’uranium, une ressource minérale limitée (dont la France ne dispose d’ailleurs pas sur son territoire); - Elle est dangereuse (Three Misle Island, Tchernobyl, Fuku- shima; les centrales sont des cibles idéales en cas d’attaque étrangère ou terroriste); - Elle est ruineuse (corrosion-érosion de nombreux compo- sants du circuit eau-vapeur; coûts réels très supérieurs aux coûts prévus, par ex. EPR ou ITER; coûts faramineux de démantè- lement des centrales, alors que les énergies renouvelables sont de moins en moins chères et que le stockage de l’énergie élec- trique progresse à grand pas, etc.); - C’est une fuite en avant : on ne sait pas quoi faire des déchets, sinon les enfouir et laisser ce cadeau empoisonné aux générations futures.
  • 5. …ne doit pas nous faire oublier le nucléaire militaire Mais Fukushima ne doit pas nous faire oublier Hiroshima : l’arme nucléaire est intrinsèquement immorale, elle est fabriquée à des fins de destruction, elle est infiniment plus dangereuse que l’énergie nucléaire. L’enjeu de l’arme nucléaire n’est pas d’abord militaire ; il est certes politique et culturel, mais il est en premier lieu philosophi- que et spirituel. Il est existentiel. Images : - Hiroshima (6 août 1945) - Nagasaki (9 août 1945) - La Tsar Bomba, bombe à hydrogène d’un équivalent de 57 mégatonnes de TNT, explosée en octobre 1961 au-dessus de l'archipel de la Nouvelle-Zemble dans l'Arctique russe, alors soviétique. Son énergie destructrice représente l'équivalent de 23 fois la puissance libérée par l'ensemble des explosifs largués sur l'Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale, ou encore de 4 000 bombes atomiques du type de celle lancée sur Hiroshima .
  • 6. La folie nucléaire L’arme nucléaire pose la question de la poursuite de l’aventure humaine. La menace de l’arme nucléaire, qui implique par elle-même le consentement au meurtre de millions d’innocents, est le reniement de toutes les valeurs qui constituent la civilisation. En anglais et en américain, « destruction mutuelle assurée » se traduit par Mutual Assured Destruction, ou MAD. Le mot mad signifie fou… Image : Hiroshima, 6 août 1945
  • 7. Une arme politique… Les bombes atomiques ont été larguées sur Hiroshima et Nagasaki en août 1945 par le Président états-unien Harry Truman davantage pour impressionner les Soviétiques que pour mettre fin à la guerre : les services secrets états-uniens avaient appris que l’empereur du Japon voulait capituler, l’Armée rouge s’apprêtait à déclencher son offensive en Mandchourie. Pour le général de Gaulle, l’arme atomique est surtout conçue comme l’instrument de la grandeur politique de la France*. Photo du haut : Little Boy ("Petit garcon", il fallait y penser !), bombe lancée sur Hiroshima. * NB : Certains affirment que la dissuasion nucléaire permet à la France d’être membre du Conseil de sécurité de l’ONU, mais à tort : La France était membre du Conseil de Sécurité (CS) dès 1946, bien avant d'avoir la bombe atomique. Il se trouve que les 5 membres permanents du CS détiennent l'arme nucléaire, mais la possession de l'arme nucléaire et le statut de membre du CS sont deux choses différentes et indépendantes. Le CS est d’ailleurs un vestige de la 2ème Guerre mondiale : il est anormal que l’Union Européenne ou l’Inde en soient absents, sans parler du Brésil ou de l’Indonésie, que l’Afrique n’y soit pas représentée, etc.
  • 8. Emploi, menace de l’emploi Certes, par elle-même, la dissuasion n’est pas l’emploi, mais elle est l’emploi de la menace, et l’emploi de la menace comporte directement la menace de l’emploi. Dès lors que l’emploi de l’arme nucléaire serait un crime contre l’humanité, la menace de l’emploi est déjà criminelle. Dans un sous-marin nucléaire d’engins de nouvelle génération (SNLE.ng) comme Le Terrible où Emmanuel Macron s’est fait hélitreuiller peu après son élection, il est installé 16 missiles M51 chacun pouvant porter 6 têtes nucléaires TNO ayant chacune une puissance TNT 10 fois supérieure à celle de la bombe d'Hiroshima. Soit au total, en termes de puissance TNT, 16 x 6 x 10 = 960 bombes d’Hiros- hima, soit plus de 150 millions de morts … Photo : SNLE Le Terrible
  • 9. Une arme de dissuasion, faite pour ne pas être utilisée… Cependant, la menace de l’emploi veut être dissuasive, c’est-à-dire qu’elle a pour finalité de conduire l’agresseur potentiel à renoncer à décider d’attaquer ou de menacer nos « intérêts vitaux ».* L’intention de l’emploi semble perdre son caractère criminel, dès lors que l’objectif de celui qui l’exprime, c’est de ne pas avoir à passer à l’acte. La dissuasion nucléaire a été pensée à l’origine par les généraux Charles Ailleret, André Beaufre, Pierre-Marie Gallois et Lucien Poirier, surnommés "les quatre cavaliers de l’Apocalypse" (cette idée de destruction étant issue d’une mauvaise interprétation de l’Apocalypse de St Jean). Sacrée comme « la clé de voûte de notre défense », la dissuasion nucléaire fige la pensée stratégique française depuis plusieurs décennies. Le général Poirier, par exemple, disait qu’afficher du scepticisme sur la dissuasion nucléaire, c’est faire le jeu de l’adversaire. * « Notre force de dissuasion nucléaire demeure, en ultime recours, la clé de voûte de notre sécurité et la garantie de nos intérêts vitaux.» Emmanuel Macron, 7 février 2020, devant des élèves officiers de l’École de Guerre,
  • 10. Quelle rationalité ? « Mais c’est supposer que la rationalité domine les comporte- ments guerriers, ce qui est contredit en permanence par la réalité des guerres. Certes, il existe une part rationnelle dans les logiques guerrières. Mais celle-ci est subordonnée et le plus souvent débordée par une pression émotionnelle qui peut être au service de buts barbares. Ainsi la solution finale nazie était un modèle de rationalité managériale, tout comme le fut la construction des arsenaux nucléaires de tous les pays possesseurs de la bombe ». Patrick Viveret, philosophe, politologue, Conseiller honoraire à la Cour des Comptes Images : - La retraite de Russie (1812) et une colonne de prisonniers de guerre allemands après la chute de Stalingrad (février 1943). Hitler a commis la même erreur que Napoléon, qui n’a pas tenu compte du « général Hiver ». - La Shoah (1941-1945), imaginée par les dignitaires nazis lors de la conférence de Wannsee (20 janvier 1942) pour mettre au point l'organisation administrative, technique et économique de la « solution finale de la question juive »
  • 11. La conscience tranquille… Puisque la bombe est faite pour ne pas servir, celui qui a le pouvoir de la déclencher a la conscience tranquille. Ni la méchanceté, ni la haine, qui alimentent d’ordinaire le désir du meurtre, n’animent la menace de l’emploi de l’arme nucléaire. Là se trouve le paradoxe de la dissua- sion nucléaire.
  • 12. Pouvoir commettre le crime absolu Au cœur de ce paradoxe, il y a l’immoralité absolue de la possibilité et de l’intention de pouvoir commettre le crime absolu. Il est en outre totalement insensé de prendre, pour se défendre, le risque d’être détruit, et de voir transformer son pays en désert radioactif. Seuls l’aveuglement, l’irresponsabilité et l’inconscience peuvent expliquer l’accommodement qui unit les décideurs et les citoyens.
  • 13. Les sept vices de la dissuasion nucléaire Sommaire 1 - Inefficace 2 - Dangereuse 3 - Illégale 4 - Antidémocratique 5 - Démobilisatrice 6 - Immorale 7 - Ruineuse
  • 14. 1 - La dissuasion nucléaire est inefficace Sommaire - Une arme non crédible, car inutilisable - Les déclarations d’un ex-président de la République, Valéry Giscard d’Estaing - L’inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples historiques - La non-agression de l’Europe depuis 75 ans grâce à la dissuasion nucléaire ? - La dissuasion nucléaire n’arrête pas le terrorisme - Des armes non seulement inutiles, mais nuisibles
  • 15. Une arme non crédible, car inutilisable En réalité, cette arme est inutilisable - stratégiquement : son usage entrainerait des destructions mutuelles inouïes, - politiquement : l'utilisateur serait mis au ban de la communauté internationale et de son propre pays - ou de ce qu’il en resterait, - moralement : crime de guerre ou crime contre l’humanité selon l’importance des dégâts, - écologiquement : la radioactivité n'a pas de frontière, cf. Tchernobyl. Or une arme inutilisable ne peut avoir aucun effet dissuasif puisque l’agresseur potentiel sait qu’elle ne sera pas utilisée… La dissuasion nucléaire, c’est du… pipeau ! Image du haut : Tandem pour fiancés Tandem pour conjoints en instance de divorce (tirée du Catalogue des objets introuvables, car inutilisables)
  • 16. Uniquement du bluff * Un ancien ambassadeur de France à la conférence du désarmement, Éric Danon (photo ci-dessus), a pu dire que l’arme nucléaire garantit la sécurité de la France comme une porte blindée garantit la sécurité d’un logement. En réalité, lui a répondu Dominique Lalanne, la dissuasion nucléaire n’est pas une porte blindée, c’est une porte grande ouverte avec, au-dessus de la porte, un panneau indiquant « Défense d’entrer, danger de mort ! ». Mais si un voleur ne croit pas à la menace de mort, il entre dans la maison… Non pas une sécurité… … mais une menace psychologique * Bluff : Parole, attitude qui cherche à impressionner en faisant illusion . Synonymes de bluff : boniment, bourrage de crâne, chantage, charlatanisme, chiqué, culot, épate, esbroufe, illusionnisme, intimidation, mystification, mythe, poker, rodomontade, tromperie, vantardise, vanterie..
  • 17. La dissuasion nucléaire, non crédible Durant la Guerre froide, dans le scénario envisagé lors d’une confrontation armée avec l’Union Soviétique, l’emploi des armes nucléaires françaises contre les armées du Pacte de Varsovie n’aurait pas manqué de déclencher les représailles nucléaires massives de l’adversaire qui auraient provoqué la destruction de la France. La France était donc dissuadée de dissuader… Valéry Giscard d’Estaing, au sujet d’un scénario d’invasion massive des forces soviétiques en direction de l’Europe de l’Ouest durant la guerre froide, écrit dans ses Mémoires en 1992* : « Une conclusion se fait jour peu à peu : ni de loin, où je suis, ni sur le terrain, où se situent les responsables militaires, la décision d’employer l’arme nucléaire tactique n’apparaît opportune. ( …) Quoi qu’il arrive je ne prendrai jamais l’initiative d’un geste qui conduirait à l’anéantissement de la France. » * V. Giscard d’Estaing, Le pouvoir et la vie - T2 L’affrontement, Poche, p. 1965
  • 18. L’interview de Valéry Giscard d’Estaing Dans une interview*, V. Giscard d’Estaing répond : « Moi je savais que je n’appuierais sans doute jamais sur le bouton nucléaire, pour une raison simple, qui a sa valeur : c’était la fin de la France ! Si on utilisait, nous, notre armement, ce serait contre les Russes qui évidemment riposteraient tout de suite et la France serait détruite. » Il est regrettable que cette déclaration soit intervenue plus de 30 ans après la fin de son mandat présidentiel, au cours duquel il a pourtant défendu la position gaullienne traditionnelle. C’est ainsi qu’en mars 1979, il déclarait à la télévision française : « Notre système nucléaire est un moyen qui a pour objet la sécurité ultime de la France. Si la décision appropriée à la sécurité de la France conduisait à appuyer sur le bouton de la force nucléaire, je le ferais. (…) » Comme le commente l’association ‘Initiatives pour le désarmement nucléaire’ (IDN), « l’État français, quoiqu’il continue de faire la sourde oreille aux appels au désarmement nucléaire, n’a jamais été dupe de ce coup de bluff bancal appelé dissuasion ». * https://www.youtube.com/watch?v=n6OtgP3CrcY&feature=youtu.be
  • 19. Le passage à l’acte : inimaginable et irresponsable Il est facile d’élaborer en chambre et de proclamer sur une estrade une rhétorique vantant les mérites de la dissuasion nucléaire. Mais lorsque survient le moment du passage à l’acte, il apparaît clairement que la rhétorique n’a aucune prise sur la réalité. Les réflexions de V. Giscard d’Estaing montrent que le passage à l’acte est véritable- ment impensable, inconcevable, inimaginable, irréaliste et, surtout, qu’il serait irresponsable. On peut légitimement penser qu'Emmanuel Macron aurait la sagesse de son prédécesseur. Tout le monde sait cela pertinemment, y compris les agresseurs potentiels, si bien que la dissuasion est une vaste tragi-comédie (dange- reuse et ruineuse), un jeu psychologique entre chefs d’État qui tiennent en otage leurs populations. Photo du bas : E. Macron à bord du sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) ‘Le Terrible’ en juillet 2017, peu après son élection.
  • 20. Se défendre / Se détruire Dans les stratégies classiques, la menace de l’emploi des armes avait pour fonction de dissuader l’agresseur potentiel, et en cas d’échec de la dissuasion (ex. la ligne Maginot), l’emploi lui-même avait pour fonction de nous défendre contre l’agression. Il y avait donc une continuité entre dissuasion et défense. Aujourd’hui, si l’agresseur contourne la dissuasion, la théorie nous enjoint d’employer nos armes nucléaires, mais la réalité rend cet emploi impossible, car suicidaire. Les moyens de la dissuasion ne peuvent plus devenir les moyens de la défense, car ils seraient ceux de la destruction. Il y a donc une fracture entre dissuasion et défense, et cela constitue la faiblesse majeure de ces systèmes d’armes. La dissuasion - quelle qu’elle soit, nucléaire, militaire ou civile - suppose des capacités et une volonté. Dans le cas de la dissuasion nucléaire, nous n’avons pas la volonté… La crédibilité de la menace pour l’agresseur potentiel et directement fonction de la proba- bilité de l’emploi de nos armes nucléaires. Si l’emploi est improbable, la menace de l’emploi n’est pas crédible.
  • 21. L’inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples 1 - Le 24 juin 1948, alors que la future Allemagne de l’Est se trouve occupée par les Soviétiques et que trois puissances occi- dentales (États-Unis, Grande-Bretagne, France) sont présentes à Berlin au milieu de cette zone, l’arme nucléaire états-unienne ne dissuade pas l’URSS de bloquer les accès terrestres vers Berlin. C’est le début de la "guerre froide". La réponse occidentale est un pont aérien vers l’aéroport berlinois de Tempelhof destiné au ravitaillement de la population berlinoise de plus de 2 millions de personnes, jusqu’à ce que les Soviétiques lèvent le blocus sans contrepartie le 12 mai 1949. 2 - Le 25 novembre 1950, l’arme nucléaire états-unienne, pourtant installée sur l’île de Guam dans la mer des Philippines, ne dissuade pas la Chine de s’engager dans la guerre de Corée aux côtés de la Corée du Nord dirigée par un régime communiste. Photos : - Caricature de l’ours soviétique enserrant Berlin dans ses griffes. - Bataille du Chongchon en Corée du Nord (25 novembre au 2 décembre 1950) : les troupes chinoises envahissent une des positions de l'ONU. ../..
  • 22. Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples 3 - L’Égypte attaque Israël en 1967 et en 1973 malgré l'arme nucléaire israélienne. 4 - Les armes nucléaires soviétiques et chinoises n’empêchent pas la guerre russo-chinoise de 1969 au sujet d'une île du fleuve Oussouri, l'île Zhenbao. De nos jours, la CIA et de nom- breux historiens estiment le bilan humain à 20 000 morts. 5 - l'Argentine ne craint pas l'arme nucléaire britannique en 1982 quand elle décide d’annexer les îles Malouines. Photo du milieu : l’île Zhenbao ../..
  • 23. Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples 6 - Les armes nucléaires indiennes et pakistanaises n’empêchent pas les crises entre l’Inde et le Pakistan au sujet du Cachemire, dont celle de Kargil, ("guerre des glaciers") en 1999, qui cause plus de 1 000 morts. 7 - la Russie dirigée par Vladimir Poutine n'a pas peur des armes nucléaires de l'Occident en 2014 quand elle phagocyte une partie du Donbass ukrainien, puis en 2022 quand elle agresse l’Ukraine*. Photo du haut : panorama de Kargil * Il convient toutefois de préciser que l'Ukraine n'est pas membre de l'OTAN. Certains affirment que si l'Ukraine avait conservé ses armes nucléaires au moment de la dissolution de l'URSS en déc. 1991, elle n'aurait pas subi d'agression russe en 2014 et en 2022. Cet argument ne tient pas, car l’Ukraine n’avait pas jusqu’en 1991 la maîtrise des armes nucléaires installées sur son territoire par l’URSS.
  • 24. Inefficacité de la dissuasion nucléaire : 9 exemples 8 - Les armes nucléaires chinoises et indiennes n’empêchent pas une confrontation militaire entre la Chine et l’Inde en juin 2020 dans le Ladakh et en janvier 2021 sur le col de Naku dans l’État indien du Sikkim. Une guerre éclair en 1962 avait vu les troupes indiennes rapidement défaites par l’armée chinoise. 9 - L’arme nucléaire israélienne n’empêche pas l’offensive terroriste du Hamas depuis Gaza le 7 octobre 2023, la plus meurtrière depuis la Shoah. Photos : - Des troupes indiennes se dirigeant vers la frontière sino-indienne, dans l’Himalaya, le 14 septembre 2017 - Le massacre du festival de musique de Réïm, le 7 octobre 2023, au début de l'invasion d'Israël par des terroristes du Hamas, dans le cadre de l'attaque du Hamas contre Israël. 260 personnes au moins sont tuées et de nombreuses autres blessées. Les terroristes commettent également plusieurs viols et prennent des otages.
  • 25. Le bouclier nucléaire protège… l’agresseur Comme l’écrit Leonidas Kalogeropoulos à propos de la guerre en Ukraine en 2022, « le bouclier nucléaire ne protège qu'un seul protagoniste : l'agresseur ! Loin d'empêcher l'attaque du faible par le fort, l'arme nucléaire ne dissuade que d'une chose : elle prohibe toute intervention de forces alliées pour venir en aide à la victime, dont nous sommes condamnés à assister impuissants à l'écrasement par les armes, sous peine de transformer une guerre territoriale en guerre mondiale. » Il est frappant de remarquer qu’en cas d’attaque russe sur des villes ou sites d’Ukraine par des armes nucléaires tactiques, l’Europe annonce - à juste titre - qu’elle réagirait par des armes conventionnelles. Cette annonce est une dissuasion beaucoup plus efficace envers V. Poutine (dont l’armée mesure cruellement l’efficacité des armes conven- tionnelles occidentales) qu’une menace de frappe nucléaire à laquelle il ne croit pas de la part de dirigeants humanistes et démocrates. Photos : - Léonidas Kalogeropoulos, consultant en affaires publiques, diplômé de l'Institut d'Études Politiques de Paris, de l'Institut Français de Presse et titulaire d’une maîtrise de droit public, dirige le cabinet Médiation & Arguments. Il défend une approche éthique du monde des affaires au sein du mouvement patronal Ethic (Entreprises de Taille Humaine Indépen- dantes et de Croissance). - Le 13 octobre 2022, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, déclare à Bruges « Toute attaque nucléaire contre l’Ukraine entraînera une réponse, pas une réponse nucléaire, mais une réponse militaire si puissante que l’armée russe sera anéantie ».
  • 26. La non-agression de l’Europe depuis 75 ans grâce à la dissuasion nucléaire ? Contrairement à ce qu’on entend dire souvent, l'arme nucléaire n'a pas fait preuve de son efficacité depuis 75 ans : la preuve principale est qu'elle génère une course aux armements, et que certains États ont voulu ou veulent se doter de boucliers anti-missiles au cas où elle ne fonctionnerait pas... Expliquer par la dissuasion nucléaire l’absence d’agression de l’Europe depuis plus 75 ans est une affirmation gratuite qui ne repose sur aucune preuve*. « On ne peut attribuer une cause certaine à un événement qui ne s’est pas produit », écrit très justement le général B. Norlain. Imagine-t-on un physicien donner une explication à une absence de mouvement, ou un chimiste à une absence de réaction ? * Au moins jusqu’en 1974, le dispositif français de dissuasion nucléaire n’était pas techniquement opérationnel pour remplir la mission qui lui était assignée, et on sait maintenant que les services de renseignements états-uniens, britanniques et soviétiques le savaient parfaitement… La croyance à l’absence de guerre en Europe depuis la fin de la 2ème Guerre mondiale à cause des armes nucléaires ressemble fort à la croyance de l’efficacité de la poudre anti-éléphants. Un homme dans le train entre Le Mans et Angers jette une poudre blanche par la fenêtre tous les 20 km. Une femme lui demande ce qu’il fait. - C’est une poudre pour éloigner les éléphants. - Mais, Monsieur, il n’y a pas d’éléphants d’ici ! - Bien sûr, Madame ! C’est grâce à ma poudre !
  • 27. La non-agression de l’Europe depuis 75 ans : quelques explications On peut expliquer l'absence d'agression soviétique - par le souvenir cruel de la 2ème Guerre mondiale en Russie, - par le fait que le pouvoir communiste avait suffisamment à faire pour imposer sa domination en URSS, en Europe de l’Est, dans les pays musulmans, - par la solidarité politique et militaire des pays d'Europe (OTAN)*, - par le rôle des organisations internationales (ONU, Union européenne, OSCE), par le travail des diplomates, - ou encore par l’interdépendance économique et culturelle croissante. D’autres même, comme l’historien Basil Liddell Hart, l’expliquent par la résistance civile qu'auraient opposée les nations européennes en cas d'agression par les troupes du Pacte de Varsovie et par la "contagion démocratique" qui aurait menacé la dictature communiste. * La Finlande et la Suède neutres et non membres de l’OTAN n’ont pas été attaquées par l’URSS, ni la Yougoslavie de Tito qui a pris ses distances avec Staline et avec ses successeurs
  • 28. Les leçons de l’histoire Le mur de Berlin et le communisme n’ont pas été vaincus par les armes de l’Occident. Pour l’essentiel, ils se sont effondrés sous la pression de la résistance non-violente des femmes et des hommes des sociétés civiles de l’Est qui ont eu le courage de prendre les plus grands risques pour conquérir leur liberté. La dissuasion nucléaire occidentale n’a joué aucun rôle dans la chute de l’empire soviétique*. Photos : Vaclav Havel et la Charte 77 en Tchécoslovaquie Lech Walesa et Solidarnosc en Pologne Manifestation du 9 octobre 1989 à Leipzig, Allemagne de l’Est * sinon peut-être que l'escalade (militaire en général) a eu un coût colossal que l'URSS n'a pu continuer d'assumer, au détriment de ses services publics et de la population.
  • 29. « Il n’y a pas de plan B ! » Lors d’un colloque*, un participant a posé à Jean-Claude Mallet (photo ci- contre), conseiller spécial de Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, la question suivante : « Quel est le plan B en cas d’échec de la dissuasion ? ». La réponse de Jean-Claude Mallet est courte et a le mérite de la clarté : « Il n’y a pas de plan B ! ». Cela signifie en clair qu’en cas d’échec de la dissuasion nucléaire, la France serait soit sous la domination de l’adversaire qu’elle entendait dissuader et en tous cas ne serait pas en mesure de protéger ses "intérêts vitaux", soit victime d’une frappe nucléaire en réponse à la frappe française. Les théoriciens de la dissuasion n’imaginent même pas qu’elle puisse ne pas fonctionner, car cela reviendrait à remettre en cause sa pertinence… Le dogme de la dissuasion nucléaire paralyse notre réflexion sur nos réponses possibles en cas de crise. Une dissuasion sans plan B, c’est comme un navire sans canots de sauvetage, un hôpital sans groupe électrogène, un député sans suppléant… Qui sont les réalistes et qui sont les utopistes ? Qui sont les ‘bisounours’ ** ? * colloque « Résistance et dissuasion - Des origines du programme nucléaire français à nos jours » organisé à la ‘Bibliothèque Nationale de France’ le 5 octobre 2017. La question est de Dominique Lalanne. ** terme cher à Hubert Védrine pour désigner les partisans du désarmement nucléaire. Image : Le Titanic, réputé insubmersible… et dépourvu d’un nombre suffisant de canots de sauvetage.
  • 30. « N'envisagez jamais d'utiliser une arme nucléaire » L’affirmation de Jean-Claude Nallet « Il n’y a pas de plan B ! » est toutefois contredite par un de ses excellents confrères, Bruno Tertrais, le « pape de la dissuasion », ex-chargé de mission auprès du directeur des Affaires stratégiques du ministère de la Défense, ex-membre de la commission du ‘Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale’ nommé par Nicolas Sarkozy, directeur adjoint de la ‘Fondation pour la recherche stratégique’ (FRS). « Mon propos était de dire que les armes nucléaires ne devraient jamais être considérées sur le plan technique. N'envisagez jamais d'utiliser une arme nucléaire car "il n'y a pas d'autre solution technique" pour détruire ou neutraliser une cible. Il y a toujours un moyen. »* Alors que la dissuasion est soi-disant « la clé de voûte » de notre défense, on reste confondu d’entendre un de ses grands théoriciens affirmer qu’il ne faut jamais envisager d’utiliser l’arme nucléaire … * Disarmament and Deterrence - Bridging the Divide : Q&A (questions and answers) EU Non-Proliferation and Disarmament Conference 2016 - Publication Fondation pour la recherche stratégique (FRS) : Désarmement et dissuasion - Combler le fossé, 3 novembre 2016
  • 31. Se préparer pour la guerre : l’aveu d’échec de la dissuasion nucléaire La Revue nationale stratégique (RNS) 2022 décidée par le président Macron actualise des documents similaires de 2017 et 2021. Le retour d’un conflit armé « de haute intensité » sur le sol européen figure désormais en tête des menaces. Le document énumère les autres atteintes non militaires à la sécurité du pays et de la population déjà identifiées par le passé : « les conséquences de la prolifération, technologique ou autre, et la persistance de la menace terroriste », les « autres grands défis globaux susceptibles de nourrir des déséquilibres importants tels que les impacts du changement climatique (accès à l’eau, insécurité alimentaire, migrations, démographie, pandémies, etc.) », la « compétition de puissance » dans les « espaces communs (cyber, spatial, fonds marins et espaces aéromaritimes) », etc. Or, alors même qu’aucune de ces menaces n’est susceptible d’être contrée par l’arme nucléaire et avant même d’examiner les moyens les plus appropriés de répondre à ces défis, le document assène que « les fondamentaux demeurent » et que donc « la France est et restera une puissance dotée d’une dissuasion nucléaire robuste et crédible ».
  • 32. Les contradictions de la doctrine française de défense Selon le document, il faut que la France devienne capable de « passer en économie de guerre, c’est-à-dire de s’organiser pour que l’industrie française puisse soutenir un effort de guerre dans la durée, en cas de nécessité. » Il s’agit donc de se préparer à la guerre alors que l’objectif stratégique affirmé de la dissuasion nucléaire « vise fondamenta- lement à empêcher une guerre majeure qui menacerait la survie de la Nation en protégeant la France contre toute agression d’origine étatique contre ses intérêts vitaux et contre toute tentative de chantage. » Autant dire que l’on ne fait pas réellement confiance à la dissuasion nucléaire, pourtant censée être « crédible », pour empêcher la guerre. C’est d’ailleurs déjà le cas dans la doctrine dite de « l’ultime avertissement », prévu pour « rétablir » la dissuasion donc au cas où elle échouerait… Au total, cette mise à jour de la stratégie de la France compte tenu du nouveau contexte international ne se traduit que par « la réaffir- mation de dogmes éculés et des contradictions constantes d’une politique de défense rendue impuissante par l’endormissement de l’esprit de défense imputable à la dissuasion nucléaire. »* * Marc Finaud, diplomate, vice-président de l’association ‘Initiatives pour le Désarmement Nucléaire’ (IDN)
  • 33. « L’avertissement nucléaire » Le concept d’"ultime avertissement" est proposé pour la première fois par le Premier ministre Raymond Barre en juin 1977. Il change de nom pour se nommer successivement "armement nucléaire tactique" (Pierre Mauroy, 1981), "armes préstratégiques" (à partir des années 1960), "armes de champs de bataille" (1974, lanceurs Pluton remplacés en 1984 par les lanceurs Hadès), "alerte nucléaire", "ultime avertissement" (Jacques Chirac, 2002 puis François Mitterrand), "avertissement de nature nucléaire" (François Hollande, 2015) et désormais "avertissement nucléaire". L’objectif est, comme le soulignait le général Henri Bentégeat, chef d’état-major particulier sous le président Chirac, de donner une troisième option au chef de l’État entre le choix binaire de « ne rien faire » ou « de provoquer des dégâts inacceptables ». Le président Macron déclare dans son discours du 7 février 2020 : « En cas de méprise sur la détermination de la France à préserver ses intérêts vitaux, un avertissement nucléaire, unique et non renouvelable, pourrait être délivré à un agresseur étatique pour signifier clairement que le conflit vient de changer de nature, et rétablir la dissuasion. » ../..
  • 34. « L’ultime avertissement » : un aveu d’échec de la dissuasion Cet "avertissement nucléaire" est une frappe unique en premier, destinée à "restaurer la dissuasion" si le chef de l’État estime que l’adversaire a dépassé un seuil de menace de nos "intérêts vitaux". Elle marque la détermination du dissuadeur à envoyer dans un deuxième temps des missiles anti-cités sur le territoire de l’agresseur. La frappe d’avertissement viserait probablement des objectifs militaires ou des sites industriels de l’agresseur. Elle serait réalisée principalement par les Forces aériennes stratégiques (FAS : avions Rafale des bases aériennes terrestres) ou par la Force aéronavale nucléaire (FANu : Rafale du porte-avions Charles de Gaulle). La tête nucléaire aéroportée (TNA) est une ogive thermonucléaire d'une puissance estimée à 300 kilotonnes (soit 20 fois Hiroshima), portée par le missile de croisière supersonique air-sol moyenne portée amélioré (ASMPA) d'une portée maximale estimée à 500 kilomètres. Depuis le discours de Jacques Chirac en 2006, cette frappe peut être aussi réalisée par les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE). C’est dans ce but que le nombre des têtes nuclé- aires a été réduit sur certains des missiles de nos SNLE. Images : Avion Rafale porteur de missiles ASMP-A, Porte-avions Charles de Gaulle et avions Rafale Cette utilisation d’arme nucléaire ne signifie rien d‘autre que l’échec de la dissuasion ! " L’avertissement nucléaire" est tout simplement la preuve que nos adversaires, mais aussi nos dirigeants, ne croient pas à notre dissuasion nucléaire… ../..
  • 35. « L’ultime avertissement » : un aveu d’échec de la dissuasion et un risque insensé d’escalade Le général Patrick Charaix, alors commandant des Forces aériennes stratégiques, reconnaissait que « si je fais de l’ultime avertissement, c’est que la dissuasion n’a pas fonctionné et que nous sommes arrivés à la limite de nos intérêts vitaux ». Par ailleurs, quel que soit l’adversaire, croire que celui-ci restera sans réaction après avoir subi un raid nucléaire revient à baser la sécurité de la France sur un pari totalement fou… "L’ultime avertissement" est bel et bien la première étape de la guerre nucléaire avec ses conséquences : massacres de populations, destructions matérielles, pollution radioactive, hiver nucléaire, etc. Image ci-contre : carte de France du nucléaire militaire
  • 36. La dissuasion nucléaire n’arrête pas le terrorisme La dissuasion nucléaire n’offre aucune défense contre les nombreuses attaques terroristes islamistes subies depuis des années par les pays occidentaux. Au contraire, il existe de réelles probabilités pour qu’un État nucléaire soit jugé comme un acteur majeur auquel incombe la responsabilité du désordre du monde et que, de ce fait, il soit jugé comme une cible potentielle par des groupes terroristes. Non seulement l’arme nucléaire est inopérante face au terrorisme, mais elle est, comme d’ailleurs les centrales nucléaires, une cible idéale des terroristes. Images : - L’attentat contre les Twin Towers à New York (2 septembre 2001) - Les victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo (7 janvier 2015) - Le camion du massacre sur la Promenade des Anglais à Nice (14 juillet 2016)
  • 37. Des armes non seulement inutiles, mais nuisibles Les armes nucléaires ne servent à rien non plus - pour combattre le crime transnational, les paradis fiscaux, - pour prévenir les conflits ethniques et religieux, - face aux risques de la guerre cybernétique*, - et face aux risques de crise climatique, de crise énergétique et donc alimentaire**. Par les dépenses qu’elles occasionnent au détriment de causes vitales et urgentes (lutte contre la faim et les pandémies, misère, exclusion, analphabétisme, dépollution, etc.), elles engendrent l’instabilité et l’insécurité. * Guerre cybernétique : utilisation d'ordinateurs et d'Internet pour mener une guerre dans le cyberespace, c’est-à-dire dans l’univers d’information et le milieu de communi-cation lié à l’interconnexion mondiale des ordinateurs * 30 % des transports routiers sont affectés aux denrées alimentaires. En cas de grosse crise pétrolière, des famines urbaines sont probables…
  • 38. 2 - La dissuasion nucléaire est dangereuse • à cause du stock d’armes et des risques de la prolifération : D’après le SIPRI*, il y a dans le monde, en 2023, 12 512 armes nucléaires en service, dont 1 800 à 2 000 en état d’alerte. C’est certes moins que les 70 000 armes nucléaires dans le monde dans les années 1990, mais c’est suffisant pour mettre fin à l’aventure humaine. La puissance de destruction moyenne de chacune étant d’environ 30 fois celle de la bombe d’Hiroshima, cela signifie que les États dotés d’armes nucléaires possèdent l’équivalent de 375 000 bombes d’Hiroshima. • et à cause des risques d’erreurs ou d’accidents. * SIPRI : Stockholm International Peace Research Institute
  • 39. Lees conséquences du passé : 2000 essais nucléaires dans le monde Au total, plus de 2 000 explosions officielles, dont 543 essais atmosphériques, ont eu lieu dans le monde. Tous les grands pays ayant l'arme nucléaire ont procédé à des essais. Près de la moitié des explosions officielles recensées, soit 1 050 explosions, ont eu lieu aux États-Unis, suivis par l'Union soviétique, qui ont réalisé 715 explosions officielles. La France est à la troisième place avec 210 explosions. La puissance cumulée des 67 essais conduits aux Iles Marshall par les États-Unis de 1946 à 1958 équivaut à l’explosion d’une fois et demie la bombe d’Hiroshima (15 kilotonnes) chaque jour pendant douze ans ! L’essai Castle Bravo du 1er mars 1954, une bombe de 15 mégatonnes, 1 000 fois plus puissante que celle d’Hiroshima, a contaminé mortellement des pêcheurs japonais et provoqué un mouvement de révolte mondial. L’essai soviétique de la Tsar Bomba en octobre 1961, la plus grosse bombe H de l'histoire (57 mégatonnes), a développé une boule de feu de 7 km de diamètre. L’éclair de l’explosion fut visible à plus de 1 000 km …
  • 40. Le danger pour l’avenir : le monde est une poudrière 12 512 armes nucléaires possédées par 9 États
  • 41. La menace nucléaire à l’occasion de crises Dans son livre La menace nucléaire - De Hiroshima à la crise ukrainienne (2022), l’historien Jean-Marc Le Page recense 29 épisodes aigus de menaces nucléaires, la plus grave étant la crise de Cuba (1962) entre l’Union soviétique et les États-Unis*. Il répertorie aussi les crises de prolifération et quelques accidents (aériens et sous-marins**) * mais aussi les crises avec évocation de la menace nucléaire : la guerre de Corée (1950-1953, entre la Corée du Sud, soutenue par les États-Unis, et la Corée du Nord, soutenue par la Chine), Dien Bien Phu (1954, entre le Vietnam et la France), Suez (1956, entre les Occidentaux et l’Égypte, soutenue par l’URSS), l’Oussouri (1969, guerre russo-chinoise au sujet d'une île du fleuve Oussouri, l'île Zhenbao), le Kippour (entre Israël et les pays arabes en 1973), le Cachemire (1999- 2003, ‘guerre des glaciers’ entre l’Inde et le Pakistan), le détroit de Formose (1994- 2022, entre la Chine et Taïwan, soutenue par les États-Unis), l’Iran (2001-2022, contre Israël, soutenu par les États-Unis), l’Ukraine (agressée par la Russie de V. Poutine en 2022, et soutenue par les Occidentaux,). ** notamment la disparition des sous-marins nucléaires USS Tresher (États- Unis,1963), K 129 (URSS, mars 1968), USS Scorpion (États-Unis, mai 1968), K-141 ‘Koursk’ (Russie, 2000) Photo du haut : l’USS Scorpion, disparu en mer en mai 1968, avec 99 marins à son bord et 2 torpilles nucléaires anti sous-marines.
  • 42. Les risques d’accident Selon le journaliste états-unien Eric Schlosser, au moins 700 accidents ou incidents mettant en cause 1 250 armes nucléaires auraient eu lieu pour la seule période 1950-1968. Quelques exemples : - La catastrophe de Kychtym (29 septembre 1957) est une contami- nation radioactive qui s'est produite dans le complexe nucléaire militaire de Maïak, une usine de retraitement de combustible nucléaire située près de la ville d'Oziorsk en Union soviétique, dans l'actuelle Russie. Le système de refroidissement de l'un des réservoirs, qui contenait entre 70 et 80 tonnes de liquides radioactifs, tombe en panne. L'explosion, dont la puissance estimée équivaut à celle de l'explosion de 70 à 100 tonnes de TNT, projette dans les airs le couvercle en béton, d'une masse de 160 tonnes. Elle provoque l’irradiation d’une zone de 23 000 km² affectant plus de 270 000 habitants.
  • 43. Kychtym, Goldsboro 200 personnes meurent de cancers dus à l'exposition directe aux radiations. Selon un rapport de Greenpeace de 2017, jusqu’à 20 000 personnes sont officiellement considérées comme ayant été affectées par les conséquences de la catastrophe de 1957. Classée au niveau 6 sur l'échelle internationale des événements nucléaires, c'est, après la catastrophe de Tchernobyl et celle de Fukushima, le troisième plus grave accident nucléaire jamais connu. - Le 23 janvier 1961, un bombardier B 52 de l’US Air Force laisse échapper ses deux bombes H au-dessus de Goldsboro, en Caroline du Nord. L’une d’elles (260 x Hiroshima) termine sa course dans les branches d’un arbre, son parachute déployé et ses mécanismes de sécurité désactivés. Seul un petit interrupteur à faible voltage permet d’éviter la catastrophe. Si la bombe avait explosé, les villes de Washington, Baltimore, Philadelphie et New- York auraient pu être touchées. Photos : - Mesure de radioactivité sur le site de Maïak, près de Kychtym - L’accident de Goldsboro (1961)
  • 44. Les risques d’accident : exemples en 1966 - Le 17 janvier 1966, deux avions se percutent au-dessus de la Méditerranée. Des quatre bombes H que transportait le B 52, trois sont retrouvées à terre près du village de Palomares en Andalousie. 2 sont détruites à l'impact au sol, dispersant environ 4,5 kg de plutonium sur 250 hectares. La 3ème bombe touche le sol et reste presque intacte. La 4ème, tombée dans la mer, est récupérée intacte après 2 mois et demi de recherches. - En juillet 1966, un bug se produit dans les transmissions électriques à cause d'un orage, et la plaquette "DG" (décollage de guerre), en noir sur rouge = immédiat, s’affiche dans l'escadron d'alerte. Un bombardier Mirage IV des ‘Forces aériennes stratégiques’ françaises décolle sur alerte, avec une arme nucléaire réelle, une bombe AN-21 de 1500 kg. Une fois l’erreur constatée, l’appareil est rappelé. Aucune procédure d’engage- ment de tir - et sans doute d’amorçage de l’arme - n’a été engagée. Images : Une des bombes de Palomarès retrouvée en mer Mirage IV de la Force aérienne stratégique
  • 45. Les risques d’accident : exemples en 1977 et 1980 - En 1977, près de côtes du Kamchatka, un sous-marin soviétique K-171 (photo) largue accidentellement une ogive nucléaire. Après une fouille impliquant des douzaines de navires et avions, l'ogive est retrouvée. - Le 19 septembre 1980 à Damascus (Arkansas), sur le complexe de lancement 374-7 de la Little Rock Air Force Base, après une fuite accidentellement provoquée dans l'un de ses réservoirs de propergols, l’explosion détruit la porte de 700 tonnes censée protéger le missile Titan (photo) d’une attaque nucléaire soviétique, et projette dans les airs la tête thermonucléaire W-53, qui équipe alors le missile. Sa puissance explosive est de 600 bombes d’Hiroshima. Elle est retrouvée le lendemain à proximité ; ses dispositifs de sécurité ont empêché l'explosion nucléaire et l'émission de matières radioactives. Voici les noms de code des incidents et des accidents d'armes nucléaires par le Département de la Défense des États-Unis : - Nuke Flash (‘flash nucléaire’) : lancement accidentel et non autorisé d'une arme nucléaire créant un risque de guerre ; - Broken Arrow (‘flèche brisée’) : accident d'une arme nucléaire qui ne crée pas un risque de guerre ; - Bent Spear (‘lance pliée’) : incident significatif non catégorisé comme les deux premiers - Dull Sword ( ‘sabre émoussé’) : événement ou déficience sur une arme nucléaire non catégorisé comme incident, impliquant une arme nucléaire ou une ogive nucléaire, des composants nucléaires, ou véhicule transportant une arme nucléaire ; - Empty Quiver (‘carquois vide’) : saisie, vol ou perte d'une arme nucléaire états-unienne.
  • 46. Les risques d’accident : exemples en 2009 et 2010 - Dans la nuit du 3 au 4 février 2009, collision à faible vitesse par grand fond entre deux sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, le britannique HMS Vanguard transportant 16 missiles nucléaires Trident, et le français Le Triomphant transportant lui aussi 16 missiles intercontinentaux M-45. Les technologies anti-sonar sont tellement sophistiquées qu'il n'est pas étonnant qu'aucun des deux submersibles n'ait vu l'autre, suggère le quotidien anglais The Sun… D’après le Daily Telegraph, le coût des réparations pour les deux sous-marins est estimé à 50 millions de £. - Un responsable du Pentagone révèle, le 27 octobre 2010, que l’armée américaine a perdu le contact, quatre jours plus tôt, pendant 45 minutes, avec 50 missiles nucléaires balistiques intercontinentaux d’une portée de 5 500 km. Une panne informatique est à l’origine de cet incident… (Le Monde daté du vdi 29 octobre 2010) Photos : Le Triomphant et missile balistique intercontinental dans son silo
  • 47. La dangerosité n’est pas une vertu Certains partisans de la dissuasion nucléaire objectent que la dangerosité des armes nucléaires, loin d’être un problème, est une preuve de la crédibilité de la dissuasion : si les armes nucléaires font peur à des citoyens français, disent-il, elles font peur aussi à nos agresseurs potentiels, si bien que les opposants à l’arme nucléaire, en utilisant l’argument de la dangerosité, confortent involontairement la dissuasion qu’ils critiquent. Ces sophistes oublient simplement une différence essentielle : - la dissuasion est un dispositif volontaire, dont on ne sait d’ailleurs absolument pas s’il sera efficace, - alors que les accidents et les défaillances techniques ou humaines sont involontaires, mais bien réels. Photos du bas : Le colonel Stanislas Petrov, officier soviétique qui, suspectant une fausse alerte, à désobéi à une procédure. Grâce à sa perspicacité et à son bon sens, une guerre nucléaire a été évitée de justesse le 26 septembre 1983. En mémoire de cette date, l'Assemblée générale de l’ONU, le 26 septembre 2013, proclame le 26 septembre ‘Journée internationale pour l'élimination totale des armes nucléaires’.
  • 48. « Un jour, la bombe partira sans qu’on sache pourquoi ! » « Un jour, la bombe partira sans qu’on sache pourquoi ! » a laissé échapper le général de Gaulle, premier des présidents de la Vème République française. Cette phrase est citée en 4ème page de couverture par Jean Toulat dans son livre La bombe ou la vie (Fayard, 1969). Jean Toulat, ancien Résistant, prêtre et journaliste honnête, ne précise malheureusement pas où et quand le général a prononcé cette phrase. Probablement cela lui a-t-il été rapporté par un proche du général qu’il n’a pas pu citer. - Photo du haut : Le 14 septembre 1966, le général de Gaulle, en tenue spéciale anti-radiations, entouré d’Alain Peyrefitte, de Pierre Messmer et du général Pierre Billotte, assiste depuis la passerelle du croiseur ‘De Grasse’ à l'explosion de la troisième bombe nucléaire française dans le Pacifique. - Photo du bas : Le livre de Jean Toulat (1915-1994) La bombe ou la vie (1969), alors interdit dans les casernes
  • 49. Le risque ne diminue pas, il ne fait que croître S’exprimant devant les services de renseignement le 27 juillet 2021, le président des États-Unis Joe Biden a eu ces mots : « Je pense qu’il est plus que probable que si nous finissons par une guerre – une vraie guerre contre une puissance majeure – ce soit la consé- quence d’une cyberintrusion de grande ampleur. » La croyance que la chance pourra se prolonger indéfiniment fait penser à cet homme qui tombe du 82ème étage d’un gratte-ciel, et qui au niveau du 3ème étage se rassure en constatant « Jusqu’ici, tout s’est bien passé ! » Le risque d’explosion d’armes nucléaires ou même de guerre nucléaire, déjà fort du fait de la prolifération, des défaillances techniques, des erreurs humaines, augmente aujourd’hui avec les risques d’attaque cybernétique contre les systèmes d’alerte ou de déclenchement. Beyza Unal et Patricia Lewis ont ainsi identifié 13 zones vulnérables aux cyber-risques, parmi lesquelles les différents systèmes de communication, les données télémétriques des missiles, les cyber-technologies dans les laboratoires et les installations d’assemblage, les informations météorologiques et de ciblage provenant de systèmes spatiaux ou de stations au sol, ou encore les systèmes autonomes robotisés dans l’infrastructure stratégique.
  • 50. Le risque d’utilisation par des dirigeants déjantés ou paranoïaques Les menaces de guerre nucléaire proférées - par le président des États-Unis Donald Trump contre la Corée du Nord en 2017, - par le dictateur Vladimir Poutine en mars 2022 contre l’Europe si elle aidait l’Ukraine, - ou par le dictateur nord-coréen Kim Jong-un en juillet 2022 contre la Corée du Sud et les États-Unis rappellent que l’abolition des armes nucléaires est une nécessité impérieuse, notamment pour qu'aucun respon- sable politique ou militaire, et en particulier des dirigeants déjantés ou paranoïaques, n'ait la possibilité d'en faire usage.
  • 51. 3 - La dissuasion nucléaire est illégale 1) au regard du droit international Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), signé à l’ONU par les représentations diplomatiques de 122 pays en juillet 2017, est entré en vigueur le 22 janvier 2021. Il est devenu alors la norme du droit international. Les États parties au TIAN s'interdisent « la mise au point, l'essai, la production, le stockage, le transfert, l'utilisation et la menace de l'utilisation d'armes nucléaires, en raison des conséquences humanitaires catastrophiques qu’entraînerait leur utilisation ». Pour les États dotés d'armes nucléaires y adhérant, le TIAN prévoit un processus assorti d'un calendrier, conduisant à l'élimination vérifiée et irréversible de leur programme d'armes nucléaires. Certes, les 9 puissances nucléaires, non signataires, ne sont pas tenues de l’appliquer. Mais elles seront de plus en plus considérées comme des États irresponsables, par l’opinion publi- que internationale et par une grande partie de leur propre popu- lation. Photo du haut : La salle où le TIAN a été adopté à l’ONU en juillet 2017
  • 52. La France perfectionne ses armements en violation du TICE et du TNP Le Traité d’Interdiction Complète des Essais nucléaires (TICE), signé par la France en 1998, vise l’interdiction universelle des essais nucléaires. Or la France poursuit au Barp (Gironde) le programme ‘Laser Mégajoule’ qui permettra d’atteindre en laboratoire des conditions thermo- dynamiques (densité, pression, température) similaires à celles rencontrées lors d’un essai nucléaire. Dans le cadre du traité franco-britannique ‘Teutatès’ signé en nov. 2010, le programme ‘Epure’ du site CEA-DAM de Valduc se réalise avec les Anglais en violation de l’article 6 du Traité de Non-Prolifération (TNP). Il a pour but d’installer un ensemble de 3 accélérateurs d’électrons pour radiographier l’explosion du premier étage des bombes nucléaires. Ce qui est grave au Barp et à Valduc, ce n’est pas seulement le gaspillage de l’argent public, c’est surtout la perversion de la science à des fins de destruction. Images : L’extension du site CEA-DAM de Valduc, l’installation Mégajoule’ au Barp
  • 53. La mauvaise foi de la France De même, - le programme de construction de 60 missiles balistiques intercontinentaux M-51 destinés à remplacer les missiles M-45 de la Force océanique stratégique (FOST) - et le missile de croisière ASMP-A (Air Sol Moyenne Portée Amélioré) de la composante nucléaire aéroportée ne respectent ni l’esprit ni même la lettre de l’article 6 du TNP*, traité auquel la France a adhéré en 1992 (22 ans après l’avoir refusé). * « Chacune des Parties au Traité s'engage à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous un contrôle international strict et efficace. » Images : Missile intercontinental M 51, missile de croisière ASPM-A
  • 54. La dissuasion nucléaire est illégale 2 - au regard du règlement militaire français * « Le subordonné ne doit pas exécuter un ordre prescrivant d’accomplir un acte manifes- tement illégal ou contraire aux règles du droit international applicable dans les conflits armés et aux conventions internationales en vigueur en France ». Bulletin Officiel des Armées, décembre 2005, n° 45. Aujourd’hui, quelle est la crédibilité de la dissuasion nucléaire française, alors que le règlement militaire français* interdit aux militaires, et donc aux officiers de tir des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), d’obéir à des ordres contraires à la loi internationale et à la morale ? Le 8 juillet 1996, sur demande de l'AG de l'OMS et de l'AG de l’ONU, la Cour Internationale de Justice (La Haye), conclut que l'emploi des armes nucléaires est, en principe, illégal après avoir notamment constaté que ces armes sont « potentiellement d'une nature catastrophique », car leur « pouvoir destructeur ne peut être endigué ni dans l'espace ni dans le temps. Ces armes ont le pouvoir de détruire toute civilisation, ainsi que l'écosystème tout entier de la planète ».
  • 55. Une discrimination inacceptable Le traité de non prolifération (TNP) introduit de manière discriminatoire un déséquilibre dans les rapports entre les États. Il exige que les États non-nucléaires renoncent à acquérir l’arme nucléaire alors même que les États nucléaires (USA, Russie, Royaume Uni, France, Chine) n’ont pas renoncé à les posséder.
  • 56. Une discrimination inacceptable Les États nucléaires qui ne n’ont pas signé le TNP (Inde, Israël, Pakistan) ne subissent pas la menace de sanctions. Corée du Nord, Arabie saoudite, Iran, Syrie possèdent ou peuvent posséder l’arme nucléaire. L’Allemagne*, le Japon, le Brésil, géants économi- ques et politiques, n’ont pas l’arme nucléaire. Le Brésil et l’Afrique du Sud y ont renoncé et ne s’en portent pas plus mal… * Toutefois, l’Allemagne, comme la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie et la Turquie, accepte d’abriter des armes nucléaires états-uniennes dans le cadre de l’OTAN
  • 57. 4 - La dissuasion nucléaire est antidémocratique Par sa structure même, la dissuasion nucléaire implique la démission des citoyen(ne)s qui abandonnent leur destin à la seule décision du Président de la République. Par les pouvoirs qu’elle confère au Chef d’État, l’arme nucléaire instaure de facto une monarchie absolue de droit divin qui écarte et éloigne le peuple de décisions qui concernent son existence. De même que Louis XIV, le Roi Soleil, disait : « L’État, c’est moi ! », François Mitterrand a pu dire : « La bombe atomique, c’est moi. » (1) Même si l’on doit se méfier des sondages et de la "sondocratie", une majorité des citoyens sont pour un désarmement nucléaire en France. 76 % des Français en 2018 étaient en faveur de l’engagement de la France dans un processus d’élimination des armes nucléaires (2). À la question : « Vous personnellement, pensez-vous que la France doive maintenant s’engager dans ce processus, c’est-à-dire signer et ratifier ce Traité d’interdiction des armes nucléaires », 67 % des Français répondent favorablement, soit plus des 2/3 de la population. 1 - Intervention de F. Mitterrand sur la politique de défense de la France, 5 mai 1994. 2 - Sondage IFOP du 4 juillet 2018 commandé par La Croix et le ‘Mouvement de la Paix’.
  • 58. Un débat refusé Le débat sur l’arme et la dissuasion nucléaires est totalement étouffé en France. La séance parlementaire du 23 mai 2018 est révélatrice : Une sénatrice, Hélène Conway-Mouret (photo du haut), propose un débat national sur la question : « Il nous paraît opportun d’organiser un débat au niveau national sur cette question, afin d’informer et de sensibiliser nos concitoyens. Il ne s’agirait en aucun lieu d’un sondage ni même d’un référendum. Ce serait une occasion pour les Français d’être correctement informés et de s’approprier le thème du nucléaire militaire au travers d’un débat porté, par exemple, par les parlemen- taires. » Réponse du rapporteur, Christian Cambon, Président de la commission des Affaires étrangères et de la Défense du Sénat (photo du milieu) : « Un an après la campagne pour l’élection présidentielle, au cours de laquelle ce sujet a été abordé, j’ai le sentiment que le débat a été tranché. Il ne me paraît pas judicieux de le relancer, au risque de mettre ainsi à nouveau en lumière toutes les oppositions sur le sujet et de donner la parole à tous ceux qui souhaitent se manifester contre le nucléaire d’une manière générale. » Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État (photo du bas) : « Même avis : le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. »
  • 59. 5 - La dissuasion nucléaire est démobilisatrice Comme naguère la ligne Maginot face au nazisme, le risque principal de la dissuasion nucléaire, en la faisant reposer sur un seul homme, le chef de l’État, est de démobiliser la population au sujet de sa défense, et de la laisser complètement démunie en cas de crise ou d'agression, d'où qu'elle vienne. En décembre 1929, le ministre de la Guerre, André Maginot, présentait au Parlement son ‘projet de loi relatif à l'organisation défensive des frontières’. Plusieurs députés répon- dirent que la ‘Ligne Maginot’ coûterait très cher et n'offrirait aucune garantie contre les véritables risques encourus par le pays. Ainsi, Jean-Marie Thomas (SFIO, Saône-et- Loire) qui disait : « La France, c'est non seulement le territoire, mais peut-être aussi ceux qui vivent sur ce territoire. » À grands frais, on a construit jusqu'en 1936 sur les frontières Est et Nord-Est de la France un énorme système de fortifications, qui a contribué à démobiliser la population contre le risque réel que représentait le régime national-socialiste allemand. ../..
  • 60. Le précédent de la ‘ligne Maginot’ La presse de 1939 proclamait le dogme sécuritaire de la ligne Maginot en affirmant son caractère infaillible. Mais, quelques mois plus tard, l'armée allemande contour- nait cette dissuasion illusoire, infligeait aux armées françaises une défaite éclair et occupait le territoire national. La défense militaire ayant échoué, et aucune défense civile n'ayant été préparée, la société française s'est retrouvée littéralement sans défense. Ne sachant que faire, la plupart des Français se sont alors résignés, à la suite des pouvoirs publics, à une collaboration qui a permis à l'agresseur d'occuper les institutions de la société politi- que et de les faire fonctionner à son propre service. Photos : - Ligne Maginot : fort de Schoenenboug - L’exode de 1940 - La collaboration de la police avec les Allemands : la rafle du Vel d’Hiv (16 juillet 1942)
  • 61. 6 - La dissuasion nucléaire est immorale L’existence même de l’arme nucléaire consacre l’échec de toutes les morales, de toutes les philosophies, de toutes les spiritua- lités, de toutes les sagesses, de toutes les religions. Et cela même si l’arme nucléaire est destinée à ne pas être utilisée. Un terroriste exerce un chantage, il ne passe pas forcément à l’action. Albert Camus, dans Combat le 8 août 1945, écrit : « La civilisa- tion mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. (…) Ce n’est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l’ordre de choisir définitivement entre l’enfer et la raison ». Le pape François déclare en novembre 2019 à Hiroshima : « L’utilisation de l’énergie atomique à des fins militaires est aujourd’hui plus que jamais un crime, non seulement contre l’homme et sa dignité, mais aussi contre toute possibilité d’avenir dans notre maison commune. (…) La possession d’armes nucléaires est immorale. »
  • 62. Un terrorisme d’État La logique de la dissuasion implique que les décideurs politiques soient fermement déterminés à passer à l’acte. La menace nucléaire s’apparente directement à la prise d’otage d’une population civile, à du terrorisme d’État*. Les idéologues ont construit une représentation irénique de la dissuasion nucléaire totalement éloignée de la réalité guer- rière de la menace des bombes nucléaires et de leur emploi potentiel. * L’État français a d’ailleurs commis un acte terroriste en juillet 1985, en coulant le Rainbow Warrior, navire-amiral de ‘Greenpeace’ qui s’apprêtait à protester contre les essais nucléaires à Mururoa : un mort, Fernando Pereira, une sérieuse crise diplomatique avec la Nouvelle- Zélande, un "bide" international, la démission du ministre de la Défense, d’énormes dédommagements à la Nouvelle-Zélande et à ‘Greenpeace’, etc. Notons que le colonel chef du ‘Service Action’ de la DGSE chargé de cette opération a été élevé à la dignité de Grand Officier de la Légion d’Honneur en 1995… Photos : - Essai de tir d’un missile balistique intercontinental; - L’attentat contre le Rainbow Warrior
  • 63. Une double aliénation de l’homme moderne En réalité, la croyance dans l’arme nucléaire se fonde irrationnellement dans la confiance qui nous a été inculquée par la civilisation moderne dans la technique et dans l’État. Pour renoncer à la bombe, il faudrait que l’homme d’aujourd’hui ait le courage d’oser se libérer de cette double emprise qui le rend inconscient et irresponsable. En définitive, l’arme nucléaire est une idole, plus dange- reuse que les autres idoles contemporaines que sont le prestige, le gigantisme, l’obsession de la vitesse, l’avidité, la course infinie aux biens matériels en dépit des conséquences sur la planète, etc. Image du haut : Charlie Chaplin dans Les temps modernes (1936)
  • 64. 7 - La dissuasion nucléaire est ruineuse Elle engloutit des sommes gigantesques, alors que les crédits manquent pour l’hôpital, l’éducation, la transition écologique. Le coût de l’arsenal nucléaire français de 1945 à 2010 est estimé à 228,67 milliards d’euros. (1) La France a effectué 210 essais nucléaires, dont 146 en Polynésie, et doit maintenant indemniser les victimes… Nos dirigeants ont décidé de moderniser la dissuasion nucléaire française dans le cadre des lois de programmation militaire (LPM) et de consacrer un effort budgétaire d'environ 25 milliards d'euros sur la période 2019-2023 et davantage pour la période 2024-2030. Images - Les essais nucléaires à Reggane, dans le Sahara algérien, ont précédé les essais en galerie dans le Hoggar (1960-1966) - Les essais nucléaires à Mururoa et Fangataufa, dans l’océan Pacifique (1966- 1996) - Le site Laser Mégajoule au Barp, en Gironde, où sont faites des simulations informatiques d’explosions nucléaires. (1) Brunot Barillot, Audit Atomique, ‘Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits’ (CRDPC) devenu L’Observatoire des armements.
  • 65. La dissuasion nucléaire est ruineuse Selon le nouveau rapport 2022 « Gaspillage : dépenses mondiales en armes nucléaires en 2022″, publiée par la Campagne ICAN, les 9 pays disposant de l’arme nucléaire ont dépensé 78,84 milliards d’euros en 2022 pour un arsenal mondial de 12 512 armes nucléaires, ce qui équivaut à près de 150 000 € par minute… Pour la France, le gaspillage financier de 5,3 milliards en 2022 pour l’arme nucléaire représente soit plus de 10 000 € chaque minute !
  • 66. La loi de programmation militaire 2024-2030 La nouvelle Loi de Programmation Militaire (LPM) prévoit un budget de 413 milliards d’euros pour la période 2024-2030. La dissuasion nucléaire et le nouveau porte-avions, deux postes majeurs de dépense dans la LPM, sont franco-français, et ne s'intègrent pas ou peu dans une politique européenne de sécurité et de défense, la seule crédible à nos yeux. On sait tous les vices de la dissuasion nucléaire, dont le principal est celui de l’inefficacité. Le nouveau ‘Porte-Avions de Nouvelle Génération’ (PANG)* envi- sagé par la LPM pour un coût de 5 à 10 milliards d’euros, quant à lui, ne sera au mieux qu’un outil de gesticulation pour afficher notre "puissance", au pire une cible idéale pour nos ennemis potentiels. Comme l’écrit Henri Vernet* : "Ces aéroport flottants formeraient des cibles toutes désirées pour des missiles hypersoniques russes ou chinois. Et ils seraient difficile-ment employables dans une guerre comme celle ayant lieu en Ukraine, entravés dans leurs manoeuvres par l'étroitesse de la mer Noire". ** Rédacteur en chef adjoint de Aujourd'hui, 2 avril 2023 * décrit comme une "cathédrale technologique de 75 000 tonnes" par le ministre des Armées Sébastien Lecornu, prévu pour être opérationnel en 2038, le PANG (photo du haut) transportera 2.000 marins, 300 avions de chasse comme le Rafale ou encore des drones.
  • 67. Le poids des lobbys Derrière toutes ces décisions se profile l’emprise des lobbies de l’industrie d’armement sur les décideurs politiques. Les liens forts entre la ‘Direction Générale de l’Armement’ (DGA - ingénieurs à statut militaire), premier investisseur de l’État, et les entreprises de défense permettent de parler à juste titre de complexe militaro-industriel. Paul Quilès, alors que les dirigeants états-unien songeaient à l’Initiative de défense stratégique (IDS : missiles anti-missiles, "guerre des étoiles") a écrit dans Le Monde que l’IDS coûterait très cher et ne servirait à rien. Jean-Luc Lagardère, dirigeant de Matra, lui a reproché cette tribune : « Vous allez nous faire perdre d’énormes contrats ! » Le général et Président des États-Unis Dwight Eisenhower (1890-1969) est le plus célèbre des militaires et des hommes politiques à avoir dénoncé le « complexe militaro-industriel », qu’il faudrait appeler plutôt complexe militaro-scientifico-industriel. Son discours télévisé de fin de mandat, prononcé le 17 janvier 1961, reste connu sous le nom de Military-Industrial Complex Speech : « Dans les conseils du gouvernement, nous devons prendre garde à l'acquisition d'une influence illégitime, qu'elle soit recherchée ou non, par le complexe militaro-industriel. Le risque d'un développement désastreux d'un pouvoir usurpé existe et persistera. »
  • 68. La mentalité nucléaire Le plus grave, et donc le plus inquiétant, c’est le triomphe de la mentalité nucléaire qui inhibe la conscience des citoyens. Ceux-ci ont perdu toute faculté d’indignation devant le fait que l’ingéniosité de l’homme se pervertit dans la fabrication d’armes de destruction massive. Notre pays a besoin de nombreux lanceurs d’alerte pour rompre cette compromission et ce silence. Selon l’article 6 de la ‘loi Sapin II’ du 9 décembre 2016, “Un lanceur d’alerte est une personne physique qui révèle ou signale, de manière désin- téressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice grave pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance”.
  • 69. La défaite de la raison et de l’intelligence L’existence même de l’arme nucléaire consacre l’échec de toutes les morales, de toutes les philosophies, de toutes les spiritualités, de toutes les sagesses, de toutes les religions. La dissuasion nucléaire est la défaite de la raison, la défaite de la pensée, la défaite de l’intelligence. Images - Albert Einstein : « Si j’avais su, je me serais fait plombier ! » - Mohandas Gandhi : « J’affirme que celui qui a inventé la bombe atomique a commis la plus grande faute dans le domaine de la science »
  • 70. Abolir les armes les plus immorales et dangereuses Les armes nucléaires seront abolies un jour - le plus vite possible sera le mieux. Les armes de destruction massive ou les armes les plus immorales sont interdites par la communauté internationale et peu à peu abolies : - les armes biologiques (avril 1972) - les armes chimiques (Paris, janvier 1993) - les mines antipersonnel (Ottawa, déc. 1997) - les armes à sous-munitions (Oslo, déc. 2008) - les armes nucléaires (TIAN, janvier 2021).
  • 71. Et la menace iranienne ? Et la bombe nord-coréenne ? Certains pourront dire : la dissuasion nucléaire nous met à l’abri des armes nucléaires (existantes, supposées ou à venir) de pays non démocratiques, tels que l’Iran (qui n’en a pas) et la Corée du Nord. La réponse tient en 2 points : 1 - Les bombes des pays démocratiques ne dissuadent pas ces dirigeants de s’armer, puisqu’ils le font ou menacent de le faire… On n’imagine pas une menace de frappe, nucléaire ou non, pour obliger ces pays à arrêter leurs programmes d’armement et de recherche. 2 - Au contraire, les bombes atomiques des pays démocratiques donnent un argument majeur aux dictateurs : « Pourquoi, si l’arme nucléaire est nécessaire à la sécurité de votre pays, n’aurions-nous pas le droit de nous en doter nous aussi ? ». Le seul langage crédible est celui de l’exemplarité. ■ Photos : - Ali Khamenei (Iran, dictature islamique) - Kim Jong-un (Corée du Nord, monarchie stalinienne)