2. Dr Poignonec.
En outre, les médecins ont l'obligation légale d'informer les patients sur les produits utilisés et leurs risques et de
recueillir leur consentement, a rappelé le Dr Jacques Saboye, secrétaire général de la Société française de
chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique (SoFCPRE). La direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait mené un contrôle dans les cabinets de chirurgie
esthétique montrant de nombreuses anomalies, "alors chez les esthéticiennes…", a fait observer le Dr Louafi
auprès d'APMnews.
Passer de la procédure judiciaire à la procédure administrative
Face à ces "pratiques dangereuses", le syndicat a décidé d'agir et a déposé neuf plaintes au pénal devant les
tribunaux judiciaires de Paris et Marseille contre des fake injectors pour exercice illégale de la médecine
principalement, sur la base d'un jugement de la Cour de cassation de 1991. Mais les victimes, honteuses,
refusent le plus souvent de s'engager dans des procédures judiciaires par ailleurs longues et coûteuses.
"Il faut accélérer et pour cela, passer des procédures judiciaires aux procédures administratives", a déclaré le
Dr Louafi à APMnews.
Le SNCPRE, appuyé par la Sofcep et la SoFCPRE ainsi que par le Syndicat d'esthétique médicale multispécialités
(SEMM), veut "que les autorités se saisissent de ce problème de santé publique", a-t-il insisté. "C'est un problème
mondial en plein développement et seuls les Etats peuvent y mettre fin sinon, on risque d'être dans la même
situation qu'en Asie", a averti le Dr Dominique Debray, président du SEMM, précisant que près des deux tiers des
médecins esthétiques en France rapportent avoir été confrontés à des complications d'injections.
Dans la littérature internationale, depuis 1993, sont rapportées des embolies d'artères oculaires avec perte de la
vision, des nécroses plus ou moins étendues du visage, des infections foudroyantes et plus récemment, "43 cas
d'embolies d'artères cérébrales, avec des troubles de la conscience, des hémiplégies, des pertes de la vision et 5
décès", ainsi que "deux cas d'hémorragie pulmonaire après des injections gynécologiques", a-t-il énuméré,
précisant qu'il existe aussi des injections dans le vagin mais aussi le pénis et les fesses.
Selon le Dr Louafi, pour le moment, aucun décès lié à ces injections illégales n'est encore survenu en France.
Mais "faut-il attendre qu'il y ait des morts pour que les autorités réagissent?", se sont interrogés les différents
intervenants.
Pourtant, la France a été le premier pays en Europe à avoir une loi qui encadre les actes à visée esthétique dès
2009, donnant pouvoir de contrôle et de sanction aux agences régionales de santé (ARS). "Mais sans décret
d'application, elles ne peuvent pas agir", a déploré le Dr Debray. "Elles pourraient mener des inspections dans
des instituts de beauté, qui ont pignon sur rue, qui font de la promotion sur Instagram et Facebook, pour vérifier
les qualifications ou saisir le procureur quand il s'agit de particuliers", a précisé le Dr Louafi à APMnews.
Le décret devrait également reprendre la norme européenne NF EN 16844 qui fixe notamment les critères de
formation. Les discussions sur le texte avaient repris avec le ministère des solidarités et de la santé mais la
pandémie de Covid-19 a tout arrêté.
Un recueil difficile des complications
Outre les ARS, qui peuvent aussi agir sur "les aiguilles souillées jetées dans les poubelles publiques", ces
médecins appellent la DGCCRF à intervenir sur les questions de protection des personnes, de l'information et du
consentement, et l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) sur la publicité
et la distribution de l'acide hyaluronique et des produits de comblement.
Les médecins doivent d'ailleurs déclarer à l'ANSM les cas d'effets indésirables mais ce n'est que "la partie
émergée de l'iceberg" et lorsqu'ils traitent des complications, les patients ne savent pas toujours quel produit
leur a été injecté et encore moins le numéro de lot. "Peut-être faudrait-il déclarer sans remplir ces éléments…", a
commenté le Dr Louafi, estimant nécessaire de recueillir des données.
De manière similaire, l'ANSM avait lancé une alerte sur les produits frauduleux et les contrefaçons d'acide
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