Guide de l’alimentation pratique du troupeau bovin allaitant - Guide alim bv bases techniques et scientifiques
1. Connaître les besoins nutritionnels des animaux pour adapter leur alimentation - PARTIE 2
53institut de l’élevage - guide de l’alimentation du troupeau bovin allaitant - vaches, veaux et génisses de renouvellement
Piloter les apports alimentaires,
selon la saison de vêlage,
en s’appuyant sur l’état corporel
de la vache
Pour profiter pleinement du potentiel
« accordéon » de la vache allaitante, l’éle-
veur doit mettre en œuvre une conduite
alimentaire cohérente avec son système
de production, c’est-à-dire concilier maî-
trise des coûts et objectifs de production.
Les deux éléments clés qui vont tout par-
ticulièrement guider les stratégies à
adopter sont :
l’état corporel de la vache aux périodes
clés du cycle de production pour ne pas
pénaliser les performances techniques ;
la saison de vêlage qui détermine la
nature des ressources disponibles (herbe pâturée ou
fourrages récoltés) au regard des besoins des animaux.
Pour bien comprendre comment interagissent ces deux
éléments clés, deux exemples de périodes de vêlage
sont décrits ci-après. Ils montrent comment la période
de vêlage influe sur les évolutions annuelles de poids,
état corporel, besoins et apport alimentaires recom-
mandés pour une vache allaitante Charolaise de 750kg
(exemples 2.3 et 2.4). Cette modélisation, réalisée à
partir d’hypothèses théoriques issues des préconisa-
tions scientifiques actuelles, permet aussi de se faire
une idée des répartitions possibles des apports éner-
gétiques à apporter à la vache allaitante selon qu'elle
est au pâturage ou en bâtiment (tableaux 2.14 et 2.15)
en lien avec sa période de vêlage.
Les recommandations pratiques qui en découlent sont
décrites en partie 4 de l’ouvrage pour les principales
saisons de vêlages rencontrées en systèmes allaitants.
Apports alimentaires recommandés (UFL/j)
4
5
6
7
8
9
10
11
-6 -4 -2 0 2 4 6 8 10 mois/vêlage
5 mois de bâtiment
pour un vêlage d’automne
Vache en bon état à la rentrée en bâtiments (NEC ≥ 3,0)
Vache en mauvais état à la rentrée en bâtiments (NEC ≤ 2,0)
Vache dont l’état à la rentrée correspond à la NEC = 2,5
5 mois de bâtiment
pour un vêlage de fin d’hiver
Vache en vêlage d'automneVache en vêlage de fin d'hivere de fin d'hiv
Apports alimentaires recommandés (UFL/j)
agvêlhe enacV
1
Apports alimentaires recommandés (UFL/j)
'
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Apports alimentaires recommandés (UFL/j)
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11
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77
4
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66
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64 018 mo eggeaaglêvvê/siom
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entrée en bâtimenralàtatéisavuamhe en
entrée en bâtimenralàtathe en bon é
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tde bâtimen
correspond à la NEC = 2,5entrée
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correspond à la NEC = 2,5
≤ 2,0)EC(N
≥ 3,0)EC
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tde bâtimen
he doncaV entréeralàtatl’éthe don correspond à la NEC = 2,5entrée correspond à la NEC = 2,5
Figure 2.10 : Variation des apports recommandés d’une vache Charolaise de 750 kg sur la période hivernale selon
son état à la rentrée en bâtiment, pour 2 périodes de vêlage (automne et fin d’hiver)
(Source : Agabriel et Petit, Inra, 1987)
2. > Des repères utiles pour les prises de décision
>> Les sommes de températures pour anticiper les
stades de l’herbe
Les stades de développement d’une prairie sont des
éléments déterminants des moments de son utilisa-
tion, aussi bien pour le pâturage que pour les récoltes.
Des repères pratiques peuvent être fournis par les
cumuls des degrés.jours (°j), appelés somme de tem-
pératures, qui sont de bons indicateurs des différents
stades de l’herbe. Ils correspondent aux températures
au-dessus de 0°C, cumulées depuis le 1er février.
Pour des prairies ou espèces/variétés de même pré-
cocité, ces sommes des températures sont sensible-
ment constantes pour atteindre un stade de dévelop-
pement donné, quelles que soient les conditions
climatiques. Ellespermettentdoncde préciser lesdates
exprimées en degré.jours auxquelles ces différents
stades sont atteints (tableau 3.11). En conséquence,
les dates calendaires correspondant à ces dates expri-
mées en degré.jours varient d’une année à l’autre et
d’une région à l’autre (tableau 3.12). Pour une même
région, un même stade et un même type de prairie,
elles fluctuent le plus souvent de +/- 10 à 15 jours
d’une année sur l’autre par rapport à la date moyenne.
Raisonner et piloter le système fourrager en systèmes bovin viande - PARTIE 3
126 institut de l’élevage - guide de l’alimentation du troupeau bovin allaitant - vaches, veaux et génisses de renouvellement
Saisons pratiques et leurs principales caractéristiques
Ajustements à prévoir
Décisions à prendre
Début de printemps
La température est plus ou moins favorable à la pro-
duction précoce de pousse de l’herbe. La portance
des sols (types et niveau de pluviométrie) est plus ou
moins favorable au pâturage.
Les ajustements vont porter sur la date de mise à
l’herbe et sur les surfaces à déprimer.
Plein printemps
Les conditions de température sont très rarement dé-
favorables à la pousse de l’herbe qui peut être cepen-
dant contrariée par le rayonnement et le déficit
hydrique.
C’est la période au cours de laquelle se déterminent
les ajustements entre les surfaces à pâturer et à fau-
cher, la fin du déprimage et la modulation des ap-
ports azotés.
Fin de printemps - début d’été
C’est l’état hydrique, résultante de la réserve utile
des sols, de la pluviométrie et de la température, qui
est déterminant de la pousse et de l’offre d’herbe au
pâturage.
Il s’agit de décider de l’agrandissement des surfaces
à pâturer, des surfaces à récolter en 2ème
coupe.
Été - fin d’été
L’état hydrique est toujours déterminant. Plusieurs
situations sont à distinguer : des régions où la
pousse d’herbe se maintient jusqu’à des régions ca-
ractérisées chaque année par une absence de pousse
estivale.
Selon les situations, les décisions à prendre porte-
ront sur :
la décision de faucher ou non des repousses ;
la mise en œuvre ou non de la complémentation en
fourrages de tout ou partie des lots.
Automne - fin d’automne
Les températures, le rayonnement et la pluviométrie
conditionnent la pousse de l’herbe et, en fin d’au-
tomne, la portance des sols.
Il s’agira de valoriser au mieux les ressources en
ajustant, lorsque c’est possible, le chargement selon
l’offre d’herbe dans les différents blocs de parcelles.
En fin d’automne, il s’agira de décider de la rentrée
des animaux en bâtiment. Celle-ci dépend de la por-
tance des sols, de la ressource en herbe disponible
et des exigences des conduites animales.
Tableau 3.10 : Les cinq saisons pratiques d’une campagne de pâturage et leurs caractéristiques
(Source : Institut de l’Élevage, 2014)
En pratique
› Le printemps : la saison clé
Au printemps, les facteurs climatiques
(température, pluviométrie) sont très
rarement limitants, exception faite des
situations où la portance des sols est affectée.
Il en résulte que les modifications de tech-
niques concernant la conduite du pâturage et
les récoltes d’excédents d’herbe produisent
leur plein effet.
La somme des températures
La date exprimée en degré.jours (ou somme de tempéra-
tures)secalculeenadditionnantlestempératuresmoyennes
(T° mini+T° maxi)/2) à partir du 1er février. Seules les
moyennes inférieures à 0°C ne sont pas prises en compte
et celles supérieures à 18°C sont plafonnées à 18°C.
Photo 3.6: Une vache adulte consomme en
moyenne 17 kg (variable selon selon le format)
de matière sèche d’herbe par jour. Lorsque la
hauteur d’herbe atteint 8 cm, le stock d’herbe
disponible sur pied est de l’ordre de 750 kg de
matière sèche par hectare pour une prairie dense.
5. 66 institut de l’elevage - guide de l’alimentation du troupeau bovin allaitant - vaches, veaux et génisses de renouvellement
Connaître les besoins nutritionnels des animaux pour adapter leur alimentation - PARTIE 2
L’alimentation solide en
complément du lait
> La consommation d’aliments solides devient
significative à partir du 3ème mois
Un veau peut commencer à consommer de
l’aliment solide dès les premières
semaines. Mais la part de fourrage ingéré
dans sa ration reste faible jusqu’à l’âge de
2-3 mois, puis progresse jusqu’au sevrage,
à mesure que sa capacité d’ingestion se
développe. Selon les situations et les
périodes de vêlages, cette fraction solide
est constituée soit d’herbe pâturée, soit
de fourrages conservés, complémentés ou
non par des concentrés selon les conduites
d’élevage.
Le phénomène de substitution entre fourrages et concentrés chez le veau
Quel que soit l’aliment solide offert au veau (herbe pâturée, fourrage conservé, concentré), le veau privilégie
l’ingestion du lait de la mère avant tout.
Quand le niveau de production laitière de la vache ne satisfait plus la satiété du veau, celui-ci se tourne alors
vers les autres aliments disponibles.
Des phénomènes de substitution d’un aliment solide par un autre apparaissent. Entre fourrages et concentrés,
la substitution est partielle et varie en fonction de la nature du fourrage :
pour des veaux en bâtiment, le taux de substitution foin/concentré augmente avec l’âge du veau passant
d’une valeur de l’ordre de 0,25 pour un veau de 3 mois à environ 0,65 pour un veau de 8 mois ;
pour l’herbe pâturée, la valeur moyenne de substitution est de l’ordre 0,5 en lien avec la qualité de l’herbe
et le niveau d’ingestion de concentré (1 kg de MS de concentré en plus = 0,5 kg de MS d’herbe ingérée en
moins).
La capacité d’ingestion (CI) du veau en aliments solides
varie en fonction de son poids (PV). Comme pour les
animaux adultes, elle est exprimée en « UEB » : unité
d’encombrement bovin. Elle peut être calculée à partir
de l’équation suivante :
CI (UEB) = 0,0257 PV (kg) – 2,02
(équation 2.i)
Les quantités d’herbe pâturée ou de fourrages consom-
mées par le veau, en plus du lait bu, dépendent éga-
lement de la production laitière de la mère mais de
manière bien moindre ; aussi peut-on considérer que
le lait s’additionne à la ration solide dès le 5ème ou 6ème
mois (à 200 kg de poids vif) (tableau 2.17).
Production de lait
de la mère
Poids du veau 100 kg vifs 200 kg vifs 300 kg vifs
Production de lait
moyenne
Lait bu par le veau (kg/j) 7 5 3
Capacité d’ingestion du veau (UEB) 0,55 3,12 5,69
Consommation d’herbe pâturée (kg
MS/j) (stade feuillu, 0,96 UEB)
0,57 3,25 5,90
Production de lait
« + »
(supérieure
à la moyenne)
Lait bu par le veau (kg/j) 8 6 4
Capacité d’ingestion du veau (UEB) 0,40 (- 27 %)* 2,97 (- 5 %)* 5,54 (- 3 %)*
Consommation d’herbe pâturée (kg
MS/j) (stade feuillu, 0,96 UEB)
0,42 (- 26 %)* 3,10 (- 5 %)* 5,77 (- 2 %)*
Production de lait
« - »
(inférieure
à la moyenne)
Lait bu par le veau (kg/j) 6 4 2
Capacité d’ingestion du veau (UEB) 0,70 (+ 27 %)* 3,27 (+ 5 %)* 5,84 (+ 3 %)*
Consommation d’herbe pâturée (kg
MS/j) (stade feuillu, 0,96 UEB)
0,73 (+ 28 %)* 3,40 (+ 5 %)* 6,08 (+ 3 %)*
Tableau 2.17 : Capacité d’ingestion du veau pour les aliments solides (pâturage, foin…) en complément du lait bu
en fonction de la production laitière de la mère
* par rapport à la situation « production de lait moyenne »
(Source : Inra, 2007)