Hernies internes : types, diagnostic et traitements
1. Hernies internes : types,
diagnostics, et traitement.
Hugo LEBRUN
Dr. PLENIER, Dr. NZAMUSHE
Urgences chirurgicales
Hernies internes : types,
diagnostics, et traitements.
3. Mme B.
• Antécédents :
Maladie de Crohn, lupus cutané, sigmoïdectomie sur diverticulite.
• Traitements au domicile :
FIVASA, SPASFON, NIVAQUINE.
• Histoire de la maladie :
Consulte aux urgences le 06/01/2017 car depuis 8 jours : constipation, avec
apparition de vomissements depuis 3 jours, et distension abdominale.
Elle consulte à Armentières où on réalise un TDM abdomino-pelvien
retrouvant un volvulus du grêle : traitement par sonde naso-gastrique.
4. Mme B.
• Sur le plan hémodynamique, patiente apyrétique avec constantes
dans les normes.
• Sur le plan biologique, on retrouve une CRP à 8 mg/L, le reste du
bilan est sans particularité.
• Cliniquement, pas de douleurs abdominales spontanées, arrêt du
transit gazeux et solide, SNG a donné 300 cc, l’abdomen est souple et
dépressible douloureux à droite sans défense.
8. Mr. C (64 ans)
• Antécédents : Anévrisme de l’aorte abdominale traité par
endoprothèse (2005), pontage fémoro-poplité gauche, polype vésical,
hypertrophie bénigne de prostate.
• Traitements au domicile : KARDEGIC, PRAVASTATINE, RAMIPRIL,
AVODART, ALFUZOSINE.
• Histoire de la maladie : Hospitalisé en chirurgie vasculaire pour
évolution de son anévrisme de l’aorte abdominale, traité par
explantation d’endoprothèse.
• J7 : Syndrome occlusif grêlique d’origine mécanique par strangulation
sur bride.
9. Mr. C (64 ans)
• Au bloc opératoire :
• Hernie interne transmésocolique gauche.
Traitement par libération de l’anse et résection-anastomose
10. Définition
Hernie interne :
« Protrusion d’un viscère au travers d’une ouverture dans les confins
de la cavité péritonéale (bien que toutes les hernies internes ne soient
pas strictement intra-péritonéales). »
Meyers et al, 2011.
11. Hernies internes : généralités
• Les orifices de hernie interne peuvent être congénitaux ou acquis.
• Dans la majorité des cas, l’organe incarcéré est de l’intestin grêle.
• Les hernies internes sont responsables de 4% des syndromes occlusifs
grêles.
15. Hernies internes : Classification
• Les hernies liées à une ouverture anormale du mésentère ou d’un
ligament péritonéal peuvent être divisées en deux catégories :
Transmésentériques (type « fenêtre ») quand les deux
feuillets péritonéaux sont impliqués.
Intermésentériques (type « poche ») si seul un feuillet
péritonéal est impliqué.
17. Hernies internes : Diagnostic
• Difficile pour le clinicien en raison des symptômes non-spécifiques.
• Examen complémentaire : Scanner multi-barrettes avec injection de
produit de contraste.
• L’injection de produit de contraste permet d’apprécier le flux sanguin
de l’intestin hernié, ainsi que le trajet des vaisseaux mésentériques
par rapport à l’orifice de hernie.
18. Hernies internes paraduodénales
• Piégeage de l’intestin grêle dans une fossette para-duodénale congénitale.
• 60% des hernies internes.
• Deux fossettes sont responsables :
Fossette de Landzert, responsable des hernies paraduodénales gauches.
Fossette de Waldeyer, responsable des hernies paraduodénales droites.
Les hernies paraduodénales gauches sont trois fois plus fréquentes que les droites.
19. Hernies internes paraduodénales
Fossette de Landzert :
La veine mésentérique inférieure et la portion ascendante de
l’artère colique gauche sont sur le bord antéro-médial de la
fossette.
Fossette de Waldeyer :
L’artère mésentérique supérieure et la veine mésentérique
supérieure sont sur le bord antéro-médial de la fossette.
20. Hernie paraduodénale gauche
• Piégeage de l’intestin grêle dans la fossette de Landzert, qui est une
fossette congénitale inhabituelle derrière le mésocolon descendant.
• Dûe à un échec de fusion du mésocolon descendant avec le péritoine
postérieur.
• Présente chez 2% des autopsies.
22. Hernie paraduodénale gauche
• Entre la 4ème et la 5ème décade.
• 50% des patientes se présentent en syndrome occlusif.
• Histoire de douleurs abdominales récurrentes et résolutions
spontanées
• Nausées et vomissements fréquents, post-prandiaux.
• Influence de la position : symptômes majorés en orthostatisme,
calmés en décubitus.
• Examen physique normal si le patient n’est pas en occlusion.
• 20-50% de décès en présentation aigue.
23. Hernie paraduodénale gauche
• Au scanner : cluster d’anses intestinales sous forme de sac dans
l’espace para-rénale gauche antérieur.
• Nécessité d’identifier la veine mésentérique inférieure qui est antério-
médiale à l’orifice de hernie.
26. Hernie paraduodénale gauche
Flèche blanche : fosse de Landzert
Flèche noire pleine : sac herniaire
Flèche noire vide : Première anse jéjunale
27. Hernie paraduodénale gauche
• Traitement :
Chirurgical par réduction de la hernie et fermeture de l’orifice.
Laparoscopie : 1ère description en 1998 (Uematsu).
Depuis, 28 cas dans la littérature.
Avantages : diminution des douleurs post-opératoires, morbidité
réduite, reprise alimentaire précoce, diminution du temps
d’hospitalisation.
Complications : plaie de la veine mésentérique inférieure, rédicive de
hernie.
28. Hernie paraduodénale droite
• Implique la fossette de Waldeyer
• Résulte de l’échec de la fusion d’une partie du mésocolon ascendant avec
le péritoine postérieur.
• Plus fréquent dans les configurations de non-rotation de l’intestin grêle :
défaut de rotation du segment pré-artériel autour de l’artère mésentérique
supérieure.
• Peut donc être associée à une agénésie du deuxième et troisième
duodénum, inversion des vaisseaux mésentériques, côlon avec rotation
incomplète.
32. Hernie paraduodénale droite
• Au scanner : la fossette de Waldeyer est en arrière du 3ème
duodenum, juste derrière la racine du mésentère.
• L’artère et la veine mésentérique supérieures longent le bord
antériomédial de la fossette et sont des points de repère utiles.
• La veine colique droite est déplacée antérieurement par l’intestin
trappé.
35. Hernie paraduodénale droite
Flèches : Fossette de Waldeyer
Astérisque bleue : racine du mésentère
Astérisque jaune : péritoine postérieur
Astérisque vert : mésocolon transverse
36. Hernie paraduodénale droite : traitements
• Si grande quantité d’intestin grêle
trappé : détacher les attaches
latérales du colon ascendant, faire
une rotation médiale, et libérer le
grêle trappé. (Bartlett, 1968)
• Cela revient à remettre les segments intestinaux dans leur position
après la première rotation : duodénum, jéjunum et iléon à droite,
caecum et côlon à gauche.
• Si petite quantité : suture simple de
l’orifice herniaire par laparoscopie
ou laparotomie.
37. Hernie paraduodénale droite : traitements
Traitement majoritairement par laparotomie.
6 cas décrits de traitement par laparoscopie.
38. Hernies du mésentère
• Mésentère : connecte l’iléon et le jéjunum au péritoine postérieur et
s’étend du ligament de Treitz à la jonction iléocaecale, contenant
l’artère et la veine mésentérique supérieure, ainsi que leurs branches.
• Deux types de défect dans le mésentère :
Hernie transmésentérique, les deux feuillets sont affectés
Hernie intramésentérique, un seul feuillet est affecté
39. Hernies transmésentériques
• Ecrasante prépondérance des hernies transmésentériques.
5 à 10 % des hernies internes.
• Au scanner, il n’y a ni d’aspect de sac, ni de vaisseaux clés. On retrouve un encombrement,
étirement des vaisseaux mésentériques ainsi qu’un déplacement vers la droite du tronc
mésentérique.
• Les hernies transmésentériques ont tendance à être compliquées de volvulus.
• Chez l’enfant, souvent associée à une atrésie de l’intestin.
Chez l’adulte, majoritairement post-opératoire.
• Les défects sont majoritairement proches de la valvule iléo-caecal ou près de l’angle de Treitz.
44. Hernies transomentales
• Grand omentum : suspendu entre la grande courbure de l’estomac et la
partie proximale du duodenum, recouvrant l’intestin grêle comme un
tablier, et s’attachant à la partie supérieure du colon transverse.
• Comporte deux feuillets, chacun comportant deux feuillets péritonéaux.
(quatre au total)
• Dans la majorité des cas, les hernies passent au travers des deux feuillets :
hernies transomentales.
• 1 à 4% des hernies internes.
• Scanner d’allure similaire aux hernies transmésentériques. Un intestin grêle
en forme de boucle fermée, sans sac, dans la portion antérieure de la
cavité péritonéale, est classique. Le trajet est de postérieur vers antérieur.
Les branches omentales des artères gastro-omentales droites et gauches
sont des points de repère.
45. Hernies transomentales
Tête de flèche : intestin grêle en forme de
« boucle fermée » (closed-loop)
Flèches blanches : vaisseaux omentaux
Flèches noires : convergence de vaisseaux
mésentériques et de graisse vers l’orifice
herniaire.
47. Hernies du hiatus de Winslow
• Foramen de Winslow : fait communiquer l’arrière cavité des épiploons
avec la grande cavité péritonéale.
• Repères anatomiques : inférieur au lobe caudé du foie, devant la veine cave
inférieure, au dessus du deuxième duodénum, et en arrière du ligament
hépatoduodénal contenant l’artère hépatique, la veine porte, et le
cholédoque.
• Organes trappés : majoritairement de l’intestin grêle, mais aussi le caecum,
le colon ascendant, le colon transverse et la vésicule biliaire.
• 8% des hernies internes.
48. Hernies du hiatus de Winslow
• Hernies rares car normalement le foramen de Winslow est fermé par
la pression abdominale.
• Prévalence augmentée chez les hommes faisant des travaux
physiques.
• Majoritairement entre 61 et 69 ans.
• La cholecystectomie pourrait être un facteur de risque.
• Autres facteurs de risques : intestin grêle anormalement long,
foramen de Winslow anormalement élargi, défect dans le ligament
gastrohépatique.
49. Hernies du hiatus de Winslow
• Symptômes :
Ceux du syndrome occlusif
Ictère par compression du pédicule hépatique
• Sur le scanner, aspect en bec d’oiseau de l’organe hernié pointant vers le foramen
de Winslow.
• En cas d’intestin grêle trappé, la présence des vaisseaux mésentériques entre la
veine cave inférieure et la veine porte est également un indice.
• On peut également trouver une compression de la veine porte par l’organe
hernié.
50. Hernies du hiatus de Winslow
• Traitement :
Chirurgical pour réduction de la hernie, majoritairement par laparotomie devant
l’incertitude diagnostique fréquente. (< 10% de diagnostic préopératoire).
Désormais possible par laparoscopie par des chirurgiens expérimentés.
Peut être difficile en cas de forte dilatation colique, nécessitant parfois une manœuvre de Kocher ou
une incision du ligament gastro-hépatique.
En laparoscopie, en cas de forte dilatation colique il est possible de faire une décompression colique
par un cathéter. (16 gauges).
Intérêts de la laparoscopie : diminution de la douleur, de la durée de séjour, meilleure récupération,
et retour aux activités de la vie quotidienne plus rapide.
Ne pas fermer le hiatus de Winslow, au risque d’une thrombose de la veine porte.
54. Hernies péri-caecales
• Dûes à un récessus congénital inhabituel péri-caecal.
• 0,1% à 6,6% des hernies internes.
• 4 types de récessus :
Récessus iléo-caecal supérieur
Récessus iléo-caecal inférieur
Récessus rétro-caecal
Scissure para-colique
Sur le scanner, on retrouve un déplacement du caecum et du colon ascendant vers l’avant
ou en dedans.
55. Hernies péri-caecales
• Traitement :
Historiquement, fermeture de l’orifice herniaire.
En ce moment la tendance est de laisser l’orifice ouvert, ou même de le
dilater.
Majoritairement par laparotomie ( 2 cas décrits par cœlioscopie)
58. Hernies du mésosigmoïde
• 3 sous types : transmésosigmoïde, intermésosigmoïde,
intramésosigmoïde. (Benson & Killen)
• Trans- et intramésosigmoïde : hernies au travers d’un défect du
mésosigmoïde lui-même, soit des deux feuillets, soit d’un seul feuillet.
• Intersigmoïde : hernies de la fossette intersigmoïdenne, une fossette
congénitale rétropéritonéale située au dessus et en arrière de la
racine du mésosigmoïde. Présente chez 70% de la population.
59. Hernies du mésosigmoïde
• Sur le scanner, l’orifice herniaire est visible entre le colon sigmoïde et le muscle
psoas gauche.
• Il n’y a pas d’aspect de sac pour les transmésosigmoïde, en opposition aux inter-
et intra-mésosigmoïde.
• Le mésosigmoïde comporte les artères et veines sigmoïdiennes, et les artères et
veines rectales supérieures.
• 27 cas décrits dans la littérature, tous traités par laparotomie, dont un par
coelioscopie puis conversion. 75% de nécrose.
61. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
• Complication majeure de la chirurgie bariatrique par gastric by-pass.
• Plus fréquente en cas de chirurgie initiale par laparoscopie que par laparotomie.
• Favorisée par la perte de poids, qui diminue l’adiposité intra-abdominale pouvant
conduire à l’augmentation de la taille des défects.
• Incidence entre 0,2 et 9%.
• 3 sous-types : transmésocolique, trans-mésentère jéjuno-jéjunal, et hernies de
Petersen.
62. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
• Hernies transmésocoliques : au travers du défect dans le mésocolon
transverse où passe la anse montée.
• La hernie du mésentère de l’anastomose jéjuno-jéjunale : au travers
du défect du mésentère.
• La hernie de Petersen : dans l’espace de Petersen, entre le mésentère
de l’anse montée et le mésocolon transverse.
63. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
1 – Hernie transmésocolon transverse
2 – Hernie trans-mésentère de l’anastomose
jéjuno-jénunale
3 – Hernie de Petersen
65. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
• Sur le scanner, l’anatomie est complexe chez les patients ayant subit
un Roux-en-Y Gastric By-Pass.
• On retrouve un « tourbillon mésentérique », des clusters d’anses
grêles, le signe du champignon, un signe de l’œil de l’ouragan, des
anses grêles derrière l’artère mésentérique supérieure, une position
anormale de l’anastomose jéjuno-jéjunale, et un mésentère
« larmoyant ».
66. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
Flèches : « tourbillon
mésentérique »
Tête de flèche : anse montée
(anse alimentaire)
Astérisques : anse
biliopancréatique dilatée
68. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
• Traitements :
• Chirurgical, par voie laparoscopique si le chirurgien est entrainé.
Conversion en cas de nécrose intestinale.
69. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
Décaler le côlon transverse vers le haut, et l’anse
alimentaire vers la gauche du patient, pour dévoiler
l’espace de Petersen
70. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
En cas de Hernie de Petersen, basculer le contenu hernié de la droite vers la gauche du patient,
puis fermer le défect au fil 2.0
71. Hernie sur Roux-en-Y Gastric By-Pass (RYGBP)
• Réduction du contenu hernié et fermeture du défect en cas d’hernie
inter-mésentérique
72. Hernie du ligament falciforme
• Hernie au travers d’un défect anormal du ligament falciforme, attachant la face
antérieure du foie à la face antérieure de la paroi. 0,2% des cas.
• Majoritairement de l’intestin grêle, mais également du côlon et de l’omentum
peuvent être retrouvés.
• Il n’y a pas d’apparence de sac. Il est suspecté une hernie du ligament falciforme
losqu’une anse en forme de boucle fermée est retrouvée devant ou légèrement
sous le foie.
• Le ligament rond est le bord inférieur du ligament falciforme et contient l’artère
falciforme, ainsi que les veines para-ombilicales. Le ligament rond sert de repère
scannographique au ligament falciforme.
73. Hernie du ligament falciforme
Flèches : Intestin grêle incarcéré situé devant
le foie.
74. Hernie du ligament falciforme
Flèche jaune : Bord gauche du foie
Flèches vertes : Petit défect dans le
ligament falciforme
Flèches bleues : Intestin grêle trappé
Astérisque : ligament falciforme
76. Hernies post-chirurgie
• Post-néphrectomie trans-mésocolon descendu : 11 cas dans la littérature,
tous après néphrectomie pour néphroblastome, la majorité (9/11) par voie
laparoscopique.
• Post chirurgie colorectale : étude coréenne rétrospective de 2016, sur
4589 patients ayant eu une chirurgie colo-rectale pour cancer entre 2007
et 2015 : 9 patients ont eu une hernie interne, soit 0,2%. Tous par voie
laparoscopique.
A 4 mois post-opératoire en moyenne. La laparoscopie diminue le nombre
d’adhérences et permet donc au grêle d’être plus libre.
Certains chirurgiens ne ferment pas les défects devant la faible incidence et
le risque de plaie vasculaire, et laisser de grands défects évitent
l’étranglement.
77. Conclusion
• 4% des syndromes occlusifs mécaniques
• Difficulté diagnostique pré-opératoire
• Gold standard : scanner abdomino-pelvien avec injection.
• Traitement chirurgical par laparotomie ou laparoscopie
• Forte mortalité en cas de souffrance digestive (20-50%)
• Plus fréquentes : Paraduodénales gauches, après gastric by-pass,
foramen de Winslow
• Autres hernies non abordées : hernies du mésocôlon transverse,
hernies de la cavité omentale, hernies pelviennes : hernies du
ligament large, hernies supravésicales, hernies du Douglas