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Cet article a été fait à partir du cours du professeur Ceruse et du mémoire de deux étudiantes de Nancy : Lauriane
Castro-Rodriguez et Candice Jacquinet. Leur mémoire est consultable en ligne sur le site internet“Mémophonie”.
	 Introduction
	 Le Larynx est l’organe situé au niveau de la gorge, entre le pharynx et la trachée, il abrite les cordes vocales. Le
larynx a donc un rôle dans la phonation, la respiration et la déglutition puisqu’il protège la trachée.
	 La laryngectomie correspond à une ablation du larynx, celle-ci peut être partielle ou totale mais résulte
généralement d’un cancer (= prolifération anormale de cellules créant une tumeur au sein du tissu sain de l’organisme)
des voies aéro-digestives supérieures (VADS). Les VADS regroupent différentes structures anatomiques comme les
fosses nasales, la cavité buccale, le pharynx, le larynx et la trachée. Des troubles des fonctions associées : respiration,
phonation et déglutition, résultent de la modification de ces structures. CesVADS sont le « carrefour stratégique entre
le parler et le manger, éléments clés de la vie sociale » (Ataya & Trouillet, 2014), une chirurgie de cette zone engendre
alors des répercussions physiques, physiologiques et psychologiques.
	 Étiologie et épidémiologie des cancers des VADS
Il existe 3 grands groupes différents de cancers :
	- Cancers du rhinopharynx : dus à l’EBV (Virus d’Epstein-Barr), un virus qui donne également la mononucléose
infectieuse. Ce virus devient cancérogène s’il est associé à d’autres co-facteurs. Quasiment toute la population est
infectée par ce virus, mais nous ne sommes pas tous atteints de cancer : le potentiel cancérogène s’exprime en
présence de co-facteurs alimentaires, comme les aliments riches en nitrosamines (sauces de poissons en saumure,
aliments séchés et salés en Asie du Sud Est, harissa au Maghreb). Les cancers du cavum sont donc très rares en France.
	 - Cancers des sinus et des fosses nasales : induits par les poussières de bois, qui contiennent des tanins, des
substances cancérigènes. Les métiers dans lesquels on respire ces particules fines sont des métiers à risques de cancer
de l’ethmoïde et des fosses nasales.
	 - Cancers de la cavité orale, de l’oropharynx, de l’hypopharynx, du larynx : les plus rencontrés.
Les facteurs de risques sont nombreux :
	 - Le tabac – fumer un paquet par jour pendant 30 ans augmente de 50% les risques de développer un cancer
ORL. La consommation de tabac multiplie le risque de cancer de 5 à 25. Au moment du diagnostic du cancer desVADS,
la consommation moyenne des patients est de 40 PA (paquet-année).
	 - L’alcool – Il existe toutefois une controverse au sujet de la consommation d’alcool seul. Au moment du
diagnostic, le patient a consommé environ 1 700kg d’alcool.
Il est important de noter que l’association du tabac et de l’alcool est explosive : elle multiplie le risque de cancer par
40. En effet, l’alcool solubilise les carcinogènes du tabac, qui passent ainsi plus facilement la muqueuse des VADS, ce
qui induit une concentration beaucoup plus importante.
	 - Les infections (HPV = Human Papilloma Virus). Identifié depuis longtemps comme à l’origine de cancers du
col de l’utérus, ce n’est que depuis 6-7 ans qu’il est impliqué dans les cancers des VADS, avec la généralisation de
certaines pratiques sexuelles. Cette incidence des cancers HPV positifs de l’oropharynx augmente considérablement
: 20% des cancers des VADS étaient dus à l’HPV il y a 20 ans, 90% aujourd’hui aux US pour 30% en France. Ce virus
hautement carcinogène est une maladie sexuellement transmissible et se mélange avec les cellules de l’ADN sain
pour induire une carcinogénèse. Les cancers de l’oropharynx (amygdales linguales et surtout palatines) sont dus au
HPV 16 et 18, d’où l’importance de la vaccination.
	 - Les facteurs héréditaires : ces facteurs de risque peuvent augmenter les risques de cancer VADS.
	 - L’état dentaire : un mauvais état dentaire est un facteur de risque en tant que reflet d’un mauvais mode de vie.
	 - Les expositions professionnelles : amiante, chrome, nickel, métaux lourds … Les personnes exposées à ces
composés sont, de par leur catégorie socio-professionnelle, plus préférentiellement fumeurs et buveurs.
	 - Les carences vitaminiques, comme pour tous les cancers.
Dossier du mois
Orthophonie et laryngectomie
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	 Ce cancer, dans 90% des cas, est un carcinome épidermoïde. Il s’agit d’une tumeur maligne cutanée pouvant
toucher l’oropharynx, l’hypopharynx, le larynx ou encore la cavité buccale. Les cancers des VADS constituent un
problème de santé publique en France. Ils sont classés au 5ème rang des cancers les plus fréquents (16 000 nouveaux
cas en 2008). 75% des nouveaux cas concernent des hommes. Ceci étant, il est intéressant de souligner que le nombre
annuel de nouveaux cas chez la femme est en augmentation (+ 1,5% entre 2000 et 2005). A l’inverse, ce taux est en
baisse chez l’homme (-5% entre 2000 et 2005). La laryngectomie totale est indiquée le plus souvent en traitement
chirurgical d’un cancer du larynx. Selon l’Institut National du Cancer, il y a eu en 2012, 3 322 nouveaux cas : 2 821 sur
des patients hommes et 501 sur des patientes femmes, soit une prévalence de 85% d’hommes pour 15% de femmes.
Là aussi, l’incidence est en baisse chez l’homme alors qu’elle est en augmentation chez la femme. L’âge moyen du
diagnostic est de 65 ans chez l’homme et 64 ans chez la femme.
	 Les cancers des VADS touchent essentiellement les hommes mais de moins en moins et surtout des catégories
socio-professionnelles basses car leur consommation de tabac et d’alcool est plus importante. Les patients sont
généralement âgés de 50-60 ans. C’est la seconde cause de mortalité pour cette tranche d’âge. Cependant les cancers
peuvent arriver dès 40 ans voire beaucoup plus tôt (très rare).
	 Diagnostics et moyens thérapeutiques
	 C’est souvent le médecin généraliste qui adresse le patient à un médecin ORL (Oto-Rhino-Laryngologiste), s’il
repère une anomalie face à certains signes d’appel. Le médecin ORL effectue tout d’abord un examen clinique par
laryngoscopie indirecte (au miroir ou à l’aide d’un nasofibroscope). Cet examen lui permet de visualiser la tumeur et
d’orienter fortement le diagnostic, confirmé ensuite par une biopsie. C’est ainsi qu’il pourra déterminer l’extension en
surface et en profondeur de la tumeur. Un examen scannographique vient appuyer les conclusions précédentes.
	 La tumeur est définie selon la classification TNM. Il s’agit, d’après l’Union Internationale Contre le Cancer,
d’une « façon de classer les cancers selon leur extension anatomique ». Le classement dépend du volume tumoral (T),
de l’atteinte ganglionnaire ou des adénopathies (N) et de l’état métastatique à distance (M). Cette classification est
universelle. Une proposition de traitement sera émise, tenant compte de ces informations et de l’évolution de la tumeur.
Rappel anatomique : le larynx
		Les traitements
	 Il existe différents traitements. Premièrement, les traitements médicaux comme la radiothérapie ou la
chimiothérapie qui peuvent être utilisés seuls, après ou en même temps qu’une chirurgie.
	 Ensuite, il y a les traitements chirurgicaux : la laryngectomie totale et les différentes laryngectomies partielles
(verticale et horizontale).
	 La laryngectomie totale est la plus grosse intervention puisqu’elle consiste en l’ablation complète du larynx.
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Pour ce faire, le chirurgien pratique une incision au niveau du cou qui va d’une oreille à l’autre. Il peut ainsi accéder
au larynx et pratiquer l’exérèse. Si besoin, il réalise également un curage des ganglions situés dans le cou. En ôtant
le larynx, le chirurgien supprime définitivement le carrefour aérodigestif et dévie la trachée. Celle-ci est abouchée
à la base du cou de manière définitive, ménageant ainsi un orifice permanent : le trachéostome. Il est vital car c’est
désormais l’unique voie de communication aérienne entre le milieu extérieur et le milieu intérieur. C’est maintenant
par le trachéostome que le patient respire. En post-opératoire, durant la période de cicatrisation et parfois de façon
irréversible, une canule est mise en place pour que le calibre reste constant. Le boîtier laryngé, qui contient les cordes
vocales,disparaît.Lafonctiondephonationoriginellen’existeplus.Lasuppressiondecettejonctionimpliqueégalement
une reconstruction du pharynx, laissé béant par l’ablation du larynx. Il a perdu ses insertions laryngées et le chirurgien
le referme sur lui-même. Il effectue une suture pharyngée très importante, celle-ci étant garante de l’imperméabilité
totale de la voie digestive. Des conséquences sur la déglutition peuvent donc apparaître. Durant les suites opératoires,
le patient doit attendre la parfaite cicatrisation de cette suture (environ 10 jours) avant de se réalimenter. Dans un
premier temps, il porte une sonde naso-gastrique, voire bénéficie d’une gastrostomie percutanée endoscopique s’il
a déjà des problèmes d’alimentation ou si la réalimentation risque d’être longue et progressive. Après contrôle de
l’étanchéité de la suture pharyngée par un test de déglutition au bleu de méthylène, la réalimentation per os peut
reprendre. Les possibilités de réalimentation sont généralement satisfaisantes.
	 Lors des laryngectomies partielles, on retire une partie du larynx tout en gardant ses différentes fonctions
(phonation, déglutition, respiration). Il existe 3 laryngectomies horizontales :
- la cordectomie. C’est l’ablation d’une corde vocale. Cette opération est désormais réalisée au laser.
- la laryngectomie frontale antérieure avec épiglottoplastie, appelée aussi opération deTücker. On retire les deux cordes
vocales, le tiers antérieur du cartilage thyroïde, on laisse deux aryténoïdes. Il faut faire une reconstruction de l’épiglotte
(épiglottoplastie) car celle-ci est très abaissée et ne peut plus recouvrir le larynx lors de la déglutition.
- la laryngectomie horizontale supra-glottique. Le chirurgien retire l’épiglotte, l’os hyoïde, un peu de base de langue
et la vallécule. Pour refermer, il utilise une pexie : il rapproche la base de langue au cartilage thyroïde en utilisant des
fils de suture. Il peut aussi retirer la partie supérieure du cartilage thyroïde, les bandes ventriculaires et les trois replis.
Il y a 2 types de laryngectomies verticales :
- l’hémi pharyngo laryngectomie, supra glottique ou supra cricoïdienne. Lors d’une laryngectomie supra glottique,
le chirurgien retire la moitié de l’os hyoïde, du cartilage thyroïde, de l’épiglotte et une bande ventriculaire. Pour une
chirurgie supra cricoïdienne, on retire la même chose, plus une corde vocale.
- les laryngectomies sub totales reconstructrices :
	 o la CHEP (crico-hyoïdo-épiglotto-pexie) où on retire tout le cartilage thyroïde, les deux cordes vocales et un
arythénoïde. Pour fermer, on fait une pexie entre le thyroïde, l’épiglotte et l’os hyoïde.
	 o la CHP (crico-hyoïdo-pexie), on retire les mêmes éléments que pour la CHEP en enlevant en plus l’épiglotte.
Pour fermer, on effectue une pexie entre l’os hyoïde et le cricoïde.
	 Le traitement adéquat est choisi en consultation pluridisciplinaire où au moins 3 médecins (chirurgien,
oncologue ou chimiothérapeute, et radiothérapeute) sont présents et prennent part à la décision. L’orientation du
traitement est dépendante de l’âge du patient, des comorbidités, du niveau intellectuel et social qui sont importants
pour une bonne rééducation. Il y a aussi une balance séquelles/guérison.
Le plus souvent, on retrouve ces traitements :
- T1T2 (petites tumeurs) : chirurgie et/ou radiothérapie
- T3T4 (plus importantes) résécables : prise en charge plurielle c’est-à-dire chirurgie et radiothérapie adjuvante
- T3/T4 non résécables : chimiothérapie et/ou radiothérapie
	 Les différentes“technologies”suite à la chirurgie
	 Ilexisteplusieursoutilssuiteauxlaryngectomies:lescanulestrachéales,lesimplantsphonatoires,lesvibrateurs
externes et les filtres trachéaux.
	 Dès qu’il y a une nécessité de trachéotomie, le chirurgien pose une canule trachéale dans le but de maintenir
écartée l’ouverture trachéale servant à la respiration. Cette canule est normalement provisoire (plusieurs semaines à 2
mois) puisqu’elle est fixée pour la période de cicatrisation. Ces canules sont pour la plupart fabriquées en silicone afin
de s’assouplir avec la température du corps et ainsi de mieux s’adapter à celui-ci.
	Pour l’implant phonatoire, le chirurgien effectue une ouverture entre la trachée et l’œsophage. Il est nécessaire
de la fermer afin d’éviter les fausses routes. Pour cela, on pose un implant phonatoire. C’est une valve qui permet de
fermer la trachée en faisant pression avec le doigt. Ainsi, l’air passe dans l’œsophage et le patient peut parler.
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Cet implant fait aussi office de nez artificiel puisqu’il filtre, réchauffe et humidifie l’air. Cependant, il peut y avoir des
complications avec des fuites importantes.
	Les vibrateurs externes sont des appareils que l’on place sur la trachée et qui vibrent. Ils sont utilisés en cas
d’échec de la voix œsophagienne ou pour tout autre besoin particulier.
	Les filtres trachéaux, ou « nez artificiels », sont utilisés pour prévenir des infections des voies aériennes
supérieures. En effet, on recommande souvent aux patients d’utiliser des foulards de protections mais ceux-ci sont
beaucoup moins efficaces que les filtres qui sont conçus à cet effet.
	 Ces systèmes améliorent grandement la qualité de vie des patients laryngectomisés en les protégeant des
infections mais aussi en leur permettant de parler à nouveau.
À gauche, une canule trachéale.
À droite, un implant phonatoire.
	 Les conséquences pour le patient
		 Les conséquences physiologiques
	 En supprimant le larynx, le chirurgien a modifié toute l’anatomie des voies aérodigestives. Des conséquences
physiologiques sont donc inévitables.
	 - Les conséquences respiratoires
La trachée ayant été déviée de son tracé naturel, la physiologie de la respiration est modifiée. La personne
laryngectomisée respire de manière définitive par l’orifice de trachéostomie. L’air ne passe plus par les filtres naturels
qu’étaient les fosses nasales et le pharynx ; ceux-ci assuraient l’humidification et le réchauffement de l’air inhalé
et constituaient un rempart contre les particules susceptibles de pénétrer les voies pulmonaires. Dorénavant, la
personne laryngectomisée pallie tout cela en utilisant des aérosols, en se munissant d’un filtre artificiel ou encore
d’échangeur de chaleur et d’humidité. Ces compensations sont indispensables pour réduire les mucosités venant des
voies respiratoires et évacuées par le trachéostome, et pour éviter les infections.
	 - Les conséquences phonatoires
La perte de la voix est « bien évidemment l’aspect le plus grave de l’opération et c’est lui qui va avoir les conséquences
les plus importantes par la suite » (Cros, 2009). En l’absence du larynx, la personne laryngectomisée se retrouve
complètement dépourvue de moyen de communication sonore. Pourtant, même s’il peut être difficile pour le patient
de le réaliser dans un premier temps, la communication avec les autres reste malgré tout possible : il peut utiliser
l’écriture (ardoise, papier), la voix blanche dite également chuchotée, les gestes. Ceci étant, il doit acquérir via une
réhabilitation vocale particulière, une voix oro-œsophagienne ou une voix trachéo-œsophagienne (avec implant) s’il
souhaite retrouver un outil de communication vocal.
	 - Les conséquences sur la déglutition
La suture pharyngée que le chirurgien effectue lors de l’opération oblige le patient à porter une sonde naso-gastrique
afin de s’alimenter pendant quelques temps, si celui-ci n’est pas déjà porteur d’une sonde de gastrostomie. Pour s’en
affranchir, il doit réinvestir sa déglutition et se réapproprier les organes essentiels à cette fonction. Bien que le risque
de fausses-routes soit écarté, le patient mange souvent un peu plus lentement et en moins grandes quantités. En effet,
l’irradiation des glandes salivaires (si radiothérapie) peut créer une insuffisance de sécrétions salivaires (hyposialie), de
même qu’un spasme de la bouche œsophagienne peut gêner la déglutition des aliments solides.
	 - Les conséquences sur l’odorat et l’audition
L’air ne passant plus par les voies aériennes supérieures pendant la respiration, la muqueuse olfactive présente dans les
fosses nasales n’est plus stimulée. De fait, l’odorat est presque complètement perdu. L’olfaction est un sens important,
s’il alerte en cas de fuite de gaz par exemple, il permet également de sentir de bonnes odeurs. De plus, l’air ne passe
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plus correctement vers la trompe d’Eustache. Cette dernière n’étant plus aérée suffisamment, des répercussions sur
l’audition sont possibles.
		 Les conséquences sur sa vie quotidienne
	 L’hospitalisation dure en moyenne entre deux et trois semaines. Elle se termine généralement quand le patient
peut reprendre une alimentation par voie orale. Aux conséquences directes que nous avons vues précédemment,
s’ajoutent des conséquences indirectes, que le patient découvre petit à petit et qu’il doit apprendre à gérer ou à pallier.
	 Tout d’abord, ces hommes ou femmes laryngectomisés sont forcés d’être plus attentifs au milieu dans lequel
ils se trouvent (l’air doit être suffisamment humide par exemple), et à leur santé, qui est fragilisée. Par ailleurs, des soins
sont à réaliser quotidiennement. Il est important que le patient les effectue seul assez vite, de façon à être rapidement
autonome. Cependant, il est possible que dans certains cas qu’il ne puisse pas les réaliser : l’intervention d’un Infirmier
Diplômé d’Etat ou du conjoint par exemple est alors justifiée.
	 Le laryngectomisé prend du temps chaque jour, matin et/ou soir, pour nettoyer sa canule si elle est encore
présente ou son implant s’il en est porteur. Ces gestes sont également à réaliser chaque fois que le patient éprouve
une sensation d’encombrement et qu’il doit se moucher. Concernant l’implant, il est recommandé de procéder
à son nettoyage au lever et au coucher. Le filtre protecteur (protection trachéale jetable) est également changé
quotidiennement, les mucosités s’y imprégnant très fréquemment.
	 Des gouttières fluorées seront également obligatoires en cas de traitement par radiothérapie. De fait, le
brossage des dents doit être très rigoureux.
	 La toilette est perturbée. Il ne faut absolument pas que l’eau pénètre dans le trachéostome, celui-ci étant
directement en relation avec les poumons. La personne porte donc dorénavant un protège-douche.
	 Notons que la disparition de la glotte empêche le laryngectomisé de bloquer sa respiration lors d’efforts
intenses. Il ne peut plus prendre appui sur sa « béquille laryngée » pour faire du sport, aller à la selle, porter des lourdes
charges ou encore lors de rapports sexuels.
	 Le laryngectomisé ne pourra plus se moucher en expirant de l’air par le nez. Il ne pourra plus souffler, siffler.
Le tabac et l’alcool sont à proscrire. Il faut boire beaucoup d’eau. L’alimentation ne change pas nécessairement mais il
vaut mieux prendre bien son temps lors des repas.
	 Enfin, des troubles du sommeil apparaissent parfois. Ils sont notamment dus à l’anxiété et aux troubles
respiratoires.
	 Un travail interdisciplinaire
	 De nombreux professionnels gravitent autour du patient, bien avant même qu’il soit opéré. Une cohésion
entre les différents thérapeutes et intervenants est primordiale dans le vécu psychologique et dans la prise en charge
de la maladie.
	 Il y a tout d’abord l’équipe médicale. Le médecin traitant est souvent à l’origine de la consultation chez un ORL.
L’équipe médicale hospitalière prend le relais pendant toute la période du diagnostic jusqu’à l’opération. Le médecin
ne reverra le patient qu’une fois ce dernier rentré chez lui.
	 L’oto-rhino-laryngologiste pratique les examens nécessaires au diagnostic et a la lourde tâche d’annoncer
au patient la présence du cancer. Cette étape est cruciale. En effet, les patients évoquent très souvent ce moment
fréquemment perçu comme traumatisant. C’est à cet instant précis que leur vie bascule et qu’ils prennent réellement
conscience de la gravité de ce qui leur arrive. Les mots du médecin sont fondamentaux et marqueront à vie le patient
et son entourage. Le chirurgien ORL pratique la laryngectomie et coordonne les suites opératoires. Il reverra le patient
très souvent, pour des visites de contrôle et des changements d’implant.
	 Parailleursd’autresprofessionnelsmédicauxgravitentautourdupatient. Leradiologueestprésentnotamment
lors du diagnostic et des recherches concernant l’extension de la lésion. Il pratique ensuite des examens pour contrôler
une éventuelle récidive. L’anesthésiste, après avoir rencontré le patient en pré-opératoire, est présent tout au long
de l’opération pour endormir le malade, veiller au bon déroulement de l’anesthésie et de la phase de réveil. Le
gastrologue pose la sonde gastrique d’alimentation si besoin, et peut s’assurer du bon fonctionnement de la voie per
os dès que ce type d’alimentation sera possible. Le laryngectomisé peut être amené à consulter un pneumologue, en
cas d’encombrement bronchique par exemple. Le radiothérapeute intervient lorsque le traitement est complété par
des rayons. Le patient verra alors ce spécialiste pendant une période de 6 semaines en moyenne. Enfin, il est possible
que l’extraction de certaines dents soit nécessaire avant l’opération, d’où l’intervention du chirurgien dentiste. La
radiothérapie, quand elle est prescrite, fragilise considérablement la denture, et le patient applique une pâte au fluor
quotidiennement afin de la renforcer.
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	 Il y a aussi l’équipe paramédicale, tout autant essentielle pour effectuer le suivi et la rééducation du patient.
Lemasseur-kinésithérapeuteassureledrainagelymphatiqueafinderendrelasensibilitéetderedonnerdelasouplesse
aux tissus cervicaux. En plus de masser et de travailler la mobilité des épaules, il apprend au patient le relâchement
musculaire et la respiration abdominale, point de départ essentiel au bon apprentissage de la voix oro-œsophagienne.
Le rôle de l’orthophoniste, professionnel de la communication, sera détaillé ultérieurement.
	 Le personnel infirmier est peut-être le corps de métier le plus présent auprès du patient laryngectomisé en péri-
opératoire.Tout d’abord, un infirmier d’annonce participe souvent à l’entretien avec le médecin ORL. Le patient peut lui
poser des questions s’il n’a pas compris ce qui a été dit lors de l’annonce de diagnostic, ou lui demander des précisions.
Ce même personnel accompagne le patient tout au long de l’hospitalisation : il effectue les soins vitaux et quotidiens
des suites opératoires (pansements, nettoyage de la canule, aspirations bronchiques, etc). C’est bien souvent à lui que
le patient et sa famille se confient, c’est pourquoi il joue un rôle primordial dans l’équipe interdisciplinaire.
	 De plus, le patient peut demander à voir un psychologue s’il en ressent le besoin. Même s’il n’en fait pas la
demande, l’équipe médicale doit le lui proposer si la nécessité s’en fait sentir. Le thérapeute est là pour recueillir ses
dires, ses angoisses par rapport à la maladie.
	 Enfin, il est important de noter le rôle de l’équipe associative : les Mutilés de la Voix. Même s’ils ne font pas
partie de la prise en charge médicale et paramédicale, l’association joue un rôle essentiel dans l’accompagnement du
patient.
	 Le rôle de l’orthophoniste
		 Quand voir le patient pour la première fois ?
	 Plusieurs cas de figure sont à envisager.
	 Dans certains hôpitaux, un orthophoniste est présent lors de l’annonce du diagnostic aux côtés du médecin
ORL et de l’infirmier d’annonce. Cette présence est pertinente pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il est bon que
plusieurs membres du personnel soignant soient présents en plus du patient et de ses accompagnants. Lorsque le
diagnostic tombe, le patient n’est pas toujours capable de l’entendre, non par manque de volonté mais parce qu’il est
sous le coup d’un véritable choc. La présence de plusieurs personnes, que le patient est amené à revoir plus tard, est
bénéfique : à leur niveau et avec leurs mots, ces personnes expliquent et réexpliquent au patient les dires du médecin.
	 Ensuite, certains patients avouent volontiers qu’il est plus aisé de poser des questions à l’orthophoniste
plutôt qu’au médecin, parfois plus intimidant ou moins disponible par manque de temps. Enfin, l’orthophoniste peut
expliquer les conséquences, en particulier phonatoires, de la laryngectomie ; il est bien question ici de prendre
sa place en tant que spécialiste de la voix et de la déglutition. Après l’opération, c’est un orthophoniste que le patient
consulte pour une réhabilitation vocale. Aussi, il est essentiel d’établir une relation de soin et de confiance le plus tôt
possible.
	 Si la présence lors de l’annonce n’est pas possible mais qu’un orthophoniste est présent au sein du service
hospitalier, il rencontre le patient en entretien pré-opératoire. Il s’agit alors de répondre aux éventuelles questions du
patient et de l’entourage, mais aussi d’expliquer la nouvelle anatomie - physiologie après opération, même si cela a déjà
été évoqué avec le médecin. Cet orthophoniste reverra également plusieurs fois le patient en période post- opératoire
afin d’ancrer la communication, de redonner les informations essentielles. Il fait aussi le relais avec les professionnels
libéraux.
	 En cabinet libéral, bien souvent, l’orthophoniste ne voit le patient pour la première fois que quand celui-ci
souhaite / peut commencer la rééducation vocale, le temps écoulé depuis l’opération étant alors très variable d’un
individu à un autre.
		 Les différentes prises en charge possibles
	 La prise en charge orthophonique peut s’effectuer selon trois modalités : à l’hôpital, en cabinet libéral ou
encore en centre de rééducation. En fonction de la modalité choisie, le patient a la possibilité d’être pris en charge
individuellement ou en groupe. L’utilité des prises en charge de groupe et leur aspect ne sont plus à démontrer. Le
laryngectomisé se retrouve face à des personnes comme lui, réapprenant ou perfectionnant une voix fonctionnelle, et
cela influe très nettement sur sa motivation.
		 Un interlocuteur privilégié
	 Le rôle premier de l’orthophoniste, selon la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) est
l’éducation à l’acquisition et à l’utilisation de la voix oro- œsophagienne et/ou trachéo-œsophagienne ».Nous savons
pertinemment que cette définition est limitée par rapport à la réalité clinique. Les hommes et les femmes qui sont
face à nous ont été atteints en tant qu’êtres communicants. Or, à chaque séance, en s’adressant à eux et en leur offrant
des possibilités de réhabilitation, l’orthophoniste les replace au centre de l’échange et les aide à retrouver cette
place communicante. Ceci est essentiel pour des personnes qui ne peuvent pas toujours s’exprimer autant qu’elles le
souhaiteraient, d’une part parce qu’elles rencontrent des difficultés intrinsèquement liées à l’opération, d’autre part
parce qu’on ne leur en laisse plus forcément l’occasion. Au quotidien, elles sont souvent victimes d’une mise en silence
involontaire, que ce soit par crainte, peur de mal faire, ou bienveillance excessive.
	 En retrouvant ainsi sa place de locuteur, le patient comprend que ces séances sont aussi le lieu d’échanges,
de digressions, de questions. Ces moments annexes à la réhabilitation vocale n’en sont pas moins profitables à
sa progression car source de partage entre le thérapeute et son patient. Or, la confiance de l’un envers l’autre est
essentielle pour la réussite du projet thérapeutique entrepris.
		 La réhabilitation vocale
	 La rééducation vocale est à entreprendre le plus tôt possible après l’opération, et ce dès que la sonde naso-
gastrique est enlevée. Cette rapidité permet au patient de ne pas prendre de mauvaises habitudes induites par un
chuchotage produit dans un effort articulatoire. Il ne doit pas perdre l’habitude d’articuler de façon naturelle et de faire
travailler ses fonctions oro-faciales. De plus, la qualité de vie du patient dépend aussi beaucoup de cette réhabilitation
vocale, ainsi, il est bon qu’elle débute rapidement après l’opération.
	 Dans les faits, la rééducation est souvent entreprise après la radiothérapie. Elle peut également avoir commencé
et être stoppée pendant les séances de radiations, ces dernières fragilisant trop les structures utilisées par la voix
œsophagienne.
	 En post-opératoire, il est bon et pratique de s’exprimer en voix chuchotée si la personne ne fait pas d’effort
articulatoire. En effet, il est possible que ce dernier provoque des défauts non négligeables pour la réhabilitation
vocale : l’émission d’un souffle trachéal, la syllabation et le grenouillage, qu’il est difficile d’éradiquer par la suite. Ceci
étant, la voix chuchotée reste tout de même un bon moyen d’expression préalable à l’apprentissage de la voix oro-
œsophagienne si le patient reste détendu lorsqu’il l’utilise.
Le patient laryngectomisé doit donc, s’il souhaite réacquérir une communication orale, apprendre une voix qui sera
produite grâce à l’œsophage qui est « aujourd’hui, le seul moyen réellement satisfaisant de réhabilitation vocale après
laryngectomie totale » (Le Huche & Allali, 2010). Ainsi, le patient peut s’exprimer en voix oro-œsophagienne ou encore
en voix trachéo-œsophagienne. Avant de parler de la réhabilitation à proprement parler, examinons tout d’abord les
différents paramètres acoustiques de la voix laryngée et les changements perceptibles dans la voix œsophagienne.
La voix laryngée VS la voix sans larynx

La voix est caractérisée par trois paramètres acoustiques.
	- La hauteur : chez le sujet normal, bien que dépendant de chaque individu, elle est d’environ 110 Hz pour la
voix masculine et 220 Hz pour la voix féminine. Avec une voix trachéo-œsophagienne, cette fréquence moyenne est
de 115,8 Hz pour les hommes, et de 111,8 Hz pour les femmes. Avec une voix oro-œsophagienne, elle est de 66 Hz
pour les hommes et de 86 Hz pour les femmes. Précisons que dans le cas de la laryngectomie totale, en raison de la
perte des cordes vocales, la fréquence fondamentale est définie par la fréquence des vibrations au niveau de la bouche
de l’œsophage. Nous remarquons donc que la différence de hauteur entre la voix d’une femme saine et la voix d’une
femme laryngectomisée est bien plus importante que la différence entre l’homme sain et l’homme laryngectomisé.
De plus, la voix d’une femme laryngectomisée est même plus basse que celle d’une voix laryngée masculine.
	- L’intensité : elle n’est pas la même selon le sexe et les femmes parlent avec moins d’intensité que les hommes
: jusqu’à 2dB plus bas. Du fait de la nouvelle physiologie respiratoire, l’intensité de la voix œsophagienne est limitée en
regard de la voix laryngée. Elle se situe entre 55 et 65 dB pour les deux sexes. Le patient aura donc des difficultés à se
faire entendre dans une atmosphère bruyante, le niveau sonore avoisinant les 70 dB dans les lieux publics.
	- Le timbre : il est spécifique à chaque individu : c’est ce qui donne la personnalité à une voix, ce qui permet
de reconnaître une personne rien qu’en l’entendant. Il est évident qu’en perdant sa voix originelle, la personne
laryngectomisée perd une partie de sa personnalité vocale. Que la voix œsophagienne soit masculine ou féminine, elle
est perçue comme rauque. Il faut tout de même préciser que lorsqu’elle est totalement maîtrisée, le patient redécouvre
des éléments de son ancienne voix laryngée (intonation, expression, accent). Les voix des patients laryngectomisés et
des patientes laryngectomisées présentent donc pratiquement les mêmes caractéristiques acoustiques, à l’inverse des
voix laryngées masculine et féminine.
La voix oro-œsophagienne
	 Pour produire un son, le patient se sert d’un « néovibrateur » constitué par le sphincter supérieur de l’œsophage.
Il injecte de l’air par voie buccale dans l’œsophage qui est rejeté lors d’une éructation contrôlée, mettant alors en
mouvement le néovibrateur. Le son est ensuite modulé via les différents articulateurs (langue, lèvres, dents, palais dur,
voile du palais). L’indépendance des souffles, pour ne pas déclencher le souffle trachéal à chaque tentative d’émission
14
vocale, ainsi que la préservation de l’articulation des consonnes sont deux compétences indispensables à prendre en
compte pour l’acquisition de cette voix.
	 Plusieurs méthodes existent ; citons la méthode par déglutition (ancienne méthode qui n’est plus que rarement
utilisée), la méthode par inhalation (ou gobage), la méthode des consonnes injectantes (ou « méthode hollandaise »),
la méthode des blocages. Souvent, l’une d’elles est employée de façon préférentielle mais plusieurs méthodes sont
parfois utilisées, conjointement, successivement, en fonction des préférences et possibilités du patient.
	 Cette voix, tout à fait intelligible, peut ne pas être appréciée par le patient. Elle a un débit souvent haché. Cette
nouvelle voix aggravée, souvent perçue comme masculine, est peut-être plus mal vécue par les utilisatrices que par les
utilisateurs. Enfin, l’éructation n’est pas socialement acceptable et peut également induire un mal-être.
La voix trachéo-œsophagienne
	 Elle est réservée aux personnes porteuses d’un implant phonatoire, permettant la communication entre la
trachéeetl’œsophage.Lavalves’ouvrepourlaisserpasserl’airdelatrachéeversl’œsophageetpermettrelavocalisation.
Elle se referme pour éviter les fuites alimentaires ou salivaires quand le patient ne parle pas.
	 En principe, l’utilisation de l’implant est simple : le patient prend une inspiration, obture le trachéostome avec
son doigt et articule sur l’expiration. L’air expiré est dévié directement dans l’œsophage via l’implant et fait vibrer
la néoglotte. Cette technique peut être acquise rapidement, en quelques séances de rééducation, voire de façon
spontanée. Cependant, son apprentissage demande toutefois un peu plus de temps dans certains cas, notamment si
le patient gère mal son souffle ou si la pression digitale n’est pas suffisante.
	 La plupart du temps, la voix trachéo-œsophagienne satisfait les personnes qui l’utilisent en leur permettant
assez rapidement de s’exprimer vocalement à nouveau. Elle n’évoque pas autant l’éructation comme nous l’avons vu
pour la voix oro-œsophagienne.
	 Toutefois cette technique nécessite d’une part d’avoir les mains propres et d’autre part de mobiliser de façon
permanente la main lors de l’acte phonatoire. Ainsi, il n’est plus possible de manger, conduire, bricoler, ou encore
cuisiner et de parler en même temps. Ceci étant, la phonation « mains libres » est permise avec une boîtier externe
fixé sur la cassette de l’échangeur de chaleur et d’humidité au niveau du trachéostome qui comporte une languette
en silicone qui se déploie et vient obturer ce boîtier en cas d’expiration forte. Cela aboutit à une déviation de l’air de
la trachée vers l’œsophage à travers l’implant. Ce dispositif, plus fatigant, n’est pas toujours supporté ni possible chez
tous les patients.
	 Cependant, l’implant ne peut être proposé à tous. En effet, l’entretien quotidien qu’il nécessite, un risque accru
de fuite entre la trachée et l’œsophage (dû à la prolifération de bactéries dans un milieu humide qui accroissent le
diamètre de la fistule), et le changement régulier de la prothèse sont autant de contre-indications existantes à la pose
d’un implant.
	 Enfin, il est vivement conseillé aux personnes utilisant cette voix d’apprendre tout de même la voix oro-
œsophagienne.
Celle-ci est un relais utile, par exemple en cas de nécessité de se servir de ses deux mains, voire indispensable lors de
dysfonctionnement de l’implant.
Le laryngophone
	 Le laryngophone, ou « vibrateur externe » est une prothèse électrique que les personnes laryngectomisées
peuvent utiliser en substitut de la voix. L’usage de cet appareil ne nécessite généralement pas un apprentissage long
et quelques séances peuvent suffire pour s’approprier le geste adéquat : apposer le vibrateur sur la joue ou le cou
(après différents essais pour trouver l’endroit idéal) puis articuler. Certaines personnes peuvent ressentir une gêne
ou une sensation de picotement à l’endroit de la vibration, le rééducateur doit alors les aider à trouver la meilleure
position.
	 L’intelligibilité est correcte mais la fréquence de vibration ne pouvant être modifiée, aucune intonation ne peut
être produite. Le caractère « très mécanique et peu esthétique » de la voix peut être déroutant pour le patient ou pour
l’entourage.
	 L’usage du laryngophone s’avère parfois utile dans les premiers temps après l’opération pour que le patient
ne se sente pas démuni, sans moyen de communication. Il offre également aux personnes n’ayant pas pu maîtriser
ou ayant des difficultés d’apprentissage de la voix oro-œsophagienne une autre possibilité d’oralisation tout en ne
constituant pas une solution pleinement satisfaisante sur le moyen et le long terme.
15

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Dossier - Orthophonie et laryngectomie

  • 1. 8 Cet article a été fait à partir du cours du professeur Ceruse et du mémoire de deux étudiantes de Nancy : Lauriane Castro-Rodriguez et Candice Jacquinet. Leur mémoire est consultable en ligne sur le site internet“Mémophonie”. Introduction Le Larynx est l’organe situé au niveau de la gorge, entre le pharynx et la trachée, il abrite les cordes vocales. Le larynx a donc un rôle dans la phonation, la respiration et la déglutition puisqu’il protège la trachée. La laryngectomie correspond à une ablation du larynx, celle-ci peut être partielle ou totale mais résulte généralement d’un cancer (= prolifération anormale de cellules créant une tumeur au sein du tissu sain de l’organisme) des voies aéro-digestives supérieures (VADS). Les VADS regroupent différentes structures anatomiques comme les fosses nasales, la cavité buccale, le pharynx, le larynx et la trachée. Des troubles des fonctions associées : respiration, phonation et déglutition, résultent de la modification de ces structures. CesVADS sont le « carrefour stratégique entre le parler et le manger, éléments clés de la vie sociale » (Ataya & Trouillet, 2014), une chirurgie de cette zone engendre alors des répercussions physiques, physiologiques et psychologiques. Étiologie et épidémiologie des cancers des VADS Il existe 3 grands groupes différents de cancers : - Cancers du rhinopharynx : dus à l’EBV (Virus d’Epstein-Barr), un virus qui donne également la mononucléose infectieuse. Ce virus devient cancérogène s’il est associé à d’autres co-facteurs. Quasiment toute la population est infectée par ce virus, mais nous ne sommes pas tous atteints de cancer : le potentiel cancérogène s’exprime en présence de co-facteurs alimentaires, comme les aliments riches en nitrosamines (sauces de poissons en saumure, aliments séchés et salés en Asie du Sud Est, harissa au Maghreb). Les cancers du cavum sont donc très rares en France. - Cancers des sinus et des fosses nasales : induits par les poussières de bois, qui contiennent des tanins, des substances cancérigènes. Les métiers dans lesquels on respire ces particules fines sont des métiers à risques de cancer de l’ethmoïde et des fosses nasales. - Cancers de la cavité orale, de l’oropharynx, de l’hypopharynx, du larynx : les plus rencontrés. Les facteurs de risques sont nombreux : - Le tabac – fumer un paquet par jour pendant 30 ans augmente de 50% les risques de développer un cancer ORL. La consommation de tabac multiplie le risque de cancer de 5 à 25. Au moment du diagnostic du cancer desVADS, la consommation moyenne des patients est de 40 PA (paquet-année). - L’alcool – Il existe toutefois une controverse au sujet de la consommation d’alcool seul. Au moment du diagnostic, le patient a consommé environ 1 700kg d’alcool. Il est important de noter que l’association du tabac et de l’alcool est explosive : elle multiplie le risque de cancer par 40. En effet, l’alcool solubilise les carcinogènes du tabac, qui passent ainsi plus facilement la muqueuse des VADS, ce qui induit une concentration beaucoup plus importante. - Les infections (HPV = Human Papilloma Virus). Identifié depuis longtemps comme à l’origine de cancers du col de l’utérus, ce n’est que depuis 6-7 ans qu’il est impliqué dans les cancers des VADS, avec la généralisation de certaines pratiques sexuelles. Cette incidence des cancers HPV positifs de l’oropharynx augmente considérablement : 20% des cancers des VADS étaient dus à l’HPV il y a 20 ans, 90% aujourd’hui aux US pour 30% en France. Ce virus hautement carcinogène est une maladie sexuellement transmissible et se mélange avec les cellules de l’ADN sain pour induire une carcinogénèse. Les cancers de l’oropharynx (amygdales linguales et surtout palatines) sont dus au HPV 16 et 18, d’où l’importance de la vaccination. - Les facteurs héréditaires : ces facteurs de risque peuvent augmenter les risques de cancer VADS. - L’état dentaire : un mauvais état dentaire est un facteur de risque en tant que reflet d’un mauvais mode de vie. - Les expositions professionnelles : amiante, chrome, nickel, métaux lourds … Les personnes exposées à ces composés sont, de par leur catégorie socio-professionnelle, plus préférentiellement fumeurs et buveurs. - Les carences vitaminiques, comme pour tous les cancers. Dossier du mois Orthophonie et laryngectomie
  • 2. 9 Ce cancer, dans 90% des cas, est un carcinome épidermoïde. Il s’agit d’une tumeur maligne cutanée pouvant toucher l’oropharynx, l’hypopharynx, le larynx ou encore la cavité buccale. Les cancers des VADS constituent un problème de santé publique en France. Ils sont classés au 5ème rang des cancers les plus fréquents (16 000 nouveaux cas en 2008). 75% des nouveaux cas concernent des hommes. Ceci étant, il est intéressant de souligner que le nombre annuel de nouveaux cas chez la femme est en augmentation (+ 1,5% entre 2000 et 2005). A l’inverse, ce taux est en baisse chez l’homme (-5% entre 2000 et 2005). La laryngectomie totale est indiquée le plus souvent en traitement chirurgical d’un cancer du larynx. Selon l’Institut National du Cancer, il y a eu en 2012, 3 322 nouveaux cas : 2 821 sur des patients hommes et 501 sur des patientes femmes, soit une prévalence de 85% d’hommes pour 15% de femmes. Là aussi, l’incidence est en baisse chez l’homme alors qu’elle est en augmentation chez la femme. L’âge moyen du diagnostic est de 65 ans chez l’homme et 64 ans chez la femme. Les cancers des VADS touchent essentiellement les hommes mais de moins en moins et surtout des catégories socio-professionnelles basses car leur consommation de tabac et d’alcool est plus importante. Les patients sont généralement âgés de 50-60 ans. C’est la seconde cause de mortalité pour cette tranche d’âge. Cependant les cancers peuvent arriver dès 40 ans voire beaucoup plus tôt (très rare). Diagnostics et moyens thérapeutiques C’est souvent le médecin généraliste qui adresse le patient à un médecin ORL (Oto-Rhino-Laryngologiste), s’il repère une anomalie face à certains signes d’appel. Le médecin ORL effectue tout d’abord un examen clinique par laryngoscopie indirecte (au miroir ou à l’aide d’un nasofibroscope). Cet examen lui permet de visualiser la tumeur et d’orienter fortement le diagnostic, confirmé ensuite par une biopsie. C’est ainsi qu’il pourra déterminer l’extension en surface et en profondeur de la tumeur. Un examen scannographique vient appuyer les conclusions précédentes. La tumeur est définie selon la classification TNM. Il s’agit, d’après l’Union Internationale Contre le Cancer, d’une « façon de classer les cancers selon leur extension anatomique ». Le classement dépend du volume tumoral (T), de l’atteinte ganglionnaire ou des adénopathies (N) et de l’état métastatique à distance (M). Cette classification est universelle. Une proposition de traitement sera émise, tenant compte de ces informations et de l’évolution de la tumeur. Rappel anatomique : le larynx Les traitements Il existe différents traitements. Premièrement, les traitements médicaux comme la radiothérapie ou la chimiothérapie qui peuvent être utilisés seuls, après ou en même temps qu’une chirurgie. Ensuite, il y a les traitements chirurgicaux : la laryngectomie totale et les différentes laryngectomies partielles (verticale et horizontale). La laryngectomie totale est la plus grosse intervention puisqu’elle consiste en l’ablation complète du larynx.
  • 3. 10 Pour ce faire, le chirurgien pratique une incision au niveau du cou qui va d’une oreille à l’autre. Il peut ainsi accéder au larynx et pratiquer l’exérèse. Si besoin, il réalise également un curage des ganglions situés dans le cou. En ôtant le larynx, le chirurgien supprime définitivement le carrefour aérodigestif et dévie la trachée. Celle-ci est abouchée à la base du cou de manière définitive, ménageant ainsi un orifice permanent : le trachéostome. Il est vital car c’est désormais l’unique voie de communication aérienne entre le milieu extérieur et le milieu intérieur. C’est maintenant par le trachéostome que le patient respire. En post-opératoire, durant la période de cicatrisation et parfois de façon irréversible, une canule est mise en place pour que le calibre reste constant. Le boîtier laryngé, qui contient les cordes vocales,disparaît.Lafonctiondephonationoriginellen’existeplus.Lasuppressiondecettejonctionimpliqueégalement une reconstruction du pharynx, laissé béant par l’ablation du larynx. Il a perdu ses insertions laryngées et le chirurgien le referme sur lui-même. Il effectue une suture pharyngée très importante, celle-ci étant garante de l’imperméabilité totale de la voie digestive. Des conséquences sur la déglutition peuvent donc apparaître. Durant les suites opératoires, le patient doit attendre la parfaite cicatrisation de cette suture (environ 10 jours) avant de se réalimenter. Dans un premier temps, il porte une sonde naso-gastrique, voire bénéficie d’une gastrostomie percutanée endoscopique s’il a déjà des problèmes d’alimentation ou si la réalimentation risque d’être longue et progressive. Après contrôle de l’étanchéité de la suture pharyngée par un test de déglutition au bleu de méthylène, la réalimentation per os peut reprendre. Les possibilités de réalimentation sont généralement satisfaisantes. Lors des laryngectomies partielles, on retire une partie du larynx tout en gardant ses différentes fonctions (phonation, déglutition, respiration). Il existe 3 laryngectomies horizontales : - la cordectomie. C’est l’ablation d’une corde vocale. Cette opération est désormais réalisée au laser. - la laryngectomie frontale antérieure avec épiglottoplastie, appelée aussi opération deTücker. On retire les deux cordes vocales, le tiers antérieur du cartilage thyroïde, on laisse deux aryténoïdes. Il faut faire une reconstruction de l’épiglotte (épiglottoplastie) car celle-ci est très abaissée et ne peut plus recouvrir le larynx lors de la déglutition. - la laryngectomie horizontale supra-glottique. Le chirurgien retire l’épiglotte, l’os hyoïde, un peu de base de langue et la vallécule. Pour refermer, il utilise une pexie : il rapproche la base de langue au cartilage thyroïde en utilisant des fils de suture. Il peut aussi retirer la partie supérieure du cartilage thyroïde, les bandes ventriculaires et les trois replis. Il y a 2 types de laryngectomies verticales : - l’hémi pharyngo laryngectomie, supra glottique ou supra cricoïdienne. Lors d’une laryngectomie supra glottique, le chirurgien retire la moitié de l’os hyoïde, du cartilage thyroïde, de l’épiglotte et une bande ventriculaire. Pour une chirurgie supra cricoïdienne, on retire la même chose, plus une corde vocale. - les laryngectomies sub totales reconstructrices : o la CHEP (crico-hyoïdo-épiglotto-pexie) où on retire tout le cartilage thyroïde, les deux cordes vocales et un arythénoïde. Pour fermer, on fait une pexie entre le thyroïde, l’épiglotte et l’os hyoïde. o la CHP (crico-hyoïdo-pexie), on retire les mêmes éléments que pour la CHEP en enlevant en plus l’épiglotte. Pour fermer, on effectue une pexie entre l’os hyoïde et le cricoïde. Le traitement adéquat est choisi en consultation pluridisciplinaire où au moins 3 médecins (chirurgien, oncologue ou chimiothérapeute, et radiothérapeute) sont présents et prennent part à la décision. L’orientation du traitement est dépendante de l’âge du patient, des comorbidités, du niveau intellectuel et social qui sont importants pour une bonne rééducation. Il y a aussi une balance séquelles/guérison. Le plus souvent, on retrouve ces traitements : - T1T2 (petites tumeurs) : chirurgie et/ou radiothérapie - T3T4 (plus importantes) résécables : prise en charge plurielle c’est-à-dire chirurgie et radiothérapie adjuvante - T3/T4 non résécables : chimiothérapie et/ou radiothérapie Les différentes“technologies”suite à la chirurgie Ilexisteplusieursoutilssuiteauxlaryngectomies:lescanulestrachéales,lesimplantsphonatoires,lesvibrateurs externes et les filtres trachéaux. Dès qu’il y a une nécessité de trachéotomie, le chirurgien pose une canule trachéale dans le but de maintenir écartée l’ouverture trachéale servant à la respiration. Cette canule est normalement provisoire (plusieurs semaines à 2 mois) puisqu’elle est fixée pour la période de cicatrisation. Ces canules sont pour la plupart fabriquées en silicone afin de s’assouplir avec la température du corps et ainsi de mieux s’adapter à celui-ci. Pour l’implant phonatoire, le chirurgien effectue une ouverture entre la trachée et l’œsophage. Il est nécessaire de la fermer afin d’éviter les fausses routes. Pour cela, on pose un implant phonatoire. C’est une valve qui permet de fermer la trachée en faisant pression avec le doigt. Ainsi, l’air passe dans l’œsophage et le patient peut parler.
  • 4. 11 Cet implant fait aussi office de nez artificiel puisqu’il filtre, réchauffe et humidifie l’air. Cependant, il peut y avoir des complications avec des fuites importantes. Les vibrateurs externes sont des appareils que l’on place sur la trachée et qui vibrent. Ils sont utilisés en cas d’échec de la voix œsophagienne ou pour tout autre besoin particulier. Les filtres trachéaux, ou « nez artificiels », sont utilisés pour prévenir des infections des voies aériennes supérieures. En effet, on recommande souvent aux patients d’utiliser des foulards de protections mais ceux-ci sont beaucoup moins efficaces que les filtres qui sont conçus à cet effet. Ces systèmes améliorent grandement la qualité de vie des patients laryngectomisés en les protégeant des infections mais aussi en leur permettant de parler à nouveau. À gauche, une canule trachéale. À droite, un implant phonatoire. Les conséquences pour le patient Les conséquences physiologiques En supprimant le larynx, le chirurgien a modifié toute l’anatomie des voies aérodigestives. Des conséquences physiologiques sont donc inévitables. - Les conséquences respiratoires La trachée ayant été déviée de son tracé naturel, la physiologie de la respiration est modifiée. La personne laryngectomisée respire de manière définitive par l’orifice de trachéostomie. L’air ne passe plus par les filtres naturels qu’étaient les fosses nasales et le pharynx ; ceux-ci assuraient l’humidification et le réchauffement de l’air inhalé et constituaient un rempart contre les particules susceptibles de pénétrer les voies pulmonaires. Dorénavant, la personne laryngectomisée pallie tout cela en utilisant des aérosols, en se munissant d’un filtre artificiel ou encore d’échangeur de chaleur et d’humidité. Ces compensations sont indispensables pour réduire les mucosités venant des voies respiratoires et évacuées par le trachéostome, et pour éviter les infections. - Les conséquences phonatoires La perte de la voix est « bien évidemment l’aspect le plus grave de l’opération et c’est lui qui va avoir les conséquences les plus importantes par la suite » (Cros, 2009). En l’absence du larynx, la personne laryngectomisée se retrouve complètement dépourvue de moyen de communication sonore. Pourtant, même s’il peut être difficile pour le patient de le réaliser dans un premier temps, la communication avec les autres reste malgré tout possible : il peut utiliser l’écriture (ardoise, papier), la voix blanche dite également chuchotée, les gestes. Ceci étant, il doit acquérir via une réhabilitation vocale particulière, une voix oro-œsophagienne ou une voix trachéo-œsophagienne (avec implant) s’il souhaite retrouver un outil de communication vocal. - Les conséquences sur la déglutition La suture pharyngée que le chirurgien effectue lors de l’opération oblige le patient à porter une sonde naso-gastrique afin de s’alimenter pendant quelques temps, si celui-ci n’est pas déjà porteur d’une sonde de gastrostomie. Pour s’en affranchir, il doit réinvestir sa déglutition et se réapproprier les organes essentiels à cette fonction. Bien que le risque de fausses-routes soit écarté, le patient mange souvent un peu plus lentement et en moins grandes quantités. En effet, l’irradiation des glandes salivaires (si radiothérapie) peut créer une insuffisance de sécrétions salivaires (hyposialie), de même qu’un spasme de la bouche œsophagienne peut gêner la déglutition des aliments solides. - Les conséquences sur l’odorat et l’audition L’air ne passant plus par les voies aériennes supérieures pendant la respiration, la muqueuse olfactive présente dans les fosses nasales n’est plus stimulée. De fait, l’odorat est presque complètement perdu. L’olfaction est un sens important, s’il alerte en cas de fuite de gaz par exemple, il permet également de sentir de bonnes odeurs. De plus, l’air ne passe
  • 5. 12 plus correctement vers la trompe d’Eustache. Cette dernière n’étant plus aérée suffisamment, des répercussions sur l’audition sont possibles. Les conséquences sur sa vie quotidienne L’hospitalisation dure en moyenne entre deux et trois semaines. Elle se termine généralement quand le patient peut reprendre une alimentation par voie orale. Aux conséquences directes que nous avons vues précédemment, s’ajoutent des conséquences indirectes, que le patient découvre petit à petit et qu’il doit apprendre à gérer ou à pallier. Tout d’abord, ces hommes ou femmes laryngectomisés sont forcés d’être plus attentifs au milieu dans lequel ils se trouvent (l’air doit être suffisamment humide par exemple), et à leur santé, qui est fragilisée. Par ailleurs, des soins sont à réaliser quotidiennement. Il est important que le patient les effectue seul assez vite, de façon à être rapidement autonome. Cependant, il est possible que dans certains cas qu’il ne puisse pas les réaliser : l’intervention d’un Infirmier Diplômé d’Etat ou du conjoint par exemple est alors justifiée. Le laryngectomisé prend du temps chaque jour, matin et/ou soir, pour nettoyer sa canule si elle est encore présente ou son implant s’il en est porteur. Ces gestes sont également à réaliser chaque fois que le patient éprouve une sensation d’encombrement et qu’il doit se moucher. Concernant l’implant, il est recommandé de procéder à son nettoyage au lever et au coucher. Le filtre protecteur (protection trachéale jetable) est également changé quotidiennement, les mucosités s’y imprégnant très fréquemment. Des gouttières fluorées seront également obligatoires en cas de traitement par radiothérapie. De fait, le brossage des dents doit être très rigoureux. La toilette est perturbée. Il ne faut absolument pas que l’eau pénètre dans le trachéostome, celui-ci étant directement en relation avec les poumons. La personne porte donc dorénavant un protège-douche. Notons que la disparition de la glotte empêche le laryngectomisé de bloquer sa respiration lors d’efforts intenses. Il ne peut plus prendre appui sur sa « béquille laryngée » pour faire du sport, aller à la selle, porter des lourdes charges ou encore lors de rapports sexuels. Le laryngectomisé ne pourra plus se moucher en expirant de l’air par le nez. Il ne pourra plus souffler, siffler. Le tabac et l’alcool sont à proscrire. Il faut boire beaucoup d’eau. L’alimentation ne change pas nécessairement mais il vaut mieux prendre bien son temps lors des repas. Enfin, des troubles du sommeil apparaissent parfois. Ils sont notamment dus à l’anxiété et aux troubles respiratoires. Un travail interdisciplinaire De nombreux professionnels gravitent autour du patient, bien avant même qu’il soit opéré. Une cohésion entre les différents thérapeutes et intervenants est primordiale dans le vécu psychologique et dans la prise en charge de la maladie. Il y a tout d’abord l’équipe médicale. Le médecin traitant est souvent à l’origine de la consultation chez un ORL. L’équipe médicale hospitalière prend le relais pendant toute la période du diagnostic jusqu’à l’opération. Le médecin ne reverra le patient qu’une fois ce dernier rentré chez lui. L’oto-rhino-laryngologiste pratique les examens nécessaires au diagnostic et a la lourde tâche d’annoncer au patient la présence du cancer. Cette étape est cruciale. En effet, les patients évoquent très souvent ce moment fréquemment perçu comme traumatisant. C’est à cet instant précis que leur vie bascule et qu’ils prennent réellement conscience de la gravité de ce qui leur arrive. Les mots du médecin sont fondamentaux et marqueront à vie le patient et son entourage. Le chirurgien ORL pratique la laryngectomie et coordonne les suites opératoires. Il reverra le patient très souvent, pour des visites de contrôle et des changements d’implant. Parailleursd’autresprofessionnelsmédicauxgravitentautourdupatient. Leradiologueestprésentnotamment lors du diagnostic et des recherches concernant l’extension de la lésion. Il pratique ensuite des examens pour contrôler une éventuelle récidive. L’anesthésiste, après avoir rencontré le patient en pré-opératoire, est présent tout au long de l’opération pour endormir le malade, veiller au bon déroulement de l’anesthésie et de la phase de réveil. Le gastrologue pose la sonde gastrique d’alimentation si besoin, et peut s’assurer du bon fonctionnement de la voie per os dès que ce type d’alimentation sera possible. Le laryngectomisé peut être amené à consulter un pneumologue, en cas d’encombrement bronchique par exemple. Le radiothérapeute intervient lorsque le traitement est complété par des rayons. Le patient verra alors ce spécialiste pendant une période de 6 semaines en moyenne. Enfin, il est possible que l’extraction de certaines dents soit nécessaire avant l’opération, d’où l’intervention du chirurgien dentiste. La radiothérapie, quand elle est prescrite, fragilise considérablement la denture, et le patient applique une pâte au fluor quotidiennement afin de la renforcer.
  • 6. 13 Il y a aussi l’équipe paramédicale, tout autant essentielle pour effectuer le suivi et la rééducation du patient. Lemasseur-kinésithérapeuteassureledrainagelymphatiqueafinderendrelasensibilitéetderedonnerdelasouplesse aux tissus cervicaux. En plus de masser et de travailler la mobilité des épaules, il apprend au patient le relâchement musculaire et la respiration abdominale, point de départ essentiel au bon apprentissage de la voix oro-œsophagienne. Le rôle de l’orthophoniste, professionnel de la communication, sera détaillé ultérieurement. Le personnel infirmier est peut-être le corps de métier le plus présent auprès du patient laryngectomisé en péri- opératoire.Tout d’abord, un infirmier d’annonce participe souvent à l’entretien avec le médecin ORL. Le patient peut lui poser des questions s’il n’a pas compris ce qui a été dit lors de l’annonce de diagnostic, ou lui demander des précisions. Ce même personnel accompagne le patient tout au long de l’hospitalisation : il effectue les soins vitaux et quotidiens des suites opératoires (pansements, nettoyage de la canule, aspirations bronchiques, etc). C’est bien souvent à lui que le patient et sa famille se confient, c’est pourquoi il joue un rôle primordial dans l’équipe interdisciplinaire. De plus, le patient peut demander à voir un psychologue s’il en ressent le besoin. Même s’il n’en fait pas la demande, l’équipe médicale doit le lui proposer si la nécessité s’en fait sentir. Le thérapeute est là pour recueillir ses dires, ses angoisses par rapport à la maladie. Enfin, il est important de noter le rôle de l’équipe associative : les Mutilés de la Voix. Même s’ils ne font pas partie de la prise en charge médicale et paramédicale, l’association joue un rôle essentiel dans l’accompagnement du patient. Le rôle de l’orthophoniste Quand voir le patient pour la première fois ? Plusieurs cas de figure sont à envisager. Dans certains hôpitaux, un orthophoniste est présent lors de l’annonce du diagnostic aux côtés du médecin ORL et de l’infirmier d’annonce. Cette présence est pertinente pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il est bon que plusieurs membres du personnel soignant soient présents en plus du patient et de ses accompagnants. Lorsque le diagnostic tombe, le patient n’est pas toujours capable de l’entendre, non par manque de volonté mais parce qu’il est sous le coup d’un véritable choc. La présence de plusieurs personnes, que le patient est amené à revoir plus tard, est bénéfique : à leur niveau et avec leurs mots, ces personnes expliquent et réexpliquent au patient les dires du médecin. Ensuite, certains patients avouent volontiers qu’il est plus aisé de poser des questions à l’orthophoniste plutôt qu’au médecin, parfois plus intimidant ou moins disponible par manque de temps. Enfin, l’orthophoniste peut expliquer les conséquences, en particulier phonatoires, de la laryngectomie ; il est bien question ici de prendre sa place en tant que spécialiste de la voix et de la déglutition. Après l’opération, c’est un orthophoniste que le patient consulte pour une réhabilitation vocale. Aussi, il est essentiel d’établir une relation de soin et de confiance le plus tôt possible. Si la présence lors de l’annonce n’est pas possible mais qu’un orthophoniste est présent au sein du service hospitalier, il rencontre le patient en entretien pré-opératoire. Il s’agit alors de répondre aux éventuelles questions du patient et de l’entourage, mais aussi d’expliquer la nouvelle anatomie - physiologie après opération, même si cela a déjà été évoqué avec le médecin. Cet orthophoniste reverra également plusieurs fois le patient en période post- opératoire afin d’ancrer la communication, de redonner les informations essentielles. Il fait aussi le relais avec les professionnels libéraux. En cabinet libéral, bien souvent, l’orthophoniste ne voit le patient pour la première fois que quand celui-ci souhaite / peut commencer la rééducation vocale, le temps écoulé depuis l’opération étant alors très variable d’un individu à un autre. Les différentes prises en charge possibles La prise en charge orthophonique peut s’effectuer selon trois modalités : à l’hôpital, en cabinet libéral ou encore en centre de rééducation. En fonction de la modalité choisie, le patient a la possibilité d’être pris en charge individuellement ou en groupe. L’utilité des prises en charge de groupe et leur aspect ne sont plus à démontrer. Le laryngectomisé se retrouve face à des personnes comme lui, réapprenant ou perfectionnant une voix fonctionnelle, et cela influe très nettement sur sa motivation. Un interlocuteur privilégié Le rôle premier de l’orthophoniste, selon la Nomenclature Générale des Actes Professionnels (NGAP) est l’éducation à l’acquisition et à l’utilisation de la voix oro- œsophagienne et/ou trachéo-œsophagienne ».Nous savons
  • 7. pertinemment que cette définition est limitée par rapport à la réalité clinique. Les hommes et les femmes qui sont face à nous ont été atteints en tant qu’êtres communicants. Or, à chaque séance, en s’adressant à eux et en leur offrant des possibilités de réhabilitation, l’orthophoniste les replace au centre de l’échange et les aide à retrouver cette place communicante. Ceci est essentiel pour des personnes qui ne peuvent pas toujours s’exprimer autant qu’elles le souhaiteraient, d’une part parce qu’elles rencontrent des difficultés intrinsèquement liées à l’opération, d’autre part parce qu’on ne leur en laisse plus forcément l’occasion. Au quotidien, elles sont souvent victimes d’une mise en silence involontaire, que ce soit par crainte, peur de mal faire, ou bienveillance excessive. En retrouvant ainsi sa place de locuteur, le patient comprend que ces séances sont aussi le lieu d’échanges, de digressions, de questions. Ces moments annexes à la réhabilitation vocale n’en sont pas moins profitables à sa progression car source de partage entre le thérapeute et son patient. Or, la confiance de l’un envers l’autre est essentielle pour la réussite du projet thérapeutique entrepris. La réhabilitation vocale La rééducation vocale est à entreprendre le plus tôt possible après l’opération, et ce dès que la sonde naso- gastrique est enlevée. Cette rapidité permet au patient de ne pas prendre de mauvaises habitudes induites par un chuchotage produit dans un effort articulatoire. Il ne doit pas perdre l’habitude d’articuler de façon naturelle et de faire travailler ses fonctions oro-faciales. De plus, la qualité de vie du patient dépend aussi beaucoup de cette réhabilitation vocale, ainsi, il est bon qu’elle débute rapidement après l’opération. Dans les faits, la rééducation est souvent entreprise après la radiothérapie. Elle peut également avoir commencé et être stoppée pendant les séances de radiations, ces dernières fragilisant trop les structures utilisées par la voix œsophagienne. En post-opératoire, il est bon et pratique de s’exprimer en voix chuchotée si la personne ne fait pas d’effort articulatoire. En effet, il est possible que ce dernier provoque des défauts non négligeables pour la réhabilitation vocale : l’émission d’un souffle trachéal, la syllabation et le grenouillage, qu’il est difficile d’éradiquer par la suite. Ceci étant, la voix chuchotée reste tout de même un bon moyen d’expression préalable à l’apprentissage de la voix oro- œsophagienne si le patient reste détendu lorsqu’il l’utilise. Le patient laryngectomisé doit donc, s’il souhaite réacquérir une communication orale, apprendre une voix qui sera produite grâce à l’œsophage qui est « aujourd’hui, le seul moyen réellement satisfaisant de réhabilitation vocale après laryngectomie totale » (Le Huche & Allali, 2010). Ainsi, le patient peut s’exprimer en voix oro-œsophagienne ou encore en voix trachéo-œsophagienne. Avant de parler de la réhabilitation à proprement parler, examinons tout d’abord les différents paramètres acoustiques de la voix laryngée et les changements perceptibles dans la voix œsophagienne. La voix laryngée VS la voix sans larynx
 La voix est caractérisée par trois paramètres acoustiques. - La hauteur : chez le sujet normal, bien que dépendant de chaque individu, elle est d’environ 110 Hz pour la voix masculine et 220 Hz pour la voix féminine. Avec une voix trachéo-œsophagienne, cette fréquence moyenne est de 115,8 Hz pour les hommes, et de 111,8 Hz pour les femmes. Avec une voix oro-œsophagienne, elle est de 66 Hz pour les hommes et de 86 Hz pour les femmes. Précisons que dans le cas de la laryngectomie totale, en raison de la perte des cordes vocales, la fréquence fondamentale est définie par la fréquence des vibrations au niveau de la bouche de l’œsophage. Nous remarquons donc que la différence de hauteur entre la voix d’une femme saine et la voix d’une femme laryngectomisée est bien plus importante que la différence entre l’homme sain et l’homme laryngectomisé. De plus, la voix d’une femme laryngectomisée est même plus basse que celle d’une voix laryngée masculine. - L’intensité : elle n’est pas la même selon le sexe et les femmes parlent avec moins d’intensité que les hommes : jusqu’à 2dB plus bas. Du fait de la nouvelle physiologie respiratoire, l’intensité de la voix œsophagienne est limitée en regard de la voix laryngée. Elle se situe entre 55 et 65 dB pour les deux sexes. Le patient aura donc des difficultés à se faire entendre dans une atmosphère bruyante, le niveau sonore avoisinant les 70 dB dans les lieux publics. - Le timbre : il est spécifique à chaque individu : c’est ce qui donne la personnalité à une voix, ce qui permet de reconnaître une personne rien qu’en l’entendant. Il est évident qu’en perdant sa voix originelle, la personne laryngectomisée perd une partie de sa personnalité vocale. Que la voix œsophagienne soit masculine ou féminine, elle est perçue comme rauque. Il faut tout de même préciser que lorsqu’elle est totalement maîtrisée, le patient redécouvre des éléments de son ancienne voix laryngée (intonation, expression, accent). Les voix des patients laryngectomisés et des patientes laryngectomisées présentent donc pratiquement les mêmes caractéristiques acoustiques, à l’inverse des voix laryngées masculine et féminine. La voix oro-œsophagienne Pour produire un son, le patient se sert d’un « néovibrateur » constitué par le sphincter supérieur de l’œsophage. Il injecte de l’air par voie buccale dans l’œsophage qui est rejeté lors d’une éructation contrôlée, mettant alors en mouvement le néovibrateur. Le son est ensuite modulé via les différents articulateurs (langue, lèvres, dents, palais dur, voile du palais). L’indépendance des souffles, pour ne pas déclencher le souffle trachéal à chaque tentative d’émission 14
  • 8. vocale, ainsi que la préservation de l’articulation des consonnes sont deux compétences indispensables à prendre en compte pour l’acquisition de cette voix. Plusieurs méthodes existent ; citons la méthode par déglutition (ancienne méthode qui n’est plus que rarement utilisée), la méthode par inhalation (ou gobage), la méthode des consonnes injectantes (ou « méthode hollandaise »), la méthode des blocages. Souvent, l’une d’elles est employée de façon préférentielle mais plusieurs méthodes sont parfois utilisées, conjointement, successivement, en fonction des préférences et possibilités du patient. Cette voix, tout à fait intelligible, peut ne pas être appréciée par le patient. Elle a un débit souvent haché. Cette nouvelle voix aggravée, souvent perçue comme masculine, est peut-être plus mal vécue par les utilisatrices que par les utilisateurs. Enfin, l’éructation n’est pas socialement acceptable et peut également induire un mal-être. La voix trachéo-œsophagienne Elle est réservée aux personnes porteuses d’un implant phonatoire, permettant la communication entre la trachéeetl’œsophage.Lavalves’ouvrepourlaisserpasserl’airdelatrachéeversl’œsophageetpermettrelavocalisation. Elle se referme pour éviter les fuites alimentaires ou salivaires quand le patient ne parle pas. En principe, l’utilisation de l’implant est simple : le patient prend une inspiration, obture le trachéostome avec son doigt et articule sur l’expiration. L’air expiré est dévié directement dans l’œsophage via l’implant et fait vibrer la néoglotte. Cette technique peut être acquise rapidement, en quelques séances de rééducation, voire de façon spontanée. Cependant, son apprentissage demande toutefois un peu plus de temps dans certains cas, notamment si le patient gère mal son souffle ou si la pression digitale n’est pas suffisante. La plupart du temps, la voix trachéo-œsophagienne satisfait les personnes qui l’utilisent en leur permettant assez rapidement de s’exprimer vocalement à nouveau. Elle n’évoque pas autant l’éructation comme nous l’avons vu pour la voix oro-œsophagienne. Toutefois cette technique nécessite d’une part d’avoir les mains propres et d’autre part de mobiliser de façon permanente la main lors de l’acte phonatoire. Ainsi, il n’est plus possible de manger, conduire, bricoler, ou encore cuisiner et de parler en même temps. Ceci étant, la phonation « mains libres » est permise avec une boîtier externe fixé sur la cassette de l’échangeur de chaleur et d’humidité au niveau du trachéostome qui comporte une languette en silicone qui se déploie et vient obturer ce boîtier en cas d’expiration forte. Cela aboutit à une déviation de l’air de la trachée vers l’œsophage à travers l’implant. Ce dispositif, plus fatigant, n’est pas toujours supporté ni possible chez tous les patients. Cependant, l’implant ne peut être proposé à tous. En effet, l’entretien quotidien qu’il nécessite, un risque accru de fuite entre la trachée et l’œsophage (dû à la prolifération de bactéries dans un milieu humide qui accroissent le diamètre de la fistule), et le changement régulier de la prothèse sont autant de contre-indications existantes à la pose d’un implant. Enfin, il est vivement conseillé aux personnes utilisant cette voix d’apprendre tout de même la voix oro- œsophagienne. Celle-ci est un relais utile, par exemple en cas de nécessité de se servir de ses deux mains, voire indispensable lors de dysfonctionnement de l’implant. Le laryngophone Le laryngophone, ou « vibrateur externe » est une prothèse électrique que les personnes laryngectomisées peuvent utiliser en substitut de la voix. L’usage de cet appareil ne nécessite généralement pas un apprentissage long et quelques séances peuvent suffire pour s’approprier le geste adéquat : apposer le vibrateur sur la joue ou le cou (après différents essais pour trouver l’endroit idéal) puis articuler. Certaines personnes peuvent ressentir une gêne ou une sensation de picotement à l’endroit de la vibration, le rééducateur doit alors les aider à trouver la meilleure position. L’intelligibilité est correcte mais la fréquence de vibration ne pouvant être modifiée, aucune intonation ne peut être produite. Le caractère « très mécanique et peu esthétique » de la voix peut être déroutant pour le patient ou pour l’entourage. L’usage du laryngophone s’avère parfois utile dans les premiers temps après l’opération pour que le patient ne se sente pas démuni, sans moyen de communication. Il offre également aux personnes n’ayant pas pu maîtriser ou ayant des difficultés d’apprentissage de la voix oro-œsophagienne une autre possibilité d’oralisation tout en ne constituant pas une solution pleinement satisfaisante sur le moyen et le long terme. 15